7 janvier 2024

Le récit national, enseigné dans les livres d’histoire, disséminé ici et là dans les esprits des générations successives à travers l’art et la culture, constitue de tout temps le ferment de la mémoire collective de tout pays. Pourtant, depuis des décennies, Haïti semble faire exception à ce principe essentiel de l’organisation de la vie nationale. Le temps de l’histoire y est comme suspendu, au profit de ce qui s’apparente à une destruction systématique du récit national par des hommes et des femmes dépourvus de toute éthique, de colonne vertébrale idéologique et de sentiment d’appartenance à la nation.

Pour preuve, la journée du lundi 1er janvier 2024, ô combien symbolique, au pays du père fondateur de la nation haïtienne, Jean-Jacques Dessalines, s’est déroulée dans une relative indifférence – hormis la tenue d’une messe d’action de grâce à la cathédrale des Gonaïves, le simple dépôt d’une gerbe de fleurs au Musée du Panthéon National Haïtien (MUPANAH), suivi d’un discours soporifique d’un inutile premier ministre de facto. Sans oublier la « patriotique dégustation » de la traditionnelle « soup joumou » dite « soupe de l’indépendance », particulièrement chez les Haïtiens de l’étranger, en mal du pays.

Or, ce 1er janvier 2024, la première République noire du monde libre, bien accoutrée dans sa robe bicolore de fête nationale, aurait dû célébrer, partout, en toute sécurité, en grande pompe, dans la joie et la bonne humeur, les 220 ans de son indépendance. Gâchée, en 2004, par les imposteurs de la mouvance GNB sur ordre de leurs puissants alliés extérieurs, cette fête, haut en couleurs, n’aura donc pas eu lieu, une nouvelle fois. Vingt ans plus tard, le pays – sous le règne de la coalition hétéroclite criminelle PHTK-SDP-Fusion et autres – se révèle pathétiquement incapable de se hisser à la hauteur de son histoire exemplaire à la face du monde moderne en garantissant la paix, la sécurité et la cohésion sur son sol. Et cette absence de célébration digne de ce nom n’émut presque personne ! Comme si cette illustre page d’histoire nationale avait pratiquement disparu de la mémoire collective !

Quelle honte !

Si, ces temps-ci, le cœur n’est pas à la fête, ce n’est, apparemment, pas le cas pour tous les Haïtiens. Force est de constater, en effet, qu’un petit groupe de géniteurs de chaos de toutes sortes continuent de vivre dans l’opulence, sans une once de décence, dans ce pays qu’ils ont rendu invivable pour la majorité de leurs compatriotes.

Pataugeant, en permanence, dans la corruption et l’impunité à grande échelle, ces cyniques affairistes de tout poil se contrefichent du bien-être des millions d’âmes qui végètent, depuis des lustres, dans la crasse la plus abjecte sur presque toute l’étendue du territoire national – et tout particulièrement dans la région métropolitaine.

Soutenus par les ennemis du peuple haïtien, tapis dans l’ombre, tant à l’intérieur qu’à l’extérieur du pays, ces fossoyeurs se moquent éperdument de l’histoire exceptionnelle d’Haïti, et notamment de la bataille de Vertières du 18 novembre 1803 – « aboutissement spectaculaire et sanglant de la guerre d’indépendance haïtienne qui voit la consécration de l’armée dite ‘‘indigène’’ dirigée par Jean-Jacques Dessalines » [et la proclamation de l’indépendance sur la Place d’armes aux Gonaïves, le 1er janvier 1804], pour citer l’historien Jean-Pierre Le Glaunec dans L’armée indigène. La défaite de Napoléon en Haïti (Lux, 2020, p. 13). Que reste-t-il, aujourd’hui, de ce haut fait d’armes dans l’esprit des Haïtiens ?

à venir : L’Edito du Rezo | La démocratie électorale en Haïti : une vaste escroquerie en bandes organisées

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