3 décembre 2024
Le livre « Vèvè Vodou Haïti » de Roxane Ledan – Taino-L ou l’éblouissante traversée d’un univers pictural exceptionnel
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Le livre « Vèvè Vodou Haïti » de Roxane Ledan – Taino-L ou l’éblouissante traversée d’un univers pictural exceptionnel

Par Robert Berrouët-Oriol

Linguiste-terminologue

Montréal, le 6 novembre 2024

Livre-événement le lundi 11 novembre 2024 à 18 h

 Librairie Le Port-de-Tête

369 Avenue Mont Royal Est

Montréal, Québec

Le livre « Vèvè Vodou Haïti » de Roxane Ledan, de son nom d’artiste Taino-L, a pour la première fois rencontré son public en Haïti, au Cap-Haïtien, le 25 juillet 2023 à l’hôtel Mont Joli, puis le 1er août 2023 à l’Hostellerie du Roy Christophe. Ce remarquable ouvrage de 104 pages est le résultat d’un minutieux travail de terrain mené par l’auteure en Haïti durant plus de vingt ans. Le livre est assorti d’exceptionnelles et inédites photos, toutes prises par l’auteure : il comprend 81 illustrations, incluant 38 vèvè de Milo Rigaud. L’ouvrage a été édité en Haïti en 2023 par AYITI BÈL. La deuxième édition, datée elle aussi de 2023, a été assurée à Montréal par le Cidihca. Le livre « Vèvè Vodou Haïti » sera l’objet, à Montréal, d’un livre-événement le 11 novembre 2024 à 18 h à la Librairie Le Port-de-Tête (369 Avenue Mont-Royal Est, Montréal). 

Présenter le livre « Vèvè Vodou Haïti » revient à effectuer un parcours iconographique sur les registres de la sémiotique et de la lexicographie. Celle-ci m’a semblé en amont un terrain plus fertile à explorer : j’ai donc entrepris d’effectuer un arpentage lexicographique exploratoire exposant l’hypothèse que les vèvè constituent un espace iconographique/sémiotique codifié lors d’une « seremoni vodou » où les transactions langagières occupent une place de premier plan. Toutefois, pour bien situer les limites objectives de ma démarche et par souci de probité intellectuelle, il est utile de préciser d’entrée de propos que ma connaissance du vodou haïtien est limitée : ce n’est donc pas à titre d’ethnolinguiste que j’effectue cet arpentage lexicographique exploratoire. Il y a quelques années, j’ai eu le privilège d’assister à Jacmel à ce que l’on appelle indistinctement en Haïti une « seremoni vodou ». Plusieurs choses ont lors retenu mon attention : (1) cette « seremoni vodou » m’a semblé être un rituel très codifié au sein duquel la danse et les chants occupent une place de première importance ; (2) la langue en usage entre les locuteurs au cours de cette « seremoni vodou » est le créole et le vocabulaire utilisé comprend également un nombre indéterminé de termes français ; (3) les chants vodou auxquels j’ai été exposé sont entonnés en créole et en « langaj » : sur ce registre, ils font une large part à un agrégat de langues africaines (fon, yoruba, malinké, etc.) dont les locuteurs créolophones n’ont probablement aucune connaissance ni compétence hormis un récitatif ritualisé, figé et mémorisé ; (4) la « seremoni vodou » est aussi le lieu d’une activité graphique elle aussi codifiée et ritualisée qui s’exprime par le tracé de figures géométriques sur le sol du « péristile » : ce sont les « vèvè », objet de la magnifique quête iconographique de Roxane Ledan.

C’est en ayant en tête ces observations générales que j’ai formulé une hypothèse exploratoire qui pourrait intéresser les ethnologues, les ethnolinguistes, les sémiologues et plus largement les historiens : la « seremoni vodou » étant le lieu convergeant (1) d’une activité graphique codifiée et ritualisée, les « vèvè », et (2) d’une activité chorale constituée de chants vodou, nous sommes donc en présence de deux systèmes sémiotiques liés et conjointement signifiants au plan sémantique. (NOTE – La notion de « système sémiotique » est ici employée au sens où l’entend le sémioticien Roland Barthes dans « Le degré zéro de l’écriture. Suivi de éléments de sémiologie », Éditions Gonthier, 1965, et dans « Rhétorique de l’image », revue Communication n°4,‎ 1964. Rappel : la sémiologie (du grec ancien : σημεῖον / sēmeîon, « signe », et λόγος / lógos, « parole, discours, étude » est l’étude des signes. Les deux systèmes sémiotiques que j’évoque sont au fondement d’un appareillage conceptuel et lexicographique qui mérite d’être étudié avec les instruments de la sémiotique aussi bien par les sémioticiens que par les linguistes-lexicographes. Cet inédit travail de connaissance du vodou pourrait à l’avenir être conduit dans le droit fil des propositions de Dimitri Béchacq consignées dans son article « La construction d’un vodou haïtien savant. Courants de pensée, réseaux d’acteurs et productions littéraires » (Infolio, MEG Genève : Vodou, 5, 2007). Dans cet article, Dimitri Béchacq rappelle de manière fort pertinente que le « Vodou » est un terme générique qui désigne tout un système religieux, philosophique, thérapeutique, esthétique…, une véritable vision holiste de l’être humain dans l’univers (…) D’un point de vue religieux, le vodou haïtien est un culte constitué de 21 rites (Beauvoir-Dominique 2005a : 60-61). » Cette définition générique du vodou éclaire la réalité que les « vèvè » appariés aux 21 rites et que donne bellement à voir le livre de Roxane Ledan sont effectivement, au cœur d’un culte ritualisé, un système sémiotique obéissant à la logique d’une activité graphique codifiée, et c’est sans doute là l’une des plus grandes qualités du travail de terrain réalisé par l’auteure de « Vèvè Vodou Haïti ».

Une recherche documentaire menée à l’aide de plusieurs moteurs de recherche ne m’a pas pas permis de retracer des outils lexicographiques spécifiques au vodou (lexiques bilingues français-créole ou anglais-créole, glossaires unilingues créoles, vocabulaires unilingues créoles). C’est toutefois grâce au remarquable et riche fonds documentaire du Cidihca, à Montréal, que j’ai pu prendre connaissance de documents de référence parmi lesquels (1) « Le grand rituel sacré ou Répertoire des chansons du Vodou haïtien » de Max Beauvoir (Edisyon Près nasyonal d’Ayiyi, 2008), qui comprend notamment « 1 763 chansons vodou » ainsi qu’un « Index » (pages 461 à 479). Au Cidihca j’ai pu également répertorier un autre livre-phare de Max Beauvoir, « Lapriyè Ginen » (Edisyon Près nasyonal d’Ayiyi, 2008), qui   comprend une réflexion étymologique et lexicographique sur plusieurs mots et notions du vodou : je reviendrai là-dessus dans le déroulé de cet article. Le fonds documentaire du Cidihca donne aussi accès au livre d’Arsène Francoeur Nganga, « Les origines Kôngo d’Haïti » (Éditions Diasporas noires, 2019) qui consigne l’intitulé « Études de l‘influence de la langue Kikôngo dans le vodou haïtien sur la base d‘un échantillon de 3 prières ».

Il y a lieu de rappeler que le livre « Vèvè Vodou Haïti » rassemble un large éventail de photos inédites de « vèvè » (81 illustrations) prises sur le terrain par Roxane Ledan durant quinze ans. Il se distingue de la sorte du livre de Nancy Tournier Férère, « Vèvè – L’art rituel du vodou haïtien » (s.l.é., 2004) qui comprend 36 tableaux de vèvè peints et commentés par l’auteure.

L’Encyclopédie Britannica définit comme suit le « vèvè » :

« Symbole vodou. Les vèvè, dans le vodou haïtien, sont des dessins géométriques qui représentent les lwa (esprits).

La production de vèvè est une tradition d’origine africaine. Au Dahomey, ancien royaume de la région qui est aujourd’hui le sud du Bénin, l’huile de palme était utilisée pour dessiner sur le sol certaines figures géométriques, telles que des rectangles et des carrés. La pratique du dessin d’emblèmes rituels sur le sol est également attestée en Afrique centrale, et la pratique de la production de vèvè en Haïti pourrait trouver son origine dans une convergence culturelle entre l’Afrique de l’Ouest et l’Afrique centrale. Certains chercheurs ont également souligné l’existence d’une pratique similaire chez les peuples Taino et Arawak, avec lesquels les Africains sont entrés en contact en Haïti.

Les vèvè peuvent être très élaborés ou simples. Ils sont dessinés sur le sol en terre du péristyle (temple), à l’aide de farine de maïs ou de cendres, et leur réalisation, généralement par un oungan (prêtre) ou une manbo (prêtresse), requiert une grande expertise. Les vèvè sont au cœur des rituels vodou car ils sont censés faire descendre ou monter l’énergie spirituelle associée à un lwa particulier. » [Traduction : RBO]

Au cours de ma recherche documentaire, j’ai également consulté la thèse de doctorat en anthropologie d’Hadrien Munier, « Le vodou asogwe diasporique transnational – Ontologie analogique et naturalisme moderne globalisé » (Université Laval et Université Lumière/Lyon 2, 2017). Cette thèse de doctorat comprend en Annexe (pages 567 à 573) ce que l’auteur désigne par « lexique » mais qui est en réalité un glossaire fort éclairant et dans lequel il fournit la clé des catégorisations suivantes : « définitions : litt. (traduction littérale), orig. fon (mot d’origine fon), orig. X prob. (mot d’origine X probable), orig. inc. (mot d’origine inconnue), orig. ang. (mot d’origine anglaise), orig. fr. (mot d’origine française) ». L’auteur définit comme suit le vèvè : « Vèvè (n. – orig. inc.) : Dessin symbolisant un lwa, semblable à des armoiries. Ils sont tracés sur le sol avec de la farine de maïs ou d’autres substances poudreuses et parfois peints sur les murs des peristil. »

Le terme « vèvè » est ainsi défini dans le fameux « Dictionnaire de l’écolier haïtien » (Éditions Henri Deschamps/Éditha, 1996) : « vèvè (FH) [français haïtien] nom m. Dessin tracé par le houngan sur le sol du hounfor, avec de la farine de maïs ou de blé, et dont les différentes parties représentent les caractéristiques d’un loa. » Dans ce dictionnaire, la rubrique « vèvè » renvoie à houngan, hounfor, loa, qui sont eux aussi définis. Le Dictionnaire des francophones définit comme suit le terme « vèvè » : « Symbole dessiné d’un esprit ». Il consigne aussi la variante orthographique « vévé » et en ce qui a trait à l’aire géographique d’utilisation du terme « vèvè » il précise : « Monde francophones ». 

Pour sa part, le dictionnaire en ligne Sensagent.com donne la définition suivante de « vévé » : 

« Un vévé ou vèvè est une sorte de symbole que les prêtres vaudous (houngan) dessinent autour d’un potomitan (poteau-mitan, un pilier situé au centre du péristyle), lieu de passage des esprits (loa ou lwa), avec de la farine de maïs, de la cendre, de la craie ou toute autre poudre. Le vévé correspond à un lwa, le dessin réunit ses symboles. Les vévés pour un lwa peuvent varier, mais on y retrouve généralement ses symboles traditionnels sous forme stylisée ».

Le portail Wikipedia, que les chercheurs citent occasionnellement et avec de grandes réserves dans leurs travaux pour des motifs méthodologiques, expose comme suit la définition de « vévé » :

« A veve (also spelled vèvè or vevè) is a religious symbol commonly used in different branches of Vodun throughout the African diaspora, such as Haitian Vodou and Louisiana Voodoo. The veve acts as a « beacon » for the lwa, and will serve as a lwa‘s representation during rituals. According to Milo Rigaud, « The veves represent figures of the astral forces… In the course of Vodou ceremonies, the reproduction of the astral forces represented by the veves obliges the lwa… to descend to earth.  Every lwa has their own unique veve, although regional differences have led to different veves for the same lwa in some cases. Sacrifices and offerings are usually placed upon them, with food and drink being most commonly used ». 

« Un veve (également orthographié vèvè ou vevè) est un symbole religieux couramment utilisé dans différentes branches du vodun à travers la diaspora africaine, telles que le vodou haïtien et le vaudou louisianais. Le vevè sert de « balise » pour le lwa, et servira de représentation au lwa pendant les rituels. Selon Milo Rigaud, « les vévés représentent des figures des forces astrales… Au cours des cérémonies vodou, la reproduction des forces astrales représentées par les veves oblige les lwa… à descendre sur terre.  Chaque lwa a son propre veve, bien que les différences régionales aient conduit à des veves différents pour le même lwa dans certains cas. Des sacrifices et des offrandes sont généralement déposés sur les lwa, la nourriture et la boisson étant les plus couramment utilisées ». [Traduction : RBO]

NOTE – Milo Rigaud est né en Haïti (…) en 1903, où il a passé la majeure partie de sa vie à étudier la tradition vaudou. Il a étudié le droit en Haïti et l’ethnologie, la psychologie et la théologie en France. L’implication du vaudou dans la lutte politique des Noirs haïtiens pour l’indépendance était l’une de ses principales préoccupations. [Son livre] « Secrets du vaudou » [traduit par Robert Cross, City Lights Publishers, 1985, [2001] retrace le développement de cette religion complexe (en Haïti et dans les Amériques) à partir de ses sources dans les brillantes civilisations de l’Afrique ancienne. Ce livre présente de façon simple les dieux ou loas et leur fonction, les symboles et les signes, les rituels, le calendrier des cérémonies du vaudou et les procédures d’exécution des rites magiques. Milo Rigaud est l’auteur, avec Odette Mennesson-Rigaud, de « La tradition voudoo et le voudoo haïtien » (Éditions Niclaus, Paris, 1953 ; version numérique, Éditions livres numériques divers, 2017). Il a également publié « Ve-Ve Diagrammes rituels du Voudou / Ritual Voodoo Diagrams » (French & European Publications, 1992).

Par ailleurs, le portail Wikipedia precise ceci : « Veves use symbolism to communicate which spirit is being called upon – for example, gatekeeper Papa Legba is invoked with a vèvè that features a walking cane, to indicate his jolly grandpa-like demeanor. The illustration also features coded images that reflect the matrilineal and patrilineal culture of the artist, providing information about their ancestral lineage. Offerings will typically be given ; in Louisiana Voodoo, this would entail a cup of coffee and/or candies associated with the spirit ». 

« Les vèvè utilisent le symbolisme pour communiquer quel esprit est invoqué – par exemple, le gardien Papa Legba est invoqué avec un vèvè qui comporte une canne, pour indiquer son comportement de grand-père jovial. L’illustration comporte également des images codées qui reflètent la culture matrilinéaire et patrilinéaire de l’artiste, fournissant des informations sur sa lignée ancestrale. Des offrandes sont généralement faites ; dans le vaudou louisianais, il s’agit d’une tasse de café et/ou de bonbons associés à l’esprit ». [Traduction : RBO]

Illustration : vèvè de Papa Legba

Le site Web visithaiti.com présente comme suit le « vèvè » : « At the heart of Vodou are the symbols known as vèvè. These cosmograms are intricate drawings made with cornmeal, coffee, or flour, and they serve as the visual representation of the spirits and deities honored in Vodou. Each vèvè corresponds to a specific spirit, and invoking them involves drawing the corresponding symbol on the ground. This is often performed by an initiate who has learned the technique and is an essential part of Vodou rituals and ceremonies ». 

« Au cœur du vodou se trouvent les symboles connus sous le nom de vèvè. Ces cosmogrammes sont des dessins complexes réalisés avec de la semoule de maïs, du café ou de la farine, et servent de représentation visuelle des esprits et des divinités honorés dans le vodou. Chaque vèvè correspond à un esprit spécifique, et pour les invoquer, il faut dessiner le symbole correspondant sur le sol. Cette opération est souvent effectuée par un initié qui a appris la technique et constitue un élément essentiel des rituels et des cérémonies vodou ». [Traduction : RBO]

Également, le site Web visithaiti.com precise ceci : « From the healing spirit of Simbi, guardian of rivers and sources, to the fierce and far-reaching power of Erzulie Freda and Erzulie Dantor, each vèvè holds a special significance and meaning. These symbols are not only an important part of Vodou rituals, but they are also beloved cultural icons that are celebrated in art and designs across the country ».

« De l’esprit de guérison de Simbi, gardien des rivières et des sources, au pouvoir féroce et profond d’Erzulie Freda et d’Erzulie Dantor, chaque vèvè a une signification et un sens particuliers. Ces symboles ne sont pas seulement une partie importante des rituels vodou, mais ils sont aussi des icônes culturelles bien-aimées qui sont célébrées dans l’art et les dessins à travers le pays ». [Traduction : RBO]

« Legba: The Guardian of the Gates [Litt.: « Legba : le gardien des barrières »]

« Papa Legba, the first spirit to manifest during a Vodou ceremony, holds a special place in the Vodou Pantheon in Haiti. He is the guardian of the gates, allowing spirits to cross into the human world. His vèvè symbolizes his role as the barrier between the two worlds, with two perpendicular axes and his cane ».

Papa Legba, le premier esprit à se manifester lors d’une cérémonie vodou, occupe une place particulière dans le panthéon vodou en Haïti. Il est le gardien des portes qui permettent aux esprits de passer dans le monde des humains. Son vèvè symbolise son rôle de barrière entre les deux mondes, avec deux haches perpendiculaires et sa canne ». [Traduction : RBO] « 

Dans la thèse de doctorat d’Hadrien Munier, « Le vodou asogwe diasporique transnational – Ontologie analogique et naturalisme moderne globalisé », le terme « vèvè » comprend la définition suivante : «  vèvè  (n. – orig. inc.) : Dessin symbolisant un lwa, semblable à des armoiries. Ils sont tracés sur le sol avec de la farine de maïs ou d’autres substances poudreuses et parfois peints sur les murs des peristil ». Tel qu’indiqué auparavant, cette thèse consigne en Annexe (pages 567 à 573) un glossaire composé d’entrées françaises et créoles. Ce glossaire fournit des définitions et des notes explicatives rédigées en français pour des termes simples et des termes complexes. En voici un échantillon.

TABLEAU 1 / Listage non exhaustif de termes créoles du vodou. (Source : Hadrien Munier, « Le vodou asogwe diasporique transnational – Ontologie analogique et naturalisme moderne globalisé », Thèse de doctorat, Université Laval et Université Lumière/Lyon 2, 2017).

TermesIndications grammaticales et étymologiquesDéfinitions + Notes explicatives
Abitasyon n. – orig. fr. Domaine foncier d’un lignage biologique en milieu rural. Le terme vient directement de l’appellation des espaces de production (plantations) de l’époque coloniale. Il est parfois synonyme de demanbre et de lakou
Adjenikon n. – orig. inc. Initié qui occupe le rôle de lancer les chants dans les cérémonies. 
Asogwe n. adj. – orig. fon prob.Nom du quatrième et dernier rituel initiatique et du grade auquel celui-ci donne droit (oungan / manbo asogwe). Il qualifie également la forme de vodou dans lequel ce grade existe (vodou asogwe). 
Ason n. – orig. fonHochet rituel utilisé pour invoquer les lwa dans le vodou asogwe. Il est confectionné à partir d’une calebasse dont une partie étroite sert de manche, auquel est attachée une clochette par une ficelle. La partie bombée est recouverte d’un filet de perles. 
Chanje miwa n., v. – orig. fr. prob.Dans les cérémonies publiques, partie durant laquelle le groupe d’initiés change d’habits. Chez Christelle, cela se passe souvent entre la première partie du rite Rada et le chante chay
Chante chay n., v. – orig. fr.Litt. « Chanter les charges ». Rite qui a lieu dans les cérémonies publiques au milieu du rite Rada et dans lequel aucun lwa n’est interpellé. Les chants qui y sont proférés ont une forte dimension morale et normative. 
Djakout / makout n., adj. – orig. inc Litt. « Sacoche ». 1 – Sac en paille tressée, attribut du lwa Kouzen Zaka. 2 – Oungan ou manbo non initié qui a obtenu ses pouvoirs directement auprès des lwa. Ces personnes sont aussi appelées madjawe
Kanzo n., v. – orig. fon prob. Second rituel d’initiation dans le vodou asogwe. Lorsqu’il est qualifié de sou pwen, cela désigne le troisième rituel initiatique. Ces deux termes sont également utilisés pour qualifier les grades auxquels ils donnent droit. Avec les mêmes usages, ils sont parfois remplacés par kouche (coucher, s’étendre sur le sol) puisque l’initiation nécessite d’être allongé durant plusieurs jours. 
Kò drapo n. – orig. fr. Initiés qui occupent le rôle de porter les drapeaux de la famille spirituelle durant certaines cérémonies. Il y en a toujours deux. 
Langay n., adj. – orig. fr.Litt. « Langage ». Langue secrète et magique utilisée dans le vodou composée de mots d’origine africaine (ou supposée africaine) dont le sens est parfois inconnu. 
Laplas n. – orig. fr. Abréviation de « commandant général de la place ». Initié qui occupe le rôle de porter un sabre, une épée ou une machette durant l’interpellation de certains lwa puis de leur donner après un vire-kase
Lwa n. – orig. fr. prob.Divinité du vodou haïtien, aussi qualifiée de zanj (ange), mistè (mystère), espri (esprit) ou sen (saint). Il remplace le terme fon vodoun et vient probablement d’un emprunt au terme français de « loi ». 
Nasyon n. – orig. fr. Litt. « Nation ». Groupe de divinités ayant une origine et des caractéristiques communes. Aussi désigné par fanmi (famille) ou eskòt (escorte). Ce sont par exemple : Rada, Zandor, Kongo, Nago, etc. 
Po tèt n. – orig. fr.Litt. « Pot de tête ». Réceptacle en faïence contenant une partie de l’âme des initiés, conservé dans le ounfò
Troke ason n., v. – orig. fr.Ensemble de gestes exécutés avec l’ason qui constitue une forme de communication secrète entre initiés de niveau supérieur au kanzo. Il est également mené avec le lwa Loko
Vire kase v., n. – orig. fr.Geste rituel consistant à tourner sur soi trois fois puis à baiser le sol devant une personne de niveau initiatique supérieur ou d’embrasser une personne de niveau initiatique égal. Ce geste peut être fait devant des initiés, des lieux, des objets ou des lwa

REMARQUE 1 – Les « Indications grammaticales et étymologiques » consignées par Hadrien Munier se décodent comme suit : n. – orig. fr. = nom, origine française ; n. – orig. inc. = nom, origine inconnue ; n. adj. – orig. fon prob. = nom, adjectif, origine fon probable ; n., adj. – orig. fr. = nom, adjectif, origine française ; n., v. – orig. fr. prob. = nom, verbe, origine française probable ; n., adj. – orig. inc = nom, adjectif, origine inconnue.

REMARQUE 2 – L’objet de cette thèse de doctorat n’est pas d’élaborer un glossaire français-créole exhaustif des vèvè ou plus largement un vocabulaire français-créole complet du vodou. Il fournit toutefois un pertinent éclairage lexicographique –des termes et de leur définition–, qui peut être utile au lecteur qui n’est pas familier de l’univers vodou. L’autre mérite de ce glossaire est de lister, au creux des définitions ou des notes explicatives, quelques termes créoles usuels de l’univers vodou : demanbre, lakou, oungan / manbo asogwe, chante chay, lwa, madjawe, sou pwen, kouche, vire-kase, zanj, mistè, espri, sen, vodoum, fanmi, eskòt, ounfò, ason, kanzo, lwa, lwa Loko.

Toujours dans la perspective d’une démarche exploratoire destinée à explorer le vocabulaire créole du vodou, j’ai procédé au relevé des unités lexicales consignées dans le livre rédigé en français de Max Beauvoir, « Lapriyè Ginen » (Edisyon Près nasyonal d’Ayiyi, 2008). Ce livre comprend une réflexion étymologique et lexicographique sur plusieurs mots et notions du vodou. L’auteur précise que l’ouvrage comprend quatre parties : (1) « LaPriyè Sen Franswa-Sen Dominik » ; (2) « La Litanie Djo » ; (3) « Lapriyè Djo » et (4) Le Bohoun ou les chants funéraires ». Ce relevé des unités lexicales permettra de vérifier, lors d’une future démarche comparative, s’il y a communauté de vue entre Max Beauvoir et d’autres auteurs et s’ils définissent pareillement les termes créoles ainsi que les notions apparentées. 

TABLEAU 2 / Dépouillement et listage des unités lexicales du livre « Lapriyè Ginen » de Max Beauvoir (Edisyon Près nasyonal d’Ayiyi, 2008)

TermesPhrases définitoires ou explicatives
Lapriyèmot de la langue haïtienne, dite créole, qui en français signifie « la ou les prières » 
Lapriyè Ginen terme commun qui désigne la ou les prières que les vodouisants adressent à Dieu ou aux grands esprits de leur religion. 
pitit Ginen les individus de ce groupe se sentent satisfaits lorsqu’ils sont perçus en tant que d’autres « enfants d’Afrique »
Ginen1désigne donc clairement un lieu d’origine qui serait situé sur le continent africain et aussi une tradition culturelle
Ginen2au point de vue mystique, le mot (…) désigne tout autre chose. Il s’agit plutôt d’un lieu mythique qui, comme le ciel ou le paradis des chrétiens, serait un endroit où les âmes se rendent après la mort
Ginen3Quand on meurt, dit-on, on retourne en « Ginen » en passant sous les eaux. « Ginen » désignerait dans ce cas précis le lieu d’origine des ancêtres primordiaux, l’endroit où les âmes se réunissent après la mort et se sédentarisent de façon plus ou moins permanente, le tertre primordial
Nèg Ginen ou Haïtien authentiqueen tant que Nègre de Guinée ou Africain, un individu qui incorpore en lui-même, toutes les valeurs culturelles qui sont incluses au sein de la tradition de ses ancêtres et qui en fait sa pratique régulière
Nan GinenDan GinenEn fait et en ce sens Nan Ginen ou Dan Ginen signifieraient « le lieu du séjour de Dieu » ou « le jardin des anchres » 
Sè, Sen, Sah, San ou Sen » des Dahoméens, tout comme les mots Sen, Sah ou San des Amérindiens, sont des homonymes du mot français  Saint, mais pas des synonymes.
Houngan Hougan Hougbon MamboHoungan ou Hougan, Hougbon ou Mambo, ne seraient-ils pas tous, avant tout, des « HOUNSI Djo? » C’est-à-dire des époux ou épouses (st) des (HOUN), Esprits qui habitent le Djo ? Par époux ou épouse, entendons par-là quelqu’un qui vivrait dans la plus étroite intimité avec un autre.
djoAfin d’expliquer les raisons qui justifieraient cette position privilégiée du djo au sein des rituels, nous avons été conduits à questionner nos frères du Dahomée qui parlent le fongbé, et ils nous ont affirmé que le vrai sens du mot Djo voulait dire en français: « Le Souffle qui entoure la Terre » 
Dji, Dja et DjoKonblanmen ou Comblanmin Le ciel dans le vodou s’appelle Dji et ce mot serait aussi de la même racine que Dja et Djo. Le Dji signifierait cette voûte qui se situe au-dessus de nos têtes. Se présentant bleue pendant le jour, et sombre pendant la nuit, le vodouisant la nommerait alors « Konblanmen (ou Comblanmin) » parce qu’elle se trouverait parsemée de constellations, d’étoiles, de planètes, de la lune… etc. 
Lwa Jumeaux ou Marasa, Mawou et Lisa, Marasa TwaOn y trouverait particulièrement les Lwa Jumeaux ou Marasa, Mawou et Lisa, ces Forces qui sous- tendent la Lune et le Soleil, et les Marasa Twa, le troisième étant laTerre 
Désouni, Bohoun, Sohoun, Linsoufè, kase kanari, Boulé zen, Démaré bouch GoviIl suffit d’observer la richesse en symbolismes inscrits en filigrane à travers tous ces rites dits Désouni, Bohoun, Sohoun, Linsoufè, kase kanari, Boulé zen, Démaré bouch Govi qui sont tous des cérémonies funéraires, pour se rendre compte de la profondeur des implications spirituelles et sociales de notre philosophie traditionnelle et populaire. 

Plusieurs remarques méritent d’être consignées au terme de ma démarche exploratoire qui a consisté à inventorier le vocabulaire créole du vodou dans deux ouvrages de référence, (1) la thèse de doctorat d’Hadrien Munier, « Le vodou asogwe diasporique transnational – Ontologie analogique et naturalisme moderne globalisé » (Université Laval et Université Lumière/Lyon 2, 2017), et le livre « Lapriyè Ginen » de Max Beauvoir (Edisyon Près nasyonal d’Ayiyi, 2008). 

REMARQUE 1 – De manière générale, l’inventaire des deux documents n’a pas permis de retracer des outils lexicographiques spécifiques au vodou de type lexique bilingue français-créole ou anglais-créole, glossaire unilingue créole, vocabulaire unilingue créole.

REMARQUE 2 – la thèse de doctorat d’Hadrien Munier, « Le vodou asogwe diasporique transnational – Ontologie analogique et naturalisme moderne globalisé », consigne des termes qui à priori ne semblent pas appartenir à la même catégorie lexicale : des noms propres ou des toponymes (« Lwa », « Nasyon »), côtoient des noms communs ou des adjectifs (Kanzo, Kò « drapo », « Po tèt »). Et certains termes appartiennent, sans doute selon le contexte énonciatif, à deux catégories grammaticales distinctes (« Asogwe » : nom ou adjectif ; « Chanje miwa », « Chante chay » : nom ou verbe). L’auteur établit mais sans l’indiquer formellement un rapport de synonymie entre certains termes (« Djakout » / « makout », qui sont à la fois des noms et des adjectifs), et il indique pour d’autres une aire géographique de provenance (« Asogwe » : nom et adjectif, orig. Fon prob. [« probable »] et « Ason » : orig. Fon). Les mentions d’aire géographique de provenance des termes (orig. Fon ou orig. fr. [française] ne sont pas documentées dans la thèse d’Hadrien Munier. 

REMARQUE 3 – Le dépouillement des unités lexicales du livre « Lapriyè Ginen » (Edisyon Près nasyonal d’Ayiyi, 2008) de Max Beauvoir atteste l’existence de mots appartenant à l’origine aux rites vodou et qui sont passés dans la langue usuelle : « Ginen », « Lapriyè Ginen ». Le classement du terme « Ginen1,2,3 » effectué par l’auteur expose trois acceptions distinctes, ce qui semble suggérer qu’il y a eu un glissement sémantique du terme géographique de départ vers une acception mystique puis vers une acception mystique-géographique.  

REMARQUE 4 – Il est également intéressant de noter que l’auteur consigne des variantes orthographiques dans la graphie française de termes usités en créole dans son livre ou ailleurs : « Houngan », « Hougan », « Hougbon ». Il ne précise pas toutefois si le terme « Mambo » serait la forme féminine de « Houngan ». 

REMARQUE 5 – À l’avenir, une enquête approfondie –soit une ample recherche ethnolinguistique à l’échelle nationale–, devra être effectuée pour consigner le vocabulaire créole du vodou. Cette enquête permettra, entre autres, d’établir la catégorie lexicale à laquelle appartiennent plusieurs appellations rituelles : « Désouni », « Bohoun », « Sohoun », « Linsoufè », « Kase kanari », « Boulé zen », « Démaré bouch Govi », etc. Dans l’usage cérémoniel, ces appellations rituelles sont-elles des noms propres ou seraient-elles devenues des unités lexicalisées du type « nom commun », « adjectif », etc. ?

INVENTAIRE DU PATRIMOINE IMMATÉRIEL D’HAÏTI 

Je termine la présentation du livre de Roxane Ledan, « Vèvè Vodou Haïti », en donnant accès à une fort éclairante description du « vèvè » élaborée dans l’« INVENTAIRE DU PATRIMOINE IMMATÉRIEL D’HAÏTI ». Je cite longuement cette description en raison de sa pertinence.

« Tracer vèvè

Carl Robert

Carl Robert est un jeune ougan, maître de cérémonie et responsable avec sa mère qui est aussi prêtresse du Péristyle « Mal pa dous mizè m pou kòm » de Christ-Roi. Il a connu l’expérience de la possession à l’âge de 12 ans et devient ougan à 18 ans après son initiation. A nos jours, il a environ 10 ans depuis qu’il dessine des emblèmes des Divinités vodou, pratique rituelle communément appelée « tracer vèvè ou tracer cérémonie ».

En référence aux différentes tribus de l’Afrique, on regroupe les divinités (101 Lwa) du vodou haïtien en 21 nanchon (nations ou tribus) mais le «1» qui termine ces nombres indique qu’il s’agit d’une valeur indéterminée). Avant chaque rituel comme prière, danse ou initiation (kanzo), le Lwa que l’on veut invoquer ou honorer est représenté par un vèvè qui constitue en même temps un espace sacré tracé au sol pour attirer sa présence. D’après Carl Robert, de même que chaque pays a son drapeau chaque Lwa a son vèvè comme emblème.

Comme emblèmes des Lwa, les vèvè occupent une place fondamentale dans les cérémonies religieuses du vodou. Savoir tracer des vèvè est une marque de distinction très appréciée par les vodouisants. Dans l’Artibonite par exemple, c’est celui qui atteint le grade de « serviteur » (fonction qui serait plus élevée que celle du ougan / manbo) qui est habilité à manipuler de la farine pour obtenir des vèvè. Étant des peintures rituelles, ils engendrent l’acte créatif. Leur spécificité c’est qu’ils représentent le principal média par lequel l’imaginaire vodou diversifie et enjolive le champ culturel haïtien en révolutionnant la peinture haïtienne. Depuis les années 1950, ces peintures d’inspiration vodou rayonnent aux États-Unis, dans la Caraïbe et en Europe.

Les vèvè sont des dessins tracés à même le sol pour rendre concret les caractéristiques des Lwa que l’on désire invoquer. Ils se composent d’une combinaison d’éléments figuratifs (sacoche, sabre, serpette, bateau), d’images tirant vers un certain naturalisme avec les feuilles (palmier) et les animaux (serpent, taureau, bélier) et de diverses formes géométriques : carré, rectangle, losange, cercle. Notamment on y retrouve des formes incurvées, des terminaisons en spirales ou à double courbes (cornes de bélier), des cardioïdes, des étoiles et des croix. Les figures résultant de cette combinaison de signes, de symboles et d’images sont aussi des messages que les morts adressent aux vivants et les initiés de leur côté utilisent ce média pour adresser des prières à leurs ancêtres disparus ou divinisés.

Comme une sorte d’art éphémère, ils sont des espaces sacrés fluides et temporaires et généralement tracés avant les danses rituelles.  Une fois que les Lwa sont salués, la prière est terminée, tambours frappés et la danse commence et des initiés tombent en transe, les vèvè sont appelés à disparaître sous les pieds des assistants mis en liesse. Presque tous les rituels vodou, privés ou publics demandent le tracer des vèvè, souligne ougan Robert. Les prières, les danses, les cérémonies kanzo ou d’initiation ou même des règlements (rituels) avant la sortie d’un défilé rara les exigent. Au minimum, il faut une kwasiyen (croix signée).

Pour se protéger contre les mauvais sorts, certains vodouisants ont l’habitude de faire une kwasiyen sous le seuil de leur porte à l’aide de la farin ginen (farine de Guinée ou cendre). Cependant, le caractère éphémère des vèvè ne laisse pas certains ouganindifférents.  Ougan Robert nous a dit qu’il est parfois triste de voir ses chefs-d’œuvre piétinés.  Idéalement, il voudrait que leur durée de vie soit plus longue. Mais circonstance oblige, le péristyle est souvent trop petit par rapport au nombre d’assistants et d’initiés. Il faut faire de la place pour recevoir tout le monde et laisser libre champ à la manifestation des Lwa.

Comme on a déjà souligné, les Divinités vodou sont multiples. Quand une cérémonie est faite pour rendre grâce à plusieurs Divinités, au lieu de tracer un vèvè pour chaque Divinité, le ougan ou la manbo trace un grand vèvè autour du potomitan (pilier central), une sorte de pentacle qu’on appelle Minokan. Disposé et dessiné symétriquement avec le potomitan (trait d’union entre le monde visible et invisible) comme axe, il invoque et incarne simultanément toutes les Divinités du vodou haïtien ainsi que les choses sacrée et profane, le tangible comme l’intangible : procréation, agriculture, santé, sécurité, connaissance, pouvoir, amour, mortalité ; eau, fer, feu ; lumière et ténèbres. 

Ce graphique rituel informe sur toute la vision du monde du vodouisant. Elle structure l’espace et le temps ainsi que le rapport existant entre le naturel et le surnaturel. Au cours des cérémonies, ce graphique offre aux participants-visiteurs la contemplation d’une véritable manifestation d’art. Selon Fouché (1976 : 66-67), elle suppose un sens développé de la perspective. Étant des tracés plastiques, ils sont considérés comme de véritables chiffres-nombres ou hiéroglyphes au pouvoir incantatoire, dessinés avec un art consommé par le créateur.

Comment obtenir un vèvè ? – Dépendamment des attributs de la Divinité que l’on veut représenter, ces figures rituelles sont réalisées avec une diversité de substances pulvérisées comme farin frans (farine de blé), farin mayi (farine de maïs), farin ginen, poudre de gingembre ou de café, etc. Avec une grande maîtrise des mouvements, le créateur laisse filer entre l’index et le majeur aidés par le pouce la poudre ou la farine appropriée. En tombant au sol en petite quantité, comme des jets d’encre, cette substance permet aux ougan et aux manbo d’obtenir les lignes de son dessin. Pour être plus rapide, parfois, ils sont plusieurs à le tracer. Pour terminer l’œuvre, ils l’ont délimité par des kwasiyen et y déposent des bougies, boisons et nourriture avant de la grande prière collective autour du vèvè.

L’apprentissage et la transmission de la pratique du tracer vèvè s’opèrent par des voies à la fois publics et secrets. Lors des cérémonies ouvertes au public, c’est aux yeux de tous que le ougan ou la manbo tient son assiette et tire de la farine pour réaliser les figures désirées. À ces occasions, les futurs prêtres ou prêtresses vodou commencent à intérioriser les mouvements et les manières de procéder.  Après avoir jugé digne d’accéder aux secrets des ancêtres en franchissant le sommet de la hiérarchie vodou, l’apprenant est invité à suivre une formation spécialisée qui peut durer entre un à douze mois selon le degré de son aptitude. Au cours de cette initiation, parmi tant d’autres pratiques, on apprend aux aspirants la manière de réaliser un vèvè et surtout ses différentes fonctions. On doit noter aussi que la pratique du vèvè demande une technique de mémorisation extraordinaire. Comme aide à la mémoire, on les donne des notes accompagnées des schémas des principaux vèvè qu’ils consignent dans un cahier. De nos jours, ce n’est pas étonnant de voir un officiant traçant des vèvè en ayant devant lui ceux qui sont reproduits dans l’ouvrage de Louis Maximilien (1945), Le vodou haïtien : Rite Radas-canzo. À cause d’une vingtaine de vèvè et des formules d’invocations consignés dans cet ouvrage, il est sur le point de devenir le livre sacré de certains vodouisants. 

A 29 ans, Carl Robert est déjà un « papa » ou un père en langage vodou car en trois occasions, il a déjà engendré 38 filles et fils spirituels, c’est-à-dire, il les a initiés au sommet de la hiérarchie. Pour apprendre à tracer des vèvè à ses postulants, il commence à les montrer comment obtenir un kwasiyen (croix signée) même quand c’est par celui-ci que s’achève un vèvè. Selon notre informateur, on fait des exercices pratiques avec de la farine de maïs au lieu de la cendre ou d’autres poudres car cette substance est plus manipulable pour un apprenti. Le procédé global qu’il emploie avec ses élèves consiste à l’observation, l’imitation suivie de la répétition personnelle. C’est par cette technique qu’il a appris la pratique auprès de son père spirituel qui vit actuellement en France. Selon les membres de sa société vodou, Carl Robert a reçu un « don spécial » pour réussir des vèvè exceptionnels. Le jeune ougan explique aussi cette performance par le fait qu’il était très calé en géométrie quand il était à l’école où il a atteint le niveau de 3e secondaire. »

Références citées dans l’étude de l’« INVENTAIRE DU PATRIMOINE IMMATÉRIEL D’HAÏTI »

Célius, Carlo A. (2007). « Considérations sur l’invention des vèvè » dans Jacques Hainard, Philippe Mathez et Olivier Schinz (dirs.) (2007), Vodou, Infolio/Musée d’ethnographie de Genève (coll. Tabou), Genève, pp. 279-305.

Fouché, Franck (1976). Vodou et théâtre : pour un nouveau théâtre populaire, Montréal, Nouvelle optique.

Hurbon, Laënnec (2001). « Transformations du vodou haïtien dans le contexte de la mondialisation », revue Conjonction, 206 : 49 – 56.

Lynch (de), Carol (2008). Le Cahier sacré du vodouisant, Henri Deschamps, Port-au-Prince.

Maximilien, Louis (1945). Le vodou haïtien : rite radas – canzo. Imprimerie Pressmax,  Pétion-Ville.

Mbongolo (ma), Masengo (2008). Le vaudou haïtien vu avec les yeux d’un Kongo d’Afrique. Malaki Production, Reggio Emilia (Italie).

M. Faïk-Nzuji, Clémentine (1996). Le dit des signes : répertoire de symboles graphiques dans les cultures et des arts africains. Musée canadien des civilisations, Québec.

ANNEXE 1 / Glossaire vodou du Musée canadien de l’histoire (non daté)

« Depuis plusieurs années, l’orthographe créole, vodou, tend à s’imposer par rapport à l’orthographe traditionnelle française, vaudou. Pour beaucoup, elle est plus appropriée, car elle se rapproche de vodun, terme d’origine ouest-africaine qui désigne les puissances invisibles que les humains essaient de se concilier. »

[NOTE DE RBO / Sur le plan lexicographique, l’une des grandes qualités de ce glossaire est qu’il fournit, pour chacune des notions, des sèmes définitoires amplement éclairants. De surcroît, les définitions sont suivies d’un énoncé explicatif décrivant un usage ritualisé ou une séquence historique ou une hiérarchie des rôles ou une typologie des symboles, etc. Sauf rares exceptions les termes contenus dans le Glossaire vodou du Musée canadien de l’histoire, qui appartiennent au vocabulaire spécialisé du vodou, n’apparaissent pas dans les dictionnaires usuels de la langue (Le Robert, Le Larousse, etc.) et ils sont absents du fameux Dictionnaire des francophones.]

Agwe (Agoué) : lwa maître de la mer. Un des grands services honorant Agwe consiste à mettre à la mer un radeau (la barque d’Agwe) chargé de boissons et d’aliments. S’il s’enfonce rapidement, cela signifie qu’Agwe a accepté l’offrande. 

Ason (asson) : hochet sacré utilisé par les oungan ou les manbo pour appeler les lwa lors de cérémonies du rite Rada. Il est aussi le symbole de la capacité des oungan et des manbo à interagir avec le monde des esprits. 

Badji : chambre sacrée contenant l’autel des lwa et où le oungan ou la manbo interagit avec ceux-ci, en particulier pour exécuter des traitements en faveur de personnes venues les consulter. 

Bizango : l’une des sociétés secrètes vodou. Les sociétés secrètes sont nées au temps de l’esclavage. Elles sont le résultat de la clandestinité dans laquelle les vodouisants pratiquaient leur spiritualité interdite par les colonisateurs européens. 

Bosou (Bossou) : famille de lwa qu’on qualifie de « taureaux » et représente avec des cornes. Les Bosou peuvent être violents, mais ils protègent efficacement leurs fidèles. 

Danbala : Venu du royaume du Dahomey (le Bénin actuel), Danbala est l’un des lwa les plus anciens et les plus célébrés. Calme et généreux, il peut procurer prestige, richesse et bonheur. Le serpent est son symbole ou attribut : serpent des origines, de la fertilité, de la force vitale qui soutient le monde, l’empêchant de se désintégrer. 

Èzili Dantò (Erzulie Dantor) : lwa, mère protectrice pour tous ceux qui subissent oppression et abus. Elle est aussi une femme indépendante et fière. Les possessions de ce lwa, lorsqu’il est fâché, peuvent être dramatiques et violentes. La personne possédée peut alors cracher du sang ou avaler du feu. 

Èzili Freda (Erzulie Freda) : lwa personnifiant l’amour, la beauté, la sensualité, et le goût du luxe et des plaisirs mondains. Mulâtresse et coquette, elle aime les belles robes, les bijoux, les parfums, les accessoires de toilette et les mets raffinés. 

Gede (Guédés) : famille de lwa qui incarnent le cycle continu de la dissolution et de la régénérescence, de la vie qui aboutit à la mort et de la mort qui est source de vie. Maîtres des cimetières, les Gede sont ceux qui connaissent les chemins par lesquels le monde des morts et celui des vivants se croisent et communiquent. 

Govi : cruche dans laquelle on fait descendre les lwa et qui contient des esprits. 

Granbwa (Grand Bois) : lwa des arbres, des feuilles et des forêts. Grand connaisseur des plantes médicinales, il joue un rôle clé dans l’initiation des futurs oungan et manbo. La forêt est un lieu important dans le vodou. Refuge des esclaves africains qui s’échappaient des plantations, elle est aussi l’endroit où ils ont rencontré les Autochtones qui leur ont transmis leur savoir sur le territoire et la nature de l’île. 

Gran Mèt (Grand Maître) : aussi appelé Bon Dieu. Dans le vodou, ce Dieu unique et suprême est considéré comme une entité tellement absolue qu’on ne peut ni l’imaginer, ni communiquer directement avec elle. 

Kouzen Zaka (Cousin Zaka) : lwa de l’agriculture et du travail agricole. Il est particulièrement révéré dans les zones rurales. Économe et grand travailleur, il fustige les paresseux. En échange d’offrandes de nourriture, il se montre généreux. Expert en plantes médicinales, il combat les maladies difficiles. 

Lasirèn (La Sirène) : lwa représenté souvent sous les traits d’une sirène qui se manifeste souvent, lors des possessions, en jeune femme coquette, élégante et soucieuse de sa toilette. 

Legba : Legba est le lwa invoqué en premier par les oungan et les manbo, car il est celui qui peut ouvrir le chemin reliant les humains au divin et aux autres lwa. 

Loko : lwa qui préside aux initiations des manbo et des oungan. Il est aussi le gardien des ounfò. Les vodouisants disent qu’il est comme un vent – le vent éternel du vodou. 

Lwa : la catégorie d’esprits la plus importante du vodou. Se comptant en plusieurs centaines et ayant des énergies, des tempéraments et des domaines privilégiés d’activité très variés, les lwa représentent à la fois les multiples manifestations du Gran Mèt et les intermédiaires de celui-ci avec lesquels les humains peuvent communiquer. Pour certains, ils sont aussi les multiples facettes de la présence du Gran Mèt en chaque individu. 

Manbo : prêtresse vodou. 

Marasa (Marassa) : lwa qui expriment à la fois le monde de l’enfance et celui des jumeaux (ou triplés). Leur pouvoir est phénoménal, souvent considéré comme supérieur à celui de tout autre lwa. 

Mèt Kafou (Maître Carrefour) : lwa qui contrôle les carrefours et qui est invoqué avant toute chose lorsqu’il s’agit de pratiquer la maji. Les carrefours sont, dans le vodou, des lieux sacrés. Les mondes des vivants et des morts s’y croisent. Des esprits, des forces et des énergies y circulent intensément. Ils sont donc des lieux privilégiés pour la maji et ses praticiens y effectuent parfois leurs thérapies, faisant appel aux lwa pour soigner, défendre ou punir. Propriétaire de ces lieux sacrés, Mèt Kafou est celui qui, tel un juge ou un médecin, peut autoriser la pratique de la maji. 

Ogou : famille de lwa guerriers et militaires. Ils ont pour emblème le sabre flanqué de deux drapeaux haïtiens. Énergiques, ces lwa mâchonnent un cigare, boivent du rhum et montrent un fort penchant pour les femmes. 

Ounfò : temple vodou. 

Oungan : prêtre vodou. 

Ounsi : homme ou femme qui est passé par les rites d’initiation et qui assiste le oungan ou la manbo. 

Pake : Lors de l’initiation, les pake sont fabriqués pendant une cérémonie secrète appelée bat gè (battre la guerre). Placés sur l’autel de l’initié, ils représentent ses lwa protecteurs, portent leurs couleurs et dégagent leurs forces. Ils peuvent contenir de la terre de certains lieux précis, des feuilles, des épices et d’autres matières. 

Pe : autel vodou. 

Péristyle : annexe du ounfò ayant l’aspect d’un grand hangar ouvert sur les côtés. C’est là que se déroulent beaucoup de cérémonies vodou et qu’ont lieu les danses rituelles. 

Potomitan (poteau mitan) : Qu’il soit un arbre vivant, ou un pilier de bois ou de ciment, le potomitan est au centre de chacun des espaces cérémoniels où se tiennent les célébrations vodou. C’est l’axe autour duquel tout se passe, car il est le véhicule emprunté par les lwa pour descendre parmi les participants lors de cérémonies. 

Pwen (point) : puissance « surnaturelle » ou force magique de protection matérialisée par un objet simple ou complexe confectionné par un oungan ou une manbo. 

Sèvitè (serviteur) : C’est ainsi que se désignent les vodouisants, voulant marquer par là qu’ils servent les lwa. 

Simbi : famille de nombreux lwa. Beaucoup d’entre eux sont les gardiens des sources et d’autres points d’eau. 

Tchatcha : hochet sacré ayant la même fonction que l’ason, mais de forme différente et utilisé, entre autres, dans le rite Kongo et le rite Petro. 

Vèvè : dessin symbolique sacré représentant les attributs d’un lwa, que l’on trace sur le sol avec de la farine de maïs, de la cendre, du marc de café, ou de la poudre de brique ou d’écorce. Chaque vèvè appelle le lwa qui lui correspond à se manifester.

ANNEXE 2 / Glossaire vodou du site Mythologica.fr (non daté)

[NOTE DE RBO / Sur le plan lexicographique et sous réserve d’un examen approfondi, l’on peut déjà observer que ce glossaire comporte quelques lacunes méthodologiques. Mais j’ai jugé utile d’y donner accès afin de fournir à l’usager un second glossaire du vodou qu’il pourra comparer à celui qui précède, le Glossaire vodou du Musée canadien de l’histoire. Le Glossaire vodou du site Mythologica.fr ne comprend pas de système de renvois inter-notionnels et la définition de certaines notions consigne des unités lexicales que l’on ne retrouve pas dans le listage des termes. De nombreux termes de ce glossaire ne sont pas reproduits selon la graphie officielle du créole.] 

 GLOSSAIRE


  • ASOGWE : Le premier et le plus haut grade de l’initiation vaudou. 
  • AÏZAN: Franges faites avec des fibres du palmiste qui ont le pouvoir d’écarter le mal.
  • ASSON : Hochet rituel composé d’une calebasse, de vertèbres de couleuvre et d’une clochette.
  • ASSOTO(R) : Grand tambour sacré. 
  • BAGUI : Sanctuaire réservé aux hougans, où se trouvent les autels (pé ou pedji) des loas. On parle aussi de « caye mystères »
  • BASSIN SAINT PIERRE : Lieu de pèlerinage où les vaudouisans se purifient dans un bassin rempli de boue.
  • BOCOR ou BOKO : Houngan qui étend ses pratiques à la magie noire; sorcier. 
  • BOULA : Petit tambour sacré.
  • BOULÉ-ZIN : Cérémonie dans laquelle des vases d’offrandes sont enduits d’huile et chauffés jusqu’à ce que l’huile s’enflamme; c’est pour donner plus de force aux loas.
  • CANZO ou KANZO : Individu qui a reçu l’initiation vaudou au cours de la cérémonie-canzo et qui devient capable de toucher le feu sans se brûler.
  • CHAM : Sortilège, poudre ou breuvage magique, qui passe pour avoir la vertu de séduire.
  • CHWAL: Forme créole du mot “cheval”. Personne possédée par un loa.
  • CRISE DE LOA : Possession d’un initié par un mystère vaudou. 
  • CROISIGNIN : Tracer avec de la farine ou de la poudre une croix sur un objet rituel ou une personne.
  • DESSOUNEN : Cérémonie pratiquée pour enlever les pouvoirs d’un initié avant ou après sa mort. 
  • DIABLESSES : Ce sont les esprits des femmes qui sont mortes vierges. Ils sont obligés de purger le péché de mourir vierge en vivant dans les bois pendant de nombreuses années avant d’être autorisés à entrer au paradis.
  • DLANDE : Mot sacré prononcé par le houngan ou la manbo dans des cérémonies telles que le « boulé zin ». 
  • DOCTE FEY : Docteur-feuille : guérisseur.
  • FLORIDA : Sorte d’eau de Cologne incontournable des cérémonies. On s’en asperge ou on s’en sert pour laver le plancher du lieu de culte afin d’attirer les bons esprits. 
  • GALIPÒT : Sorcier, loup-garou, personne qui possède le don de bilocation. Ce terme est emprunté aux colons de Saint – Domingue. 
  • GAN GAN : Prêtre ou sorcier secondaire qui n’arrive pas à obtenir le statut de Hougan. 
  • GARDE : Talisman chargé de pouvoirs magiques porté par les hommes.
  • GÈ : Rappel des mystères ou des esprits devant être placés sur une personne ou dans un talisman. Usité dans le rite petro, le « bat ‘gè’ » consiste à faire frapper des couteaux et des cuillers contre quatre assiettes placées chacune à extrémité d’une natte. 
  • GE ROUGE (oeil rouge) : Épithète indiquant l’aspect horrible et violent d’un loa ; . Ainsi trouve-t-on Agwe-Ge-Rouge, Damballah Ge-Rouge, Erzulie Ge-Rouge, Ogoun Ge-Rouge.
  • GOVI : Ustensile rituel d’où parlent les esprits. 
  • HOUGAN ou OUGAN : Prêtre mais également sorcier et guérisseur qui est appelé divinor, bocor ou docteur-feuille selon la fonction qu’il occupe. 
  • HOUNFORT : Temple vaudou constitué de trois pièces.
  • HOUNGNOR : Nouvel initié qui pourra par la suite accéder à d’autres degrés d’initiation : Hounsi bossale, Hounsi kanzo,  Assogué.
  • HOUNSI : Homme ou femme qui a passé les rites d’initiation, qui assiste, vêtu de blanc, le houngan ou la mambo en chantant et exécutant des danses rituelles.
  • IFE : Quartier général des esprits dont l’étoile à huit branches est son symbole.
  • KAY LOA : Maison des esprits. 
  • LANGAY : Langage utilisé lors des cérémonies et des chants vaudous 
  • LAPLACE : Maitre de cérémonies qui, armé d’une machette, seconde le Hougan.
  • LAV TET : Cérémonie qui a pour but de nettoyer la part négative d’une personne avant son admission dans un groupe.
  • LOA ou LWA : Esprits masculins ou féminins qui sont de deux types: les Loa doux ou Loa-Ginen et les Loa agressifs ou Loa amers, selon les pratiques de magie défensive ou offensive. Ce terme vient du mot français ‘loi ».
  • LOA ACHTE : c’est un esprit acheté pour sa puissance, il faudra l’honorer à l’aide d’offrandes parfois coûteuses sous peine de malédiction.
  • LOA MET-TET : Loa des initiés, placé sur sa tête lors de l’initiation, et qu’il faut enlever avant la mort.
  • LOA RASIN : C’est le loa racine, l’esprit familial hérité d’un parent.
  • LUTIN : Fantôme d’un enfant mort non baptisé. 
  • MACOUTTE : Sacoche en feuilles de latanier.
  • MALDYOK : Mauvais oeil.
  • MAMBO : Prêtresse vaudou appelée aussi Divinèse.
  • MANGÈ: Offrandes en nourriture.
  • MANJE-LOA : Cérémonie vaudou. 
  • MANJE RANVWA : Sacrifice destiné à repousser les assauts d’un mystère cruel.
  • MAZIMAZA : Hougan qui, tout en accomplissant ses devoirs sacerdotaux, n’hésite pas à employer, moyennant argent, des moyens illicites pour satisfaire la cupidité de ses clients. 
  • MONTER : Verbe qui indique la possession d’un fidèle par un loa.
  • NAGO : Rite vaudou.
  • OGAN : Sorte de clochettes aplaties que l’on frappe avec une tige métallique pour accompagner les tambours.
  • OUANGAN : Les ouangans sont des charmes et il en existe de différents types: ouangan-envoûtement, ouangan-mort, ouangan-amours.
    Les talismans ont également une grande importance. En particulier les paquets-Congo composés d’épices, de terre (prélevée dans une église, dans un carrefour, dans un bois ou dans un cimetière), de poudre à canon et de poudre de corne de taureau. Ces éléments sont ficelés dans une enveloppe de satin aux couleurs vives, surmontée de plumes et garnie de verroteries. Ils sont destinés à différentes thérapeutiques censés guérir tous les maux car consacrés selon le rite Petro. 
  • OUFO : Temple vaudou 
  • OUNSI : Initié du vaudou 
  • PÈ : Autel en maçonnerie dans un sanctuaire où sont déposées les offrandes aux loas et les accessoires sacrés du Houngan ou de la Manbo.
  • PERISTYLE : Temple vaudou ouvert où se déroulent les danses. 
  • POTOMITAN : ou poteau-mitan, pilier sacré planté au milieu du péristyle et par lequel arrivent les loas. 
  • PWEN : Puissance surnaturelle. 
  • RANGER : Verbe qui indique l’action d’ensorceler un objet.
  • RASIN : Musique des cérémonies vaudou. 
  • REPOZWA : (Reposoir) Emplacement où un Loa réside.
  • ROUMBLER : Appeler les loas avec des battements de tambours.
  • SIPEN : Deuxième grade dans l’initiation vaudou. (Hougan sipen, Mambo sipen)
  • VEVE : Les vévés sont des dessins rituels. Ces symboles magiques représentent les attributs du loa qui a été appelé pour la cérémonie; tracés à même le sol avec de la farine ou des cendres, ils seront inéluctablement effacés par les pieds des danseurs. 
  • VILLE AU CAMP : Capitale sous-marine des loas. 
  • VODOUSIAN : Adepte du vaudou. 
  • WANGA : Arme magique ordinaire 
  • ZAMBOS : Métis indien et noir. 
  • ZOBOPS : Sorcier
  • ZOMBIE : Personne considérée comme décédée qu’un sorcier a partiellement ressuscitée pour lui faire exécuter des travaux pénibles.

ANNEXE 3 / « Glossaire du Vaudou ». Référence : Alfred Métraux, « Le Vaudou haïtien » (Éditions Gallimard, 1959). 

[NOTE DE RBO / Sur le plan lexicographique, l’on observe que l’auteur a intégré dans son glossaire des termes de la langue usuelle qui ne font pas partie du vocabulaire spécialisé du vodou. Exemples : « acassan », « akra », « cassave », « clairin », « macoute ». Toutefois il consigne la « migration sémantique » de certains termes de la langue usuelle vers un sens particulier dans le vocabulaire spécialisé du vodou. Exemplse « canari », « escorte », « engagement », « manger ».

Abobo

Acclamation rituelle qui ponctue la fin des chants rada ou exprime l’enthousiasme religieux. L’exclamation est accompagnée parfois du bruit que l’on produit en frappant la bouche avecles doigts.

Acassan

Bouillie fort appréciée, préparée avec de la fécule de manioc et consommée avec du lait et du sucre.

Aguida

Archet dont on se sert pour battre le tambour « second » de la batterie rada.

Ago

Exclamation rituelle dont le sens est « attention ! »

Aouessan

Sautoir en soie porté par les hounsi kanzo.

Aïzan

Frange faite avec les fibres du palmiste (Oreodoxa regia). L’aïzan a le pouvoir d’écarter le mal, c’est pourquoi, est porté par les initiés lorsqu’ils sortent de leur retraite. L’aïzan est souvent suspendu au linteau des portes du houmfò, au « poteau-mitan » ou à d’autres objets sacrés. Il recouvre parfois les offrandes.

Aïzan chiré

Effrangement rituel des feuilles du palmiste qui s’effectue au début d’une cérémonie. L’opération s’accompagne de chants de circonstance et se termine par le baptême rituel du talisman.

Akra

Beignet fait de farine de manioc ou de malanga.

Assein

Tige de fer surmontée d’un petit plateau rond. Il est planté devant l’autel et sert de support à des bougies. Au Dahomey, où l‘assein représente les ancêtres, il est un accessoire de culte fort important.

Asson

Hochet du houngan et de la mambo, fait d’une calebasse recouverte d’un filet dans les mailles duquel sont prises des graines de porcelaine ou des vertèbres de serpent.

Assoto

Tambour de grande taille frappé par plusieurs tambourinaires qui dansent autour de lui. C’est un objet sacré dont la fabrication s’accompagne de longues cérémonies. Il est habité par un loa et pour cette raison est fréquemment habillé.

Atoutou

Boulette de farine brûlante que les initiés serrent dans leur main à la fin du boulé-zin qui termine la période de réclusion.

Bagui

Chambre du sanctuaire où se trouve l’autel des loa.

Baka

Génie malfaisant. Serviteur surnaturel des sorciers.

Banda

Danse de la catégorie Martinique qui est exécutée par les loa Guédé.

Batterie

Terme qui désigne en Haïti les tambours de l’orchestre.

Bohoum

Rite funéraire qui consiste à frapper avec des baguettes des calebasses recouvrant une écuelle pleine d’eau.

Boko

Ce terme, dérivé du mot fon bokono (prêtre), s’applique généralement au houngan qui pratique la magie noire, mais est souvent employé pour désigner le prêtre vaudou. Le boko est aussi un guérisseur.

Boula

Le plus petit des tambours rada.

Boulayer

Tambourinaire qui bat le boula.

Boulé-zin

Cérémonie dans laquelle des pots en terre, dans lesquels on fait cuire des offrandes sont enduits d’huile et chauffés jusqu’au moment où l’huile s’enflamme. Le boulé-zin est une cérémonie polyvalente qui fait partie des rituels d’initiation, de consécration et des rites funéraires. Le feu est censé « chauffer » les loa et leur donner plus de force et de vigueur. On expose également les sacra aux flammes des zin.

Bossal

De l’espagnol basai qui signifie « sauvage, indompté ». Ce mot s’applique aux loa qui se

manifestent pour la première fois dans une personne et aux hounsi qui n’ont pas encore terminé leur initiation.

Canari

Grande jarre consacrée et cassée pendant les rites funéraires. Les débris du canari sont jetés dans un carrefour. Le rite du « casser canari » est répandu surtout dans le Nord d’Haïti.

Caprelata

Charme magique.

Caprelateur

Magicien qui prépare les caprelata.

Cassave

Galette de manioc.

Chapiteur

Individu (souvent un boko) qui pratique la divination en interprétant un passage d’un livre

pieux, choisi au hasard.

Choual

Forme créole du mot « cheval ». Personne possédée par un loa.

Clairin

Rhum blanc bon marché.

Combite

Groupe de paysans travaillant en commun au son de la musique.

Croisignin

Littéralement : « croix-signer ». Tracer avec de la farine ou toute autre substance une croix sur un objet rituel ou une personne.

Caye

Mot créole signifiant maison.

Caye-mystère

Maison des esprits ou loa. Synonyme de houmfô ou sanctuaire.

Chansy

Hochet en fer blanc.

Dahomey-z’épaules

Danse rapide qui s’exécute, le haut du corps droit, avec des rotations d’épaules suivant le rythme des tambours.

Divino

Devin. Houngan spécialisé dans la divination.

Djévo

Chambre d’initiation.

Dossa

Fille née après des jumeaux.

Dossou

Enfant né après des jumeaux.

Eau-sirop

Mélange fait avec du sirop de batterie (sirop tiré de la canne à sucre) et de l’eau.

Escorte

Groupe de loa qui accompagne un loa important. Ce mot a parfois le sens de « famille » de loa.

Engagement

Pacte qui lie une personne à un mauvais esprit.

Gnamelle

Bac en bois dans lequel on prépare les « bains » ou dans lesquels on sert à manger aux loa.

Gombo

Nom donné dans le nord d’Haïti aux cérémonies en l’honneur des loa ou « saints ». 

Govi

Cruche dans laquelle on fait descendre les loa et qui contient des esprits.

Gros-bon-ange

Une des deux âmes que chaque individu porte en lui.

Houngan

Prêtre vaudou.

Hounguenikon

Chef de chœur dans une société vaudou. C’est l’homme ou la femme (appelée aussi « reine chanterelle ») qui « envoie » les chants et qui les arrête. Elle assiste le prêtre et le remplace quand il est possédé ou lorsqu’il ne peut, pour une raison quelconque, conduire toute la cérémonie.

Hounsi

Homme ou femme qui a passé par les rites d’initiation et qui assiste le houngan ou la mambo.

Hounsi-kanzo

Hounsi qui a passé par les rites d’initiation.

Hounto

Esprit des tambours et aussi le plus grand des tambours de la « batterie » rada.

La-place

Titre que porte dans une confrérie vaudou, le maîtres des cérémonies. Armé d’un sabre ou

d’un coupe-liane (machette), il conduit les processions, rend les honneurs aux loa, et assiste l’officiant.

Loa

Être surnaturel dans le vaudou. Ce mot est généralement traduit par « dieu », « divinité ». En fait, un loa est plutôt un génie, un démon ou un esprit.

Loa-racine

Esprit ancestral hérité dans une famille.

Macoute

Sacoche en feuilles de latanier qui fait partie de l’accoutrement habituel des paysans.

Mambo

Prêtresse du vaudou.

Manger

Offrandes de nourriture.

Manger-dyo

Offrande utilisée dans les rites de consécration. Elle consiste en patates, ignames, malangas, mirlitons, maïs moulu, le tout mélangé et arrosé de sirop et d’acassan. On se sert aussi, dans les rites de sacralisation, de maïs, de cacahuètes grillées et de morceaux de cassave.

Manger Guinin

Nourritures offertes aux loa rada. Le manger-guinin ne semble pas différer du manger-dyo.

Manger-loa

Cérémonie destinée à nourrir les loa auxquels on offre des sacrifices d’animaux et des nourritures diverses.

Manman

Le plus grand des tambours de la « batterie » rada.

Marassa

Jumeaux divins.

Mazanga

Loup-garou qui déterre les morts dans les cimetières.

Masisi

Homosexuel, inverti.

Monter

Ce verbe est employé dans la possession lorsqu’on parle d’un loa qui descend sur un fidèle.

Nago

Nom que les Fons donnent aux Yoruba.

Nom-vaillant

Nom rituel donné à un houngan ou à une mambo à la fin de son initiation.

Ogan

Cloche en fer à battant extérieur. L’ogan peut être un morceau de fer que l’on frappe avec

une tige de métal.

Autel en maçonnerie dans un sanctuaire. On. Y dépose les cruches sacrées, les pierres des esprits, leurs attributs et les accessoires du houngan ou de la mambo. C’est sur le que

l’on place les offrandes faites aux divinités.

Péristile

Annexe du houmfo ayant l’aspect d’un grand hangar ouvert sur les côtés. C’est là que se

déroulent presque toutes les cérémonies vaudou et qu’ont lieu les danses rituelles.

Pititt-fèy

«Petite-feuille» — membre d’une société vaudou.

Placer-nanm

Cérémonie qui consiste à consacrer un objet, en particulier un tambour.

Point

Terme magico-religieux signifiant « puissance surnaturelle », « force magique », « effluve

mystique ». Le « point » peut être un charme ou un esprit qui exécute les volontés d’un sorcier.

Poteau-mitan

Pilier situé au centre du péristyle et considéré comme le chemin des esprits. C’est un objet

éminemment sacré.

Pot-tête

Pot contenant les cheveux, les poils et les ongles d’un initié.

Rada

Nom dérivé de la ville d’Allada au Dahomey. Nation de loa, rituel suivi pour les loa de cette catégorie.

Ranger

Verbe employé pour désigner l’action d’ensorceler un objet.

Reposoir

Arbre ou tout autre emplacement où un loa est censé résider.

Roumbler

Appeler les loa par des battements de tambour.

Ségond

Tambour moyen de la batterie rada.

Service

Cérémonie en l’honneur des divinités vaudou.

Ti-bon-ange

Une des deux âmes de chaque individu.

Ventailler

Geste rituel consistant à faire tournoyer des oiseaux à bras tendu.

Vèvè

Dessin symbolique représentant les attributs d’un loa, que l’on trace sur le sol avec de la farine de maïs, de la cendre, du marc de café ou de la brique pilée.

Vlanbindingue

Membre d’une société secrète de sorciers.

Yanvalou

Danse exécutée, le corps penché en avant, les mains posées sur les genoux pliés et qui s’accompagne d’ondulations des épaules.

Zobop

Membre d’une société secrète de sorciers.

Zombi

Individu dont un sorcier a enlevé l’âme et qu’il a réduit en servitude. Le zombi est en quelque sorte un mort-vivant.

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