Le Point | Lyonel Trouillot partage sa vision contrastée de la situation en Haïti : entre l’envie de partir et le désir de rester

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Invité d’honneur au Salon du Livre Haïtien, l’écrivain de Port-au-Prince, Lyonel Trouillot, partage son quotidien sous la menace des gangs, tout en explorant le rôle crucial de la culture.

L’écrivain renommé de Port-au-Prince, Lyonel Trouillot, était l’invité d’honneur du salon du livre Haïtien à Paris. Dans un entretien exclusif avec Le Point, il dévoile les défis quotidiens auxquels les Haïtiens sont confrontés, oscillant entre le désir de partir et l’aspiration à rester malgré les menaces des gangs.

Le Quotidien sous menace

Lyonel Trouillot expose sans détours la réalité difficile qui règne dans sa ville natale. Les gangs exercent une pression constante, mettant en péril la vie quotidienne des habitants. Cependant, l’écrivain souligne que malgré cette atmosphère tendue, de nombreux Haïtiens sont déterminés à rester et à lutter pour un avenir meilleur sur leur terre natale.

Veilleuse du calvaire, nouveau roman de Lyonel Trouillot, repéré dans sa première liste par le prix Fémina, donne voix à une femme témoignant de ce que fut, et de ce qu’est devenue, une colline du haut de la ville. Autrefois, la nature étincelante et les oiseaux faisaient de ce lieu un paradis, puis vinrent « les chasseurs, les arpenteurs, les notaires, les banquiers, la loi, le pouvoir, l’ordre, la bienséance, la torture, le viol, les conventions » et une OPA immobilière l’a ravie à ceux qui aimaient s’y aimer, nous raconte ce roman. On y rencontre un soi-disant major allemand, un couple de jeunes amoureux et un autre dont le mari bat sa femme. Toujours, chez Trouillot, les femmes sont courageuses et porte-parole, veilleuses se transmettant le flambeau des récits passés et présents, ainsi celui-ci, que va transcrire un « chroniqueur chauve », écrit Trouillot se moquant de lui.

Mais son art de « faire des histoires une histoire » est ici une fois encore à l’œuvre. Il continue de donner voix aux sans-voix dans Moi, un autre texte (en français et en créole) où il donne parole à l’intériorité des siens. Et à cette même maison d’édition (Atlantiques déchaînés), dans la lignée des textes qu’il avait rassemblés pour Haïti parmi les vivants (Actes Sud-Le Point), après le séisme de 2010, il a coordonné les plumes d’écrivains cette fois confirmés, publiant leurs « témoignages littéraires sur la crise politique en Haïti » : Nouvelles du peyi lòk. À l’occasion de son séjour parisien comme invité d’honneur de la dixième édition du Salon du livre haïtien, Lyonel Trouillot nous raconte le quotidien du professeur, écrivain, activiste littéraire et… as du bâton ! Les visiteurs du salon du livre l’ont vu sur scène enseigner cet art martial, entre deux lectures de la grande poésie haïtienne…

Le Point : Vous arrivez de Port-au-Prince pour le salon du livre haïtien, dans quel état d’insécurité est la ville que vous avez quittée ?

Lyonel Trouillot : Les kidnappings au quotidien. Des quartiers attaqués par les gangs. L’insécurité alimentaire pour les plus démunis. La violence des armes et toutes les formes de violence auxquelles est soumise la population. L’inquiétude, l’angoisse même.

Votre quotidien de professeur, mais aussi d’écrivain, à quoi ressemble-t-il ? Et celui de vos proches ?

L’angoisse pour les proches quand ils doivent sortir. On guette leur retour comme un miracle. Les cours, je ne descends plus les donner à l’ENS [École normale supérieure où Lyonel Trouillot enseigne le romantisme, NDLR]. Je sors une fois par semaine pour aller animer mon émission sur radio Kiskeya. La plupart du temps, je reste chez moi d’où j’entends le bruit des balles. On essaie quand même de se réunir de temps en temps entre amis pour discuter et se convaincre qu’on est encore vivants.

Dans une de vos récentes publications, Moi, vous donnez la parole à un jeune révolté, qui a sombré dans la violence : comment se mettre dans la peau de ces jeunes sans futur, dont une partie terrorise la population ?

Quand la colère éclate, on a forcément peur. Mais comme pour tout ce qui est social, il fallait poser la question des conditions de production de cette colère. Le personnage de mon texte, je ne le vois pas comme membre d’un gang lancé contre la population. Sa colère est forte mais elle vise plus les pouvoirs (politique, économique, racial). Ce n’est pas une colère dont les petites gens sont les premières, voire les principales victimes, comme c’est le cas, hélas, avec les gangs.

Accédez à l’intégralité de l’entretien sur Le Point en cliquant sur ce lien ci-dessous.

Lyonel Trouillot : « Nombreux les Haïtiens qui veulent partir, mais nombreux aussi ceux qui veulent rester » (lepoint.fr)

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