De nouvelles Révolutions s’imposent
Ernst Weche
« L’ambition collective est la clef du succès et il n’existe aucune fatalité du sous-développement. » (Landing SAVANE in « Mon ambition pour le Sénégal », 1993)
Conception graphique : Ernst Weche
Illustration de couverture : Panier à crabes, peinture de Mérès Weche Saisie électronique et mise en page : Créations EW
Impression : lulu.com
Editeur : lulu.com
Déjà paru :
Reconstruire la vie en Haïti (environnement-développement), un défi de société, 2016.
À la mémoire de mes parents, qui furent mes héros et mes modèles, et qui m’ont inculqué les plus belles valeurs familiales et citoyennes
À la mémoire de mon frère, Mérès, parti trop tôt, qui alimenta en moi, continuellement et sans faillir, l’amour de notre chère Haïti à qui il a consacré la majorité de ses œuvres artistiques et littéraires
À l’attention de la jeunesse haïtienne en qui je place de l’espoir pour des lendemains meilleurs
Avant-propos
– Quand la faim tenaille nos enfants dont le seul crime est de vouloir rester en vie, – Quand les roues de la machine agroalimentaire s’enlisent davantage chaque jour, – Quand le goût d’apprendre reste inassouvi par absence et manque d’écoles ou de matériels scolaires appropriés,
– Quand les droits humains élémentaires, ou tout simplement le droit à la vie, sont bafoués et que leur sont substitués ceux de la cupidité, de l’irresponsabilité et de l’incompétence,
– Quand l’oligarchie se donne des airs de démocratie,
– Quand gouverner signifie se servir et non servir,
– Quand le vivant végète et la mort est son seul choix,
– Quand la nourriture, le logement, l’énergie et l’eau se font de plus en plus rares,
Alors, trois attitudes s’offrent au citoyen :
1- Accepter son sort, s’adapter, tant bien que mal, plus souvent mal que bien, en d’autres termes se résigner ;
2- Gémir sur son sort, se plaindre, désapprouver, contester ;
3- Refuser son sort et œuvrer, individuellement et collectivement, à l’amélioration des conditions de vie. Autrement dit, contrebalancer l’inertie par l’initiative et le dynamisme collectif.
C’est la troisième voie que nous proposons d’emprunter, à condition de nous débarrasser des tares qui nous empêchent d’avancer et procurer ainsi de l’espoir pour les générations futures.
Avertissements
1. La première section de cet ouvrage vise une réflexion sur les mœurs, coutumes et traditions en Haïti, en cherchant à faire comprendre ce qu’est l’enjeu du progrès socio-économique rêvé, susciter le goût d’un pays meilleur, inciter à des actions concrètes pour y parvenir.
L’emploi de ‘’Nous, Ils et Haïtiens’’ désigne la majorité, et non la totalité. Force est de signaler qu’un certain pourcentage d’haïtiens ne sont que partiellement visés par les tares dont il est question dans cet ouvrage.
2. Notre façon d’aborder le drame haïtien n’est pas une fin en soi. Le lecteur a toute la latitude pour enrichir notre réflexion, soit au niveau de l’identification des maux de notre société, soit au niveau des remèdes à y apporter.
INTRODUCTION
Haïti fait les frais d’un grave problème de société et de mal-développement, exacerbé depuis les quarante dernières années. Plusieurs facteurs se combinent pour expliquer les difficultés que rencontre Haïti à sortir du cycle de la pauvreté et accéder au rang de pays en développement.
Hélas! Les gouvernements successifs sont toujours passés à côté des politiques devant mettre le pays sur les rails du développement.
Pourtant, Haïti est un pays potentiellement riche, en considération de ses ressources minières, ses atouts touristiques, ainsi que son patrimoine culturel et le génie de sa population. Il peut faire mieux dans le classement mondial. Tout est une question de gestion, de transparence et d’équité, sur fond d’esprit patriotique, de la volonté et de l’orgueil (quand on se compare avec les voisins, on se désole).
Malgré le constat désolant, il y a lieu de garder l’espoir d’un futur viable. Il faut réinventer le pays. Toutefois, Haïti ne peut être réinventé sans révolutionner nos mœurs, us et coutumes perpétués depuis trop longtemps. Il faut préparer des hommes et des femmes qui cultivent le patriotisme, le civisme, la moralité, la justice sociale, la tolérance, la démocratie, la solidarité, le respect de l’environnement.
Notre contribution est de proposer cet ouvrage qui s’adresse aux haïtiens de toutes les couches sociales, en vue de susciter une prise de conscience nationale, des débats constructifs, et non les sempiternelles délibérations d’intellos qu’on ne peut se permettre, quand un pays se meurt.
À notre avis, quatre grandes révolutions sont impératives pour une nouvelle Haïti. Ainsi, l’ouvrage se divise en quatre sections :
Section 1 : La nécessaire révolution mentale.
Dans cette section, notre ambition est de susciter une prise de conscience civique : nous sommes les premiers responsables de nos maux et les possibilités de nous en sortir ne relèvent que de nous. Dans cette perspective, nous pointons du doigt quelques-unes des tares dont nous sommes porteurs et dont nous devons nous débarrasser pour un avenir meilleur.
Section 2 : La nécessaire révolution éducative
Dans cette section, notre ambition est de proposer l’éducation comme principal moyen de modifier les attitudes et comportements innés et/ ou appris (désignés comme des tares dans le présent ouvrage), et qui risquent de se répéter, d’une génération à l’autre. Il faut parvenir, par l’éducation, à rompre ce cercle vicieux, en remettant en cause les schèmes de pensée, les idées reçues, les façons de faire et modes de vie indésirables des générations précédentes.
Chez les enfants, notamment, le système éducatif doit favoriser la structuration de la pensée et des formes d’expression, tout autant que le développement de l’esprit critique, les règles de la vie de groupe, le sens civique et moral, etc.
Section 3 : La nécessaire révolution agro-environnementale
Dans cette section, notre ambition est de proposer des voies vers un développement durable, donc écologiquement viable, économiquement rentable, socialement juste et humain.
Considérant qu’il faut placer le secteur ‘’agriculture – environnement’’ au premier plan des initiatives visant à contribuer au relèvement économique du pays… |
Les interventions à mettre de l’avant, dans ce secteur, doivent être capables de prendre racine et de croître dans la société.
Section 4 : La nécessaire révolution énergétique
Dans cette section, notre ambition est de proposer des alternatives accessibles à la population et capables de prendre racine dans nos mœurs et coutumes, tout en visant à modifier des façons de faire, qui se répètent, d’une génération à l’autre.
SECTION I :
LA NÉCESSAIRE RÉVOLUTION MENTALE
Pourquoi sommes-nous dans ce bas-fond Après 219 ans d’existence comme peuple dit «libre» ? |
Après trois siècles d’asservissement, Haïti a pris naissance en 1804, au prix d’une Révolution contre le système en place à Saint-Domingue. On peut bien s’enorgueillir d’être la ‘’Première république noire libre du monde’’; mais là s’arrête notre fierté. L’orgueil doit nous amener plus loin … (Quand on se compare avec nos voisins, on se désole). Il est impérieux de relever Haïti et le mettre sur les rails du développement, ne serait-ce que pour honorer la mémoire des pères et mères fondateurs. Les sacrifices qu’ils ont consentis ne doivent pas demeurer vains. Certains observateurs étrangers vont jusqu’à ironiser que les générations successives ne méritent pas les actes de bravoure que les héros de l’indépendance ont consentis.
Nous avons aujourd’hui un pays dont les indicateurs socio-économiques et les indices de développement humain sont au plus bas. Ce qui retient l’attention, ces dernières années, ce sont les dérives d’une société en mal de vivre, lesquelles se traduisent en d’interminables luttes pour le pouvoir, des scènes de pillage dans les rues, des scènes de violences, des enlèvements (kidnapping), en fait le chaos.
C’est très sain que des groupes politiques puissent exprimer des idées divergentes et qu’une population puisse manifester ses frustrations; mais doit-on perpétuer la culture du « Ôte-toi que je m’y mette » et banaliser la vie, donc s’auto-détruire ?
De tout temps, les Haïtiens ont toujours placé leur avenir entre les mains (et dans les poches) de leurs dirigeants. Ils vivent toujours dans l’attente d’un sauveur. Force est de constater que, plus les hommes au pouvoir changent, plus le pays recule, et de façon exponentielle ces dernières années. Malgré tout, l’opinion publique croit que les problèmes d’Haïti peuvent être résolus par des élections.
Diverses options sont proposées pour le décollage d’Haïti, entre autres la démocratie à l’occidental comme alternative à la dictature, le transfert de technologies et de connaissances, etc. mais, l’expérience d’Haïti en ces domaines s’avère décevante. D’une part, le pays s’enlise dans une expérience démocratique depuis les trente-six dernières années (l’ère post-duvaliériste); d’autre part, l’aide étrangère n’est parvenue qu’à transformer Haïti en un cimentière de petits projets sans réelle orientation vers des lendemains meilleurs.
(voir en annexe : Faut-il refonder la Nation haïtienne).
Face aux grands défis auxquels fait face Haïti, nous croyons fermement qu’une Révolution haïtienne (mentale) doit donner suite à la Révolution de Saint Domingue (socio-politique). Il ne s’agit pas ici de rééditer le ‘’koupe tèt, boule kay’’, mais d’un renversement des mentalités, mœurs et coutumes perpétués depuis le début de la colonie et qui, s’ils ne sont pas conjurés, risquent d’hypothéquer à jamais les chances réelles de progression du pays vers le développement socio-économique.
L’enjeu est certes de taille; il s’agit de réinventer Haïti en tant qu’espace politique, économique, social et culturel viable et redéfinir son rapport au reste du monde. Ce repositionnement ne peut se faire sans une véritable révolution mentale.
Notre ambition est de contribuer à la volonté de relever ce grand défi, en nous conviant d’abord collectivement à un vaste examen de conscience.
CES TARES DONT IL FAUT SE DÉBARRASSER POUR AVANCER
Nous sommes façonnés par notre Histoire qui permet de comprendre beaucoup de nos gestes, actions et façons de pensée aujourd’hui. Il résulte de nos origines africaines, notre passé de colonisés et d’esclaves une structure identitaire spécifique qui nous caractérise et influence aussi bien nos décisions que l’ensemble de nos comportements.
Pour trouver ensemble des réponses aux interrogations posées, nous allons passer en revue (de manière non exhaustive) quelques-uns de nos traits identitaires qui [n’assurent ni cohésion sociale, ni croissance économique partagée, ni bien-être social généralisé]1. Ce sont de véritables tares chez nous, en tant qu’Haïtiens, et qui au fil du temps sont devenus de véritables grains de sable dans l’engrenage du développement de notre pays.
L’accommodation, à vision individualiste
Nous avons une très grande facilité à nous adapter dans des situations anormales. Sur quelle base élisons-nous nos dirigeants, et qu’exigeons-nous d’eux ?
À la recherche ou dans l’attente d’avantages personnels, il nous suffit trop souvent de quelques slogans (parfois vides de sens), lancés par des démagogues jouissant d’une certaine popularité ou imposés, quand les votes ne vont pas tout simplement aux plus offrants (l’offre à mille gourdes per capita est bien connue).
Nous nous accommodons de la faible disponibilité du courant électrique et des fréquentes coupures là où il existe, le «black-out», même si nous payons à l’État le service d’électricité. Au lieu de revendiquer ce droit collectif, nous nous tournons vers des solutions individuelles : la génératrice, l’inverter et le panneau solaire.
Pour faire face à l’insécurité, nous nous procurons des voitures blindées, nous construisons de véritables forteresses, nous embauchons des agents de sécurité; autant de palliatifs individuels, qui ne permettent pas de régler le problème. Le phénomène de kidnapping terrorise la population, et nous nous plions aux exigences des bandits, en acceptant de renflouer leur caisse. Il en résulte la décapitalisation et son corollaire, la ruine des familles.
Depuis plus d’une année, nous contournons les blocages routiers institués par les gangs, isolant la capitale de plusieurs régions du pays, en optant pour l’avion, quel qu’en soit le coût. D’ailleurs, même les autorités n’osent pas s’y aventurer; qui plus est, la ministre de la Justice en poste les déclare ‘’territoires perdus’’.
Nous nous accommodons des routes défoncées et cahoteuses, des voyages périlleux, même si nous en payons les frais en pertes de vies humaines et matérielles. Au lieu de mettre les responsables étatiques face à leurs responsabilités, nous choisissons de contourner le problème en nous dotant de voitures grand format capables d’affronter les conditions routières périlleuses.
Trois principes sont à intégrer : 1) Chercher à résoudre les problèmes au lieu de chercher à les contourner. 2) Revendiquer le droit à la vie, au lieu de se contenter de survivre. 3) Élire les gens qu’il faut, à la place qu’il faut.
L’auto-victimisation et l’inconscience
Cet état d’esprit nous amène généralement à croire que les événements et les échecs qui se produisent sont le résultat de ce que fait quelqu’un d’autre, sans remettre en question nos propres actions, attitudes et comportements. C’est trop souvent la faute des autres, ‘’l’International’’, si les choses vont mal en Haïti. Autant de prétextes pour justifier des échecs. Il en résulte un manque de confiance et de contrôle sur notre propre vie; ce qui rend difficile le progrès. Il faut savoir assumer ses responsabilités pour avancer. Il faut sortir de cette logique où tous nos échecs sont imputables au ‘’blanc’’. Le ‘yo’ est un prétexte trop facile pour le laisser-aller, pour déresponsabiliser le ‘nou’.
Nous devons admettre être, collectivement, les premiers responsables des malheurs de notre pays, n’en déplaise à ceux qui se trouvent une excuse du fait de n’avoir jamais exercé de pouvoir public. Bien sûr, les orientations que privilégient « les pays dits amis d’Haïti » ne sont pas toujours dans nos intérêts. Mais, il revient à l’Haïtien de savoir ce qu’il veut et de l’exprimer à son vis-à-vis. Trop souvent, il suffit aux dirigeants, négociateurs ou dirigeants d’organisations d’entrevoir des intérêts personnels dans l’aide étrangère, au détriment de la majorité. Si vous ouvrez la porte de votre demeure à un étranger, vous ne pouvez pas le reprocher d’y occuper toute la place, de vous dire comment y vivre, et même vous fait fuir des lieux. Comme le dit notre proverbe créole : sòt ki bay, enbesil ki pa pran.
Faux nationalistes et hypocrites, pour la plupart, ils rejettent à rideau levé l’intrusion du ‘’blanc’’ dans les affaires du pays, mais courtisent ce dernier en coulisses pour qu’il intervienne en leur faveur au moment opportun. Ils adorent être invités à festoyer dans les ambassades. Ils attendent toujours le coup de fil des envoyés spéciaux, sur le terrain, des pays ‘’faiseurs’’ et ‘’tombeurs’’ de présidents. Combien de politiciens réfuteraient le ‘’tweet’’ du blanc pour le placer au pouvoir ? Berner la population, par tous les moyens, c’est leur point fort. On connaît tous le principe de monnayer les votes et armer des gangs pour intimider les adversaires, profitant en cela de la pauvreté et du faible niveau d’éducation des électeurs.
Il faut comprendre que la plupart de ceux qui ont occupé ou occupent encore des postes de pouvoir aux trois niveaux, exécutif, législatif et judiciaire, ne sont pas recyclables pour un autre Haïti; ils sont à jeter après usage. Sans présumer de la culpabilité ou de l’innocence de ceux actuellement sanctionnés par leurs pays de prédilection, souhaitons qu’ils éprouvent du remords d’avoir fait profiter ces dits pays des fortunes qu’ils ont amassées dans l’exercice de leurs fonctions et/ou de manière illicite. Hélas ! ils doivent être désormais condamnés à partager avec la population le piètre état des mêmes services publics qu’ils fuyaient et qui auraient été tellement meilleurs s’ils avaient contribué à doter le pays qui les a vu naître d’infrastructures de développement. Puissent-ils enfin se rendre à l’évidence que l’Haïtien n’a qu’un seul pays qui ne le reniera jamais ! (nou pa vrèmen gen peyi derechanj).
Le bluff ou la magouille
Le bluffer ou magouilleur est un marchand d’illusion. Ce terme est emprunté au jeu où le succès d’un joueur repose sur la tromperie des autres joueurs à propos de ses forces et ses possibilités réelles. Il utilise tous les subterfuges pour être crédible face à ses interlocuteurs et que ces derniers se fassent avoir.
Le magouilleur cherche notamment à contourner les lois et les règles. Il en résulte des procédés, manœuvres et tractations douteuses, notamment dans le monde politique où les intrigues ont souvent force de loi.
Force est de constater que la magouille s’est infiltrée dans toutes les sphères d’activité, notamment dans la gestion des affaires de l’État, où le principe de reddition de comptes est totalement absent.
Le ‘caméléonisme’ ou le non-respect des engagements
À l’image du reptile appelé caméléon qui peut changer de couleur selon son humeur, son environnement ou sa communication avec ses congénères, l’Haïtien peut facilement changer d’opinion, de conduite selon ses intérêts personnels. La scène politique fourmille d’exemples, en ce sens. Par cupidité et ambition, certains ne se gênent pas de changer, du jour au lendemain, d’allégeance ou de camp politique, reniant même les principes qu’ils ont défendus auparavant avec la plus grande ferveur. Un défaut de conviction qui leur vaut le sobriquet créole ‘’abolotyo ou abolocho’’.
Le clientélisme (clanisme, népotisme)
L’haïtien a souvent tendance à ne se sentir bien qu’entre gens du même clan, de la même famille, avec peu d’ouverture aux autres. Cela peut prendre la forme de regroupements très formels ou informels, comme c’est souvent le cas en politique, en affaires, ou dans le secteur de l’emploi. En poste de responsabilité, surtout dans l’appareil de l’État, nous ne voyons aucun problème à n’embaucher que des membres de notre famille ou des proches amis.
Et, quelquefois, cette solidarité familiale ou amicale se manifeste au détriment de la société globale, notamment lorsqu’il s’agit de préserver les positions de pouvoirs, entraînant alors différentes déviances, telles que la complaisance, l’impunité, la corruption, etc.
Le cloisonnement social
Nous vivons dans une société cloisonnée :
* citoyen urbain (moun lavil) versus citoyen rural (moun andeyò), * intellectuel versus analphabète,
* noir versus mulâtre,
* français versus créole,
* chrétien versus vodouisant,
* etc.
Un tel cloisonnement ne manque pas d’entraîner des conséquences socio économiques désastreuses, entre autres, des rapports dominant-dominé qui ouvrent la voie à l’exclusion.
Mes congénères nés en milieu rural voient leur acte de naissance scellé ‘’Paysan’’, comme un animal étampé au fer rouge. Une condamnation qui hypothèque même les chances d’accéder aux études supérieures, à moins de quitter sa région. Le cloisonnement urbain / rural se reflète d’abord dans la répartition du budget national, les villes s’en accaparant presque la totalité, au grand dam des régions rurales.
Une autre plaie de notre société, c’est la situation née du ‘colorisme’. Cette forme de discrimination avoisinant le racisme, est basée sur les nuances de l’épiderme et la texture des cheveux. C’est une tare de notre société, en vertu de laquelle des avantages ou privilèges (économiques, sociaux et même judiciaires) sont accordés aux Haïtiens ayant la peau claire (minoritaire), au détriment de ceux à teint foncé (majoritaire). L’effet pervers de cette situation, c’est que beaucoup d’Haïtiens à peau foncée, se croyant inférieurs, cherchent à ressembler physiquement à leurs opposés.
D’autre part, la magouille a une langue en Haïti, le français. C’est un instrument de domination, souvent utilisée pour réduire au silence et frauder les unilingues créoles.
La complaisance
La complaisance, chez l’Haïtien est à double connotation, positive et négative. L’Haïtien est naturellement indulgent, sympathique et serviable. Il est enclin à faire plaisir, pour des raisons soit familiales soit amicales. Toutefois, la complaisance nous amène trop souvent, notamment en matière de justice et d’application des lois, à nous conformer aux désirs, envies et sentiments d’autrui pour leurs intérêts personnels, ouvrant la voie à l’impunité et à la corruption.
Seuls l’application et le respect des lois, des normes et règlements peut garantir la stabilité et le progrès social. C’est une garantie contre l’anarchie et pour le contrôle de la corruption. ‘’L’enquête se poursuit’’ est devenue la norme en matière de justice quand des ‘’intouchables’’ sont concernés.
L’incohérence ou la contradiction
Nous aimons tous Haïti, mais cet amour ne s’accompagne pas toujours de fierté. À titre d’exemple, cet attachement à tout ce qui vient de l’étranger. Est-ce un complexe d’infériorité ? Si oui, il faut s’en débarrasser.
Nous avons toujours tendance à dévaloriser tout ce qui est produit localement, au profit d’articles importés, dont certains (tels que vêtements réutilisés, dits ‘’pèpès’’) sont considérés comme rebuts des pays d’où ils viennent. Un coup bas porté à nos artisans (tailleur, cordonnier, etc.) qui peinent à survivre.
Tout en clamant leur attachement au pays, plusieurs personnalités de divers milieux (politique, médias, etc.) ignorent qu’ils sont à contre-courant de l’amour du pays en exhibant régulièrement leurs survêtements griffés ‘’Boss’’, ‘’Nike’’ ou autres, achetés parfois neufs à prix parfois incroyables, ou acquis à rabais dans la filière de l’économie parallèle, ce au détriment des artisans locaux dont on peut apprécier la qualité de leurs réalisations.
Le constat est aussi désolant dans d’autres secteurs de la vie nationale, dont l’alimentaire où la diète à base de vivres et céréales locaux est, dans beaucoup de familles – surtout citadines – supplantée par les mets à base de produits ‘’étrangers’’, dont le spaghetti. Ce phénomène prend de plus en plus d’ampleur, au grand dam de la production nationale.
Que dire de ceux à qui Haïti a tout donné ou qui ont tout pris du pays, mais choisissent d’investir en République Dominicaine l’argent accumulé, de manière honnête ou non.
La coquinerie et la malignité
Selon plusieurs personnalités politiques, certaines ayant été au timon des affaires de l’État, font croire à la nécessité de proposer à la Nation une nouvelle constitution ou une réforme de celle en vigueur depuis 1987, la décriant comme une source d’instabilité, comme du sable dans l’engrenage de la bonne gouvernance. Les adeptes de cette thèse (surtout motivés par des intérêts strictement politiques), croient mordicus qu’il suffit de la modifier ou la remplacer pour que tout aille bien.
Est-ce la Constitution, le vrai problème ? Veut-on vraiment l’appliquer ? N’est-il pas question, plutôt, d’un inconfort face au respect des tenants et aboutissants de celle-ci ? Nous sommes des coquins, cherchant toujours à contourner les principes d’un ordre prescrit.
Le défaut de patriotisme
Ne confondons pas nationalisme et patriotisme. Il ne suffit pas d’aimer Haïti et de s’identifier haïtien pour se considérer patriote. À notre avis, quatre éléments contribuent conjointement au patriotisme : Nourrir un sentiment d’appartenance à son pays… S’approprier le pays … Se mettre au service de son pays … Habiter d’un esprit de sacrifice à l’égard de son pays. À chacun de mesurer son degré de patriotisme.
Le patriotisme est un sentiment très fort qui se résume, selon le Che, à ‘’La patrie ou la mort’’. C’est faire passer les intérêts de son pays avant les siens et d’être prêt à mourir pour les défendre. ‘’Traître à la patrie’’ est plutôt le caractère distinctif de bon nombre d’haïtiens qui se retrouvent dans des situations où ils auraient dû la défendre. Quand on pactise avec l’étranger au détriment des intérêts de la Nation, on ne peut pas s’accoler l’étiquette de patriote. Combien de fois n’a t-on entendu cette phrase de la bouche de politiciens et de gouvernants : ‘’Aucun sacrifice n’est trop grand pour mon pays’’. Foutaise !
On ne se trompe pas si l’on croit que très peu d’entre nous sont prêts à mourir pour défendre les intérêts de la Nation.
Les discours improductifs
Nous parlons beaucoup plus que nous n’agissons. Nous sommes passés maîtres dans les grands discours qui n’accouchent que de piètres réalisations. Ce qu’au Québec, on qualifie de ‘’grands parleurs, petits faiseurs’’. Nous sommes premiers de classe en envolée oratoire, mais derniers de classe en résultat concret.
Les plus grands parleurs, surtout les représentants de groupes politiques, font régulièrement le tour des médias, pour répéter les mêmes discours et proposer les mêmes solutions, qu’ils oublient sitôt arrivés à des postes de responsabilité.
Pour sa part, l’administration de l’État se caractérise par une répétition de réunions, colloques et assemblées qui ne sont qu’un gaspillage éhonté de ressources humaines et financières. Lors même où les meilleurs plans d’action en sortent, ils finissent par moisir dans des tiroirs sans avoir été mis en application, jusqu’aux prochains qui subiront le même sort.
La population néglige d’exiger de ses dirigeants, à tous les niveaux, une obligation de résultat.
L’étroitesse d’esprit
Tout au long de son histoire, Haïti a connu très peu de grands projets, donc très peu de visionnaires. Plusieurs des œuvres dont l’Haïtien s’enorgueillit ne sont que de piètres réalisations (quand on se compare, on se désole). L’Haïtien se contente du minimum soutiré de l’aide étrangère qui, au fil du temps et avec la complicité de nos dirigeants, a transformé notre pays, en un cimetière de petits projets, sans orientation vers un réel développement. L’ouvrier travaille au goût du maître d’ouvrage, dit-on. Si nous visons petit, nous obtenons petit.
Il faut oser mettre de l’avant des programmes-projets novateurs, ambitieux, prometteurs, susceptibles de mobiliser la participation de tous et faire naître l’espoir de lendemains meilleurs. L’étroitesse d’esprit produit des dirigeants à courte vue.
Il nous faut rêver grand, sans toutefois tomber dans la mégalomanie et l’utopie. -13-
L’exclusion socio-économique
L’indépendance durement acquise en 1804 n’a pas permis, hélas! de briser la stratification socio-économique existante. Les colons ont été chassés, mais depuis se répète la politique du ‘’Ôte-toi que je m’y mette’’ perpétuant le même système d’inégalité socio-économique d’alors. Les privilèges ont simplement changé de mains.
Le pouvoir politique, décisionnel et financier a toujours été concentré entre les mains d’une minorité appartenant à la classe politique et au secteur des affaires, laquelle prend en otage la grande majorité de la population; c’est ce qui fait d’Haïti l’un des pays les plus inégalitaires du monde, avec plus de 6 millions d’Haïtiens vivant en dessous du seuil de pauvreté de 2,41 $ US par jour, et plus de 2,5 millions vivent en dessous du seuil de pauvreté extrême de 1,12 $ US par jour.
Ce n’est certes pas le seul facteur qui ouvre la voie à la violence dans des poches de pauvreté, mais il faut en prendre compte face à l’expansion du phénomène des gangs qui gagnent de plus en plus de terrain.
L’improvisation
C’est l’opposé de la planification, laquelle est une des étapes essentielles d’une bonne gestion, que ce soit au niveau personnel ou au niveau du pays. Que de fois, nous nous aventurons dans des projets ou activités, sans planification préalable, avec des résultats minables.
Dans des situations pourtant urgentes, nous avons coutume d’agir en pompier. Une telle mode de gestion ne peut pas être une option dans la gouvernance d’un pays. Sans une bonne planification, on ne peut utiliser au mieux ses ressources. Il ne peut y avoir de développement sans une planification adéquate des projets envisagés. Sans objectifs clairs non définis à l’avance, on aboutit immanquablement au gaspillage de ressources et on ouvre la porte à la corruption.
Que de projets auraient pu faire passer Haïti à un autre niveau s’ils étaient correctement planifiés à l’avance, et si les fonds alloués n’étaient pas dilapidés.
L’indiscipline ou l’inconduite ‘’sociétale’’
C’est malheureusement l’une de nos marques de commerce, cet ensemble de troubles de comportement (non-respect de l’ordre ou le désordre) qui conduisent au chaos social. Sont légions les situations quotidiennes où les gens ne contrôlent pas leur comportement ou n’obéissent pas aux règles, niant tout bonnement l’autorité d’une personne ou d’une institution pour agir dans le déni de l’ordre établi. Que d’haïtiens sont revenus vivre en Haïti, après avoir résidé ailleurs, du seul fait qu’ils n’arrivent pas à évoluer dans un pays de loi et d’ordre. C’est pour eux le seul endroit au monde où ils sont libres de faire ce que bon leur semble, sans risque d’être apostrophés, réprimandés ou sanctionnés.
On n’a qu’à voir le système de circulation automobile dans le pays pour se faire une idée de l’ampleur de l’indiscipline et du désordre généralisé au sein de notre société.
Il est impérieux qu’un peuple intègre la discipline, en tant que mode de régulation des conduites, non pas tant par crainte de la punition que par respect de l’autorité morale et des principes établis.
L’individualisme et l’égocentrisme
La motivation de l’Haïtien repose sur le «JE», et non sur le «NOUS». Du plus haut niveau de la structure étatique jusqu’au dernier échelon, les mandataires ne sont motivés qu’à se servir et non servir. Il n’en est pas autrement dans les autres secteurs de la vie courante. L’Haïtien ne se préoccupe que de son bien-être individuel, parfois au détriment du bien-être collectif.
L’esprit collectif, le sens ‘’du collectif’’ n’est pas automatique chez l’Haïtien, trop souvent motivé par son ambition personnelle, sa réussite personnelle, sa protection personnelle. Nous avons touché cet aspect en référence au climat d’insécurité qui sévit au pays : l’instinct de protection est individuel, partant du premier citoyen, jouissant personnellement d’une extrême sécurité, pendant que la grande majorité de la population est aux abois, imperturbable, comme faisant sourde oreille à leurs cris de douleur.
Dans le même ordre d’idées, l’Haïtien qui voyage dans les pays développés, même s’il fait partie des structures de l’État, ramène au pays des idées de progrès individuel (aménagement, embellissement, etc.) qu’il n’appliquera qu’à ses propres besoins domestiques. Il n’est pas intéressé de reproduire les idées de progrès collectif (développement routier, aménagement urbain, structures de santé, etc.). On s’en fout, si l’on possède une voiture adaptée aux routes défoncées, une maison blottie derrière des murs de forteresse, les moyens de se faire traiter à l’étranger en cas de maladie. Et, en réponse à un système éducatif en débandade, on envoie ses enfants étudier à l’étranger.
L’esprit collectif produirait l’effet contraire : de bonnes routes, du courant électrique, de bons centres de santé et de bonnes écoles… au bénéfice de tous.
Vouloir pour soi-même, sans se soucier de la collectivité, une attitude immorale qui ne peut qu’engendrer de l’inassouvissement et ouvrir la porte de la corruption.
« L’ambition collective est la clef du succès et il n’existe aucune fatalité du sous-développement. » (Landing SAVANE in « Mon ambition pour le Sénégal », 1993)
L’intolérance
Nous passons beaucoup de temps à discuter et à débattre, mais nous ne tolérons pas les opinions contraires aux nôtres. Nos discussions sont le plus souvent de véritables dialogues de sourds où chacun cherche à parler plus fort que l’autre, ne l’écoute pas vraiment, rejette son point de vue. Chaque interlocuteur croit que son opinion est la meilleure et, le plus souvent la seule valable. Il cherche à l’imposer à l’autre comme étant la vérité absolue. Nous avons beaucoup à gagner en additionnant les idées et opinions de chaque interlocuteur. Du choc des idées, la lumière devrait jaillir.
Le spectacle de l’intolérance nous est servi à satiété par la classe politique. Nous n’avons qu’à suivre les débats radiophoniques et télévisuels, notamment depuis le vide occasionné par l’assassinat du président Moïse.
Dur, dur l’apprentissage démocratique entamé depuis près de quarante ans !!! -18-
La méfiance
La société haïtienne est souvent comparée à un panier où grouillent de multiples crabes qui peuvent s’attaquer avec leurs pinces, c’est-à-dire une bande d’individus qui se nuisent les uns les autres, l’un empêchant l’autre d’avancer, se déchirant continuellement entre camps et clans divergents, se doutant de la sincérité des uns envers les autres.
Beaucoup d’initiatives citoyennes de concertation et de mise en commun de ressources, d’ordre financier ou politique ont avorté, parce que la confiance fait défaut.
Le spectacle de méfiance le plus hideux ayant atteint son paroxysme, c’est la multiplication des accords sectaires, suivant l’assassinat du président Moïse. Une situation qui plonge le pays dans une crise politique qui perdure. Au moment d’écrire ces lignes, toutes les tentatives, non pas pour arriver à l’unanimité (objectif inatteignable), mais pour un consensus minimal, sont vouées à l’échec.
Si l’un ne peut faire confiance à l’autre, on ne pas s’étonner que la Nation n’avance pas.
« L’ambition collective est la clef du succès et il n’existe aucune fatalité du sous-développement. » (Landing SAVANE in « Mon ambition pour le Sénégal », 1993)
La médiocrité, la mesquinerie, le manque de rigueur, l’insouciance
L’haïtien a tendance à s’attacher à ce qui est petit, médiocre, à ce qui manque de grandeur, d’élévation. Il se trouve que beaucoup d’actions et de projets sont abordés avec un esprit borné, étroit. Certaines œuvres ou réalisations de haute valeur symbolique ont vraiment l’air minable.
Le goût de l’excellence et le sens de la perfection, ne sont pas des valeurs spontanées (elles doivent être incarnées dès l’enfance !).
L’opportunisme négatif ou la manipulation
Dans son sens positif, l’opportunisme traduit de l’ambition où de l’audace, la confiance en soi, la détermination, l’observation ou encore l’anticipation. Mais, sons aspect négatif prend le dessus chez l’Haïtien. qui tente souvent d’adapter son comportement et ses idées en fonction des circonstances et de ses interlocuteurs, de manière à toujours tirer parti d’une situation, même au détriment de l’autre. Pour obtenir gain de cause, par cette attitude, l’opportuniste ainsi décrit fait généralement passer ses intérêts avant la morale, recourant à des actions frauduleuses. Ses principales armes sont la manipulation et le mensonge. Nous connaissons tous des individus de cette trempe, dans divers secteurs,
La résignation ou la disposition à l’assistanat
On répète ad-nauseam que le peuple haïtien est résilient, face aux événements catastrophiques; on dirait plutôt qu’il se résigne, prend son mal en patience et attend l’aide d’autrui, la main tendue ou s’abandonne à la grâce divine (bondye bon). Il faut changer cette mentalité de tendre le bol de la misère aux donateurs internationaux. L’expérience de l’aide étrangère nous apprend que la soi-disant générosité des pays dits <<amis>> nous permet de survivre, mais ne peut assurer le réel développement. C’est un cycle à briser.
Le peuple haïtien a, certes, la <<couenne dure>>. Courageux, il se relève toujours de toutes les catastrophes et épidémies qui ont jalonné son histoire. Mais, <<résilience>> ne doit pas se confondre en <<instinct de survie>>, lequel se traduit en <<résignation>> et finalement aboutit à <<l’attentisme>>. C’est un cycle à briser, sinon l’assistanat’’ nous restera collé à la peau.
« L’ambition collective est la clef du succès et il n’existe aucune fatalité du sous-développement. » (Landing SAVANE in « Mon ambition pour le Sénégal », 1993)
Pour briser le cycle, soyons opportunistes (dans le bon sens). Les événements catastrophiques sont parfois accompagnés d’opportunités d’innovations et d’avancements à qui sait en profiter. Cela veut dire, exploiter intelligemment ses ressources matérielles, financières et humaines. Une façon, entre autres, de s’affirmer en tant que pays dit ‘’indépendant’’.
L’indifférence ou l’irresponsabilité face à l’environnement
Notre pays se meurt, lentement mais sûrement, si la tendance se maintient. Une lente agonie consécutive aux gestes que nous posons quotidiennement et attribuable à notre indifférence, notre insouciance vis-à-vis de nos milieux de vie, tant naturels que construits. Un exemple, parmi tant d’autres : nos manifestations de rue se font avec des branches vivantes arrachées aux arbres se trouvant sur notre parcours (quelle horreur !!!).
Notre histoire de peuple est jalonnée de périodes d’acharnement contre une ressource aussi précieuse que la forêt.
VÉGÉTATION PROBABLE D’HAITI AU DÉBUT DE LA COLONISATION
« L’ambition collective est la clef du succès et il n’existe aucune fatalité du sous-développement. » (Landing SAVANE in « Mon ambition pour le Sénégal », 1993)
Au XVIIe siècle
De grandes surfaces ont été déboisées pour la culture de diverses espèces végétales importées, tels que le café, la canne-à-sucre, le coton, etc. La colonisation qui avait ainsi enrichi la flore à Saint-Domingue y avait également amorcé le déboisement.
Au XIXe siècle
Après 1804, le déboisement allait prendre une allure dévastatrice.
Le gouvernement de Jean-Pierre Boyer a dû compter sur l’exportation de bois précieux (acajou, gaïac, campêche) pour payer la dette de l’indépendance réclamée par la France, en guise d’indemnité pour préjudices aux possessions coloniales.
Ce massacre de la nature s’est poursuivi pendant presque un siècle, jusqu’à épuisement quasi-total des réserves.
Au XXe siècle
• Durant l’occupation américaine (1915 – 1934)
Différentes concessions ayant été accordées à de grands exploitants pour les cultures en plaines, les moins nantis ont du se replier dans les montagnes où leurs installations et leur survie ont nécessité un déboisement systématique.
• Durant l’ère duvaliériste
Dans les années 1960, le régime de Papa Doc a lancé quelques offensives dans les mornes à la recherche de guérilleros en provenance de l’étranger. Ces pourchasses ont donné lieu à autant d’actions de déboisement.
• Durant la période de l’embargo (1992 – 1994)
L’impossibilité pour Haïti de s’approvisionner en produits pétroliers (liquides et gaz), a eu pour conséquence l’accélération de la coupe de bois comme combustible, ainsi que l’amplification du commerce de charbon.
Au XXIe siècle
D’après des études menées au Ministère de l’Agriculture, le Pic Macaya (Grand anse) couvrait une superficie de 6250 ha de forêts vierges il y a à peine 30 ans. En 1977, il n’en restait que 750 ha environ et en 1985, la couverture forestière était réduite à 225 ha.
Il ne subsiste que quelques îlots de ce qu’on pourrait appeler des réserves forestières : forêt des pins, morne Macaya, morne de Cerca-la-source. De vastes régions, autrefois recouvertes d’une végétation luxuriante, sont réduites à de chétives savanes aux herbes courtes ou, tout simplement des broussailles. En certains endroits, même des arbres traditionnellement préservés en raison de leur utilité alimentaire ou leur valeur mystique, n’ont pas échappé à la dilapidation de la nature.
Le processus de déboisement se poursuit de plus belle, et le commerce du charbon de bois est devenu l’une des activités les plus lucratives (chiffre d’affaires de plus de $65 millions).
Il en résulte que :
* L’érosion devient le problème numéro un des terres de montagne cultivables * Les inondations et glissements de terrain deviennent coutumiers * Plus rien ne distingue certaines de nos rivières d’un égout
* La terre arable est de plus en plus une denrée rare dans plusieurs régions autrefois très fertiles
* Les pluies se font de plus en plus rares dans des régions autrefois bien arrosées
Nos villes sont défigurées et, véritables dépotoirs à ciel ouvert, elles affectent notre santé :
* Nuisances sonores, pollution visuelle et tas de détritus
* Voitures rafistolées qui crachent impunément leurs fumées quotidiennes de substances cancérigènes,
Ainsi, la gestion de notre environnement représente un défi de société sans précédent. Nous devons remettre en question nos habitudes et comportements, à l’école, à la maison comme au travail. Il faut éviter d’hypothéquer irrémédiablement la qualité de vie des générations futures.
Pour notre survie en tant que peuple, il nous faut susciter le goût d’un environnement de qualité et inciter à des actions concrètes de protection de l’environnement. Face à ce défi, nous avons tous un rôle à jouer pour trouver et appliquer des solutions puisque nous sommes tous producteurs et/ou consommateurs. Cet objectif ne sera atteint que par un engagement de tous et chacun : tous les secteurs de la vie nationale (citoyens, groupes, organismes, institutions, entreprises, syndicats, industries et gouvernements) ; toutes les catégories sociales (riches et pauvres, citadins et ruraux, intellectuels et analphabètes).
Hélas ! Les gouvernements successifs ont toujours fait sourde oreille aux cris d’alarme lancés par les gens avisés, dont celui de mars 1988, lors d’un colloque sur le reboisement tenu à Damien en avril 1987, et d’où est issu un document intitulé « Pour une déclaration officielle de l’état d’urgence face à la dégradation de l’environnement national ».
Les chaînes culturelles
Il y a lieu d’admettre que l’abolition de l’esclavage n’a été que physique. Les chaînes aux pieds et aux mains ont disparu, mais la religion, la culture et la langue de l’esclavagiste sont restées et prédominent à travers notre Histoire, sous une forme ou une autre. Ce qui fait dire à plusieurs que l’esclavage persiste dans notre mental.
Nous sommes restés attachés au christianisme. Les églises chrétiennes pullulent à travers le pays. Négligeant le rôle qu’elles pourraient jouer dans la conscientisation de leurs fidèles, elles persistent à leur prêcher la résignation, en référence à certains préceptes bibliques et exploitant le faible niveau d’instruction de la grande majorité. Le vodou, pratique religieuse enracinée dans la culture haïtienne, est plutôt relégué en second plan, traité en parent pauvre et même dénigré.
Nous sommes restés attachés à la langue française, au détriment de la langue créole, parlée par plus de 90% de la population. Il a fallu attendre cent-quatre vingt-trois ans après l’Indépendance pour qu’elle soit reconnue langue officielle, à la faveur de la Constitution de 1987. Soulignons que tous les pays développés le sont dans la langue de la majorité. De plus, aucun pays anciennement colonisé par la France n’arrive à se démarquer en comparaison avec ceux ayant été sous le joug anglais. Ce que Paul Kagame (Rwanda) a bien compris, en prenant le virage linguistique.
Nous sommes restés attachés à la culture française dans plusieurs secteurs de la vie nationale haïtienne. Mentionnons, à titre d’exemple, notre système de pouvoir exécutif bicéphal (président et premier ministre) enchâssé dans la Constitution de 1987, en vigueur.
LA NÉCESSAIRE RÉVOLUTION MENTALE
Tous les traits caractéristiques relatés interagissent pour faire de nous ce que nous sommes et de notre pays, Haïti, ce qu’il est aujourd’hui. On comprend donc que, pour renverser la tendance, il faut s’engager dans la bonne direction.
Il faut reformater l’être haïtien … pour réinventer le pays, afin de rompre les schèmes de pensées, d’attitudes et de comportements perpétués depuis trop longtemps, un ‘conditionnement social’ transmis de génération en génération. Nous devons intégrer des qualités qui, jointes à nos point forts (chaleureux, créatif, ingénieux), ne peuvent que faire de nous un peuple fort et fier, pouvant aspirer à un futur digne, dont nous devons être les seuls responsables.
De toute évidence (et nous y croyons fermement), une nouvelle Révolution doit inspirer les haïtiens, certes pas le genre ‘’koupe tèt boule kay’’ justifiable en 1804 (les revendications ne sont plus tout à fait les mêmes, quoique que subsiste le fond d’inégalité socio-économique et d’injustice sociale), mais une Révolution dans les esprits, dans les mœurs, dans les mentalités, dans les manières d’être et d’agir, etc… C’est la nécessaire RÉVOLUTION MENTALE.
À notre avis, ‘’la révolution mentale’’ est une condition sine qua non pour conjurer nos maux et assurer à long terme le progrès socio-économique en Haïti.
Mais, par où commencer ?
Tout d’abord, prenons conscience que nous sommes les premiers responsables de nos maux et que les remèdes ne se trouvent pas ailleurs. À court et moyen termes, des dispositions doivent être prises en vue de préparer la voie vers des solutions durables.
Pour le court et le moyen termes, il faut élire et placer les bonnes personnes (moralité, compétence, intégrité) aux endroits qu’il faut, et exiger d’eux une vision, un plan d’action, une équipe compétente et fiable.
Pour le long terme, il faut instruire le peuple, selon ce que le Dr. Legrand Bijoux appelle un ‘processus éducation-socialisation’2.
L’ÉDUCATION, LÉITMOTIV DE LA RÉVOLUTION MENTALE
Certaines valeurs fondamentales sont essentielles à intégrer dès l’enfance, dans la famille, à l’école et dans la société :
Croire en ses potentialités
Être vrai et authentique
Être honnête et sincère
Être fidèle à ses engagements
Développer l’esprit d’entraide
Donner des chances égales à tous
Aimer son pays et se dévouer à sa cause
Haïti ne peut être réinventé sans révolutionner le système éducatif. Il faut intervenir auprès des jeunes par des actions préventives ciblées, afin de construire la nouvelle Haïti en tant qu’espace politique, économique, social et culturel viable et son rapport au reste du monde devra s’appuyer sur l’implication éclairée et active de sa population.
Le système éducatif doit avoir pour mission de préparer des hommes et des femmes qui cultivent les valeurs fondamentales que sont :
• L’écologie sociale
Pour comprendre et intégrer les relations entre les personnes et leur environnement, et aussi prendre conscience de l’interdépendance des personnes, des collectifs et des institutions. Il en découle la reconnaissance de notre responsabilité à l’égard de notre environnement physique et apprendre à le protéger;
• Le pacifisme
Pour défendre la paix, la tolérance, le pluralisme et le droit de tous de vivre en sécurité et de répondre à ses besoins fondamentaux;
• La solidarité et la cohésion sociale
Pour reconnaître les liens qui nous unissent à nos semblables et à notre environnement social, écologique et culturel, et pour agir pour une plus grande justice sociale, une répartition équitable des richesses communes et la protection des plus démunis;
• La démocratie
Pour apprendre à mieux vivre ensemble de façon bénéfique à tous, à défendre et à promouvoir les droits, les libertés et l’égalité des chances, à participer à la vie citoyenne et au façonnement du bien commun.
• Le civisme
Pour le respect des uns envers les autres, le dévouement envers la collectivité, le respect des lois et des règles de la vie en société.
• La moralité
Pour conformer sa conduite à un ensemble de principes moraux, tels que l’honnêteté, la fidélité à des principes.
• Le sens patriotique
Pour s’attacher à sa patrie et se dévouer à sa cause
SECTION II :
LA NÉCESSAIRE RVOLUTION ÉDUCATIVE
POUR UNE ÉDUCATION INTÉGRALE, VERTE ET SOLIDAIRE VERS LE DÉVELOPPEMENT ENDOGÈNE ET DURABLE
L’ÉCO-ÉCOLE ET LES CONCEPTS ASSOCIÉS
Le concept ‘éco-école’ vise de faire évoluer le système éducatif en vue d’intégrer les concepts de développement endogène et durable, sous une forme ou sous une autre, dans les programmes de l’école primaire et du secondaire, avec pour objectif d’aider les enfants et les adolescents à identifier les «valeurs durables» et faire des liens entre les connaissances, les comportements et la réalité en matière de développement durable, en vue d’arrimer leur pensée avec des visions prospectives et systémiques des problèmes locaux à résoudre
L’ÉDUCATION
Dans son sens large, l’éducation est définie comme ‘’un processus de socialisation des individus’’, processus au cours duquel il acquiert des connaissances et les assimile, sans faire abstraction d’une sensibilisation culturelle et comportementale.
L’éducation ainsi comprise, on ne peut pas éduquer convenablement un individu sans tenir compte de son environnement familial et social. Car, certaines attitudes et certains comportements innés et/ ou appris risquent d’être répétés, d’une génération à l’autre. Il faut parvenir, par l’éducation, à rompre ce cercle vicieux, en remettant en cause les schèmes de pensée, les idées reçues, les façons de faire et modes de vie indésirables des générations précédentes.
Les compétences et les valeurs véhiculées par le processus éducatif doivent amener des changements non seulement intellectuels, mais aussi affectifs et sociaux chez l’individu, et ce pour le reste de sa vie. Ainsi, l’éducation formelle ou scolaire ne peut se réduire à une simple transmission de connaissances par des matières académiques et des techniques.
Chez les enfants, notamment, l’éducation doit favoriser la structuration de la pensée et des formes d’expression, tout autant que le développement de l’esprit critique, les règles de la vie de groupe, le sens civique et moral. Mais, ce processus doit se poursuivre tout au long de la vie, puisque l’être humain évolue et a constamment besoin de formation et d’information.
LE DÉVELOPPEMENT DURABLE
Tout développement sérieux demande, pour un territoire donné, un plan ou outil de gestion qui indique le mode d’utilisation des ressources disponibles (matérielles, financières, humaines) en vue de répondre à des besoins précis d’une population. Sa finalité doit être l’amélioration de la qualité de vie de tous les citoyens.
Pour sa part, le concept de durabilité fait référence à stabilité et résistance au temps. Ainsi se pose la question à savoir : quelles sont les conditions nécessaires pour qu’un développement soit durable ?
Quatre aspects sont généralement pris en compte en matière de développement durable, à savoir qu’il doit être écologiquement viable, économiquement rentable, socialement juste et humain. En résumé, pour être durable, le développement doit être capable de prendre racine et de croître dans la société pour laquelle il est planifié.
L’éducation pour le développement durable (EDD) devrait être central dans l’éducation et la formation en vue de : « doter tous les citoyens des connaissances, des compétences et des attitudes nécessaires pour comprendre et relever les défis et les complexités du développement, tout en tenant compte des implications environnementales, sociales, culturelles et économiques, et ainsi assumer leurs responsabilités. »
LE DÉVELOPPEMENT ENDOGÈNE
Selon Benjamin Grassineau, << le concept de développement endogène désigne, au sens large, une transformation sociale qui est considérée comme une « amélioration », un progrès, et dont la nature, les finalités et les moyens demeurent sous le contrôle des acteurs qui la portent. Il s’oppose en cela à d’autres formes de développement qu’on pourrait qualifier d’exogènes qui, en simplifiant, recoupent un ensemble de transformations sociales imposées et parachutées de « l’extérieur » sur une « population endogène » qui en subit les effets (positifs ou négatifs) et n’a donc plus de prise, de pouvoir d’agir, d’autonomie sur certains pans de son existence, du moins ceux qui sont affectés par le développement.>>.
L’éco-école propose, entre autres :
– un pari gagnant volontariste sur la science et la technologie, ce qui exigera une restructuration profonde et originale du système d’enseignement, de formation et de recherche;
– la démocratisation de la gestion de l’enseignement avec la participation des étudiants, élèves, enseignants et gestionnaires;
– la généralisation de l’apprentissage technique et la liaison école -milieu ; – l’éradication de l’analphabétisme et de l’obscurantisme, la formation d’un nouveau type de citoyen (ne) par des vastes campagnes d’information, d’éducation et de communication utilisant les médias traditionnels et modernes; – la valorisation de la langue nationale (le créole) et des savoir-faire locaux ; – la promotion de la recherche endogène : recherche fondamentale et recherche appliquée, en collaboration avec les entreprises, les unités de recherche, les administrations régionales, les organisations de producteurs, etc.
L’ÉCO-ÉCOLE que nous concevons se concrétise par un système d’éducation à trois volets : intégral, vert et solidaire.
« une approche pour apprendre et grandir en s’épanouissant« .
L’éducation intégrale concerne, à la fois, le développement harmonieux de toutes les capacités humaines et la préparation de l’individu aux tâches d’une société en développement.
Pour accompagner efficacement les enfants à devenir des citoyens responsables, il faut tenir compte de façon cohérente de l’ensemble des facteurs qui influencent leur développement physique, émotionnel, cognitif, social et intérieur. En ce sens, le concept d’éducation intégrale offre une vision globale et pratique de l’éducation qui vise à faire éclore l’immense potentiel à l’intérieur de chaque individu.
Cette démarche vise à réunir dans le projet éducatif, aux cycles primaire et secondaire de l’enseignement technique et de l’enseignement général, une offre globale et concertée d’interventions intégrant éducation formelle, santé et prévention, ainsi que la sécurité alimentaire des jeunes.
Objectifs principaux à atteindre :
1- Réorienter l’éducation et l’apprentissage afin que chacun ait la possibilité d’acquérir les connaissances, les compétences, les valeurs et les attitudes qui lui permettent de contribuer au développement durable de son pays et d’agir en conscience ;
2- Renforcer l’éducation et l’apprentissage dans tous les agendas, programmes et activités en faveur du développement durable.
Ce programme vise à inciter les jeunes à devenir des principaux acteurs du changement pour l’avenir, ainsi que les habiliter à vivre en harmonie avec leur environnement (écologie).
Au niveau préscolaire, Ils peuvent à la fois jouer dans la terre, mettre les petites graines, revenir pour voir le processus de croissance des plantes.
Au niveau primaire, le concept de développement durable peut se limiter à des écogestes concernant la forêt, le climat, l’énergie, la faune et la flore, le patrimoine, la pollution, l’éco-citoyenneté, la santé, le tri des déchets, etc…
Au niveau secondaire, on peut aborder le rôle de l’homme dans les modifications de l’environnement, les interdépendances de hommes dans la société, la nécessité de faire des choix responsables, et le besoin d’une solidarité à l’échelle mondiale (agir localement, penser globalement).
Explorer les questions d’actualité dans la salle de classe
Mettre les élèves au courant des problèmes environnementaux importants qui affligent leur pays et notre planète, échanger sur les enjeux économiques et sociaux de ces enjeux et passer à l’action,
Intégrer des projets verts à l’école
Les écoles vertes ont pour but de sensibiliser les parents, au travers des enfants, à la lutte contre la déforestation et en faveur du reboisement, le compost, les pépinières, et le tri des déchets.
Rendre l’éducation de qualité accessible à toutes les couches sociales
L’éducation solidaire est une approche de justice sociale pour alléger les fardeaux socio-économiques des familles d’enfants fréquentant l’école. La scolarité est modulée en fonction des ressources financières des familles. Les jeunes issus de familles à situation précaire pourraient ne rien payer pour bénéficier d’une éducation égale à celle que reçoivent ceux des familles les plus aisées fréquentant le même établissement, les mêmes salles de cours. C’est un moyen de donner la chance à tous les enfants du pays d’exploiter au maximum leurs potentialités, leurs talents.
Aucune entrave d’ordre financier ne devrait empêcher un jeune de milieux défavorisés d’accéder à des études. De même pour la classe moyenne, la modulation des droits de scolarité serait profitable; elle paierait sa juste part.
En définitive, la modulation de la scolarité dans un système d’éducation unifié, à une seule vitesse, est un moyen d’atteindre l’objectif d’éducation pour tous, devant être soutenue à la fois par l’État et la communauté.
Ses assises sont : la scolarité modulée, l’aide alimentaire gratuite aux élèves, l’accompagnement individuel gratuit des élèves (santé et services sociaux), le développement du lien école-famille-communauté. |
PROGRAMMES D’ENSEIGNEMENT
Les programmes d’enseignement définis par le Ministère de l’Éducation nationale seront respectés, mais ils seront enrichis par des principes et lignes directrices conformément définis.
PRINCIPES ET LIGNES DIRECTRICES
Le projet d’éducation intégrée, verte et solidaire est conçu pour corriger les faiblesses citoyennes à l’origine des injustices, de l’hostilité et de la violence entre groupes, et pour susciter un comportement responsable envers l’environnement. |
Au moment de concevoir des activités, quel que soit le niveau d’enseignement, il est important de planifier l’intégration des éléments suivants :
• des contextes authentiques tirés du monde réel et pertinents pour les élèves; • des points d’entrée pour tous les apprenants, afin de faire éclore l’immense potentiel à l’intérieur de chacun d’eux.
• des occasions d’approfondir le raisonnement des élèves et de le remettre en question;
• des occasions de susciter les échanges et discussions en groupe, et de favoriser l’acceptation d’opinions contraires;
• des occasions de susciter la coopération plutôt que la compétition; • des occasions de se faire confiance, de s’entraider et de s’intéresser à ce que les autres ont à dire;
• des possibilités pour les élèves de poser des questions et de faire des choix; • des structures d’apprentissage collaboratif qui favorisent la compréhension et l’autonomie;
• des occasions authentiques de communiquer son raisonnement par différents moyens;
• l’utilisation de divers genres de textes, présentations orales, modes de diffusion et médias;
• l’acquisition de la terminologie propre à la matière.
ENRICHISSEMENT DES MATIÈRES
Au moment de préparer son cours, l’enseignant devra trouver des points d’ancrage dans la matière concernée, pour intégrer des notions relatives aux éléments suivants :
• Civisme (citoyenneté) et Moralité
• Patriotisme
• Respect de l’environnement
HIÉRARCHIE DES LANGUES
Langue première : Créole
Le créole, langue maternelle de plus de 90% des Haïtiens, doit être priorisée pour faciliter l’apprentissage et l’appropriation de la formation par les jeunes, de même que l’implication des parents dans le processus.
Langues secondes : Français, Anglais, Espagnol
Il faut donner à l’Haïtien des outils linguistiques pour pouvoir communiquer avec ses voisins, proches ou éloignés (Rép. Dominicaine, Cuba, USA, Am. Latine).
OUTILS PÉDAGOGIQUES ET DIDACTIQUES
Afin de faciliter l’acquisition de concepts, d’habiletés, d’attitudes et de dextérités, le choix d’outils d’enseignement et d’apprentissage doit être approprié.
Nous privilégions un virage technologique :
1. L’usage de tableau numérique interactif combiné à un projecteur et un portable, le tout branché à des panneaux solaires;
2. L’intégration des technologies de l’information et de la communication (TIC), c’est-à-dire d’ordinateurs et d’accès internet au sein des classes (là où les conditions le permettent);
3. La formation continue des enseignants par vidéo-conférence .
L’éducation technique
C’est un complément du cours de Science et Technologie devant faire partie de la formation générale des jeunes du secondaire, dans un triple objectif :
1. Enrichir les connaissances générales de l’élève, sans déboucher nécessairement sur une carrière
2. Leur permettre d’acquérir des compétences en travail manuel. 3. Les préparer, à contribuer à la résolution de certains problèmes en tant que membres d’une société en développement.
Principe sous-jacent
Ce volet du programme de formation est placé dans une perspective de transformation sociale vers une société sans exclusion, qui vise à valoriser les métiers manuels.
Les objectifs de ce complément de formation peuvent être atteints en mettant à contribution, tant les activités agricoles et les classes vertes du programme scolaire, que les agriculteurs et artisans de la communauté.
L’accompagnement en santé et services sociaux
Éducation et prévention
1. Éducation humaine intégrale (la connaissance de soi du point de vue biologique et psychologique, l’identité, etc.)
2. Éducation à la sexualité, la perception des risques liés à l’activité sexuelle et la négociation du rapport à l’autre (adoption de comportements sexuels à moindre risque, prévention des grossesses précoces, etc.).
Soutien médical et psychosocial
– Visite hebdomadaire d’un/e infirmier/ère et d’un/e travailleur/se social/e – Visite mensuelle d’un médecin
Le programme nutritionnel et alimentaire
Dans le cadre de notre vision d’une école devant assurer l’épanouissement et la réussite des jeunes, la sécurité alimentaire doit être prise en considération. Un programme de cantine scolaire permet de servir à tous les élèves des repas sains au quotidien, gratuitement. Il comprend un volet d’éducation alimentaire. |
Accès à des aliments sains à l’école.
L’insécurité alimentaire engendre de nombreux effets néfastes sur la santé et le bien-être des enfants. Il est prouvé que l’accès à un soutien alimentaire au primaire et au secondaire contribue considérablement au développement de citoyens plus heureux, en meilleure santé et plus actifs. Le déficit alimentaire risque de compromettre leur apprentissage, leur santé ou leur comportement à l’école.
Éducation nutritionnelle
Nous devons fournir les bases nécessaires au développement de saines habitudes alimentaires qu’ils conserveront toute leur vie et qui feront en sorte que leur apprentissage n’est pas compromis par un manque d’accès à des aliments sains.
Disponibilité des aliments pour la cantine scolaire
Autoproduction
Une partie des aliments pour la cantine scolaire sera produite sur place grâce aux activités d’agriculture, d’élevage, d’aquaculture et d’apiculture, auxquelles seront associés les élèves.
Approvisionnement externe
Des dons alimentaires seront sollicités, tant auprès de membres de la communauté que de sources extérieures et même de pays étrangers.
Les interventions en agroenvironnement pour une éducation verte
Principes et lignes directrices
La mission première est l’éducation, mais le développement durable est au cœur de notre démarche. Notre engagement envers le développement durable a pour principal but de former des écocitoyennes et écocitoyens responsables, tout en contribuant à leur réussite éducative. Notre engagement se traduit par deux principales orientations. |
1. L’intégration des principes de développement durable dans les pratiques de gestion de l’éducation.
2. L’intégration de l’éducation pour un avenir viable et l’éducation en vue d’un développement durable dans les pratiques éducatives. Ce qui consiste à offrir aux jeunes et aux adultes de l’établissement scolaire des situations d’apprentissages et des activités leur permettant de :
• Acquérir les connaissances fondamentales pour mieux comprendre leur environnement, ses composantes et les interactions qui lui sont propres; • Développer un état d’esprit propre au développement de valeurs et de sentiments d’intérêt à l’égard de leur pays et des difficultés auxquelles ils font face;
• Développer les savoir-faire nécessaires pour mieux comprendre et agir; • Passer à l’action en leur offrant la possibilité de contribuer activement à protéger, à améliorer et à rêver le pays dans lequel ils vivent et souhaitent vivre. • Protéger et améliorer le patrimoine naturel environnant.
Stratégies pédagogiques
Les interventions visent à offrir aux jeunes en formation des situations d’apprentissage portant sur les enjeux du développement durable en empruntant trois voies :
1. Introduire un cours d’écologie dans les cycles du préscolaire et du primaire, et un cours d’environnement dans le curriculum du secondaire;
2. Dans le cadre des activités d’enseignement régulières, trouver des points d’ancrage pour introduire les notions pertinentes;
3. Par des activités parascolaires consistant à offrir aux jeunes des occasions d’entrer en contact avec la nature durant leur cheminement éducatif par divers moyens, tels que :
• Faire entrer la nature dans l’école en aménageant des espaces verts ; • Introduire à l’école le principe des 3-R (réduire – réutiliser – recycler) • Initier les jeunes en faisant pousser des semis, en réalisant un jardin scolaire, etc.;
• Organiser des jeux, des activités pédagogiques ou des sorties en milieu naturel.
• Organiser des activités thématiques à l’école et des kiosques de sensibilisation ouverts à la communauté
Thèmes d’étude
La biodiversité, la forêt, le climat, l’air, l’eau, l’énergie, les déchets
Activités
Classes agricoles (jardin, pépinière) et Classes-nature (étude du milieu) Voir en annexe :
Un projet d’enrichissement pour une école verte
Les interventions en Arts et Culture
Comme l’Éco-École se donne pour mission de former l’élève dans sa globalité, l’intégration de disciplines artistiques y est tout indiquée. Arts plastiques, musique, art dramatique et danse permettent de stimuler la créativité, l’imagination et la sensibilité tout en favorisant l’autonomie, l’expression de soi et l’interaction avec son milieu.
Ces disciplines encouragent également l’organisation de la pensée, le développement de la motricité, le sens critique et l’éveil des sens.
Arts visuels
Les arts plastiques, un outil de connaissance de soi, permettent à l’enfant de prendre conscience de son environnement en reproduisant ce qu’il voit et en l’interprétant à sa manière. De plus, comme ils l’amènent à puiser en lui-même, à exprimer sa sensibilité et à faire appel à sa logique, il s’agit aussi d’un outil de connaissance de soi.
Arts de la scène (théâtre, danse)
L’art dramatique et la danse : des moyens d’expression.
L’art dramatique favorise l’expression orale en public dans un contexte amusant, encourageant ainsi l’imaginaire, la créativité, l’esprit de collaboration et le sens de l’effort.
En plus d’aider l’enfant à renforcer son estime de lui-même, il sollicite l’expression corporelle. D’ailleurs, à l’instar de la danse, l’art dramatique amène le jeune à prendre conscience de son corps, à se mouvoir dans l’espace et à être à l’écoute de ses émotions et de ses sensations.
En contribuant au développement de son estime de soi, de sa personnalité et de son ouverture sur le monde, l’enseignement des arts à l’école est assurément une valeur ajoutée à la formation scolaire de l’élève.
Musique : une mine d’or d’habiletés
Apprendre à jouer d’un instrument de musique est un défi qui sollicite plusieurs sens, comme la vue, l’ouïe et le toucher, et qui participe à la formation de l’intelligence de l’élève.
En plus de permettre l’acquisition de connaissances musicales, l’apprentissage de la musique favorise le développement de plusieurs compétences, dont :
la polyvalence, la concentration, la mémoire, la patience, la persévérance, la capacité d’émerveillement et l’esprit de communauté.
Spectacles (ouverts à la communauté)
Pièces de théâtre, pièces musicales et numéros de danse, montés par les élèves
Expositions (ouvertes à la communauté)
Œuvres (dessin, peinture, artisanat) réalisées par les élèves
Patrimoine (histoire et culture)
Les sorties scolaires en milieu historique et culturel permettent aux élèves de découvrir toute la richesse de lieux et d’événements empreints de culture tout en leur offrant l’occasion de vivre des expériences culturelles signifiantes.
Ateliers de lecture et d’écriture
C’est une démarche qui permet aux élèves de faire de nombreux choix, qui privilégie l’autonomie, qui s’inspire de comportements authentiques et qui met les livres et leurs créateurs au centre de l’apprentissage de la lecture et de l’écriture.
Compétences développées
Compétence 1 : Affirmer sa personnalité
Compétence 2 : Interagir de façon harmonieuse avec les autres Compétence 3 : Communiquer en utilisant les ressources de la langue Compétence 4 : Construire sa compréhension du monde
Compétence 5 : Mener à terme une activité ou un projet
Le volet ‘Sports et Loisirs’
Le programme vise notamment à améliorer le rendement scolaire des jeunes grâce à l’activité physique et au divertissement. À privilégier : sports d’équipe et jeux de société |
Les activités s’inscrivent dans notre philosophie consistant à donner aux jeunes un environnement favorable au développement de saines habitudes de vie et de compétences qui influencent de manière positive leur santé et leur bien-être.
« L’ambition collective est la clef du succès et il n’existe aucune fatalité du sous-développement. » (Landing SAVANE in « Mon ambition pour le Sénégal », 1993)
Il s’agit de leur offrir une diversité d’activités parascolaires (activités physiques, sportives, culturelles et communautaires).
Ces activités contribuent à faire de l’école un milieu de vie attrayant pour les jeunes en leur permettant de :
• Développer leur sentiment d’appartenance;
• S’impliquer dans l’école et d’y rester le plus longtemps possible; • Améliorer leur estime de soi et leur concentration;
• Favoriser le développement de relations sociales positives.
Afin de maximiser la participation des jeunes et les effets du programme, il est souhaitable de :
• Intervenir de façon préventive en se basant sur les problématiques locales; • Encourager les élèves à s’engager dans l’organisation ou le soutien des activités;
• Offrir les activités dans un cadre supervisé, sain et sécuritaire, à l’école ou dans la communauté (autant que possible à pr9aoximité de l’école);
• Assurer la mobilisation d’un grand nombre d’acteurs autour de ce programme; • Encourager des partenariats avec des groupes de la communauté qui sont en cohérence avec les valeurs et la mission de l’école.
« L’ambition collective est la clef du succès et il n’existe aucune fatalité du sous-développement. » (Landing SAVANE in « Mon ambition pour le Sénégal », 1993)
« L’ambition collective est la clef du succès et il n’existe aucune fatalité du sous-développement. » (Landing SAVANE in « Mon ambition pour le Sénégal », 1993)
Une et cinq
Unité satellite 1 Santé
Unité satellite 2 Agriculture , Services sociaux
Unité satellite 3 Arts Culture
Unité centrale
Section pédagogique Administration
Section de services
Activités communautaires
Environnement
Unité satellite 4 Sports Loisirs
« L’ambition collective est la clef du succès et il n’existe aucune fatalité du sous-développement. » (Landing SAVANE in « Mon ambition pour le Sénégal », 1993)
« L’ambition collective est la clef du succès et il n’existe aucune fatalité du sous-développement. » (Landing SAVANE in « Mon ambition pour le Sénégal », 1993)
1. L’UNITÉ CENTRALE
•Classes de préscolaire, primaire, secondaire
•Local des profs
•Bibliothèque
•Salle polyvalente
•Autres …
Section pédagogique
•Bureau de la direction
•Secrétariat
•Comptabilité
•Autres …
Section administrative
Section
Section
•Cuisine
•Cafétéria •Abreuvoirs •Autres … services alimentaires
utilitaire
•Toilettes •Autres …
« L’ambition collective est la clef du succès et il n’existe aucune fatalité du sous-développement. » (Landing SAVANE in « Mon ambition pour le Sénégal », 1993)
1. LES UNITÉS SATELLITES
« L’ambition collective est la clef du succès et il n’existe aucune fatalité du sous-développement. » (Landing SAVANE in « Mon ambition pour le Sénégal », 1993)
Santé, services sociaux,
Personnel
Culture verte
nutrition Personnel – Infirmier/ère
Arts et
– Travailleur/se social/e
– Nutritionniste / Diététicien/ne
Services
– Prévention
– Consultation – Prise en charge – Autres …
Ressources
Sports et
– Technicien/ne
en agriculture et environnement
Services
– Classes agricoles – Classes écologiques – Excursions
– Autres …
culture Ressources
externes
– Peintre / dessinateur
– Acteur / Metteur en scène – Danseur / chorégraphe – Musicien
– Artisan
– Historien
– Écrivain
Activités
– Arts visuels
– Arts de la scène
– Musique
– Ateliers (écriture, lecture) – Patrimoine (histoire, culture)
loisirs
externes
– Technicien/ne sportif/ve
– Praticiens de disciplines sportives
– Animateur/trice en loisirs
Activités
– Sports d’équipe
– Jeux de société
– Compétitions
– Autres …
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Activités communau taires
Lien école – milieu
– Cours
d’alphabétisation
– Rencontres profs
parents
– Activités culturelles
– Conférences, débats
– Expositions
– Etc…
2.Les constructions secondaires
Bâtisses
Entrepôts Gros animaux d’élevage
– Matériel et
équipement divers
Équipement et
matériel agricole
3.Aire de jeux et de détente
– Étable
– Porcherie
– Chèvrerie
Petits animaux – Poulailler
– Clapier
– Autres …
« L’ambition collective est la clef du succès et il n’existe aucune fatalité du sous-développement. » (Landing SAVANE in « Mon ambition pour le Sénégal », 1993)
« L’ambition collective est la clef du succès et il n’existe aucune fatalité du sous-développement. » (Landing SAVANE in « Mon ambition pour le Sénégal », 1993)
SECTION III :
LA NÉCESSAIRE RÉVOLUTION AGRO-ENVIRONNEMENTALE
Haïti se retrouve dans le cercle vicieux de la pauvreté, de la dégradation de l’environnement de la décadence du secteur agricole : les gens sont de plus en plus pauvres à cause de la dégradation de l’environnement et son corollaire la décadence de l’agriculture; l’environnement est de plus en plus dégradé et l’agriculture en décroissance constante, à cause de la pauvreté. |
« L’ambition collective est la clef du succès et il n’existe aucune fatalité du sous-développement. » (Landing SAVANE in « Mon ambition pour le Sénégal », 1993)
« L’ambition collective est la clef du succès et il n’existe aucune fatalité du sous-développement. » (Landing SAVANE in « Mon ambition pour le Sénégal », 1993)
La crise environnementale d’Haïti est d’abord une crise de son agriculture.
L’érosion, problème no. 1
L’érosion en Haïti est un, sinon le plus grave problème actuel auquel font face les 8 millions d’Haïtiens. Le sol arable se précipite par million de tonnes chaque année à la mer.
Au-delà des chiffres servant à brosser un sombre tableau de l’économie haïtienne, Haïti souffre, depuis très longtemps, de la décadence de son agriculture, mal exploitée et surtout mal conservée devant un déboisement et une érosion en progression constante. La sécheresse, la désertification, la pression sur les terres, le manque de technologie et l’absence de services de vulgarisation, le tout réuni donne une production agricole et des revenus faibles. Les causes sous-jacentes sont la pauvreté, les mauvaises techniques de gestion, les régions rurales laissées à l’abandon et les conditions commerciales inéquitables.
À moyen et long termes, l’érosion du sol se traduit par une augmentation des importations d’aliments. À mesure que la productivité diminue, le problème de la pénurie alimentaire s’intensifie. Il en résulte qu’Haïti importe une grande partie des aliments nécessaires à sa subsistance, surtout sous forme d’aide humanitaire.
▪ L’équation de la destruction de la VIE
❖ Érosion des terres = baisse de la fertilité naturelle = baisse de la production agricole = insécurité alimentaire = famine
En conséquence, depuis 1980, la croissance de l’agriculture est négative, alors que plus de 70% de la population en vit. Rien d’étonnant que Haïti importe de plus en plus pour nourrir sa population.
« L’ambition collective est la clef du succès et il n’existe aucune fatalité du sous-développement. » (Landing SAVANE in « Mon ambition pour le Sénégal », 1993)
PROBLÉMATIQUES DU SECTEUR
Les années cinquante-soixante ont marqué de façon spectaculaire le début de la décadence du secteur agricole en Haïti. Il en résulte aujourd’hui une gênante dépendance alimentaire, notamment au profit des États-Unis et de la République Dominicaine. Les causes explicatives de la décadence sont nombreuses; mais, on peut retenir parmi les principales :
AU NIVEAU DE LA TERRE
1. L’accentuation du phénomène de l’érosion,
2. La baisse de la productivité (carence en fertilisants),
3. L’absence de système d’irrigation adéquate,
4. La sécheresse qui sévit sporadiquement,
5. Le dépérissement ou l’abandon des cultures qui fournissaient les denrées d’exportation …
6. Le morcellement des terres (petites propriétés) consécutif à l’explosion démographique. Il en résulte une forte pression de la population sur l’espace cultivable pour tirer sa subsistance
7. Les modes de faire-valoir liés aux titres de propriété (cas d’absentéisme)
AU NIVEAU DE LA PAYSANNERIE
• Lutte pour la terre
« Des paysans sans terres… Des terres sans paysans… »
Les terres cultivables échappent par tous les moyens aux paysans : que ce soit par l’érosion des sols, la déforestation ou la spéculation. Selon un rapport de la Banque Mondiale (juin 1985), 1% de la population possède 60% des terres. La structure socio-économique d’Haïti est telle qu’une très petite minorité de super privilégiés dominent l’économie, et une masse de paysans sont maintenus dans la misère. « Autrement dit, quand l’indépendance politique reste le privilège d’une classe dominante autoritaire, elle ne garantit pas l’indépendance économique ».
« L’ambition collective est la clef du succès et il n’existe aucune fatalité du sous-développement. » (Landing SAVANE in « Mon ambition pour le Sénégal », 1993)
Un épineux problème d’exploitation des terres se retrouve dans le latifundisme3 d’État et le latifundisme privé. Dans le premier cas, l’État en tant que grand propriétaire terrien (environ 30% du territoire national4) a coutume de laisser de grands domaines en jachère5 prolongée. Dans le second cas, des particuliers, grands propriétaires, sont le plus souvent des absentéistes et des non-agriculteurs peu intéressés à financer des améliorations foncières. Le faire-valoir de leurs propriétés est laissé à des fermiers, des gérants, des métayers (appelés de moitié)»6. Dans ce mode de faire-valoir, la partie remise représente souvent les 2/3 ou les ¾ des produits récoltés. Ces « de moitié » de même que les travailleurs agricoles (journaliers, participants des combites) sont dépourvus de terre et n’ont que leurs bras pour travailler celle des propriétaires fonciers et des paysans riches.
Les paysans sans terres mettent en culture des terres marginales et envahissent les zones réservées. Ils sont obligés de faire pousser des cultures sarclées là où la vocation naturelle du sol exige l’élevage ou la sylviculture.
De fait, les terres les plus dégradées sont, soit propriétés de l’État, soit affermées, soit en litige de succession, soit sans titres valables. Dans un tel contexte, le fermier non-propriétaire n’est pas motivé à faire des investissements dont lui, ni ses héritiers ne seront pas bénéficiaires. Il cherche à tirer le maximum de la terre, dans un minimum de temps et pour un minimum de travail.
Les types d’occupation du sol (fermage, métayage ou de moitié, etc.) sont en fin de compte des obstacles majeurs à la pratique de la conservation (reboisement, techniques antiérosives) et, conséquemment l’une des causes de la dégradation des terres.
De toute évidence, une réforme agraire est incontournable si l’on veut amener de la justice sociale dans le secteur agricole, ainsi que d’assurer son développement. |
L’OUTILLAGE ET LES TECHNIQUES
1. Moyens de culture archaïques (la houe et la machette)
2. Techniques de culture déficientes, inadéquates
3Système de grande propriété.
4L’État est considéré comme le plus grand propriétaire terrien de la République
5 Temps d’inoccupation de la terre
6Selon la définition de R. Benjamin « le de moitié est celui qui travaille une portion de terre appartenant à un autre et qui partage avec lui la récolte, moitié à chacun d’eux ».
« L’ambition collective est la clef du succès et il n’existe aucune fatalité du sous-développement. » (Landing SAVANE in « Mon ambition pour le Sénégal », 1993)
3. Encadrement technique quasi-inexistant
• Défrichage pour l’agriculture
Le paysan haïtien, après la préparation du sol, élimine systématiquement les déchets végétaux.
Cette pratique, en dépit de quelques avantages (élimination des œufs de certains parasites, destruction des branches épineuses, facilité du semis), n’est pas moins condamnable.
• Agriculture sur brûlis
En gardant les déchets sur le terrain, une plus grande infiltration de l’eau est obtenue et les pertes de sol par ruissellement diminuent.
• Abus de pâturage : par exemple, la chèvre (cabri) est un puisant agent de déboisement, surtout quand l’arbre est jeune.
Végétation livrée en pâture libre
• Mauvaises méthodes de culture
• Techniques de culture archaïques
Certaines pratiques culturales répétées sans discernement peuvent être un facteur des plus stimulants à l’érosion.
Quand l’agriculteur pratique ses labours dans le sens de la pente, les sillons creusés pour la mise en terre de ses semences provoquent, lorsqu’il pleut, la concentration rapide de l’eau qui ruisselle. Alors, des rigoles se forment, et les pluies n’ont aucune difficulté à entraîner au loin tout le sol arable.
« L’ambition collective est la clef du succès et il n’existe aucune fatalité du sous-développement. » (Landing SAVANE in « Mon ambition pour le Sénégal », 1993)
« Les oubliés par ceux qui sont à Port-au-Prince. »
L’extrême morcellement des propriétés, les techniques agricoles désuètes, l’insuffisance des moyens de production, la distorsion entre le dynamisme démographique et le faible accroissement de la production concourent à vouer les familles paysannes à des revenus de famine. Ni l’outillage, ni la technique n’ont varié depuis plus de deux siècles. Les méthodes de culture n’ont guère changé : sarclage, piquage, ensemencement, enfouissement. Les cultures céréalières et vivrières viennent au gré de la nature. Pas étonnant que la part de l’agriculture dans l’économie ne cesse de dégringoler, alors qu’au début des années 50 elle en comptait pour la moitié. Il en est de même pour sa part dans l’ensemble des exportations, entraînant le déclin considérable de l’emploi dans ce domaine.
Dans ces conditions, la situation du paysan haïtien n’offre que de sombres perspectives. Pas étonnant que chaque année plus de 20 000 haïtiens, pour la plupart des paysans, cherchent par tous les moyens à quitter Haïti pour des cieux plus cléments (Amérique du Nord, République Dominicaine, Antilles).
LE TRAVAIL (MAIN-D’ŒUVRE)
L’exode rural : une source d’inquiétude
L’action conjuguée des impacts de la dégradation environnementale entraîne une rupture de l’équilibre entre le paysan et son milieu naturel de vie : c’est le désengagement et, finalement, la désertion des campagnes. L’exode des jeunes s’amplifie de jour en jour.
Les migrations en provenance de la campagne alimentent en bonne partie la croissance des bidonvilles. C’est la marche pathétique d’êtres humains tenaillés par la faim et poussés par leur instinct de survie. C’est l’exode de petits fermiers qui, s’ils en avaient le choix, préféreraient sans doute rester sur leur lopin de terre pour vivre dans la dignité. Ils affluent vers les villes, pleins d’espoir, croyant laisser derrière eux la pauvreté croissante des campagnes. Déracinés d’une terre qui ne cesse de se dégrader, beaucoup se retrouvent isolés et déprimés. Originaires de petits villages ou de montagnes, ils sont venus de trop loin pour rebrousser chemin.
« L’ambition collective est la clef du succès et il n’existe aucune fatalité du sous-développement. » (Landing SAVANE in « Mon ambition pour le Sénégal », 1993)
Par ailleurs, la migration interne des zones rurales vers les zones urbaines fait monter en flèche le niveau du chômage dans les villes (60-70%).
LE CAPITAL
Problématique : Système de financement agricole déficient, ou inexistant, ou inaccessible aux petits producteurs.
Soixante-dix p. cent (70%) des Haïtiens en dépendent, mais la plupart du temps, c’est une agriculture de subsistance, et le taux d’emploi salarié en milieu rural est très faible. Bon an mal an, l’agriculture a longtemps représenté environ le tiers du PIB, mais sa valeur diminue d’année en année.
Bien sûr, la dégradation environnementale n’est pas l’unique responsable des maux du secteur agricole et rural. Qu’on se souvienne, entre autres, de la « cure néolibérale » administrée à Haïti, ainsi que de « toutes les politiques de développement dictées de l’extérieur et appliquées depuis 1986 en Haïti », lesquelles ont eu pour effet d’encourager l’importation des aliments de base au détriment de la production locale (le cas du riz en est un exemple frappant : dépendance à 80%). On connaît aussi l’histoire de l’extermination des cochons créoles qui ne sera pas détaillée dans le cadre de cet ouvrage. Comme dommage collatéral, le commerce du charbon a pris la relève auprès des producteurs et éleveurs désabusés.
Une nouvelle approche globale est, sans contredit, nécessaire pour le secteur agricole.
• Une vision
L’augmentation de la productivité des petites unités agricoles peut aider à enrayer l’exode rural et éviter d’aggraver les problèmes urbains tout en améliorant les conditions de vie des populations rurales dont la précarité de vie incite à l’émigration.
• Une mission
Transformer l’unité de production agricole, la faisant passer de jardin (agriculture de subsistance) à une unité économique d’exploitation agricole.
• Des objectifs
• Permettre au producteur d’avoir un revenu correct ;
• Mettre sur le marché des produits à un prix et à un niveau de qualité acceptables pour le consommateur ;
« L’ambition collective est la clef du succès et il n’existe aucune fatalité du sous-développement. » (Landing SAVANE in « Mon ambition pour le Sénégal », 1993)
• Répondre aux demandes des secteurs de transformation ; • Assurer la pérennité de l’exploitation ;
• Préserver la qualité de l’environnement ;
• Assurer la durabilité du système d’exploitation pour le bien être des générations futures.
• Des moyens
o Agir simultanément sur 4 facteurs de la production agricole : terre, capital, outillage, travail
o Faciliter aux petits producteurs l’accès aux intrants agricoles (semences, engrais, pesticides), ainsi qu’à l’outillage et l’encadrement technique
o Fournir des services : crédit, expertise technique, matériel agricole, transport collectif, etc.
o Venir en appui à la commercialisation
Un programme national de crédit agricole supervisé est, de toute évidence, incontournable. Il pourrait comprendre trois volets :
1. Une ‘’Caisse rurale d’économie’’ dans chaque commune 2. L’octroi du Crédit, principalement en nature aux producteurs (semences, fertilisants, pesticides, etc.)
3. L’encadrement technique à toutes les étapes de la production
N.B. Le programme pourra être étendu au secteur de la transformation des produits agricoles (cassaveries, conserveries de fruits, distilleries, etc.).
« L’ambition collective est la clef du succès et il n’existe aucune fatalité du sous-développement. » (Landing SAVANE in « Mon ambition pour le Sénégal », 1993)
TRANSFORMER LES CONDITIONS DE VIE EN MILIEU RURAL
L’agriculture est la pierre angulaire du développement, de la croissance économique et de la stabilité sociale. Une nouvelle approche globale est nécessaire dans ce secteur, à divers niveaux : investissements publics adéquats, meilleure politique des prix en faveur des paysans, amélioration de la productivité et du rendement agricoles grâce à une meilleure technologie (appropriée, sans effets indésirables sur la main-d’œuvre).
Le monde rural est un peu à l’heure actuelle comme un ressort brisé : écosystèmes naturels dégradés, rendements agricoles décroissants, etc. Un monde à la dérive dans un contexte écologique en voie d’irréversible dégradation, tel est le contexte difficile dans lequel il faudra construire l’agriculture de demain. Il est temps sans doute encore, mais la marge de manœuvre devient extrêmement tenue … car la seule issue qui restera, si l’on ne réussit pas à emprunter la seule voie porteuse d’avenir qui s’ouvre au monde rural, c’est la dépendance alimentaire érigée en système, assortie de l’impossibilité de réaliser un développement authentique … une voie qui conduirait inéluctablement à la triple ruine patrimoniale, écologique et culturelle.
o Redonner confiance aux paysans et freiner l’exode Pour le bénéfice du pays tout entier et particulièrement pour les premiers concernés, la classe paysanne, l’exode des populations rurales vers les villes doit cesser; les paysans doivent se sentir utiles et valorisés chez eux. Le vrai développement ne peut se faire sans eux, mais il faut admettre qu’ils ont été trop souvent bernés. La reconquête de leur confiance est peut-être la tâche la plus urgente à accomplir. Ils ont eux aussi droit à des services de base en santé, en éducation, en moyens de communication, en approvisionnement en eau potable et en services sociaux. Il est possible d’y parvenir, à condition de prendre les mesures qui s’imposent :
• Frein à la dégradation de l’environnement
• Priorité à l’agriculture paysanne et l’encadrement technique nécessaire • Réforme agraire authentique
• Effort vers l’autosuffisance
• Services de mise en marché et conditions de crédit adéquats • Participation des paysans aux choix politiques et économiques • Rythme de développement respectueux des populations
« L’ambition collective est la clef du succès et il n’existe aucune fatalité du sous-développement. » (Landing SAVANE in « Mon ambition pour le Sénégal », 1993)
Une vaste gamme de mesures sociales et économiques méritent d’être prises si l’on veut stimuler les investissements, la production et la conservation des ressources en milieu rural. Il faut prendre les mesures nécessaires en vue d’accroître la productivité des petits agriculteurs : réforme du système de crédit agricole, de la politique des prix agricoles et de la politique commerciale, de sorte qu’une croissance à long terme du secteur soit possible.
En matière de création d’emplois, il faut envisager des programmes à fort coefficient de main-d’œuvre axés sur le reboisement au niveau national, la restauration des sols, la construction, la réfection et l’entretien d’infrastructures (routes, ponts, ports, aéroports, etc.).
o Opter pour une technologie
compatible : au service de l’écologie et des paysans (des solutions pratiques, simples et applicables pour une agriculture respectueuse de l’environnement (naturel et humain)
Entre toutes les technologies existantes, il faut choisir celle qui est la plus compatible, c’est-à-dire la mieux adaptée à la situation actuelle du pays. Ce qui revient à y faire face en termes de limitations et de ressources abordables, sans imposer des contraintes qui risquent d’augmenter encore plus la dépendance envers l’extérieur. Les procédés et équipements compliqués, dispendieux et à fort coefficient de capitaux, sont à éviter.
La technologie doit être suffisamment simple pour qu’elle soit accessible financièrement au plus grand nombre de paysans et que des personnes possédant un niveau d’instruction limitée puissent l’utiliser sans avoir besoin d’un entraînement spécialisé. Voici à quoi doit correspondre une technologie appropriée, c’est-à-dire au service de l’écologie et des populations locales :
• abordable et exploitable à un niveau local (ressources et main-d’œuvre) • peu coûteuse, pour qu’elle ne dépende pas de l’importation de matériaux ou d’équipements dispendieux (saignée en devises étrangères déjà rares).
• indépendante de sources d’énergie coûteuses
• indépendante de pièces de rechange non disponibles ou nécessitant un entretien compliqué
• reproductible localement
• productrice d’emplois au niveau local
• Dans un pays où les paysans ne connaissent que la houe pour travailler la terre, l’introduction de la charrue tirée par des animaux représente une technique qui est « intermédiaire » entre le tracteur et la houe traditionnelle.
« L’ambition collective est la clef du succès et il n’existe aucune fatalité du sous-développement. » (Landing SAVANE in « Mon ambition pour le Sénégal », 1993)
• (Photo : Umutara Community Resource and infrastructure development project)
FAIRE DE L’AUTOSUFFISANCE ALIMENTAIRE UNE PRIORITÉ
Le plus grand défi qui se pose, c’est de multiplier les efforts visant à accroître la production dans le secteur agricole, en ayant pour objectif de réduire la faim et la dépendance alimentaire envers l’extérieur. Ce qui revient à axer les interventions principalement sur la production destinée à la consommation intérieure.
❖ AMÉNAGEMENT DE L’ESPACE POUR SE NOURRIR TOUS LES JOURS ET À LONG TERME
C’est un système d’aménagement de l’espace pour une agriculture durable. Il imite la structure étagée d’une forêt naturelle. Un tel jardin demande une planification minutieuse et du temps, mais une fois réalisé, il présente de nombreux avantages.
• La culture multiple : une tradition à renforcer
(Source : Archives de documents de la FAO)
A partir de cette tradition bien établie, diverses méthodes de culture peuvent être développées pour obtenir en continu une production optimale du jardin potager. Si les conditions climatiques sont favorables et que l’on dispose de suffisamment d’eau, la culture multiple peut fournir des légumes et des fruits pendant toute l’année.
La culture multiple tient compte de l’interaction des différentes cultures les unes sur les autres et sur leur environnement. Outre le fait qu’il s’agit d’un des moyens
« L’ambition collective est la clef du succès et il n’existe aucune fatalité du sous-développement. » (Landing SAVANE in « Mon ambition pour le Sénégal », 1993) clés de se procurer en continu des aliments variés, la culture multiple peut aussi représenter une bonne stratégie pour lutter contre les maladies des plantes.
C’est un système naturel à plusieurs niveaux qui comprennent des arbres de haute et moyenne taille, des arbustes, des plantes grimpantes et du sous-bois feuillu. Dans ce système, les plantes se partagent l’eau et le soleil; elles fournissent de l’ombre et protègent le sol.
N.B. La culture du sol doit être adaptée au milieu (terrain, climat). Si les cultures suggérées ne sont pas adaptées à la région, l’agent local de vulgarisation agricole peut conseiller les exploitants de jardins potagers sur les cultures qui conviennent le mieux.
• La culture intercalaire : un bénéfice pour les plantes (Image Agropedia)
Le fait de cultiver ensemble différents végétaux permet de mieux lutter contre les ravageurs et d’utiliser efficacement les éléments nutritifs du sol. Des plantes comme l’ail, le piment, l’oignon et le basilic repoussent certains ravageurs et peuvent trouver leur place entre les tomates, les carottes ou toute autre culture, du moment que toutes les plantes ont assez de soleil et d’espace pour bien pousser.
Des cultures telles que le niébé, l’arachide, le haricot, le pois bambara et d’autres légumineuses ont des racines capables de fournir de l’azote à d’autres plantes. Ainsi, quand ces légumineuses sont cultivées en association avec d’autres cultures, en particulier celles qui ont besoin de beaucoup d’azote telles que les jeunes plantes de maïs ou de sorgho, les cultures autres que les légumineuses en bénéficient largement. Une autre formule de culture intercalaire bénéfique consiste à planter ensemble l’arachide ou le haricot avec des plantes-racines comme le manioc ou l’igname. (Image Agropedia)
• La culture associée
Beaucoup de plantes traditionnelles, telles que la patate douce et les haricots, sont cultivées en association avec le maïs ou d’autres cultures céréalières pour servir de barrière écologique aux maladies.« L’ambition collective est la clef du succès et il n’existe aucune fatalité du sous-développement. » (Landing SAVANE in « Mon ambition pour le Sénégal », 1993)
1 Dr Legrand Bijoux, in ‘Des mœurs qui blessent un pays (Haïti)’`, 1997).
2 Dr Legrand Bijoux, in ‘Des mœurs qui blessent un pays (Haïti)’`, 1997.