« Défendre la démocratie en Haïti, c’est envoyer un signal fort aux tyrans d’aujourd’hui et de demain. »
Dimanche 22 mai 2021 ((rezonodwes.com))– Face à un projet dictatorial à l’œuvre en Haïti, nous, Haïtiens vivant en Europe, signataires de cette tribune, lançons un cri d’alarme aux citoyens du monde qui partagent les valeurs démocratiques.
C’est un cri de solidarité envers nos sœurs et frères d’Haïti, victimes de l’insécurité généralisée. Des habitants des bidonvilles sont massacrés en toute impunité. Quotidiennement, des hommes, des femmes et des enfants de toutes les couches de la population sont kidnappés contre rançon, torturés, violés, assassinés.
Ces exactions sont l’œuvre de chefs de gangs qui agissent à visage découvert, en toute impunité et dans l’indifférence totale des autorités étatiques. Selon plusieurs organisations de droits humains locaux et internationaux, ces « gangs » seraient instrumentalisés par les plus hautes autorités de l’État afin d’étouffer toute contestation populaire contre le gouvernement. La commission nationale de désarmement et de réinsertion créée par le président de facto Jovenel Moïse va jusqu’à fédérer ces gangs, tristement célèbres, sous l’appellation « G 9 an fanmi e alye », terme créole qui signifie « G 9 en famille et alliés ».
Notre cri d’indignation s’élève face à la mauvaise gouvernance des représentants actuels de l’État. L’économie est exsangue. La corruption atteint des proportions inégalées dans toute l’histoire d’Haïti, alors que la grande majorité des Haïtiens n’a accès ni à la santé, ni à l’éducation, ni au logement et autres droits économiques et sociaux les plus élémentaires.
Le scandale de détournement de plus de 4 milliards de dollars US, issus du projet « Petro Caribe » (un fonds d’aide au développement accordé par le Venezuela), a poussé des millions de jeunes dans les rues ces trois dernières années pour réclamer la reddition de comptes. La réponse du gouvernement aux justes revendications du peuple Haïtien est la répression. Sous le gouvernement de M. Jovenel Moïse, quand les honnêtes citoyens manifestent, ils sont réprimés dans la terreur ; les bandits, eux, ne sont jamais inquiétés.
Notre cri est un cri de révolte face à l’imposture. M. Jovenel Moïse décide de rester au pouvoir au-delà de son mandat constitutionnel qui a pris fin le 7 février 2021. Cela, au mépris de l’article 134.2 de la constitution haïtienne. Son coup de force entre dans un projet dictatorial global. Après avoir délibérément rendu le parlement dysfonctionnel en refusant d’organiser des élections à temps, M. Jovenel Moïse veut imposer au peuple haïtien un référendum inconstitutionnel, pour changer la constitution, en violation flagrante de l’article 284.3 de cette même loi fondamentale qui est claire et sans ambiguïté : « Toute consultation populaire tendant à modifier la constitution par voie de référendum est formellement interdite » ; cette interdiction de modification impliquant a fortiori celle de changer toute la constitution par voie de référendum. Constitution que M. Moïse avait pourtant juré de respecter et de faire respecter. Les tyrans n’ont que faire des lois.
Nous condamnons énergiquement ce projet macabre de référendum inconstitutionnel qui vise à donner un coup de grâce à l’État de droit démocratique, à assurer l’impunité des dirigeants d’aujourd’hui et de demain pour qu’ils n’aient pas à répondre de leurs crimes. En effet, une des dispositions phares de ce projet de constitution est de prémunir les membres du gouvernement de toute poursuite judiciaire pendant et après l’exercice de leur fonction, une sorte d’immunité perpétuelle.
Le peuple haïtien n’acceptera jamais de perdre les acquis démocratiques gagnés de hautes luttes, au prix du sang et de larmes. Nous, Haïtiens vivant en Europe, nous nous tiendrons debout, aux côtés de notre peuple, pour défendre ses droits inaliénables.
Nous lançons un vibrant appel à la solidarité des citoyens du monde pour exiger le retrait de tout soutien de leur gouvernement au régime corrompu et liberticide de M. Moïse. Notre appel s’adresse en particulier aux citoyens des États-Unis d’Amérique, du Canada et de l’Europe pour qu’ils demandent à leur gouvernement respectif de ne plus soutenir l’insoutenable, et de rester fidèles aux valeurs démocratiques. Différentes actions sont possibles : pétitions, manifestations, sensibilisation des parlementaires pour pousser les dirigeants du monde à soutenir une transition démocratique en Haïti, afin que les Haïtiens puissent reprendre en main leur destin.
Près d’une centaine d’Haïtiens résidant en Europe ont signé cette tribune dont :
- Beethova Obas (Belgique)
- Gerda Cadostin (France)
- Patrick Dorvil (Luxembourg)
- Cellinie Constant (Pays-Bas)
- Damien François (Suisse)
- Sergo Alexis (France)
Pour authentification :
Alain Mondésir