L’analyse de l’état de la décentralisation haïtienne au vu de la théorie de décentralisation : le constat d’un effet d’affichage

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Joram Vixamar

Mardi 2 février 2021 ((rezonodwes.com))–

Cet article analyse l’état de la décentralisation haïtienne à travers la théorie de décentralisation en mettant l’accent sur, notamment, la théorie de Charles Roig. Il passe en revue le socle juridique haïtien qui tend à établir une gouvernance par la décentralisation en commençant par la loi constitutionnelle du 29 mars 1987 pour arriver aux derniers instruments juridiques (les lois, les décrets du Conseil des ministres, les arrêtés présidentiels, etc.) portant sur l’organisation et le fonctionnement des Collectivités territoriales. En conséquence, l’auteur, docteur Joram Vixamar, Doyen de la Faculté des Sciences Juridiques, Politiques et Diplomatiques (FSJPD) de l’Université Publique du Bas Artibonite à Saint-Marc (UPBAS) et chercheur associé au Laboratoire Interdisciplinaire de Recherche en Innovations Sociétales ( LiRIS) de l’université Rennes 2 en France, relève un « effet d’affichage » dans l’application du droit des collectivités territoriales en Haïti, ainsi que de nombreuses contraintes des collectivités territoriales relatives à l’autonomie financière, à l’ambiguïté du cadre légal, au blocage du processus de décentralisation au niveau de la collectivité dérivée (le département) dû à la non réalisation des élections indirectes, entre autres. Cet article précède la publication de son ouvrage intitulé : « Comprendre les relations entre l’Etat et les Collectivités décentralisées d’Haïti dans le processus de décentralisation ».

1-   Introduction

Analyser les questions de décentralisation, c’est faire référence à une certaine forme d’organisation de l’Etat, autrement dit « une manière d’être de l’Etat » (Hauriou, 1891, p.471) ou encore parler « d’une structure particulière de l’organisation de l’Etat » (Burdeau, 1968, t.2, p.371). Cela dit, on considère que la décentralisation est non seulement conçue comme une forme d’organisation de l’Etat, mais elle est aussi la façon dont l’Etat consent à accueillir des réalités locales (Auby, 2006, p.127). Par ailleurs, Bernard Jean Auby (2006) souligne aussi qu’en tant que forme d’organisation de l’appareil d’Etat, la décentralisation repose sur deux piliers. Le premier consiste à faire une distinction de base entre l’Etat fédéral et l’Etat unitaire considérés comme les deux formes possibles d’organisation de l’Etat. Tandis que le second, correspond à la conception selon laquelle la décentralisation est une forme d’aménagement de l’Etat unitaire, dans laquelle les autorités administratives non étatiques gèrent des affaires administratives particulières dans un certain rapport d’indépendance par rapport à l’administration d’Etat (p.127). La République d’Haïti est donc organisée selon le second, c’est-à-dire cette forme d’Etat unitaire. Né au lendemain de l’indépendance nationale, le 1er janvier 1804, avec le statut d’Etat unitaire à organisation centralisée, depuis des temps, particulièrement à partir de la seconde moitié du XXe siècle, l’Etat haïtien s’est transformé juridiquement en un « Etat unitaire à organisation décentralisée ». Cette transformation structurale de l’Etat haïtien est le résultat des luttes menées par le peuple haïtien qui ont poussé la classe politique à opter pour une nouvelle orientation de l’Etat en 1987 par la démocratisation de la société et la valorisation du milieu local.

Aujourd’hui, il est clair que plus de trois décennies après la réforme décentralisatrice engendrée par les constituants en mars 1987, cette décentralisation n’est pas encore effective. Une analyse de la réalité locale d’Haïti par rapport à la théorie de la décentralisation est nécessaire pour conforter cette hypothèse. Cela est à même de renforcer le caractère scientifique de ce travail pour citer Marcel Proust ( Paris 1871-Paris 1922) qui souligne « qu’une œuvre où il y a des théories est comme un objet sur lequel on laisse la marque du prix ». En conséquence, cette analyse du système de décentralisation haïtienne sert à constater la situation et le fonctionnement des collectivités territoriales en mettant l’accent sur les principales théorie de décentralisation. Elle tend à observer et, du même coup, à étudier la situation des entités décentralisées et le désaccord qui existe entre le droit et la réalité au niveau territorial. Cela nécessite donc une analyse des théories de la décentralisation par rapport à l’évolution actuelle de la décentralisation en Haïti afin de mesurer les progrès de ce système et de constater ses faiblesses.

Si le terme théorie correspond à un ensemble de notions, d’idées et de concepts abstraits appliqués à un domaine particulier (Dictionnaire Larousse, 2019), la théorie de la décentralisation doit nous envoyer à l’étude de différents courants de pensées relatives à la notion de décentralisation, c’est-à-dire la manière dont plusieurs auteurs ont pensé et conçu la décentralisation comme forme de gouvernance. Par exemple, en France comme en Haïti, les théories juridiques, notamment constitutionnelles, ont approuvé une gouvernance avec la décentralisation. Depuis 2003, l’article premier de la Constitution française précise que la France est un Etat unitaire dont l’organisation est décentralisée. De l’autre côté de l’Atlantique, en Haïti, la Constitution du 29 mars 1987, amendée le 9 mai 2011, a opté, dans son préambule, pour une décentralisation dite « effective ». Cela dit, dans ces deux Etats, la décentralisation recouvre un statut de nature juridique et constitutionnelle. Cependant, la notion de décentralisation ne peut pas être conçue comme une simple forme de gouvernance, car elle suscite des questions relatives à la séparation des affaires publiques entre le centre et la périphérie, aux transferts de compétences, à l’organisation du pouvoir, entre autres. Elle nous renvoie à la procédure relative « aux transferts de compétences et de pouvoirs de décision de l’Etat central au profit d’autres personnes morales de droit public, juridiquement distinctes de lui et qui disposent d’une certaine marge d’autonomie tout en restant sur son contrôle » (Roux, 2016, p.5). C’est la raison pour laquelle, pour mesurer le résultat du processus de décentralisation d’un pays, il est important de confronter la doctrine à la réalité administrative de l’Etat en question.

Il est certain qu’étudier la décentralisation à travers la théorie, d’un pays à l’autre, c’est entrer dans une recherche qui doit indubitablement mener à l’analyse et à l’examen du mode d’organisation de l’Etat par la définition des notions, notamment de « décentralisation ». Toutefois, cette notion n’est pas nouvelle puisque nombre de chercheurs ont déjà travaillé sur ce terme. De nombreux auteurs ont réalisé des travaux dans ce domaine et ont élaboré des théories dans le but de cerner et de définir le concept de décentralisation envisagé comme un mode d’organisation de l’Etat. De ce fait, pour bien maîtriser la thématique de cette étude, qui consiste à analyser la décentralisation haïtienne à travers la théorie de la décentralisation afin de parvenir à un résultat plus rationnel, nous devons tenir compte de ce que dit la doctrine sur la notion de « décentralisation » en tant que forme d’organisation de l’Etat unitaire. De surcroit, en analysant la décentralisation à travers la doctrine, il sera possible d’identifier et de cerner des variables comme la « déconcentration », la « centralisation », entre autres. Pour ce faire, étant donné que nous constatons que la construction du système de décentralisation haïtienne est en partie une imitation de celui de la France, il importe de passer en revue la doctrine française avant de mettre l’accent sur le mode d’organisation de l’Etat haïtien.

2-   La décentralisation selon la doctrine française

Le mot « décentralisation » apparait pour la première en France en 1829 lors des débats sur les deux projets de loi relatifs à l’administration départementale et communale par le gouvernement Martignac qui aboutiront à la loi de 1831 sur les communes et à celle de 1833 sur les départements, avant de faire, ensuite, son entrée pour la première fois dans le complément du Dictionnaire de l’Académie française, avec pour définition « l’action de détruire la centralisation » (Roux, 2016, p.65). Parler, ici, de décentralisation, c’est mettre en relief une notion transversale dont la définition doit conduire à une analyse générale suivant le système politique en question. En réalité, le terme « décentralisation » n’a fait l’objet d’aucune définition rigoureuse et univoque. Il existe une multitude de définitions d’auteurs de tendances différentes pour cette notion. Quelques années après les grandes lois sur la décentralisation du 10 août 1871(Loi de 1871-O8-10 relative aux conseils généraux, J.O. 29 août 1871) sur le département et du 5 avril 1884 (Loi du 5 avril 1884 sur l’organisation municipale, J.O. 6 avril 1884) sur l’organisation municipale, E. De Macère (1895), l’un des plus célèbres concepteurs et promoteurs de l’idée de décentralisation en France, avait raison de répondre à la question, « Décentraliser, qu’est-ce que c’est ? » : « C’est un terme un peu vague et qu’il faut conserver pourtant puisqu’il exprime un vœu intense, un sentiment général, c’est comme un cri sorti de milliers de poitrines oppressées, mais c’est un mot dont le sens n’est pas défini » (p.1).

Cette remarque d’indétermination présuppose que la décentralisation a été dotée depuis à l’origine d’un contenu idéologique extrêmement large et élastique. Cette indétermination a été profitable à l’évolution de la décentralisation puisque chacun a pu lui attribuer une signification qui lui convenait (Roig,1966, p.445). Georges Burdeau (1949) expliquerait que cette indétermination politique se traduit par le fait qu’à la fin du XIXe siècle la référence à la décentralisation a pu être revendiquée tant par la droite traditionnaliste que par la gauche anarchisante, associées dans une même haine de l’Etat jacobin et de l’Etat napoléonien, les uns y voyant « un moyen d’abattre la République », les autres la promesse « d’un libre gouvernement des hommes par eux-mêmes », une anticipation de l’autogestion. Cette ambigüité fit la fortune de l’idée décentralisatrice (p.49).

Ainsi, tout au long de l’histoire, la décentralisation a été portée et défendue par beaucoup d’auteurs, relevant de tendances politiques diverses, voire opposées. Par exemple : le traditionaliste de droite, De Bonald ; le conservateur Taine ; le libéral Tocqueville ; le socialiste utopique, Proudhon. Ainsi, comme le dit Mény (1974), un consensus est trouvé autour de cette idée entre les forces politiques, « cette convergence [résultant] du fait que chacun trouve ce qu’il veut dans la décentralisation ».

Le doyen Hauriou (1882), dans la doctrine originelle, semble présenter la définition la plus explicite et complète de la décentralisation, dont on trouvera écho chez des auteurs du droit administratif (Duguit et al., dans l’acte d’administration, par exemple) : « au point de vue du droit, la décentralisation est une manière d’être de l’Etat, caractérisée par ce fait que l’Etat se résout en un certain nombre de personnes administratives qui ont la jouissance de droit de puissance publique, et qui assurent le fonctionnement des services publics, en exerçant ses droits, c’est-à-dire en faisant des actes d’administration. » (P. 471). La décentralisation peut être cernée aussi comme une problématique, tout comme un contenu. Lorsque la décentralisation est prise comme une problématique, elle parait bien concerner « une manière d’être de l’Etat » ou encore « une structure particulière de l’organisation de l’Etat » (Hauriou, 1882, p.471). En termes de contenu, la décentralisation apparait comme une forme particulière de l’Etat dans laquelle est opérée un transfert de compétence vers une pluralité de personnes publiques.

            Charles Eisenmann, qui développe les thèses de Kelsen concernant la centralisation et la décentralisation des ordres juridiques (Théorie générale du droit de l’Etat, 1997, P.364), a construit une appréhension théorique de la décentralisation qui, en résumé, repose sur deux idées. Pour lui, il y a décentralisation, si deux éléments sont réunis :

Le premier est l’existence d’autorités qui dédient leur activité à un groupe particulier de personnes, défini par le lien de ces personnes avec un territoire (pour Eisenmann, la décentralisation est un élément de la structuration personnelle des compétences administratives).

Le second est le fait que, sur ces autorités, les organes de l’Etat n’exercent qu’un contrôle réduit en ce sens qu’ils ne peuvent normalement pas priver leurs actes d’effet pour des raisons discrétionnaires : aucune autorité ne doit pouvoir discrétionnairement leur « prescrire la conduite à tenir » ou « remplacer leur conduite par une conduite différente (Auby, 2006, P. 128). 

            En matière de territorialisation, la décentralisation est bien, en soi, un vecteur de territorialisation du droit. Elle l’est, en résumé, par construction juridique et par effet sociologique (Auby, 2006, p. 18). On suppose que là où il y a la décentralisation, il y a aussi un certain niveau de territorialisation du droit. Cela dit, lorsque dans un système juridique, il n’existe aucune distinction territoriale du droit, c’est-à-dire que toutes les règles juridiques appliquées sont rigoureusement les mêmes sur tout le territoire, on est en présence d’une situation de centralisation absolue. Par contre, si certaines décisions, en plus ou moins grand nombre, sont prises à l’échelle locale et, par conséquent, créent une situation juridique particulière, il y a la présence de la décentralisation. C’est le scénario où la décentralisation est conçue comme « vecteur de territorialisation du droit par construction juridique ».

Par contraste, la décentralisation est « vecteur de territorialisation par effet sociologique » lorsqu’elle contribue, par essence, d’une façon ou d’une autre, à l’élargissement et/ou l’allongement au niveau local des circuits administratifs, politiques et juridiques de l’action publique. Jean Bernard Auby (2006) explique, dans ce cas, que la complexification du droit, comme des modalités de l’action publique dans nos sociétés, a pour conséquence que les politiques publiques produisent aujourd’hui leurs effets au travers de constellations de mécanismes et de vecteurs qui font qu’entre le centre de leur pilotage et le stade où elles produisent des effets concrets s’introduisent des échelons de plus en plus nombreux dans lesquels l’impulsion initiale se déforme, s’infléchit, se réoriente (p.19). Ces phénomènes sont largement décrits par Ulrich Beck, pour ne citer que cet auteur (Aubier, 2001, p.471 et s.).

Cependant, on ne doit pas confondre la déconcentration avec le phénomène par lequel la décentralisation, comme vecteur de territorialisation, contribue par effet sociologique à l’allongement des circuits administratifs, politiques, entre autres, au niveau local. Généralement, les notions de déconcentration et de décentralisation renvoient à deux formes d’organisation distinctes : la déconcentration peut être analysée comme une modalité de la centralisation ; les décisions prises par les administrations déconcentrées le sont en effet selon des directives fixées par le pouvoir central. Les autorités déconcentrées sont soumises au pouvoir hiérarchique des autorités centrales. En revanche, dans l’hypothèse de la décentralisation, la personne publique dispose d’un pouvoir de décision plus autonome, car elle agit pour son propre compte et en son nom, indépendamment du fait qu’elle doive respecter les règles de droit en vigueur (Donier, 2016, p.2). Donc, entre la déconcentration et la décentralisation, la doctrine a établi une distinction même si la première, dans des cas précis, peut servir de complément à la seconde. Pierre Sadran considère que « la distinction entre déconcentration et décentralisation essentialise ce qui n’est en réalité qu’une différence de degré dans l’échelle de la décentralisation, terme génétique s’il en est » (2015, p.47). Hauriou (1891), pour sa part, considère « la déconcentration comme un aménagement de la centralisation alors que la décentralisation se présente, au moins en théorie, comme une rupture par rapport à celle-ci, les collectivités territoriales apparaissant comme autrui par rapport à l’Etat ».

Certains points de vue cherchent à faire un rapprochement entre la déconcentration et la décentralisation, en faisant ressortir leurs points d’opposition et de complémentarité (Roux, 2016, p.67). La déconcentration apparait alors en opposition à la décentralisation quand elle est considérée comme un mode d’aménagement de la centralisation. Dans ce cas, elle consiste à redistribuer le pouvoir de décision au sein d’une même personne publique en le transférant des autorités les plus élevées dans la hiérarchie administrative à des autorités subordonnées. Cela ne réduit pas le champ d’intervention de l’autorité hiérarchique, mais permet seulement une redistribution des pouvoirs en son sein sans toutefois compromettre son autorité. Odilon Barrot, président du Conseil sous la IIème République (France), dans sa conception sur la déconcentration, souligne que « c’est toujours le même marteau qui frappe, mais on en a raccourci le manche » (Roux, 2016, p.68). Cela dit, en considérant l’organisation de l’Etat, la déconcentration peut prendre plusieurs formes. Il peut s’agir d’un transfert d’autorité d’un haut fonctionnaire de l’Etat à un ou plusieurs de ses subalternes (le transfert opéré par le ministre de l’Education à un recteur, par exemple) ou encore d’une situation dans laquelle des autorités déconcentrées, qui représentent l’Etat, disposent de certaines compétences sur des circonscriptions administratives (les préfets des régions et des départements en France – ou les délégués départementaux et vice délégués des arrondissements en Haïti-, à titre d’exemple). En tout état de cause, les autorités déconcentrées doivent se soumettre à leur autorité hiérarchique. Toutefois, on ne doit pas confondre non plus la déconcentration avec la « délocalisation », phénomène qui consiste, dans le cadre de la politique d’aménagement du territoire, à transférer d’une circonscription de l’Etat à l’autre, une institution ou un établissement public sans transfert de compétence, mais restant toujours sous le contrôle de l’autorité centrale, dans le cadre d’une politique de décongestion. A titre d’exemple, la réalisation d’un Conseil des ministres dans un département autre que la capitale, est aussi une activité délocalisée.

Le décret portant sur la charte de la déconcentration française précise que « la déconcentration consiste à confier aux échelons territoriaux des administrations civiles de l’Etat le pouvoir, les moyens et la capacité d’initiative pour animer, coordonner et mettre en œuvre les politiques publiques définies au niveau national et européen, dans un objectif d’efficience, de modernisation, de simplification, d’équité des territoires et de proximité avec les usagers et les acteurs. Elle constitue la règle générale et de répartition des attributions et des moyens entre les échelons centraux et territoriaux des administrations civiles de l’Etat […] » (Décret No2015-510 portant la charte de la déconcentration, J.O. 7 mai 2015, modifiant le décret du 1er juillet 1992).

La doctrine explique que même si parfois elles se présentent comme opposées, ces deux formes d’organisation de l’Etat sont pourtant complémentaires. Cela s’explique par le fait qu’elles (décentralisation et déconcentration) visent toutes deux à se rapprocher des administrés au niveau local et à prendre des décisions permettant d’organiser les politiques publiques locales en vue de donner des services publics à la population. En France, cette complémentarité semble être affirmée depuis longtemps par la loi du 6 février 1992 sur l’administration territoriale qui dispose que : « L’administration territoriale est assurée par les Collectivités territoriales et par les services déconcentrés de la République […] » (Loi no 92-125 relative à l’Administration territoriale de la République, J.O. 6 février 1992, art. 1). On considère que la déconcentration précède parfois la décentralisation dans la mesure où la première peut aider la seconde. Cela dit, dans certains Etats fortement centralisés, le début d’une déconcentration peut favoriser à terme la décentralisation en « habituant l’administration à ce que les dossiers soient traités à l’échelon local au plus près des administrés » (Bourdon et al., 1998, p.13). Cependant, la déconcentration peut aussi favoriser et accompagner la décentralisation comme cela s’est fait en France dans les années quatre-vingts (Roux, 2016, p.68). Dans cette perspective, les élus locaux souhaitent toujours avoir en face d’eux des interlocuteurs valables, représentants de l’Etat, qui soient à même de discuter et de décider au sujet des grands problèmes territoriaux. C’est ce que l’on peut appeler l’Etat territorial. Certains sociologues vont plus loin en parlant de la notion de « déconcentralisation » comme modalité d’organisation de l’Etat ; ils expliquent que lorsque dans « un système, l’Etat accompagne systématiquement chaque nouvelle étape de la décentralisation d’un nouveau degré de déconcentration afin de garder le contrôle, ce procédé est appelé déconcentralisation » (Dutercq, 2003, p.88).

Aujourd’hui, pour contextualiser le concept de décentralisation à l’intérieur de l’Etat unitaire, on ajoute au concept « Etat unitaire », la variable de décentralisation pour former la thématique « d’Etat unitaire à organisation décentralisée » ou tout simplement « l’Etat unitaire et décentralisé ». L’objectif de cette forme d’Etat consiste le plus souvent à donner plus de responsabilités aux collectivités territoriales en vue de participer à la gestion des affaires publiques locales. Dans sa doctrine, Nicolas Kada précise que la décentralisationpermet d’accorder une certaine autonomie à des collectivités territoriales libres de s’administrer comme elles le souhaitent, mais toujours dans le cadre d’une unique loi nationale qui continue de s’imposer à elles. Dès lors, les collectivités décentralisées ne sont pas dans une situation de dépendance à l’égard du pouvoir central et peuvent évoluer de façon relativement diversifiée (Kada, 2010, p.8). C’est à partir de cela que la distinction entre les types de décentralisation est nécessaire. Généralement, la décentralisation se divise en deux grands groupes : décentralisation territoriale et décentralisation fonctionnelle. Le premier groupe correspond à l’existence de Collectivités territoriales, considérées comme des personnes juridiques distinctes de l’Etat et bénéficiant d’une certaine autonomie administrative et financière. Tandis que le second consiste à attribuer une certaine autonomie de gestion et d’action à des services publics qu’ils soient administratifs (universités, hôpitaux, etc.) ou industriel et commerciaux (Aéroports de Paris, etc.). Ainsi, en dehors de toute définition constitutionnelle et législative, la doctrine présente les collectivités territoriales de manière classique: « les collectivités territoriales sont considérées comme des personnes morales de droit public ayant une assise territoriale et bénéficiant d’une compétence générale pour administrer leurs propres affaires par des organes élus représentant les intérêts collectifs de la population, sous le contrôle de l’Etat, contrairement aux établissements publics, elles ne sont rattachées à aucune autre personne publique. » (Janicot, 2011, p.227).

En analysant le contenu des dispositions juridiques susmentionnées, il apparait que le droit des collectivités territoriales d’Haïti se rapproche de celui de la France, notamment de ceux qui soutiennent que la déconcentration est un complément de la décentralisation. D’ailleurs, nous avons indiqué tout au début de cet article que la France (la Vème République) est organisée selon ce modèle d’Etat unitaire à organisation décentralisée. Il en est de même pour la République d’Haïti, plus particulièrement, à partir de 1987. L’analyse du système haïtien est nécessaire pour affirmer cette hypothèse et, du même coup, mesurer la dimension de la décentralisation haïtienne.

3-   Le système décentralisé haïtien au regard de la théorie décentralisatrice de Charles Roig

Confronter des approches théoriques à la réalité de la décentralisation haïtienne, c’est cerner la dimension de cette décentralisation. Aujourd’hui, il est certain que la décentralisation suscite d’un grand intérêt et de nombreux débats tant au niveau national qu’international au point que l’on cherche à l’appréhender dans toute sa dimension. Elle peut être mesurable dans une société lorsque que l’on arrive à apprécier la valeur ou le poids des compétences déléguées aux instances décentralisées et leur niveau d’implication dans la gestion des affaires publiques. La distinction entre les affaires locales et les affaires nationales revêt d’une importance capitale dans la conception de la décentralisation. Nombreux sont les auteurs qui essayent d’expliquer la dynamique de la décentralisation à travers leurs différentes doctrines. Il importe de choisir la doctrine décentralisatrice de Charles Roig pour confronter la décentralisation haïtienne puisque, à notre avis, celle-ci contient suffisamment d’éléments pour nous aider à cerner le système haïtien dit « unitaire à organisation décentralisée » dans toutes ses dimensions par la confrontation de cette théorie de décentralisation aux structures administratives et juridiques ainsi qu’aux réalités locales haïtiennes qui ont subi et qui ne cessent de connaitre de profondes mutations en raison de l’évolution et de la détérioration de la situation économique et sociale d’Haïti, d’autant que cette théorie est très connue par des chercheurs travaillant sur la décentralisation. Ainsi, dans ses travaux, le juriste et politiste, Charles Roig (1935-2002), a fait état de quatre critères sur lesquels peuvent être fondées les théories de la décentralisation, à savoir la distinction entre les affaires nationales et les affaires locales, l’autonomie des organes locaux, la dimension politique (les élections locales), ainsi que la définition normative et culturelle (Roig, 1966, PP.445-471), critères au vu desquels nous analyserons la décentralisation haïtienne de 1987 à nos jours.

3-1. La distinction entre les affaires nationales et les affaires locales

Le premier critère est fondé sur une distinction entre les affaires publiques nationales qui relèvent des compétences des autorités centrales et les affaires publiques locales qui sont de la compétence des autorités locales. Alexis De Tocqueville (1835) a bien expliqué ces deux catégories de responsabilités publiques et a tiré les conséquences de l’influence de l’une sur l’autre en indiquant que « certains intérêts sont communs à toutes les parties de la nation, tels que la formation des lois générales et les rapports du peuple avec les étrangers. D’autres intérêts sont spéciaux à certaines parties de la nation, tel que les entreprises communales, par exemple ». Et il ajoute le fait de « concentrer le pouvoir de diriger les seconds, c’est que j’appellerai la centralisation administrative » (Tocqueville, 1835, ch.5). Cela dit, lorsque le pouvoir central accapare les affaires locales, on parle du phénomène de centralisation. Il convient de souligner que la répartition des affaires publiques entre le pouvoir central et le pouvoir local peut se faire en fonction du système de valeur et du niveau de développement économique de la société.

En Haïti, la Constitution haïtienne de 1987 établit les règles relatives au premier critère de Charles Roig. En effet, après les tentatives avortées avec, notamment, la Constitution de 1843 dans l’établissement d’une distinction entre les affaires nationales de l’Etat et celles locales, gérées par les autorités municipales ( les maires à l’époque), c’est la loi fondamentale du 29 mars 1987 qui va établir de façon plus claire cette répartition à partir de la création de trois niveaux de collectivités territoriales (la section communale, la commune et le département) comme personne morale de droit public à l’article 61 avec une certaine autonomie pour gérer des affaires publiques locales (Constitution du 29 mars 1987 amendée le 9 mai 2011, J.O. Le Moniteur No 96, 19 juin 2012, art. 61). Ainsi, l’article 74 de cette Constitution précise que le Conseil municipal a le privilège de veiller à la gestion des biens fonciers du domaine privé de l’Etat situés dans les limites de sa commune par les services compétents conformément à la loi. L’article 77, pour sa part, consacre le statut de la personne morale du conseil départemental qui lui permet de gérer une partie des affaires publiques de son ressort. D’autres textes abordent dans le même sens que la loi fondamentale de 1987 en définissant des compétences pour chaque catégorie de collectivité locale à travers, notamment le décret du 1er février 2006 fixant le cadre général de la décentralisation, de l’organisation et du fonctionnement des Collectivités territoriales haïtiennes, dans la perspective de la fourniture adéquate des services publics à la population, du développement local et de la démocratie participative. Au titre III de ce décret, les compétences techniques des collectivités territoriales, toutes catégories confondues, ont été définies dans les domaines suivants : foncier ; environnement et gestion des ressources naturelles ; santé et hygiène ; éducation, formation professionnelle et alphabétisation ; culture, sports et loisirs, protection civile ; assainissement et secours ; pompes funèbres et cimetières ; eau et électricité ; etc. De plus, les instances dites décentralisées détiennent des compétences administratives et politiques. Le décret fixant le cadre général de la décentralisation haïtienne dispose que : « La décentralisation consacre le droit des Collectivités territoriales à s’administrer de manière autonome et à gérer leurs affaires propres afin de promouvoir le développement à la base, de favoriser la participation à travers la gouvernance locale. Elle implique soit le transfert vers les Collectivités territoriales de compétences antérieurement exercées par le pouvoir central, soit l’attribution à ces collectivités de compétences non exercées par aucune autre entité publique. » (Décret du 1er février 2006 fixant le Cadre général de la Décentralisation, ainsi que les Principes d’Organisation et de Fonctionnement des Collectivités territoriales haïtiennes, J.O. Le Moniteur No 57, 14 juin 2006, art.2). Cependant, elle précise que : « La décentralisation se réalise dans le strict respect de l’unité nationale, de l’intégrité territoriale et des lois de la République.» Cette définition envisage de conditionner la notion de décentralisation à la situation des collectivités territoriales.

 Cependant, si des dispositions juridiques ont été prises pour qu’il y ait une répartition des compétences entre l’Etat et les collectivités territoriales en vue de concrétiser le projet de décentralisation de 1987, cette répartition des compétences entre le centre et la périphérie ainsi que la distinction entre les affaires de l’Etat et celles des collectivités territoriales ne suffisent pas pour faire fonctionner un système décentralisé. La décentralisation territoriale exige d’autres mesures d’accompagnement, notamment financières.

3-2.       L’autonomie des organes locaux

Le deuxième critère sur lequel Charles Roig a mis l’accent, est celui de l’autonomie financière et juridique dont bénéficient les organes périphériques. Pour lui, la doctrine française de décentralisation a été conduite par la généralisation de ce critère depuis le début du XXème siècle en affirmant que la décentralisation territoriale n’est pas, comme elle l’avait admis jusqu’alors, le seul type décentralisation : à côté d’elle, il faut faire place à un second type, la décentralisation par « services » ou « technique ». Cette « décentralisation par services » concerne des services soustraits à l’autonomie centrale qui, en principe, devraient diriger, et être constitués en « administration à direction propre, distincte et plus ou moins autonome » (Eisenmann, 1947). En France, on fait allusion aux services constitués en établissements publics. Par ailleurs, parler des établissements publics, c’est faire référence à des personnes morales qui relèvent du droit public et qui disposent d’une autonomie administrative et financière pour accomplir une mission d’intérêt général. On distingue les établissements publics de l’Etat et ceux des collectivités territoriales, tout dépend de l’entité de rattachement de l’établissement public (entité nationale ou locale) et de sa zone d’action. En France, on peut faire référence aux différents établissement publics selon leurs domaines d’intervention, par exemple : les établissements publics de santé (hôpitaux), d’enseignement (université, lycée), etc. Par contre, en Haïti, leurs statuts juridiques ne sont pas amplement clairs en raison de l’ambivalence du cadre légal les régissant. En Haïti, il est possible de les identifier et de les répartir au niveau central et local, tout dépend de leur zone d’affectation et/ou de leur autorité de création. Ainsi, si au niveau de l’Etat central d’Haïti, on peut retrouver tout un ensemble d’établissements publics comme des universités, des lycées, des écoles, entre autres, il est difficile d’identifier les établissements publics des collectivités territoriales qui fonctionnent actuellement. Certes, dans les écrits, il est dit que les collectivités locales peuvent disposer des institutions publiques comme des écoles communautaires ou communales, des bibliothèques municipales et/ou Centres de Lecture et d’Animation culturelle (CLAC) et d’autres établissements publics, mais, dans la réalité, ces institutions n’ont pas été créées dans toutes les collectivités décentralisées, faute de moyens financiers. Seule la commune dispose actuellement de certains établissements publics, d’autant que les quelques municipalités du pays qui les possèdent ne sont pas nombreuses. De plus, les établissements publics de la collectivité communale d’Haïti n’ont aucune autonomie administrative et financière. D’ailleurs, l’ouverture ou la création de certains CLAC est trop souvent financée par des Organisations Non Gouvernementales (ONG) dont ils restent tributaires. Cependant, si le droit haïtien ne comporte pas de textes consacrant l’autonomie des établissements publics des Collectivités locales, les constituants haïtiens ont néanmoins consacré celle des collectivités territoriales sans garantir qu’elle sera mise en œuvre réellement.

En effet, cet aspect de l’autonomie juridique et financière des organes dans la décentralisation que soulève Ch. Roig, a beaucoup d’importance. Il regroupe un ensemble de compétences décisionnelles dont bénéficie l’autorité gestionnaire locale en matière administrative et financière. Dans ce cas, ces responsabilités doivent être essentiellement distinctes de l’attribution régalienne de l’Etat. D’après la législation haïtienne, l’autonomie des Collectivités territoriales s’entend « du droit et de la capacité effective de ces dernières à régler des affaires publiques de leur compétence, sous réserve des compétences exclusives de l’État, et à gérer selon la loi et au profit de leurs populations, les ressources dont elles disposent. » (Décret du 1er février 2006 fixant le Cadre général de la Décentralisation, ainsi que les Principes d’Organisation et de Fonctionnement des Collectivités territoriales haïtiennes, J.O. Le Moniteur No 57, 14 juin 2006, art.20). Après la création des 3 niveaux de collectivités territoriales à l’article 61, la Constitution haïtienne consacre l’autonomie locale. Ainsi précise-t-elle à l’article 66 que « la commune a l’autonomie administrative et financière. » Puis, elle ajoute, à l’article 77, que « le département est une personne morale. Il est autonome. » Cela dit, le droit national reconnait également le critère de l’autonomie (juridique et financière) dont doivent bénéficier les collectivités territoriales dans le système décentralisé haïtien. Cependant, bien que la loi fondamentale du 29 mars 1987 ait créé les trois catégories de collectivités locales, elle ne leur a pas toutes attribuées les mêmes statuts juridiques et financiers. Si la commune et le département disposent constitutionnellement de l’autonomie financière, la Constitution ne dit rien quant au statut de la section communale. Cette imprécision en ce qui a trait à la définition de l’autonomie de la plus petite collectivité locale du pays, laisse un flou juridique dans le système territorial et risque d’avoir des conséquences négatives quant à la capacité financière de la section communale à pouvoir servir la population locale correctement. Or, dans un système décentralisé, les instances décentralisées doivent avoir la capacité financière pour agir localement, bien que cet aspect financier ne soit pas le seul critère sur lequel est fondée la décentralisation territoriale.

3-3.       Le critère électoral

Le troisième critère prend en considération la dimension politique dans la construction de la décentralisation. Selon ce critère, la définition de la décentralisation est formulée en fonction d’une approche politique : l’élection des agents. On veut parler de l’élection des organes des collectivités locales ou des élus locaux. Plusieurs auteurs, anciens comme contemporains, ont soutenu cette approche et ont pensé que le critère électoral est indispensable à la construction de la décentralisation. Hauriou adoptait aussi ce critère en considérant que la « décentralisation consiste en la création de centres d’administration publique autonomes où la nomination des agents provient du corps électoral de la circonscription et où ces agents forment des agences collectives ou des assemblées. » (1919, p.171). Ainsi, le caractère électoral est le principal point qui marque la différence entre les collectivités territoriales et les établissements publics. Cela dit, les chefs des établissements publics sont nommés tandis que les autorités des collectivités territoriales, c’est-à-dire les élus, proviennent d’un processus électoral, autrement dit des élections. Un auteur contemporain, Vedel, est plus clair en ajoutant que « la décentralisation a une valeur démocratique puisqu’elle se ramène à faire gérer le maximum d’affaires publiques par les intéressés eux-mêmes ou par leurs représentants. » (1961, p.460). De cette logique, on suppose que l’attribution des compétences à des organes locaux est loin d’être suffisante si l’autonomie locale n’est pas définie en amont ou à la base, c’est-à-dire pendant la constitution, l’établissement ou l’élection même de l’organe dirigeant de la collectivité locale. Cela dit, les dirigeants locaux doivent être l’émanation du peuple. Donc, l’établissement des dirigeants locaux nécessite des élections au suffrage universel direct ou indirect, ce qui va établir la distinction entre le système de déconcentration où les organes périphériques sont nommés par l’Etat central et celui de décentralisation dans lequel ils proviennent des élections. Cela rentre aussi dans une démarche démocratique qui implique la participation des citoyens et encourage la démocratie locale. Le facteur électoral laisse croire que la décentralisation ne peut pas être fonctionnelle dans un système qui n’est pas démocratique.

La législation haïtienne post 1987 ne fait pas l’économie du critère électoral dans la construction de la décentralisation. La loi fondamentale de la République d’Haïti traite de façon générale de la question des élections des organes locaux et laisse la spécificité aux législateurs haïtiens. La Constitution du 29 mars 1987 veut que les autorités locales soient constituées à travers les élections. Elle indique à l’article 63 que « l’administration de la section communale est assurée par un Conseil de 3 membres élus au suffrage universel pour une durée de 4 ans. Ils sont indéfiniment rééligibles. » Puis, elle continue pour déterminer l’élection au niveau de la commune ajoutant, à l’article 66, que « […] chaque commune est administrée par un Conseil de trois membres élus au suffrage universel dénommé conseil municipal ». Enfin, elle précise, à l’article 78, que le département doit être administré par « un conseil de trois membres élus pour 4 ans par l’assemblée départementale ». Le décret du 1er février 2006, pour sa part, précise que « Chaque collectivité est administrée par un organe exécutif : le Conseil, et par un organe délibérant : l’assemblée. Les membres des conseils et des assemblées sont élus» (Décret du 1er février 2006 fixant le Cadre général de la Décentralisation, ainsi que les Principes d’Organisation et de Fonctionnement des Collectivités territoriales haïtiennes, J.O. Le Moniteur No 57, 14 juin 2006, art.21). Cependant, le problème du système électoral haïtien réside, en grande partie, aujourd’hui dans la réalisation des élections indirectes qui demandent une longue procédure, avec l’organisation des élections directes pour ensuite organiser l’élection au second degré de l’organe exécutif de la collectivité dérivée, notamment le département. Cette procédure électorale indirecte est valable aussi pour la construction des assemblées municipales et départementales. Cette longue procédure électorale ne reste pas sans conséquence sur le système de décentralisation haïtienne. Comme on peut le constater, l’Etat haïtien n’arrive pas souvent à franchir toutes les étapes électorales au niveau territorial. Les élections indirectes devant aboutir à la construction des assemblées locales (assemblées municipales et départementales) et de la collectivité départementale, ne sont pas toujours organisées. Par conséquent, ces instances locales dérivées n’existent pas dans la réalité, d’autant que la première tentative pour les mettre en place en 1998 a été ratée. Donc, le système électoral local est bloqué au niveau départemental. Bien que la loi fondamentale du 29 mars 1987 opte pour l’organisation des élections en vue de constituer les trois catégories de collectivités territoriales d’Haïti, il n’en reste pas moins que seules la section communale et la commune sont actuellement constituées. L’élection de la collectivité départementale se fait encore attendre, ce qui constitue une atteinte au droit des collectivités locales haïtiennes.

Toutefois, on a remarqué que la Constitution haïtienne de 1987 a institué une nouvelle politique de décentralisation axée sur la démocratie locale qui a mis fin à des pratiques anciennes. Parler de la démocratie locale, c’est faire référence à un régime politique basé sur le transfert du pouvoir de l’Etat vers des Collectivités locales ou régionales, dans des domaines de compétences bien définis. D’après Johannes Althusius (557-1638), que l’on considère comme le précurseur de la démocratie locale et du principe de subsidiarité, elle peut se définir comme le pouvoir de décision transféré dans certains domaines de compétences par un Etat à une Collectivité locale ou régionale dotée elle-même d’institutions démocratiques : région, département, ville, etc. Cette forme de démocratie bénéficie dans toute l’Europe occidentale d’une longue légitimité, depuis la Grèce antique, en passant par des villes bourgeoises du Moyen-âge et pour arriver à la Renaissance. Cela étant dit, en instituant cette forme de démocratie locale, la Constitution haïtienne cherche à combler les vides démocratiques dans le fonctionnement des structures étatiques internes du pays. Autrefois, seul le pouvoir central (l’Exécutif) était à même de décider sur le sort de ceux qui devaient être maires ou dirigeants des organes des collectivités locales à proprement parler. Les grands mouvements de protestation de la population en 1986 ont débouché sur le renversement du régime dictatorial des Duvalier et ont permis à cette démocratie locale d’émerger. Les forces vives de la société ayant participé aux différentes luttes résultant de la mise en place de la nouvelle Constitution vont avoir leur part de responsabilité dans la gestion de la nation tant du point de vue national que local. Ce nouveau modèle de gouvernance a conduit à l’institutionnalisation d’un système politique local construit à partir d’un modèle de la démocratie qui implique, désormais, la participation citoyenne à travers les élections pour choisir les dirigeants locaux et le transfert de compétences de l’Etat vers les collectivités territoriales. La démocratie locale est donc institutionnalisée en 1987 pour prendre la forme de la démocratie représentative. En conséquence, le peuple ne prend pas les décisions directement, mais dispose du droit de se faire représenter par les décideurs publics, autrement dit, les élus locaux et nationaux. Il s’agit là, du pluralisme politique et de la valorisation de la légitimité populaire, actions qui sont susceptibles de garder en santé le principe d’alternance politique. Cela se fait par l’établissement des organes des collectivités territoriales responsables (Conseil Municipal, Conseil d’Administration de la Section communale, assemblée section communale, etc.) de façon démocratique via un processus électoral libre où les citoyens sont les acteurs du système en raison de leur droit de vote.

En conséquence, ce nouveau système va, dorénavant, reposer sur la logique de la pluralité des partis où l’action citoyenne va jouer un rôle important dans la construction de l’Etat au niveau territorial et national. Cela a permis d’entrer dans une politique de nouveauté électorale en adoptant l’approche qui veut que les autorités locales soient l’émanation de la conviction citoyenne. Donc, l’obligation de constituer les administrations décentralisées par des personnes élues au suffrage universel et le transfert de compétences à ces dernières, devient une évidence dans le droit haïtien avec l’adoption de la Constitution de 1987. De plus, le décret de 2006 fixant le cadre général de la décentralisation en Haïti, aux termes de ses articles 82 à 84, a déterminé la façon dont les nouveaux rapports des collectivités locales avec les habitants doivent se dérouler. Il indique que : « Les habitants de la collectivité territoriale ont le droit d’être informés de toutes les décisions prises par ses organes. Ils peuvent assister aux séances de l’assemblée dans le respect des règlements établis et ont libre accès à tous les documents émis par ces organes. Ils sont notamment avisés par le Conseil de la mise à disposition, à des fins de consultation, des documents concernant le budget de la collectivité (art. 82). Les électeurs d’une collectivité peuvent être consultés par le Conseil pour toutes affaires relevant des compétences de la collectivité.  Cette consultation est organisée par le Conseil électoral permanent sous forme de référendum sur la base d‘un co-financement des dépenses nécessaires par l’instance qui en fait la demande (art. 83). Les habitants d’une collectivité territoriale peuvent soumettre, suivant les conditions prévues par la loi, des pétitions à la délibération de l’assemblée. Celle-ci ne peut refuser de statuer sur leur objet. Afin d’instaurer un régime de gouvernance locale et permettre la participation effective de la société civile locale dans les prises de décisions, la mise en œuvre, le suivi et l’évaluation des politiques publiques de développement, les Conseils mettront en place des instances non partisanes de concertation regroupant les représentants des différents secteurs et des différents espaces géographiques de leurs juridictions. Les Conseils s’assureront que les secteurs marginalisés fassent partie de ces instances (art. 84). »

Ainsi est établi le principe de la démocratie locale. La décentralisation est donc consacrée juridiquement tout en tenant compte du critère électoral.

Cependant, s’il est vrai que la Constitution et les lois (électorales) haïtiennes déterminent tout un ensemble de procédures légales et de principes électoraux pour une personne qui voudrait être dirigeante des organes d’une Collectivité locale, dans la réalité, l’interdit est, quelquefois, devenu tout à fait normal en Haïti.

En effet, après l’accession du président Joseph Martelly à la Magistrature suprême de l’État haïtien le 14 mai 2011, on a tardé à organiser les élections pour le renouvellement du personnel politique local et le tiers des Sénateurs de la République qui arrivaient à la fin de leur mandat. L’Exécutif a profité de ce vide institutionnel pour nommer, en lieu et place des élus locaux, des personnes surnommées « Agents Exécutifs Intérimaires (AEI) » pour diriger les affaires publiques locales au niveau des communes. À l’exception de la Collectivité départementale ainsi que les Assemblées locales dérivées qui ne sont plus fonctionnelles depuis les expérimentations de 1997/1998, toutes les autres Collectivités territoriales, notamment municipales, étaient dirigées par des personnalités non issues des urnes de 2011 jusqu’à 2016, date d’entrée en fonction des nouveaux élus issus des élections locales du 25 octobre 2015. Cela dit, durant la grande période 2006 à 2015 aucune élection locale n’a été réalisée en Haïti alors que le mandat des élus locaux arrivait à terme depuis en 2011. Par conséquent, des personnes issues pratiquement d’une même famille politique ont dirigé les affaires publiques locales sans aucune légitimité populaire, ce qui a créé un véritable désordre au niveau des administrations territoriales. D’ailleurs, certains rapports publiés sur la gouvernance des collectivités locales haïtiennes durant la période de 2011 à 2016 ont fait état de nombreux abus, de corruptions, de fraudes et des problèmes organisationnels majeurs (Phillips, Staff Attorney de l’Institute for Justice and Democracy in Haiti/IJDH. Rapport de mission en République d’Haïti du 26 mars au 7 avril 2017 : Mission organisée par l’Office français de protection des réfugiés et apatrides/OFPRA avec la participation de la Cour Nationale du Droit d’Asile/CNDA ).

Aujourd’hui encore, cette pratique traditionnelle de nomination des politiques dans des fonctions électives est malheureusement de retour  dans les administrations communales au mépris du droit national. En juillet dernier, à l’échéance constitutionnelle du mandat des élus locaux, à défaut d’élections locales, l’administration du président Jovenel Moise a pris, en Conseil des ministres, des Arrêtés, le 3 juillet 2020, publiés dans Le Moniteur spécial No14 nommant les nouvelles « Commissions Municipales » des cent quarante-et-un (141) communes du pays chargées de gérer leurs intérêts ( Arrêtés nommant les Nouvelles Commissions Municipales des cent quarante-et-un (141) communes du pays chargées de gérer leurs intérêts, J.O. Le Moniteur, spécial No 14, 7 juillet 2020). Et, jusqu’à date, l’Exécutif haïtien ne cesse de prendre des arrêtés pour changer les dirigeants élus des municipalités du pays en les remplaçant par des personnes nommées au sein des Commissions pour gérer les affaires des communes.

Il ne fait pas de doute que cette pratique traditionnelle (nomination des politiques dans des fonctions électives) constitue l’un des facteurs qui fait la faiblesse des administrations décentralisées en Haïti. Des Agents exécutifs intérimaires (2011-2015) et/ou Commissions municipales ( de juillet 2020 à nos jours) nommés, parfois, sur fond de contestations populaires, n’ayant ni légitimité, ni force morale pour prendre des décisions judicieuses et légales engageant la ville. Par voie de conséquence, le travail administratif et institutionnel local a beaucoup souffert de ces arbitraires politiques.

Cependant, si certains maires et maires adjoints en poste transformés en autorités nominatives ont pris conscience de leur illégitimité à la tête de la commune comme « Agents exécutifs intérimaires et/ou Commissaires municipaux» ont choisi de démissionner, d’autres manifestent leur audace et entrent déjà en campagne pour les nouvelles élections tout en pensant pouvoir utiliser les ressources publiques de la cité pour leur propagande politique ; situation où le fonctionnement normal des instances décentralisées est fragilisé par le comportement du pouvoir Exécutif, lequel a la mission de garantir le bon fonctionnement de toutes les institutions (nationales et locales) de la République afin de faire asseoir non seulement le processus de décentralisation mais aussi d’assurer la bonne gouvernance du pays.

Toutefois, à défaut d’élections, les mairies ne devaient pas rester sans être dirigées, car les élections locales n’avaient pas eu lieu à la date prévue, le vide institutionnel local risquant de déboucher sur la pire catastrophe. Face à une telle situation de crise où les protagonistes politiques n’arrivaient pas à s’entendre pour organiser les élections locales à temps, la solution la moins mauvaise était de maintenir en poste les élus, considérant qu’ils avaient déjà bénéficié dans le temps de la confiance d’une grande partie de la population. Là encore, le risque était important d’être accusé de totalitarisme, car on ne peut maintenir en poste une autorité élective au-delà de son mandat constitutionnel au mépris des principes républicains. D’ailleurs, l’Administration du président Martelly a pris cette option pour la collectivité Section communale (les Conseils d’Administration Section Communale -CASEC- et Assemblées Section Communale-ASEC-), ce qui n’a pas donné de grand résultat en raison de la déception de la population locale face à cette situation et son refus de collaborer avec les membres des CASEC et ASEC gardés en poste après l’expiration de leur mandat constitutionnel. La seule solution était évidemment l’organisation d’élections démocratiques respectant les échéances électorales au niveau local et national. Cela renforçait non seulement la démocratie haïtienne mais aussi le projet de décentralisation de 1987.

D’autres problèmes majeurs du système territorial haïtien se résident dans l’organisation des élections frauduleuses. Si, des fois, les élections locales ont été organisées pour désigner les organes des collectivités décentralisées, notamment la section communale et la commune, il n’en demeure pas moins que le processus électoral a trop souvent débouché sur des problèmes majeurs, ce qui décrédibilise trop souvent la légitimité des élus locaux. Depuis 1987 jusqu’aux dernières élections locales de 2015, on ne cesse d’assister à des dénonciations de fraudes électorales et de scandales de corruption. En 2015, presque la majorité des cartels (ou listes) élus ont été contestés : Conseils municipaux et CASEC. L’institution électorale, autrement dit le Conseil Electoral Provisoire (CEP), est aussi décriée. Les juges électoraux sont trop souvent accusés de corruption et d’être des « vendeurs d’élections ». De même que dans les autres sphères du pouvoir, la corruption est devenue monnaie courante au sein de l’institution électorale qui, pourtant, devrait être une instance crédible et indépendante. A titre d’exemple, une ordonnance du juge d’instruction près le tribunal de première Instance de Port-au-Prince, suite aux conclusions du Parquet contenues dans son réquisitoire le 5 mars 2018, a envoyé deux membres du Conseil électoral provisoire au tribunal criminel pour y être jugés sans assistance de jury pour des faits qui leur sont reprochés. Ainsi, le juge a ordonné qu’ils soient pris de corps et déposés dans la maison d’arrêt s’ils ne s’y trouvent pas déjà aux fins de droit. Dans cet arrêt, le Juge avance qu’il y a des charges et indices suffisants et concordants pour renvoyer ces hauts responsables électoraux au tribunal criminel pour fraude électorale, forfaiture, abus de confiance, enrichissement illicite, corruption et pot-de-vin, faits prévus et punis par le décret électoral du 2 mars 2015, par les articles 20 et 137 du code pénal et la loi portant sur la prévention et répression de la corruption du 10 mai 2013, en ses articles 5.2, 5.5, 5.6, 11 et 15. Qui pis est, plusieurs mois après cette décision judiciaire, les inculpés continuent librement de vaquer à leurs occupations sans hésitation aucune, au point qu’ils continuent à occuper de hautes fonctions de l’Etat. Cela ne donne aucun exemple pour corriger les dérives du système électoral haïtien. Et, tout absence de sanction est à même d’instaurer et/ou de renforcer dans le pays le système d’impunité.

Donc, en dépit de l’établissement juridique du critère électoral dans la construction de la décentralisation haïtienne, les autorités décentralisées souffrent trop souvent d’un déficit de légitimité, en raison de la corruption qui gangrène le système électoral haïtien qui soit à même d’influencer ou de truquer les résultats des urnes.

3-4.       La définition normative et culturelle

Le quatrième et dernier critère énoncé par Roig, c’est la définition normative et culturelle utilisée par le professeur Eisenmann (1903-1980) pour expliquer la centralisation et la décentralisation. Il semble que cette conception lui est tout à fait originale. Ainsi, son premier objectif a été notamment de débarrasser ces notions de tous les éléments hétérogènes qui leur ont été ajoutés. De ce fait, cette conception présuppose que « le problème de la centralisation ou de la décentralisation est celui de l’unité ou de la division corrélative de l’appareil étatique ou de la collectivité étatique » ; c’est « le problème des formes d’Etat et autres collectivités politiques, de leur structure unitaire (simple) ou composée (divisée) ; centralisation et décentralisation sont des formes d’Etat- l’unitaire, la composée- » (Roig, 1966, p.450). Par cette définition, Eisenmann renonce à la décentralisation par services qui recouvre en revanche le problème du fédéralisme et il entre dans une perspective strictement normative pour définir les notions centralisation et décentralisation qui relèvent du droit public général. Pour Charles Eisenmann, comme pour Hans Kelsen, la problématique centralisation-décentralisation apparait avant tout comme un élément lié à la qualité et à la portée de la norme (Roux, 2016, p.6). A partir de là, Eisenmann aboutit à une distinction à partir de trois types de systèmes possibles. D’abord, la centralisation dans laquelle la maitrise des activités appartient à un organe central :« une activité normatrice est centralisée si c’est en dernière analyse un organe central qui décide quelles normes seront par elle posées » (Thalineau, 1994). Ensuite, la décentralisation implique que la maitrise d’une activité revient à une multiplicité d’organes non centraux. Enfin, « la semi-décentralisation consiste à faire dépendre l’entrée en vigueur des normes d’une double décision libre, prise l’une par l’organe central, l’autre par l’organe décentralisé, à la provoquer ou à ne pas l’empêcher… » (1994). De ce fait, cette conception suscitée, particulièrement la dernière approche axée sur la « semi-décentralisation », nous intéresse beaucoup dans le cas d’Haïti, car elle peut permettre de faire le point sur le système haïtien dit « décentralisé » à partir des principales théories juridiques, notamment la Constitution du 29 mars 1987. Il est clair que du 1er janvier 1804 (date de la fondation d’Haïti) au 29 février 1987 (date du début de la grande réforme décentralisatrice), les gouvernements qui se sont succédé en Haïti ont préconisé un système axé presque sur la centralisation où la maitrise de tout appartenait à l’organe central de l’Etat. A partir de 1987 à nos jours, on est passé à une forme de gouvernance par la décentralisation où juridiquement la maitrise de l’activité-affaire publique- ne dépend plus d’une seule autorité centrale, mais de tout un ensemble d’institutions locales, autrement dit les collectivités territoriales. Cependant, avec la répartition de compétences opérée par la loi fondamentale du 29 mars 1987, il arrive que l’Etat dispose, d’un côté, de responsabilités pour agir dans le monde local et, de l’autre, la collectivité locale en dispose d’autres ou encore ces deux disposent des missions communes. A titre d’exemple, la Constitution dispose, à l’article 32.1, que « l’Education est une charge de l’Etat et des Collectivités territoriales […] ». Elle poursuit, à l’article 32.2, que « la première charge de l’Etat et des Collectivités territoriales est la scolarisation massive, seule capable de permettre le développement du pays.» Ces compétences et tant d’autres sont constitutionnellement définies comme des compétences partagées entre l’organe central et l’organe décentralisé au niveau de la commune. Cependant, en réalité, seul l’Etat central s’occupe de ces compétences dites « partagées ». Dans ce cas, les interventions de la commune n’ont pas de grands impacts, d’autant plus que les autres collectivités locales sont presque inexistantes financièrement. De plus, il est à constater que le pouvoir Exécutif haïtien est toujours au-devant de la scène dans la moindre réalisation à quelque échelle locale qu’elle puisse effectuer, en vue de faire de la propagande politique dans l’unique objectif de conserver la popularité du président en place à des fins électoralistes. Fort de cela, n’y a-t-il pas lieu de se demander si en réalité le système haïtien ne fonctionne pas comme une semi-décentralisation en lieu et place d’une décentralisation ? Tout chercheur qui étudie le fonctionnement du système territorial haïtien risquerait de répondre affirmativement à ce questionnement en raison de ce qui se fait dans la pratique. Toutefois, il reste à dénombrer les décisions qui sont prises localement et celles qui sont prises par les autorités nationales afin de répondre à cette interrogation.

4-    Conclusion

Cette étude réalisée à travers la théorie de décentralisation nous a montré qu’il n’y a pas l’ombre d’un doute, que juridiquement, la décentralisation haïtienne a été implantée dans le pays. Cela dit, des dispositions constitutionnelles de 1987 ont consacré cette décentralisation et plusieurs dispositions juridiques qui ont succédé, jusqu’à aujourd’hui, ont aménagé son fonctionnement : des élections locales sont épisodiquement organisées, certains organes sont constitués notamment au niveau de la section communale et la commune, des compétences sont désormais transférées aux entités dites décentralisées…

Cependant, il semble que le législateur haïtien post 1987 ne considère toujours pas les collectivités locales comme des acteurs indispensables à la décentralisation et au développement local du pays. Cela s’explique par une carence constatée dans la production des lois visant à renforcer et à encadrer les pouvoirs locaux en vue d’asseoir la décentralisation comme le souhaitait pourtant le constituant de 1987.

De plus, l’un des problèmes de la décentralisation haïtienne réside dans la distance qui existe entre le droit et la pratique. On constate qu’il existe un « effet d’affichage » dans le système territorial haïtien. La pratique est en désaccord constant avec le droit. Il est presque irrationnel de présenter les collectivités territoriales d’Haïti en se basant seulement sur les textes. L’observation de ce qui se fait sur le terrain est une condition indispensable pour distinguer la théorie de la pratique.  Alors que certaines dispositions juridiques sont parfois précises et relativement complètes, elles ne sont pas toujours mises en œuvre par les décideurs publics.

Le passé semble refaire surface par la reproduction, de plus en plus fréquente, des pratiques qui portent à équivoque. La révocation des élus, notamment les maires, pour les remplacer par des maires intérimaires (des agents exécutifs intérimaires) nommés par le pouvoir Exécutif, de 2011 à 2016, est un exemple tangible d’un retour aux pratiques anciennes.

Toutefois, il importe de souligner que l’un des problèmes du système haïtien dit « décentralisé » réside dans un manque de préparation du milieu local haïtien qui soit à même de permettre l’application des dispositions locales relatives à la décentralisation. De surcroit, des questions continuent à être posées sur la volonté réelle des dirigeants à rendre effective cette décentralisation haïtienne lorsque l’on sait que l’Etat haïtien évolue avec une culture traditionnelle de centralisation et que la décentralisation dont on parle aujourd’hui exige de la démocratie qui implique la transparence politique (organisation des élection libres, justes et démocratiques).

            En définitive, l’analyse de ces différentes approches théoriques de la décentralisation par rapport à la réalité territoriale d’Haïti nous permet d’évaluer en partie le système territorial d’Haïti. Elle nous permet d’être en mesure de porter des éclaircissements sur le processus de la décentralisation haïtienne. D’abord, il ne fait pas de doute que le processus de décentralisation réelle et effective d’Haïti a été initié par la Constitution du 29 mars 1987 avec la construction de trois catégories de collectivités locales. Ensuite, des avancées significatives dans la construction des organes des collectivités locales ont été obtenues à travers une procédure démocratique (élection). Enfin, tout un ensemble de textes relatifs à l’encadrement et au fonctionnement de ces collectivités décentralisées ont été adoptés pour les rendre fonctionnelles, bien que certains d’entre eux soient déjà obsolètes sans même entrer en application. Toutefois, les besoins des collectivités territoriales restent grands, notamment en matière financière. En conséquence, suivant les 4 critères susmentionnés, selon lesquels on peut définir la décentralisation, il est possible d’affirmer qu’il existe en Haïti bien évidement un processus décentralisation, mais cette décentralisation n’est pas encore concluante. Il est donc de la responsabilité des décideurs publics de travailler en conséquence pour asseoir cette décentralisation en vue de parvenir au développement intégral du pays.

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Auteur :

Joram Vixamar

Docteur en droit public de l’Université Renne 2, en France

Chercheur associé au Laboratoire Interdisciplinaire de Recherche en Innovations Sociétales (LiRIS) de l’Université Rennes 2

Email : joramvixamar@gmail.com

Doyen de la Faculté des Sciences Juridiques, Politiques et Diplomatiques (FSJPD) de l’Université Publique du Bas Artibonite à Saint-Marc (UPBAS)

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