Haïti | Tout change pour que rien ne change: Laurent Saint-Cyr du HCT remplace Louis-Gérald Gilles du SDP à la présidence du CPT
Le bilan politique et social de la situation en Haïti livre un paradoxe déconcertant, digne d’une ironie tragique : Laurent Saint-Cyr, ancien membre du gouvernement d’Ariel Henry – un gouvernement défaillant – est aujourd’hui en lice pour occuper la présidence du Conseil Présidentiel de Transition (CPT) à l’approche des « élections ». Un choix des plus curieux, voire effrayant, au regard de l’absence de traces de ses précédentes responsabilités, notamment sa participation à un Haut Comité de la Transition (HCT), en collaboration avec Mme Mirlande Manigat. Depuis ce fameux accord signé avec le SDP, nous attendons toujours le moindre rapport de gestion du HCT, perdu peut-être de vue dans les méandres de l’opacité administrative.
Il est utile de s’arrêter un instant pour apprécier la saveur de ce feuilleton politico-gouvernemental : M. Saint-Cyr se prépare à occuper un poste clé, tandis que d’autres candidats malchanceux, comme Louis-Gérald Gilles, voient leur étoile pâlir, plombée par des accusations de pots-de-vin et de « braquage de banque ». Nous sommes ici face à un système où la corruption n’est pas un dérapage, mais une méthode de gouvernance : Haïti vit « de la corruption, par la corruption et pour la corruption » Un constat qui, bien qu’amer, ne surprend guère lorsqu’on parcourt les rapports de Transparency International. Ce n’est un secret pour personne, Haïti n’a cessé de dégringoler dans les classements mondiaux depuis l’avènement du régime Tèt Kale-PHTK. A la fin de chaque mois de janvier, les observateurs internationaux, du haut de leur tour d’ivoire, prennent la mesure de ce gouffre sans fond.
Dans cette scène divertissante où des membres d’un gouvernement inconstitutionnel et illégitime sont successivement accusés de vol de banque, la nomination de leurs remplaçants se poursuit avec une nonchalance déconcertante. On voit par exemple l’architecte Voltaire, fervent partisan de Lavalas, s’apprêter à endosser lundi le rôle de président du CPT. Et la valse continue : d’autres noms s’ajoutent à la liste des successeurs, jusqu’à ce que, finalement, le tour vienne à Laurent Saint-Cyr.
La perspective de voir M. Saint-Cyr à la tête du pays en 2025, chargé de proclamer les résultats électoraux d’un référendum illégal, est absurde. En effet, les élections sont déjà destinées à perpétuer le cycle du « tout change pour que rien ne change ». A chaque scandale, on découvre un Saint Pierre, puis un Saint Paul, et la roue tourne, imperturbable. Les seuls vrais perdants sont, comme toujours, les citoyens haïtiens, contraints d’assister à cette farce tragique.
N’est-il pas là l’accomplissement d’un plan de destruction méthodique? Les propos du Mgr Leroy Mésidor, tenus vendredi dernier, résonnent étrangement comme une vérité que personne ne souhaite affronter: peu importe les efforts, peu importe les protestations, Haïti s’enfonce inexorablement dans une spirale d’autodestruction.
cba
