28 décembre 2025
Fritz Alphonse Jean vs Alix Didier Fils-Aimé : Les deux visages d’un même naufrage
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Fritz Alphonse Jean vs Alix Didier Fils-Aimé : Les deux visages d’un même naufrage

Reynoldson Mompoint

Port-au-Prince, le 16 juillet 2025

Il y a dans l’air de Port-au-Prince une odeur de duel feutré, une tension contenue, un orage politique que tout le monde entend gronder, mais que personne n’ose nommer. D’un côté, Fritz Alphonse Jean, le doctrinaire économiste recyclé en conseiller présidentiel, flanqué de ses affidés technocrates nourris au lait de la Banque Mondiale ; de l’autre, Alix Didier Fils-Aimé, le stratège de couloir, président du conseil d’administration de la Chambre de commerce et d’industrie de l’ouest (CCIO) et de la Chambre de commerce et d’industrie d’Haïti (CCIH), sans charisme mais doté d’un flair absolu pour les mécaniques clientélistes, aujourd’hui Premier ministre par accident, mais ambitieux par vocation.

Entre les deux, ce n’est pas une question d’idéologie, ni même de cap politique, car dans ce bateau sans gouvernail qu’est le Conseil Présidentiel de Transition (CPT), personne ne parle de direction, seulement de position. Ce qui les divise, c’est une guerre d’appropriation : qui signera les chèques ? Qui placera ses pions dans les régies ? Qui parlera au nom du chaos ?

Fritz Jean, en apôtre du verbe technocratique, rêve encore d’un État réglé comme une montre suisse. Mais il oublie que les horlogers de la République ne sont pas neutres : ils facturent, ils marchandent, ils intriguent. À force de vouloir moraliser l’indécence, il est devenu une cible mouvante pour les prédateurs institutionnels. Son clan, replié dans un silence hautain, croit encore qu’en Haïti, la compétence protège. Erreur funeste.

Fils-Aimé, lui, ne s’embarrasse pas de telles illusions. Il ne parle pas de réforme mais d’équilibre : équilibrer les appétits, les intérêts, les promesses. Son cabinet est un laboratoire de recyclage où chaque fonction devient une monnaie d’échange. Son autorité repose non pas sur une vision, mais sur une capacité à composer avec les forces obscures du statu quo.

Et entre ces deux hommes, le CPT tangue, s’enlise et se vide de son sens. Leurs collaborateurs s’évitent, se poignardent dans les réunions, se neutralisent à coups de notes internes. Les grands dossiers ONA, FDI, BNC, APN ne sont plus des enjeux de redressement, mais des terrains d’influence. Qui placera son DG à l’APN ? Qui verrouillera les décaissements de l’ONA ? Qui contrôlera le robinet du FDI ?

Pendant que le peuple crie famine, que les bandits dictent la géographie du quotidien, ces deux architectes d’un désastre bien partagé s’empoignent dans les salons climatisés, se sabotent à mots couverts, s’épient à travers les colonnes des journaux, et se préparent déjà à se renvoyer la faute lorsque l’édifice s’effondrera.

Le plus dramatique dans ce pugilat larvé, c’est qu’il n’offre ni rupture, ni salut. Fritz Jean incarne la rigidité vaine d’un idéal sans muscle, pendant qu’Alix Didier Fils-Aimé symbolise la souplesse sinueuse d’un système sans âme. Deux logiques, deux méthodes, un même résultat : l’immobilisme dévastateur.

Et le pays, pendant ce temps, reste coincé entre une Banque Centrale sans mandat, un ministère de l’intérieur vidé de toute souveraineté, et une Primature qui gouverne sans peuple, sans honte.

Reynoldson Mompoint

mompointreynoldson@gmail.com

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