18 novembre 2025
Haïti | Confusion des pouvoirs : un Conseil des ministres ne peut « ratifier » un Code pénal
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Haïti | Confusion des pouvoirs : un Conseil des ministres ne peut « ratifier » un Code pénal

Fritz Jean: ...N ap anonse popilasyon an konsèy minis ki pat fèt yè 23 jen 2025 lan rive fèt jodi 24 jen an. Nou ratifye kòd penal la ak pwosedu kòd penal la ke popilasyon an ak yon bann séktè ògaznize nan peyi a tap tann.

Non, un Conseil des ministres ne peut pas « ratifier » un code pénal. La formulation utilisée par Fritz Jean dans son tweet soulève une grave confusion juridique, et semble s’éloigner des principes élémentaires de la hiérarchie des normes et de la séparation des pouvoirs dans un État de droit.

1. Distinction entre « adoption », « ratification » et « entrée en vigueur »

  • L’adoption d’un code pénal est une compétence normative qui relève du pouvoir législatif (Parlement), sauf en cas de vacance institutionnelle particulière où un pouvoir exécutif assume cette charge de manière exceptionnelle par décret, jamais par ratification.
  • Le terme « ratifier » s’emploie dans un contexte de traités internationaux ou d’actes déjà signés qui nécessitent confirmation par une autorité compétente, généralement le Parlement.
  • En droit interne, un Conseil des ministres peut adopter un projet de loi ou un décret, mais il ne ratifie pas un code.

2. Ce que peut faire un Conseil des ministres

Un Conseil des ministres peut :

  • adopter un décret ou un décret-loi, dans un régime d’exception (absence du Parlement) ;
  • publier dans le Moniteur un texte législatif ou réglementaire adopté selon une procédure déterminée (ex. : décret de promulgation d’un code déjà préparé par une commission) ;
  • mais ne peut ni légiférer à volonté ni ratifier des normes pénales.

3. Spécificité haïtienne (Contexte 2020–2025)

Depuis 2020, l’État haïtien fonctionne en grande partie sans Parlement. Le Code pénal de 2020 publié par décret présidentiel (Jovenel Moïse) a été contesté, et sa mise en vigueur plusieurs fois reportée par les gouvernements successifs, en raison d’un déficit de légitimité démocratique et de consultations sectorielles.

Dans ce cadre :

  • Le gouvernement actuel pourrait publier une version amendée du Code, mais cela ne constitue pas une ratification.
  • Si le Conseil des ministres actuel « décide » d’appliquer ce texte, il s’agit au mieux d’une décision administrative d’entrée en vigueur d’un décret existant, mais certainement pas d’une ratification normative au sens constitutionnel du terme.

Non, un Conseil des ministres ne peut pas ratifier un Code pénal. Le terme est juridiquement impropre. S’il y a eu adoption ou publication d’un décret d’application ou de mise en vigueur, cela devrait être qualifié autrement (ex. : décret d’entrée en vigueur, publication au Moniteur). Le recours au mot « ratifier » est soit une erreur de terminologie, soit une tentative politique de donner un vernis de légitimité à un acte purement exécutif.

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