19 octobre 2025
HAÏTI: Claude Joseph, croque-mort de la diplomatie, membre initiateur du Conseil Présidentiel
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HAÏTI: Claude Joseph, croque-mort de la diplomatie, membre initiateur du Conseil Présidentiel

Par Reynoldson MOMPOINT

Port-au-Prince, le 11 juin 2025

Il parle avec l’aisance d’un diplomate et écrit avec la rigueur d’un professeur. Il cite Fanon, disserte sur la souveraineté, et invoque le patriotisme dès qu’un micro s’ouvre. Pourtant, derrière cette façade soignée, Claude Joseph demeure l’un des artisans les plus subtils de l’effondrement diplomatique et politique de l’État haïtien. Ancien chancelier, Premier ministre de fortune, aujourd’hui membre initiateur du Conseil Présidentiel de Transition, Claude Joseph incarne une génération d’intellectuels formés à l’étranger, qui ont mieux appris à plaire à Washington qu’à écouter le peuple de Carrefour ou de Hinche.

Claude Joseph est souvent présenté comme un modèle de réussite universitaire : doctorat en sciences politiques aux États-Unis, professeur de relations internationales, polyglotte à la diction impeccable. Mais l’intelligence, si elle ne s’enracine pas dans une volonté de transformation, devient une arme de légitimation du statu quo. Claude Joseph n’a jamais utilisé son savoir pour bâtir une vision de société. Il l’a mis au service du pouvoir, et surtout, de sa propre ascension.

Sous couvert de neutralité académique, il a tranquillement glissé dans le costume de technocrate docile du régime PHTK, puis dans celui de politicien opportuniste, jonglant entre idéalisme creux et calcul personnel.

Nommé ministre des Affaires étrangères en 2020 par Jovenel Moïse, Claude Joseph a tenu le poste avec un zèle particulier pour les relations avec les puissances étrangères. Mais sous son mandat, Haïti a brillé par son isolement international croissant, sa dépendance accrue aux grandes chancelleries occidentales et l’abandon progressif de la diaspora comme force politique active.

Ce fut lui, le chancelier silencieux, quand les Haïtiens étaient pourchassés comme des bêtes en République Dominicaine. Lui encore, incapable d’articuler une vision géopolitique cohérente pour Haïti dans la Caraïbe ou à l’ONU. Il parlait bien, certes. Mais c’était un vide diplomatique masqué par une syntaxe propre.

À la mort de Jovenel Moïse, Claude Joseph tente un coup de poker : il se proclame Premier ministre, dans un pays sans président, sans Parlement, sans Constitution fonctionnelle. Pendant quelques jours, il joue au chef d’État sur les plateaux de CNN, avant d’être discrètement désavoué par ses maîtres. Ariel Henry entre dans la danse, soutenu par la communauté internationale, et Claude Joseph recule, sans résistance. Ce fut la première tentative avortée de putsch légaliste, dans un théâtre politique où l’hypocrisie règne en loi.

En 2022, il fonde EDE, les Engagés pour le Développement, un parti sans base populaire, sans programme de transformation radicale, mais avec un nom bien calibré pour séduire les bailleurs de fonds. Dans la pure tradition haïtienne, EDE est une coquille pour ambition personnelle, un ascenseur électoral que Claude espère activer au moment opportun.

Le problème ? Personne ne croit en sa rupture. Il est vu comme un fils adoptif du système PHTK, bien élevé, bien brossé, mais sorti du même ventre politique : celui de la continuité dans l’échec.

Aujourd’hui, il revient, drapé dans la toge du sage, comme membre fondateur du Conseil Présidentiel de Transition, cette aberration institutionnelle née d’une énième négociation régionale sans ancrage populaire. Claude Joseph y siège au nom de la jeunesse, de la compétence et de la diplomatie, les mêmes mots qui ont justifié vingt ans de médiocrité technocratique.

Il ne représente ni une base sociale, ni un projet national, mais une élite repliée sur elle-même, dont l’objectif est de continuer à exister politiquement. Claude Joseph, c’est le diplomate des ruines, celui qui parle du futur avec le langage du passé. Celui qui, à défaut de construire un État, se construit un poste.

Ti Claude n’est pas une anomalie. Il est le produit chimiquement pur d’un système politique haïtien qui recycle les échecs comme des trophées. Dans ce pays sans mémoire, on oublie que l’homme qui dit vouloir sauver la démocratie fut celui qui a échoué à l’incarner. On l’accueille encore une fois, à la table de la transition, pendant que le peuple crève.

Claude Joseph, le croque-mort de la diplomatie haïtienne, n’a jamais enterré les pratiques du passé. Il les maquille, les parfume, les rhabille pour les vendre comme avenir.

Reynoldson Mompoint 

mompointreynoldson@gmail.com

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