Alors que les conflits armés intègrent de plus en plus l’intelligence artificielle (IA), l’ONU et des ONG multiplient les alertes : la guerre autonome, où des machines décideraient seules de tuer, n’est plus de la science-fiction. Les attaques de drones en Ukraine et les investissements massifs de grandes puissances (États-Unis, Chine, Russie, Israël, Corée du Sud) dans des systèmes d’armes autonomes illustrent cette tendance inquiétante.
La secrétaire générale adjointe de l’ONU pour le désarmement, Izumi Nakamitsu, a rappelé que « déléguer à des machines la décision de vie ou de mort est moralement inacceptable » et devrait être interdit par le droit international.
En Ukraine, l’usage croissant de drones par les deux camps, notamment dans la région de Kherson, a entraîné des pertes civiles massives. L’ONU a déjà qualifié certaines frappes de crimes contre l’humanité. Cette guerre devient un laboratoire à ciel ouvert de l’autonomisation du champ de bataille.
Les critiques évoquent une « déshumanisation numérique », où des algorithmes biaisés pourraient confondre civils et cibles militaires, notamment en raison de défauts de reconnaissance faciale ou de mouvements inhabituels, comme ceux des personnes handicapées.
L’enjeu éthique est renforcé par une question cruciale : qui serait tenu responsable en cas de bavure ? Le développeur ? Le fabricant ? Le programmeur ? Selon Nicole Van Rooijen de la coalition Stop Killer Robots, l’absence de responsabilité humaine directe représente un échec moral majeur.
Malgré onze années de discussions internationales, aucune définition claire ni réglementation contraignante n’existe encore. Toutefois, en mai 2025, de nouvelles discussions ont ravivé l’espoir : plus de 120 États soutiennent désormais l’idée d’une loi internationale pour encadrer, voire interdire, les armes létales autonomes.
Le Secrétaire général de l’ONU, António Guterres, a exhorté les États à conclure un accord juridiquement contraignant d’ici 2026, pour éviter que le monde ne bascule dans une guerre sans visage, ni conscience.
En matière de guerre, souligne Mme Nakamitsu, « il faut que quelqu’un rende des comptes ».