3 décembre 2024
Port-au-Prince : la destination oubliée dans les aéroports américains – Une humiliation nationale
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Port-au-Prince : la destination oubliée dans les aéroports américains – Une humiliation nationale

Dans les halls animés des aéroports de Newark, Fort Lauderdale, Miami, ou Boston, les annonces résonnent, appelant des passagers à embarquer pour des destinations diverses, de Cancun à Paris, de Kingston à Santo Domingo. Pourtant, une destination manque à l’appel : Port-au-Prince, capitale d’Haïti. Ce silence assourdissant dans les hauts-parleurs des aéroports américains est bien plus qu’une omission : il est le reflet d’un échec systémique et d’une humiliation collective.

Le fait que Port-au-Prince ne figure plus dans les annonces des vols directs n’est pas qu’un détail logistique. C’est le symptôme d’une crise bien plus profonde. Les grandes compagnies aériennes américaines qui suspendent progressivement leurs vols à destination de la capitale haïtienne, citent des raisons de sécurité, des instabilités politiques, et une absence de garanties pour leurs passagers et personnels. Mais derrière ces justifications se cache une réalité plus troublante : celle d’un État qui ne parvient plus à garantir sa propre souveraineté ni la stabilité de sa capitale.

En observant les écrans ultramodernes et les bornes interactives du tout nouveau terminal rénové de l’aéroport Newark Liberty, un sentiment de contraste profond s’impose. Les passagers, entourés par une technologie de pointe et des services avant-gardistes, se dirigent vers des destinations globales en toute sérénité. Ici, les vols vers Paris, Tokyo ou Johannesburg se déroulent dans un décor qui reflète innovation et progrès. Pendant ce temps, Haïti est reléguée au silence, comme si son existence même s’éteignait dans le tumulte des nations modernes.

Pour les milliers de voyageurs haïtiens présents dans ces aéroports américains, ne pas entendre « Port-au-Prince » dans les annonces publiques est une double peine. Ces passagers, déjà éprouvés par les obstacles administratifs, les longs trajets, et les contraintes financières, doivent désormais adapter leurs itinéraires à une réalité insensée : transiter par le Cap-Haïtien, seule porte d’entrée encore fonctionnelle vers le pays. Cette solution de repli, bien qu’utile, reste problématique : le coût des taxis aériens entre Cap-Haïtien et Port-au-Prince devient une opportunité pour certains, mais un fardeau pour d’autres.

Cet état de fait révèle une inégalité criante et une gestion étatique calamiteuse. Où est le rôle du gouvernement dans la sécurisation des infrastructures essentielles ? Où est la volonté de réhabiliter l’image du pays sur la scène internationale ?

Diriger un pays implique de prévoir et de prévenir les crises, pas de les subir. Or, les dirigeants haïtiens sont incapables de répondre aux besoins fondamentaux de la population, tant à l’intérieur qu’à l’extérieur des frontières. Quand un dirigeant embarrasse ses concitoyens à l’étranger, il échoue dans sa mission première : représenter et défendre dignement son pays. Ces leaders, qui se battent pour maintenir leur emprise sur le pouvoir tout en détournant les ressources publiques, méritent-ils encore leur place ? Le silence autour de Port-au-Prince dans les aéroports américains est le symbole de leur faillite morale et politique.

Depuis le confort high-tech d’un terminal comme celui de Newark, il est difficile d’ignorer l’ironie amère : d’un côté, des pays qui avancent dans l’ère numérique, où chaque destination incarne une promesse de progrès et de stabilité, et de l’autre, un Haïti où l’incapacité à garantir des services de base conduit à l’effacement d’une capitale autrefois dynamique.

L’absence de vols directs pour Port-au-Prince n’est pas une fatalité. Elle peut être inversée, à condition que des mesures fortes soient prises. Mais cela exige un leadership visionnaire, un engagement réel envers le redressement national, et une rupture avec les pratiques actuelles. Ce n’est qu’en garantissant la sécurité des citoyens, en réhabilitant les infrastructures essentielles, et en restaurant la confiance des partenaires internationaux que Port-au-Prince pourra de nouveau résonner dans les annonces aéroportuaires.

En attendant, chaque Haïtien, qu’il soit à Newark-NJ, Miami, à Fort Lauderdale, ou ailleurs, continue de porter le poids de cette honte collective. Car lorsqu’une nation est effacée des cartes du monde, c’est son peuple tout entier qui est humilié. Mais cette humiliation peut devenir un moteur de changement, si elle est transformée en exigence de responsabilisation pour ceux qui nous gouvernent.

cba

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