Leslie Voltaire: En Haïti « on n’a pas pu fournir de nourriture ni de soins de santé à cinq millions de personnes »
Lors de son échange avec le journal EL TIEMPO, Leslie Voltaire, président du Conseil Présidentiel d’Haïti, a dressé un portrait alarmant des défis qui assaillent son pays, tout en esquissant les espoirs placés dans une coopération internationale pour la paix et la préservation de la biodiversité. À quelques heures de sa rencontre à Cali avec le président colombien Gustavo Petro, il a exposé les enjeux de la violence endémique, de l’insécurité alimentaire et de la crise écologique qui menacent la stabilité et la santé de millions d’Haïtiens. Dans cet entretien, il appelle également à un soutien international pour assurer une transition politique stable, légitime et respectueuse de l’environnement.
La COP16 : Espoirs de Conservation et de Coopération
Question : Quelles sont vos attentes pour la COP16, notamment en ce qui concerne la biodiversité et les efforts de reforestation ?
Voltaire : « Nous attendons des engagements fermes de la part des États pour conserver au moins 30 % des terres, eaux continentales et zones côtières et marines à l’échelle mondiale. Pour Haïti, c’est vital. Nous faisons face à une violence qui détruit nos montagnes et nos plaines, accentuant la déforestation, et nous espérons que, dans quelques mois, nous aurons un cadre sécuritaire suffisant pour organiser les élections et initier un vaste programme de préservation de la biodiversité. »
L’objectif de conservation de 30 % est particulièrement critique pour Haïti, où l’exploitation abusive des ressources naturelles alimente la crise sociale et écologique. Voltaire insiste sur le lien direct entre les actions environnementales et la stabilisation politique. « Sans un environnement sain, il n’y a pas de paix possible, et sans paix, l’environnement continue de se dégrader », ajoute-t-il.
Rencontres Bilatérales et Absence Remarquée de Lula Da Silva
Question : Avez-vous eu l’occasion de rencontrer certains dirigeants en prévision de la conférence ?
Voltaire : « Oui, bien que je regrette l’absence du président brésilien Lula Da Silva, qui est tombé malade et n’a pas pu nous rejoindre. Sa présence aurait été précieuse pour discuter des enjeux écologiques et de développement. Cet après-midi, je m’entretiendrai avec le président Gustavo Petro pour aborder des thèmes cruciaux : la protection de la nature, la sécurité, les échanges commerciaux entre Haïti et la Colombie, ainsi que les préparations électorales. Par ailleurs, nous avons confirmé plusieurs rencontres bilatérales avec des dirigeants du Suriname, de la Guinée-Bissau, ainsi que le Secrétaire général des Nations Unies, António Guterres. »
Cette absence du dirigeant brésilien symbolise les défis auxquels font face les pays de la région pour coordonner une réponse commune aux problèmes écologiques. Cependant, Voltaire se montre optimiste quant aux accords bilatéraux qu’il espère conclure pour renforcer la coopération régionale.
Haïti face à l’Urgence Politique et Sécuritaire
Question : Pouvez-vous décrire la situation actuelle en Haïti et les principales initiatives du Conseil Présidentiel ?
Voltaire : « Nous avons constitué un Conseil Présidentiel de neuf membres, dont je suis le président. Nous avons instauré un gouvernement de transition qui doit mener le pays jusqu’au 7 février 2026, avec l’organisation d’un référendum constitutionnel prévu pour le 25 février prochain. Mais la violence des gangs reste un défi majeur. Elle bloque les routes, empêchant l’acheminement de nourriture et l’accès aux soins de santé pour cinq millions d’Haïtiens. Ces défis touchent toutes les strates de la population, aggravant l’insécurité alimentaire et fragilisant les infrastructures de santé. »
Voltaire souligne que le blocage des routes par les gangs a un impact direct sur les besoins de première nécessité, créant une situation de crise humanitaire sans précédent. La mise en place d’une réforme constitutionnelle vise ainsi à offrir une base politique plus stable pour l’avenir du pays.
Appel aux Nations et à la Solidarité Internationale
Question : En quoi consiste l’appel que vous adressez à la communauté internationale ?
Voltaire : « Haïti a besoin d’un soutien pour établir la paix et organiser des élections légitimes qui permettront de désigner des dirigeants représentatifs. Nous lançons un appel pressant au monde et aux organisations telles que le Fonds mondial pour la biodiversité et le changement climatique pour nous aider à reboiser, à restaurer notre environnement et à établir une paix durable avec la nature. Cette vision est essentielle pour stabiliser notre société. »
Voltaire conclut en insistant sur la nécessité d’un soutien international coordonné, non seulement pour la sécurité mais aussi pour des initiatives de reforestation et de réhabilitation de l’environnement, qui demeurent cruciales pour la survie et la résilience d’Haïti.
