3 décembre 2024
Flashback, ONU 22 septembre 2023 | Discours complet d’Ariel Henry : lutte contre les gangs et dénonciation du trafic d’organes
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Flashback, ONU 22 septembre 2023 | Discours complet d’Ariel Henry : lutte contre les gangs et dénonciation du trafic d’organes

Le discours complet du Premier ministre de facto, Dr Ariel Henry, à la Tribune des Nations Unies

Rezo Nòdwès publie l’intégralité du discours d’Ariel Henry, le Premier Ministre par intérim d’Haïti, suivi d’une analyse approfondie de ses déclarations. Dans son discours, Ariel Henry aborde la question des activités criminelles des gangs et révèle, pour la première fois, l’existence de trafic d’organes, un sujet qui n’avait jamais été évoqué par le gouvernement jusqu’à présent.

Ariel Henry aborde de front la question de l’assassinat de Jovenel Moïse, tandis que des partisans de Moïse à l’extérieur du siège des Nations Unies accusent le Premier Ministre de complicité dans cet acte criminel. le 7 juillet 2021.

Ariel Henry, exprimant sa perspective en tant que dirigeant élu, encourage les membres de la diaspora haïtienne à envisager un retour à leur pays d’origine.

Le discours du Premier Ministre Ariel Henry met particulièrement en avant sa proposition de faire envoyer une force multinationale en Haiti, une mesure en contradiction avec la Constitution haïtienne. Ariel Henry s’exprime comme s’il se préoccupait des problèmes auxquels les Haïtiens sont confrontés, livrés à l’indifférence face aux gangs criminels.

Ariel Henry qualifie la crise à la frontière, notamment la situation à la rivière Massacre, de malaise inutile.

Ariel Henry exprime sa reconnaissance envers le Kenya et évoque pour la première fois la mission d’évaluation déployée sur le terrain, tout en restant succinct quant aux détails. Il n’oublie pas de mentionner les visites fréquentes des délégations de la Caricom à Port-au-Prince.

New York 22 septembre 2023 ((rezonodwes.com))–

Monsieur le président de l’assemblée générale, monsieur le secrétaire général, excellences, mesdames et messieurs les chefs d’État et de gouvernement, mesdames et messieurs les chefs de délégation, distingués délégués,

Tout d’abord, permettez-moi d’adresser mes félicitations aux frères de la Caraïbe, en particulier à Son Excellence Monsieur Dennis Francis, pour son élection à la présidence de la 78e session ordinaire de l’Assemblée Générale des Nations Unies. Je saisis cette occasion pour exprimer toute la gratitude du peuple haïtien envers le Secrétaire général Antonio pour sa récente visite dans notre pays et son soutien inébranlable à la démarche d’Haïti auprès du Conseil de Sécurité pour obtenir du soutien en faveur de notre police nationale.

Monsieur le président, je me réjouis du thème choisi pour guider nos interventions au cours de cette session : « Rétablir la confiance et raviver la solidarité mondiale, accélérer l’action en faveur du Programme 2030 et de ses objectifs de développement durable en faveur de la paix, de la prospérité, du progrès et de la durabilité pour tous ». Il est de notre responsabilité d’examiner et de proposer des solutions aux principaux défis mondiaux. Il est essentiel de comprendre que le développement est indissociable de la paix et de la sécurité, et que nous devons faire preuve de solidarité et de détermination pour relever ces défis.

Le monde, à la veille de l’échéance de 2030, va mal et traverse une période difficile. Les nombreux conflits en cours ont des conséquences désastreuses pour les populations civiles, et les crises liées à la sécurité, à la santé et à l’alimentation se multiplient. Il est crucial de souligner l’impact de la sécurité alimentaire, fortement influencée par les conflits et les violences. Le rapport mondial sur les crises alimentaires de 2022 a révélé que 258 millions de personnes étaient en situation d’insécurité alimentaire aiguë et avaient besoin d’une aide alimentaire d’urgence. En août dernier, mon pays a participé au débat public sur la famine et la sécurité alimentaire mondiale, organisé par le Conseil de Sécurité, afin de sensibiliser à cette urgence.

De plus, l’économie mondiale, depuis la crise du Covid-19, est en stagnation, l’inflation affecte de nombreuses économies, et les perspectives de croissance sont peu encourageantes. Cette situation a des répercussions significatives sur les pays les moins avancés, notamment le mien, qui doit faire face à la volatilité des prix et à une grave crise, aggravée par une détérioration de la sécurité nationale.

Il est également essentiel de mentionner l’impact du changement climatique, en particulier pour les petits États insulaires comme Haïti, qui sont confrontés à des menaces constantes. Les catastrophes naturelles ont des conséquences dévastatrices sur l’économie de la région caraïbe, remettant en question les progrès enregistrés sur les plans social, économique et politique.

En ma qualité de chef de gouvernement d’Haïti, je saisis cette opportunité pour exposer la situation critique dans laquelle se trouve mon pays. Nous sommes plongés depuis plusieurs années dans une crise multidimensionnelle qui impacte nos institutions et entrave le développement économique et social. Cette crise a atteint un niveau critique avec la détérioration de la sécurité, marquée par des attaques violentes de gangs armés qui contrôlent de nombreux quartiers de la capitale et de certaines villes de province.

La dégradation de la situation sécuritaire a entraîné une nouvelle crise humanitaire, avec des déplacés internes, estimés à plus de 16 500, fuyant la violence des gangs. Ces personnes font face à d’énormes difficultés, vivant dans des conditions précaires, et font également face à une menace sanitaire avec des cas de choléra signalés dans certains sites.

Les abus et les violations systématiques des droits de l’homme, perpétrés par les gangs armés, compromettent la paix, la stabilité et la sécurité du pays. Les enlèvements, les pillages, les incendies, la violence sexuelle et sexiste, le trafic d’organes, la traite des personnes, les homicides, les exécutions extrajudiciaires et le recrutement d’enfants-soldats sont autant de crimes qui ont de graves conséquences. La mauvaise performance économique persiste, avec cinq années de contraction économique, une croissance négative et une inflation élevée d’environ 40%. Environ 4.8 millions de nos compatriotes se trouvent en insécurité alimentaire, soit près de la moitié de la population vivant en dessous du seuil de pauvreté, avec moins de deux dollars américains par jour.

Nous ne sommes pas ici pour accabler ou justifier le passé, mais pour demander aux pays amis de comprendre la situation d’urgence à laquelle nous sommes confrontés et de nous aider à créer un meilleur avenir pour les enfants d’Haïti en rétablissant la sécurité et la stabilité.

Haïti a connu plusieurs chocs successifs au cours des 15 dernières années, notamment trois catastrophes cycloniques et l’assassinat odieux du président Jovenel Moïse en juillet dernier. Il est aujourd’hui impossible de dissimuler la réalité. Chaque mauvaise décision, comportement inapproprié et radicalisme ont contribué à notre détresse. Une fois de plus, je sollicite de cette tribune une aide pour les Haïtiens, afin qu’ils puissent trouver la paix et la tranquillité sur leur terre natale. Dans un monde où les destinations idéales se font de plus en plus rares en raison des aléas climatiques et des crises économiques récurrentes, nous demandons votre soutien pour faire face aux défis qui se posent à nous.

Certaines nations ont déjà fait face à des situations similaires à celle que vit actuellement Haïti. Notre peuple aspire à retrouver la liberté de circuler et à s’épanouir dans son propre pays. De nombreux Haïtiens se trouvent aujourd’hui dans le monde entier, mais beaucoup espèrent un retour dans leur pays d’origine dès que la stabilité y sera rétablie. Nous sommes reconnaissants envers les pays qui ont apporté leur soutien, mais nous souhaitons également pouvoir dire à nos compatriotes qu’ils peuvent rentrer chez eux en toute sécurité pour participer à la reconstruction.

Monsieur le président, je tiens à affirmer que nous sommes prêts au changement que nous attendons depuis longtemps. Nous aspirons à une liberté totale qui permettra à chaque citoyen de s’épanouir dans la dignité et des conditions décentes. La question de la sécurité reste notre priorité absolue. La circulation des armes à feu et les actes criminels sont des défis majeurs pour notre gouvernement. Nous appelons le Conseil de Sécurité à agir en urgence en autorisant le déploiement d’une mission multinationale de soutien à la sécurité, composée de forces policières et militaires, en collaboration avec la police nationale d’Haïti, afin de rétablir l’ordre.

Cependant, l’emploi de la force, bien que nécessaire, ne suffit pas. Il est essentiel de prendre en compte le développement socio-économique pour lutter durablement contre l’extrême pauvreté, source de nombreux problèmes. Les inégalités sociales et la mauvaise répartition des richesses nationales créent un fossé entre les masses populaires et une minorité qui détient 90% des richesses du pays.

Je lance un appel à tous les acteurs de bonne foi, tant à l’intérieur qu’à l’extérieur d’Haïti, pour travailler avec le gouvernement dans la lutte contre les gangs et le rétablissement de la sécurité. La démocratie doit prévaloir, et le gouvernement est déterminé à mettre en œuvre les meilleures idées. Dans les jours à venir, nous finaliserons le lancement du processus électoral avec le soutien de la communauté internationale. Nous invitons tous les acteurs politiques, la société civile, les femmes et les jeunes à participer activement à cet effort pour redresser Haïti.

Seul un gouvernement légitime issu d’élections libres, honnêtes, démocratiques et transparentes pourra relever le défi de la refondation territoriale, économique et sociale. Je souligne également l’importance de la participation de la communauté internationale pour résoudre la situation à la frontière avec la République dominicaine, afin d’éviter des tensions inutiles entre nos deux nations.

Je tiens à rappeler que Haïti ne cherche pas la guerre, mais la paix. Nous sommes un peuple généreux et solidaire, prêt à dialoguer et à partager équitablement des ressources communes dans le respect mutuel. Nous ne souhaitons pas de conflits avec nos voisins, mais cherchons à vivre et à progresser ensemble. La violence ne peut que causer des regrets et laisser des amertumes qui se transmettent de génération en génération. Je suis ici pour transmettre ce message et demander votre attention à cette situation.

Ce gouvernement intérimaire que je dirige est déterminé à réaliser les meilleures avancées malgré la situation. En accord avec le conseil, nous finalisons les démarches pour le lancement du processus électoral avec le soutien de la communauté internationale. Notre gouvernement s’engage à poursuivre le dialogue avec tous les acteurs politiques et de la société civile de mon pays pour trouver ensemble un consensus historique permettant de mettre fin à la crise démocratique en cours.

Nous souhaitons également encourager la participation significative des femmes, des jeunes et de la société civile, ainsi que de tous les acteurs concernés, à nos efforts communs pour restaurer la stabilité. Seul un gouvernement légitime issu d’élections libres, honnêtes, démocratiques et transparentes pourra entreprendre la tâche de la refondation territoriale, économique et sociale.

Je tiens à attirer l’attention de la communauté internationale sur une situation qui s’est développée ces dernières semaines à la frontière avec la République dominicaine. Nous ne sommes pas en guerre avec nos voisins. Les Haïtiens sont un peuple généreux et solidaire qui croit au dialogue et à la possibilité de partager équitablement des ressources communes dans le respect mutuel.

Nous devons éviter de réveiller de vieilles blessures historiques entre la République d’Haïti et la République dominicaine. Nous réaffirmons notre droit souverain d’utiliser les ressources hydriques binationales de manière équitable, conformément aux accords signés entre nos deux pays en 1929 et 2021.

Avant de conclure, je tiens à saluer les pays frères et les organisations internationales pour leur engagement et leur solidarité envers Haïti. Je remercie notamment le Kenya pour son accueil favorable à l’idée de prendre en charge la mission multinationale de soutien à la sécurité. Enfin, je rappelle que Haïti, tout comme l’Afrique, croit en la coopération internationale pour un avenir meilleur.

Je vous remercie.

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