Martelly ne s’en va jamais vraiment ; il reste présent, par sa musique, ses partisans, et son héritage politique empoisonné.
Lorsque Michel Martelly est arrivé au pouvoir en 2011, beaucoup en Haïti espéraient un renouveau politique, une rupture avec les dynamiques corrompues et les vieux démons du passé. Mais au lieu de cela, Martelly a incarné une régression profonde, où les espoirs d’un État moderne et démocratique ont été sacrifiés sur l’autel des intérêts personnels, de la corruption et des alliances douteuses.
Aujourd’hui, alors que de nouvelles accusations surgissent contre lui, se pose la question : Martelly est-il simplement un produit de circonstances malheureuses, ou représente-t-il un cancer profond qui gangrène tout le corps politique haïtien ?
La marionnette qui a pris vie
Le soutien initial des États-Unis à Martelly semble, avec le recul, être un acte de néo-colonialisme déguisé. Ils ont vu en lui un individu manipulable, capable de maintenir une stabilité superficielle dans un pays déstabilisé. Mais ce qu’ils n’avaient pas anticipé, c’était la transformation de cette marionnette en un acteur autonome, engagé dans une accumulation personnelle de pouvoir et de richesse, au détriment de la population haïtienne.
Les accusations portées mardi 20 aout 2024 par les États-Unis eux-mêmes, l’accusant de participation dans le trafic de drogue et de blanchiment d’argent, illustrent à quel point Martelly a échappé à leurs contrôles. Il est devenu non seulement un embarras, mais un danger pour les mêmes intérêts qu’il était censé protéger. Ces révélations mettent en lumière l’hypocrisie des acteurs internationaux, qui tolèrent et soutiennent des régimes corrompus tant qu’ils servent leurs intérêts, mais qui se retournent contre eux lorsque ces régimes deviennent incontrôlables.
Une emprise tentaculaire sur Haïti
Sous le règne de Martelly, Haïti n’a pas seulement été mal gouverné ; il a été méthodiquement décomposé. Les institutions ont été sapées, les contre-pouvoirs ont été neutralisés, et la culture de la corruption a été érigée en norme. Son héritage, incarné par des figures telles que Jovenel Moïse et Ariel Henry, témoigne de la profondeur de son emprise sur le pays. L’assassinat de Moïse, encore non résolu, et la crise politique qui s’ensuit ne sont que les dernières manifestations de cette descente aux enfers amorcée sous Martelly.
Il ne s’agit plus seulement de se demander si Martelly tombera ou non, mais plutôt de comprendre comment un tel individu a pu prospérer dans le contexte haïtien. Martelly n’est pas une aberration isolée ; il est le produit d’un système politique et social profondément malade, où la corruption, l’impunité et l’ingérence étrangère se combinent pour asphyxier tout espoir de progrès.
Un avenir incertain : Se défaire de l’héritage Martelly
Alors que l’on pourrait espérer que la fin politique de Michel Martelly marquerait le début d’une nouvelle ère pour Haïti, la réalité est beaucoup plus complexe. L’influence de Martelly s’étend au-delà de son propre mandat. Les structures qu’il a mises en place, les alliances qu’il a forgées, et la culture politique qu’il a perpétuée continueront de peser sur le pays bien après son départ.
L’affaire de son forcing au « Carnaval Labor Day » à New York en septembre en est un parfait exemple. Ce qui devrait être une célébration culturelle allait se transformer, nonobstant des haitiens consequents envers eux-memes, sous l’influence de Sweet Micky, en une manifestation de son cynisme politique villipende. C’est un rappel poignant que, pour beaucoup, Martelly ne s’en va jamais vraiment ; il reste présent, par sa musique, ses partisans, et son héritage politique empoisonné.
La question demeure donc : Haïti peut-elle véritablement se débarrasser de l’ombre de Martelly, ou ce dernier continuera-t-il à hanter la nation, tel un spectre, bien après que sa carrière politique aura pris fin ? La réponse dépendra de la capacité des Haïtiens à exiger un changement radical et à construire un avenir qui n’est plus défini par les erreurs du passé, mais par les aspirations d’une société enfin libre de ses démons.
cba