Haïti | Judiciaire. Me. Evens Fils dénonce des « pressions exercées » par « l’Empereur » Ariel Henry et « appelle les Magistrats de la République à la vigilance » face à ce pouvoir illégitime et corrompu

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Me. Evens Fils: « Dans un pays en agonie, le Premier Ministre est Alpha et l’Omega. Il n’a ni commencement, ni fin ».

Note d’appel à la vigilance du Conseiller Evens Fils adressée à tous les honorables Magistrats de la République, au personnel judiciaire et aux distingués Membres du CSPJ. 

Dimanche 2 octobre 2022 ((rezonodwes.com))–

D’une cause juste (rapport) vers un but inique (représailles vraisemblablement justifiées).

Que personne ne cède aux pressions et répressions du Premier Ministre (PM) ! Suite au refus de participer à une réunion avec le Premier Ministre Dr Ariel Henry, des pressions sont exercées formellement sur les Magistrats du pays, le personnel des Cours et Tribunaux et les Membres du CSPJ. 

Immédiatement après la publication de la note de la Fédération des Barreaux d’Haïti et celle du Conseiller Evens Fils déclinant respectueusement ladite invitation jugée inopportune assortie d’une proposition de démission du Gouvernement, le PM, par correspondance en date du 30 septembre 2022, a décidé de bloquer l’ordonnancement de toute dépense en faveur du Conseil Supérieur du Pouvoir Judicaire et de la Magistrature.

Dès aujourd’hui, tous les Magistrats de la République n’auront plus droit aux indemnités et tous les contractants n’auront plus droit à leur salaire. Le CSPJ, les Cours et Tribunaux n’auront plus droit aux dépenses administratives. La dépendance du Pouvoir Judiciaire est formalisée. Ainsi en a décidé l’Empereur

Sur ce, il sied de rappeler à tous les Magistrats qu’ils ne doivent point céder aux velléités d’un Premier Ministre qui avait pour mission que d’expédier les affaires courantes par l’accomplissement de simples formalités publiques. Si le Premier Ministre croit que la chose publique est un bien privé acquis par droit successoral, qu’il garde le budget du Pouvoir Judiciaire et  enlève tous frais et privilèges vaniteux.

Nous ne céderons jamais au projet personnel d’un Premier Ministre qui outrepasse ses prérogatives de fait et veut mettre la République à genoux. Au lieu de répondre à l’insécurité, la misère, la famine mortelle dans les prisons, la liberté d’aller et venir, il s’en prend à des élus et aux Magistrats. Il faut contrôler, mais il n’est pas l’organe de contrôle

Au fait, le Premier Ministre a parlé d’obligation de rapport du CSPJ dans sa correspondance. C’est judicieux ! Donnons à César ce qui est à César ! Là, moi et le Premier Ministre, nous nous rencontrons et nous nous entendons. Combien de fois ai-je failli perdre ma vie tellement j’exigeais de rapports dans l’administration judiciaire ?

Alors, au nom de la transparence commune, toutes les instances de l’État doivent soumettre leur rapport. Quelle aubaine pour assainir l’administration publique ! Palais National, la Primature, les Ministères. Dans l’intervalle, aucune dépense, généralement quelconque, dès ce lundi 3 octobre, ne devra être autorisée sans la soumission des rapports à qui de droit (sauf à la Primature).

Ces rapports doivent être rendus publics dont ceux de la Primature qui est soumise au même régime commun de reddition de compte et qui n’a pas compétence pour les recevoir ou les examiner.

Car il faut rendre compte au peuple (dépenses, actes bilatéraux, contrats nationaux et internationaux, lettres de créance, Energie, les commandes publiques, BRH, etc.) 

Soulignons : D’honnêtes magistrats ont abandonné le système judiciaire à cause des humiliations injustifiées du Premier Ministre ; d’autres sont privés de tout dans leur juridiction parce qu’ils n’ont pas de connexion à la Primature et au Ministère de l’Économie et des Finances pour que les réquisitions faites en faveur de leur bureau soient approuvées. A cela, nous devons attirer l’attention de tous et chacun sur les repressions administratives dont subissent les policiers en détachement avec le Conseiller Evens Fils.

Persécutés par la Direction Générale de la Police Nationale d’Haïti depuis une année, cers derniers se voient refuser leur rémunération comme fonctionnaire. A ce propos, nous ne saurions passer sous silence les menaces de mort et de dénigrement dont font l’objet des Conseillers.

Dans un pays en agonie, le Premier Ministre est Alpha et l’Omega. Il n’a ni commencement, ni fin. Sa volonté est la loi. Sa pensée est son calendrier et sa feuille de route. Il fait ce qu’il veut au temps qu’il le veut, sans censure, sans contrôle. N’est-ce pas suffisant ou trop ? Pourquoi s’attaquer au Pouvoir Judiciaire ? Pourquoi vouloir enlever des acquis démocratiques précaires ?  Pourquoi désire-t-on saper une quête vers une indépendance chancelante ? 

En définitive, le Premier Ministre doit accepter qu’il ne peut pas balancer, par la répression, cette équation complexe à sept (7) inconnus . Il faut des élections dans le pays. Pour avoir des élections, il faut un Conseil Électoral Provisoire. Pour avoir un Conseil Électoral,  il faut une Cour de Cassation qui recevra la prestation de serment dudit Conseil. Pour avoir une Cour de Cassation, il faut un Conseil Supérieur du Pouvoir Judiciaire qui se prononce sur la qualité des candidats pouvant composer la Cour de Cassation.

Tous azimuts, le Conseil Supérieur du Pouvoir Judiciaire est incontournable à l’instar d’un accord responsable, inclusif, transparent qui aura composé avec les sept inconnus de l’équation : CSPJ, FBH, Sénat, Association des Magistrats, Société civile, les juges de la Cour de Cassation en fonction et le Gouvernement afin de créer un équilibre social durable pour un prompt retour à l’ordre constitutionnel. 

Et aucune institution ne peut se substituer à une autre sans alimenter des conflits irréversibles à effets exterminateurs. 

Nommer des juges, sans accord par les institutions concernées,  sous fond de conflit accablant, équivaut à un défaut de légitimité des juges a priori, et par voie de conséquence, à leur retrait dans le système judiciaire avant qu’ils aient même eu le temps d’y entrer. Et des décisions qui seront contestées même par le vent.

On n’honore pas ainsi la carrière d’un Magistrat ou d’un juriste. En attendant, ne cédons point aux écarts arbitraires du Premier Ministre et soumettons les rapport à l’autorité compétence qui est loin d’être Ariel. Chacun devra répondre de ses actes dans un temps proche ou lointain. La cause évoquée par le PM (il faut donner des rapports) est juste. Mais, comme un mensonge qui dissimule une grande part de vérité,  le but poursuivi est inique.

Le PM veut faire pression pour que les magistrats lui donnent l’aval de former la Cour de Cassation à sa guise. Indice de l’iniquité du but :  

a) décision survenue suite à un refus de le rencontrer ;

b) effets non annoncés ;  

c) décision impartiale. Les autres instances et la Primature n’en sont pas frappées ;

d) Il n’est pas l’organe de contrôle a posteriori ;

e) c’est au Conseil que l’Administration du CSPJ devra présenter les rapports et non au PM ; Aujourd’hui encore, une réunion de la Primature avec le CSPJ est de nouveau fixée à brûle-pourpoint.

Si d’autres Conseillers du CSPJ disponibles, dans leur sagesse fort circonspecte, voudraient bien y participer dans l’intérêt de la Magistrature, je leur suis solidaire. Nous constituons un quorum de cinq (5) membres prescrit par la loi de 2007.

Il leur plaira de prendre en compte mon message et de le transmettre s’il leur parait aimable: « Pas de soi-disant réouverture cérémonielle d’une justice en lambeaux. Le Premier Ministre ne peut pas choisir des juges pouvant composer la Cour de Cassation. Sa volonté ne doit pas participer. Il doit rester qu’aux formalités. Personne ne cèdera à ses répressions et humiliations exercées contre la Magistrature et la Justice, même s’il faudrait mourir ou enlever les vanités que l’on nomme privilèges. Sa fonction de fait ne peut pas évincer le rôle des élus de droit. La défaite du droit est provisoire ». 

2e version !

Fait à Ouanaminthe, ce dimanche 2 octobre 2022.
Evens Fils, bâtonnier de l’Ordre des Avocats de Fort-Liberté
Représentant de la Fédération es Barreaux d’Haïti au CSPJ.

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