L’annulation de la subvention de l’essence entraine « de lourdes conséquences immédiates sur le quotidien des haïtiens », souligne AAA

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AAA: « Ariel Henry évite d’adresser les particularités du kérosène qui compense pour le manque d’électricité, surtout dans l’arrière-pays ».

Directoire du parti AYITI AN AKSYON

Note de Conjoncture

Ref.: Annulation de la subvention de l’essence

Le 20 Septembre 2022                                      

Le Parti Ayiti An Aksyon (AAA) confirme qu’il continue de participer aux efforts communs des forces politiques haïtiennes et de la société civile en vue d’aboutir à une solution concertée à la crise, découlant d’une gouvernance inefficace et corrompue pour répondre au desiderata populaire, tant sollicité. 

Le Parti Ayiti An Aksyon s’est toujours opposé et continue de s’opposer aux appels à la violence (discours du Coord. National/Youri Latortue/2-09-2022/Gonaïves); ce qui, à certaines occasions, lui a valu une grande incompréhension. Il s’est maintenu à distance de toute action malhonnête envers quiconque, et en particulier, contre ses adversaires politiques, dans une approche éthique et patriote. La légitimité s’acquiert, elle ne s’impose pas.

Aussi, le Parti condamne, sans réserve, tous les actes de brigandage perpétrés pendant les récentes manifestations populaires, notamment les incitations à la haine qu’il ne saurait cautionner. Cependant, le Parti continue de soutenir une mobilisation populaire pacifique tel que lancé en Juin 2022 (prioritairement contre l’insécurité), seul moyen de faire entendre les justes revendications du peuple haïtien.   

De plus, le Parti Ayiti An Aksyon estime utile de confirmer qu’il n’adhère pas à l’élimination des subventions du prix du Pétrole comme entend le faire le Premier Ministre Ariel Henry

La position du Parti ne se situe pas dans une ligne populiste d’autopromotion facile.  Il veut souligner que la décision présentée par le Premier Ministre découle de l’improvisation, et que l’heure est trop grave pour permettre à l’amateurisme de persister sans considération pour les lourdes conséquences immédiates, d’une telle décision sur le quotidien des haïtiens. Modifier un régime de subventions doit être scrupuleusement justifié et méthodiquement élaboré à travers des programmes d’encadrement social, bien implantés. Tout ce qui se conçoit bien, doit pouvoir s’énoncer avec simplicité, et précision; or aucune trace d’une telle mise en place n’existe à date

Pour comble, même les bénéfices de l’annulation de la subvention, présentés par le Premier Ministre Ariel Henry, sont vagues, génériques et non chiffrés

Ce dernier, applique une stratégie de communication floue, évitant les considérations qui s’imposent lorsque la hausse des prix concerne le gaz propane, pierre angulaire de la lutte contre le déboisement. Au même titre, il évite d’adresser les particularités du kérosène qui compense pour le manque d’électricité, surtout dans l’arrière-pays. Sans faire étalage, le Parti Ayiti An Aksyon constate que le Premier Ministre Ariel Henry, tout en s’accrochant au pouvoir hérité de façon discutable, se libère de toutes les responsabilités qui devraient engager les décisions intégrées d’un leadership prévoyant et bienveillant.   

A moins que cela ne tienne du secret d’Etat -ce qui ne ferait aucun sens-, aucune donnée précise n’est offerte; ce qui empêche de construire une simulation –même approximative – qui permettrait au Parti de vérifier la faisabilité des programmes sociaux annoncés. 

L’empressement à annuler une subvention que le gouvernement n’a su, ou n’a pu quantifier de façon convaincante, nous autorise à douter de sa parole. En fait, nous ne pouvons soutenir des décisions dont les promoteurs, eux-mêmes au gouvernail du pays, sont incapables de défendre valablement, et dont les palliatifs sont trop flous pour être crédibles. 

Aucune analyse n’a été offerte pour justifier de l’annulation de la subvention aussi brutalement, au lieu de la faire en phase, à supposer qu’il aurait pu être démontré que ce soit la seule voie à suivre dans l’immédiat; ce qui n’est pas le cas. 

Le Parti est conscient de la difficulté pour l’Etat de financer la différence entre le prix d’achat et le prix de revente du pétrole localement. Mais la moindre des choses serait de présenter un raisonnement technique professionnel afin de rassurer le public sur les bénéfices indirects escomptés. Au moins, une telle approche aurait offert au Premier Ministre Ariel Henry, une meilleure chance, si jamais il espérait vraiment rallier le pays à une décision aussi controversée. 

le PM contesté œuvre à une explosion sociale

Doubler le prix de produits éminemment transversales, dans le cadre d’une des crises économiques les plus aigües que le pays ait connues depuis plus de 30 ans – avec des gangs armés qui empêchent la libre circulation des personnes et des biens, aucun investissement depuis 3 ans, et un chômage qui atteint 70% aujourd’hui, aucune prévision d’augmentation de salaires et des indices économiques sans exception dans le rouge, c’est œuvrer à une explosion sociale

Fort de ce qui précède, Ayiti An Aksyon se trouve obligé de s’opposer catégoriquement à cette démarche qui pourrait être un nouveau subterfuge pour dégager des fonds dont l’application judicieuse au bénéfice des citoyens, n’est nullement garantie.  A date, les prises de position du Premier Ministre tiennent de l’oralité, avec pour seul engagement immuable, ceux qui concernent les sacrifices à imposer aux plus démunis. 

En effet, si les mesures d’accompagnement sont toujours énumérées, elles sont rarement maintenues.  En plus de se faire gruger, le peuple se sent méprisé, tandis que tous ses recours institutionnels ont été édentés.

Aussi, la déclaration de dimanche du Premier Ministre Ariel Henry, ignorant la colère populaire qu’il a attribué strictement aux gangs, infiltrés -selon lui- par le secteur des affaires et l’opposition politique, a doublement enragé la population aux abois. Y a-t-il des gangs qui s’activent sur le territoire ?  Certainement. Peut-on dire que ce sont eux qui sont la cause de cette révolte dans toutes les villes du pays ? Non

Pour preuve, le peuple a redoublé de fougue au lendemain de l’annonce de l’augmentation du prix du pétrole à la pompe. C’est une politique de l’autruche que de mettre le blâme sur d’autres secteurs, surtout que le Gouvernement n’a pris aucune mesure contre les chefs de gangs les plus notoires désormais autoproclamés «révolutionnaires politiques». Ce déni «pourianiste», confirme que nous ne sommes pas gouvernés; ou peut être qu’il y a connivence pour faire penser que le peuple n’est pas dans les rues.      

Aussi, nous exigeons que les contre-effets, parmi lesquels l’augmentation du chômage, l’augmentation du cout du transport entre autres domaines directement affectés, ne soient pas ignorés au profit d’une approche macroéconomique cynique; d’autant que le Premier Ministre est dans l’incapacité de chiffrer la réallocation des montants économisés, au bénéfice de la population. 

Le Gouvernement nous doit une analyse macro-économique, en bonne et due forme, des effets du retrait des subventions avec une présentation des bénéfices de cette démarche de façon chiffrée sur au moins 12 à 18 mois. 

Si réformer la politique des subventions diminue une partie du déficit budgétaires, elle aggrave des  problèmes sociaux et politiques importants, en grande partie dans des groupes sociaux démunis et dans des régions les plus défavorisées, ou qui le deviendront. Les bénéfices de retrait des subventions ne peuvent pas être diffus. Les pertes potentielles tendent à concerner des groupes d’intérêt influents à côté des groupes sociaux pauvres, ce qui contrarie les réformes. Dans cette logique il faut que les vrais perdants de la suppression d’une subvention soient identifiés et compensés.

La transparence des recettes et des dépenses de l’Etat est un point non négociable. Mais aussi, et surtout, assurer aussi que le sacrifice exigé n’est pas seulement celui du peuple, mais de l’administration publique et des secteurs privés concernés, est un point sensible. Il doit chercher à récupérer d’autres sources de financement à partir des franchises à limiter, les taxes sur les passeports à rapatrier par exemple. 

Il est tout aussi important pour Ariel Henry de faire preuve de transparence en ce qui a trait au justificatif de cette décision, tandis qu’il se doit de rassurer le peuple que l’annulation des subventions ne vise pas à financer le  Pouvoir et de son agenda politique, mais plutôt la qualité de vie du peuple en général.

Ayiti An Aksyon demeure attaché au renforcement des institutions, à la restructuration de l’administration publique et de l’assainissement de la gestion des deniers publics.  Cependant, montrer que l’Etat prend aussi des mesures d’austérité pour prouver à la population qu’il réduit son train de vie, et opère des reformes (franchise, argent passeports, et autres taxes) est tout aussi clé. 

Le peuple ne veut pas être le seul à se sacrifier, et ne pas le rassurer de la globalité des efforts de bonne gouvernance, ne peut qu’aggraver le climat incendiaire du moment.  Malheureusement, par son discours du 11 Septembre 2022, le Premier Ministre n’a fait que confirmer à son peuple, déjà éprouvé par l’insécurité chronique, une pauvreté infrahumaine, une dépendance vitale au carburant pour son transport, pour l’électricité ou la cuisine, qu’il est livré a lui-même. 

En attendant, le Parti Ayiti An Aksyon continuera à demander plus de transparence, tout en se mobilisant, aux cotés de la population dans toutes ses revendications, et en particulier, contre la décision d’annuler les subventions.  

Fait à Port-au-Prince, le 20 Septembre 2022. 

*Les prix du diesel et du kérosène vont presque doubler, passant d'environ 350 gourdes (la monnaie haïtienne) à près de 670 gourdes. Plusieurs villes haïtiennes, dont la capitale Port-au-Prince, étaient paralysées mercredi 14 septembre par des manifestations déclenchées par la décision du gouvernement de suspendre ou réduire drastiquement les subventions sur les carburants, question extrêmement sensible dans ce pays où l'essence est aussi rare qu'essentielle. Les routes principales étaient bloquées par les barricades, les transports en commun étaient à l'arrêt et nombre de commerces ou d'institutions publiques avaient gardé porte close après l'attaque de certaines entreprises par des protestataires. A date la situation demeure très volatile.

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