3 octobre 2025
Un président coincé dans le labyrinthe de ses promesses
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Un président coincé dans le labyrinthe de ses promesses

Faudrait-il remplacer dans le cadre de cette réflexion sur les « faits et gestes» de Jovenel Moïse, étant président, la notion de vérité par celle de promesse de campagne électorale ?

par Me. Elco Saint-Amand




Port-au-Prince, mercredi 7 juin 2017 ((rezonodwes.com)).- Choisir de camper un personnage politique entre ses vérités et ses promesses, nous conduit involontairement à une spirale où la magie de la réalité tient indubitablement lieu de mysticisme dans des faux pas, entraînant de plus en plus le collectif le dos au mur. Le contexte identifié à propos de l’homme héros (qu’il est… et se porte à faire croire en révolutionnant la culture de bananes) prôné par notre président, qui a su, de par sa volonté, dévaler toutes les pentes d’un tissu social qui ne pardonne pas… et pourtant, Jovenel Moïse se voit être le produit réussi et fini d’une classe possédante. Une intention très peu louable pour cet enfant de l’arrière pays. Mais voilà… un poncif qui a entraîné une véritable discordance pour le « Nèg banann nan» qu’il était.

Nèg banann nan : argent comptant pour les conflits de classes et d’intérêts

S’agit-il d’une affirmation qui retiendra le mensonge social haïtien en otage… Pour plus d’uns, il fallait attendre le discours non attendu du président Jovenel Moïse lors de la cérémonie de l’ ACHAM (Haitian-American Chamber of Commerce) pour mieux cerner l’essence de l’homme au pouvoir (…) il fallait bien qu’on débouche sur une erreur plus dommageable et nettement plus problématique, à savoir une fausse identité sociale de celui qui se réclamait jadis de la paysannerie — rien que ça, un simple comportement. Très embarrassant et embêtant, vraiment assourdissant.

De la caravane, dans l’Artibonite, à une telle citation étant donc entièrement fausse : « Je suis le produit du secteur privé », martelait-il? Nous pensons qu’une telle bribe de phrase a tout simplement déformé la théorie de Max Weiber sur la dynamique et la transformation des classes sociales.

Jovenel Moïse : un président en mal d’identité.

Monsieur, est-il le président de la bourgeoisie ou/et celui du peuple haïtien ? Quand on observait le candidat Moïse, on aurait pu penser, bien sûr, à une sorte de « collage sociopolitique ». Mais il n’en est rien non plus : aucune portion de cette manière de gouverner n’est de lui ? C‘est un manque de vérification suffisante du social, voilà; et une légèreté pour le moins con fuse pour étudier un sujet de classe. Mais nous n’essayons pas d’ accabler le président dont l’intention, encore une fois, pourrait être louable, mais qui, à contrario, représente un certain intérêt pour cette classe qui l‘a placé au Palais national.

Pourquoi Jovenel Moïse est-il devenu président de la République ? Une réponse très simple, mais aussi très complexe : l’échec de la classe politique traditionnelle. Le peuple est devenu plus instable dans son mental et dans ses choix…

Les aberrations de la prise de pouvoir auxquelles on parvient aujourd’hui, en Haïti, est carrément un constat, où l’on veut rester aveugle devant ce phénomène de récompenses des membres de l’ancien Conseil électoral provisoire (CEP). Les cas de Pierre Manigat junior (Journal L‘Union) et Yolette Mengual (Direction générale du ministère des Haïtiens vivant à l’étranger) quoique cette dernière soit jusqu’ici inculpée par la justice pour une affaire de corruption, elle fait, contre vents et marées, partie du gouvernement Moïse/Lafontant. Récompense. Clientélisme.

Depuis l’avènement de M. Moïse à la magistrature suprême de l’État, l’on se demande à vue d’œil qu’est ce qu’il avait en tête ? Est-ce un défi social ou l’ échec de responsabilité ? Comment convaincre toute une république de l’échec de la politique traditionnelle et de l’urgente nécessité d’une grande réforme sociale et d’en diffuser la substance…? — celle d’une mobilisation républicaine de tous et de toutes contre la mauvaise gouvernance de l’État. Un État qui ne se gère point.

Haïti : l’insurrection des maux!

Une société qui fait silence sur la question de la mise en examen du président, est-elle aussi, selon toute humanité éclairée, une société inculpée ?- Peut-on, en effet, passer sous silence cette question d’inculpation du président tant et si bien quand on savait que toutes les entreprises que tenait le citoyen Jovenel Moïse étaient pour la plupart non existantes. L’Agri-Trans n’existe plus. Maism en réalité, a-t-elle jamais existé ? Tolérer, dans une société, un président inculpé à la tête de l’État c’est tout simplement envoyer un mauvais signal dans un monde où l’on est en train de combattre la corruption sous toutes ses formes.

M. Moïse, qui se rendait en Équateur, la semaine dernière, afin d’assister à l’installation du nouveau président équatorien dont l’oncle vient d’être arrêté pour une affaire de corruption… quel modèle ?




Plus près de nous, et ce depuis plus d’un mois, l’on assiste à une levée de boucliers contres les corrompus et les corrupteurs dans la République voisine. Le porte-parole de la marche des verts, en République dominicaine, eut à déclarer, le dimanche 4 juin 2017 dernier, que le ministre de la Justice de son pays a ordonné au procureur de la République (commissaire du gouvernement) d’ouvrir une enquête sur les sources de financement de campagne du Président Danilo Médina — une marche pour exiger que le président Médina mette fin à la corruption institutionnalisée au sein de l’État…

À quand une marche contre la corruption en Haïti ?

Paradoxalement, faudrait-il théoriser sur la corruption qui gangrène notre pays ? La création d’une université pour assurer la formation des corrompus. « Tragiironie» du temps de guerre contre la corruption étatisée dans la plupart des pays de l’Amérique latine, où l‘on mentionne à tort que notre Exécutif, de concert avec le Législatif veut imposer à la nation une nouvelle loi sur UCREF — une loi qui, dans son esprit et dans ses lettres, voudrait retirer l’autonomie, la crédibilité et l’indépendance de cette institution républicaine créée pour combattre la corruption. Cette loi votée par le Parlement n’a pu être, jusqu’ici, publiée dans le journal officiel Le Moniteur.

Pourquoi ? Parce que cette loi est une anti-loi contre la loi de 2001 créant l’UCREF — cette loi ayant fait de UCREF une institution autonome et indépendante et également ayant des ramifications à d’autres institutions au niveau international contre l’argent provenant de la drogue et de la corruption. Un rapport : à la lutte contre le clientélisme et la tolérance.

Où est passée l’idée des États généraux de la Nation prônée par le candidat Jovenel Moïse ? Sans vouloir rendre ici un hommage bien mérité à ce grand citoyen que fût le Dr. Tuneb Delpé, et aussi sans vouloir faire un amalgame entre l’idée de la conférence nationale souveraine et les États généraux, nous voudrions plutôt poser la question sur le manque d’intérêt de tous ceux qui se sont succédé au pouvoir, depuis la chute de la dictature…

Aucune tentative n’a été initiée. Poser la problématique d’une conférence nationale (États généraux), c’est fortement reposer les fondements des relations entre l’État et la Nation, qui, dans une logique de mise en commun du devenir social et politique du pays, devra redéfinir l’image de celle ou de celui qui prendra en mains propres les destinés du pays.




Enfin, où est passé l’idéal de justice cultivé au nom du peuple, quand on constate le laxisme qui caractérise le système judiciaire haïtien dans la prononciation du mot du droit, même lorsque c’est le président de la République qui s’est lui-même trouvé en cause ?

Me. Elco Saint Amand, av.

[texte extrait de Haïti-Observateur / Edition du 7 au 14 juin 2017]

3 Comments

  • Mario Caonabo 7 juin 2017

    Ou pote kèk bon pwen nan atik la, tèlke kriz oubyen konplèks idantite lakay Jovenel, echèk “klas” politik la (se pa yon klas men reprezantan “defòme” klas boujwaz la), rekonpans moun ki te nan koripsyon nan KEP a, kesyon enkilpasyon “prezidan” an, lwa “ilegal” paleman kwoupyon an pou bay “enkilpe” a kontwòl enstitisyon ki sipoze endepandan, UCREF la (yon aberasyon, gagòt), kesyon konferans nasyonal la, epi yon leve kanpe kont koripsyon ann Ayiti ets.

    Laplipa sa w soulve nan atik la se plito efè yo, sentòm maladi a. Men ou pa touché kòz la. Si w pa manyen kòz la, ou riske tonbe nan pansman tanporè ki pap solisyone pwoblèm la, geri malad la vreman. Li ka rale yon ti souf pou yon ti tan. Sepandan, nou vreman vle geri maladi a yon fwa pou tout pou malad la sispann soufri yon fason pèmanan. Gwo kòz la sè ke sosyete Ayisyèn la se yon sosyete kapitalis ki chita sou leksplwatasyon. Se vrè kòz maladi a. LA A, NOU KONNEN POU YON SOSYETE OSI MALAD KE AYITI, PA GEN LÒT SOLISYON, SE REVOLISYON! KOZE SA A, NOU VLE L RANTRE NAN TÈT NOU, NAN TOUT SELIL NOU, NAN ‘ADN’ NOU MENM!

    Ou montre nan atik la Jovenel Moise di a pwòp bouch li, li se pwodui sektè prive a. Nou konn kisa sa vle di? Sa vle di nou gen yon “nèg bannann” sèch alatèt peyi a ki se bon tyoul boujwa yo nan peyi d Ayiti. Konsa, li pa etonan, jounen Jodi a, li vle enpoze sendika Ouvriye yo kap goumen pou yon ogmantasyon salè 800 goud, 2 konze ke Ouvriye yo pa rekonèt yo nan yo ditou nan Konsèy Siperyè Salè a (CSS/KSS). Mesye, SISPANN BANN VAGABONDAJ SA YO NAN PEYI A!!! Men zak yon “prezidan” koken ki panse li ka gouvène Ayiti an gwo ponyèt, an kriminèl notwa. PANSE A 7 FEVRIYE 1986 TANDE NÈG!!!!

    Tout sendika Ouvriye, tout asosiyasyon travayè, tout òganizasyon pwogresis, tout vrè demokrat, brèf, tout moun konsyan nan peyi a ak nan dyaspora a dwe denonse gouvènman Jovenel/Lafontant an ak tout CSS/KSS bidon an e pa asepte anyen ki pa reponn a revandikasyon jis pou ogmantasyon salè Ouvriye yo a 800 goud la pou pi piti, plis akonpayman sosyal yo.

  • Regard perçant 8 juin 2017

    Poukisa de ranyon kou aristid, preval, switmiki, vin prezidan apre youn mons kou divalye pè e youn ti minab kou divalye fis? Pa gen klas moun kap peyi. Pa gen elit jan youn gwo entelektyèl tan jodi ya dil. Pase elit ki gen pouvwa yo se fo elit yo ye yo gen enterè kraze peyi ya pase yo pa identifye tèt yo kou moun peyi ya.

  • Regard perçant 8 juin 2017

    Poukisa de ranyon kou aristid, preval, switmiki, vin prezidan apre youn mons kou divalye pè e youn ti minab kou divalye fis? Pa gen klas moun kap panse pou mennen peyi ya lan byen kolektif ak striktirèl. Pa gen elit jan youn gwo entelektyèl tan jodi ya dil. Pase elit ki gen pouvwa yo se fo elit yo ye yo gen enterè kraze peyi ya pase yo pa identifye tèt yo kou moun peyi ya.

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