Pagaille sur le marché des changes : 6 taux pratiqués, la BRH mise en cause

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La Banque de la République d’Haïti (BRH), peine à jouer pleinement son rôle d’organe régulateur pour freiner des dérives sur le marché des changes. Avec certaines faiblesses, des agents économiques en profitent pour déstabiliser le marché

Vendredi 12 mars 2021 ((rezonodwes.com))– Les conséquences de la circulaire 114-2 de la BRH sont pour le moins néfastes pour l’économie, estime l’économiste Énomy Germain. Même si le rythme d’accélération du taux de change a considérablement diminué, il en demeure que les effets pervers ont rattrapé le marché. 

Dans une interview exclusive accordée au journal Rezo Nòdwès, l’économiste Énomy Germain evoque une rareté de la devise américaine, ce qui provoque un certain déséquilibre entre l’offre et la demande. 

Dans la logique de contrôler le flux de la circulation du dollar, la BRH semble avoir opté pour des alternatives moins enviables et ouvert la voie à des transactions irrégulières. Il s’ensuit que le taux quotidien affiché dans les banques commerciales est de loin celui pratiqué par des agents informels, déplorent des opérateurs économiques.

Cette réalité résulte d’une canalisation de la monnaie américaine vers des importations, ou encore la disponibilité du dollar pour des particuliers, analyse Énomy Germain. 

Avec la circulaire 114-2, le marché informel fait face à un manque criant de devise, ce qui contraint certains importateurs à se tourner vers des opérations d’intermédiation financière, a-t-il expliqué. 

Injection ou trompe l’oeil
En vue de contenir le glissement du taux de change, la BRH a eu recours à des injections sur le marché. La dernière décision de la Banque des banques d’alimenter le circuit monétaire en injectant 150 millions de dollars américains n’a pas réussi à faire bouger les lignes.

Dans son analyse, il décèle des mécanismes mis en avant par la BRH pour contrôler les transactions du dollar qui s’avèrent inefficaces. Autrement dit, ces injections n’influent pas la pression sur la Gourde. Selon Énomy Germain, cette politique n’augmente pas en réalité l’offre du dollar américain. Il s’agit d’une recanalisation de la devise américaine au regard des 30% retenus sur des transferts étrangers, non des fonds puisés dans la réserve de la BRH. 

Au moins 6 taux sont pratiqués sur le marché et le dollar est devenu de plus en plus rare, témoignent des agents économiques. Le communiqué quotidien de la BRH fixant le taux du dollar s’apparente à une farce, car un fossé énorme entre le taux affiché et celui pratiqué s’impose. 

L’organe régulateur du système monétaire peine à jouer son rôle de gendarme pour réguler la situation et ramener les opérateurs à se plier aux dispositions de la circulaire 114-2. En conclusion, un désordre a été constaté dans le secteur. Dans les banques commerciales, le dollar est affiché à 76 Gourdes, dans des maisons de transfert, il en faut en moyenne 85 Gourdes, alors que les agences informelles affichent 91 Gourdes ; un véritable déficit de transparence, soutient l’économiste.

Le chantier s’annonce relevé pour la BRH afin de ramener les  opérateurs à appliquer les mesures édictées pour stabiliser le marché, a en croire le spécialiste. 

Même si des sanctions sont envisagées pour certaines banques commerciales hostiles à la réforme, les efforts de la BRH pour reprendre la main sont loin de rassurer. 

Hervé Noël
vevenoel@gmail.com

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