Jeudi 16 avril 2020 ((rezonodwes.com))– Quiconque voulant faire une analyse diachronique sur le mal-développement économique des pays appauvrissants, elle/il ne cesserait de mettre en évidence la question de dette comme un instrument de domination du système capitaliste néolibéral. Alors, la jeune nation haytienne dès son indépendance a fait face à une nouvelle forme de colonisation, l’imposition d’une indemnité de 150 millions francs-or.
Par ailleurs, est-ce celle-ci qui va mettre Hayti en croix de son développement organique ? Pourquoi Hayti reste et demeure un pays isolé par les grandes puissances impérialistes ? Pourquoi les « dirigeants » haytiens ne font pas d’autres choix politique et économique ? Hayti se trouve-t-il dans le défit du dépassement du FMI pour assurer le bien-être socio-économique et politique de la société haytienne ? En quoi une annuité de dette peut changer un problème structurel où le FMI est l’une des principales causes en faisant passer comme une solution lors du Covid-19 ? Est-ce une faveur du FMI auprès d’Hayti ? Pourquoi pas une annulation totale de cette dette odieuse ?
À la lumière de l’histoire d’Hayti, [1] « les anciens captifs du XVIIIe siècle se construisent un État anti-colonialiste, anti-impérialiste, anti-raciste, la seule place dans les Amériques où un Noir peut vivre sans être inquiété.» Ce modèle révolution aurait eu une grande conséquence politique, économique, culturelle et diplomatique contre la nation haytienne. Car cette révolution va à contre-courant de la logique mondiale de l’époque. C’est en ce sens, Hayti aura subit une nouvelle forme de colonisation avec le paiement d’une indemnité de 150 millions francs-or. Alors, est-ce une forme de revanche contre la victoire de l’armée Indigène sur celle de Napoléon, car cette victoire avait occulté en France pendant plusieurs décennies. Si j’ose paraphraser Jean Pierre Le Glaunec.
En effet, Hayti acceptait une indemnité où [2] Charles X a fait escorter l’ordonnance par une armada de 14 bâtiments de guerre armés de 528 canons. [3] La dette de l’indépendance : 90 millions de Francs-or, soit aujourd’hui quelque 17 milliards d’euros, exigés par la France en 1825, sous le règne de Charles X, en échange de l’affranchissement du pays, et destinés à « indemniser » les colons.
Cependant [4] même lorsque l’indemnité totale a été réduite à 90 millions de franc-or, Haïti est resté paralysé pour toujours par la dette, l’isolement économique et la mise en quarantaine diplomatique. Cette réduction est due grâce à un accord signé en 1838 entre l’ex-colonie française de Saint-Domingue et Louis-Philippe 1er. Cet accord reconnait l’indépendance pleine et entière de la République d’Haïti et aussi la réduction de l’indemnité de 150 à 90 millions franc-or. Bien avant cette réduction, [5] le président Boyer contracta une dette de 30 millions de francs pour faire face à la première échéance de l’indemnisation.
Gérard Pierre Charles a mentionné suivant Abel Nicolas LEGER dans histoire diplomatique d’Haïti, la somme de 30 millions de francs fut contractée à des intérêts annuels de 6% avec la Maison Candolphe et Cie dont le chef était le fameux banquier parisien Laffite. C’est ce que les historiens nomment « la double dette ». Cette dette fut honorée au prix de la force de travail des paysans c’est-à-dire dans les travaux forcés et à l’exploitation de notre denrée comme le café. Aussi, [6] la première guerre mondiale a une conséquence néfaste pour notre économie, car elle baisse notre café. En outre, [op.cit.] le pays a pris des emprunts auprès des États-Unis, de l’Allemagne et même chez des banques françaises à des taux exorbitants.
Les puissances occidentales à travers leur démarche colonisatrice considèrent Hayti comme leur colonie malgré son indépendance politique en Janvier 1804. La démarche coloniale est une question de rapport de force mais non de dialogue. Comme le Diplomate, Professeur Ricardo Seitenfus a si bien souligné « le rapport entre Haïti et la communauté internationale est un rapport de force mais non de dialogue ».
Alors, [op.cit.] en 1922, la Banque nationale fut l’instrument grâce auquel l’héritage de la dette extérieure passa des mains françaises aux mains américaines. [7]Le 15 mai 1922, Louis Borno prend possession du pouvoir. Le nouveau chef d’État promet de construire le développement du pays en s’appuyant sur les attentes américaines. Conscient des limites financières auxquelles il est soumis, il demande à l’occupant un emprunt dont le but sera d’assainir les finances du pays et de faciliter sa modernisation. Par ailleurs, est-ce vraiment pour moderniser le pays ?
À la lumière du professeur Sauver Pierre Etienne dans son essais, « l’énigme haïtienne, l’échec de l’État moderne en Haïti », il est difficile d’établir l’État moderne en Hayti, car il est effondré à chaque tentatif, c’est en ce sens, nous avons une tradition de l’État néopatrimonial.
Il est clair, [op.cit.] l’emprunt émis est de 22.9 millions USD. Conformément au protocole du 3 octobre 1919, cette valeur est affectée au paiement des emprunts français de 1875, 1896, et 1910 de la dette intérieure […]. Suivant les clauses de l’emprunt, le pays ne doit pas investir dans les activités qui peuvent concurrencer les produits importés.
En effet, l’emprunt de 1922 devient un moyen d’encourager l’exploitation des marchandises vers Haïti. Il constitue pour la nation haïtienne, souligne Maurice Liautaud, un carcan. [Ibid.] À partir de 1922, les autorités haïtiennes se mettent inconditionnellement au service des forces d’occupation. Dès lors, l’occupation s’étend sans difficultés à tous les domaines de la vie nationale. En fait, la terre est donnée aux compagnies à meilleur marché qu’aux paysans.
La marginalisation des paysans n’est pas nouveau, comme a si bien souligné Gérard Barthelemy dans son livre intitulé, « le pays en dehors », le milieu rural n’a jamais cessé d’être définie et de se définir comme le pays « andeyò», c’est ce qui permet notamment d’expliquer au mieux la cohabitation de l’autogestion du milieu rural avec la dictature, mode de suprématie politique inhérent à l’autre culture, car si, par essence, ce pouvoir étatique est néfaste, autant qu’il soit mauvais, injuste, excessif, prédateur. Au moins il se justifie alors dans sa position d’élément externe et son rejet n’en est que plus automatique, plus normal, puisque son but avoué a toujours été la domination du paysan ou son rejet. Face à l’ingérence d’autres structures de pouvoir, notamment économique, comme les projets de développement en provenance de l’extérieur, la première réaction du milieu est toujours de se défendre. Ainsi, [op.cit.] l’emprunt de 1922 renforce la dépendance du pays vis-à-vis des États-Unis, et constitue un facteur limitatif du développement d’Haïti.
Hayti et la corruption endémique
Comment se fait-il avant et après président Jean-Bertrand Aristide aucun président n’intéresse plus dans une lutte pour « la réparation et restitution », le remboursement de l’indemnité de l’indépendance haytienne imposée par la France. [8]La somme réclamée par le président Aristide a été évaluée en 2004 à plus de 21 milliards de dollars par un cabinet d’affaire des États-Unis à la demande du président.
L’intention du président Aristide a été noble, cependant sa méthode propagandiste non diplomatique était mauvaise ; on ne croit pas qu’il y ait un projet de société pour mieux investir et faire la gestion de la somme réclamée si toutefois la France nous l’a remboursé. La gouvernance de ce dernier a une réputation d’être corrompue. Par exemple, [9] l’Unité Centrale de Renseignements Financiers(UCREF) a été mise à contribution en 2004 en appui à une commission présidentielle, Commission d’Enquête Administrative(CEA), créée par arrêté présidentielle en date du 6 octobre 2004.
[Ibid.]Ladite commission devait enquêter sur la deuxième administration du président Jean-Bertrand Aristide 7 février 2001-29 février 2004. Malgré son travail qui a documenté les pratiques de corruption de ce régime, le rapport préliminaire du mois de Juillet 2005 n’a donné lieu véritablement à aucune poursuite. En outre, [10] en réplique aux médiocres prestations des lavalassiens et des duvaliéristes, il est né dans l’intervalle de moins d’une année, une race de voleurs qui, par tous les moyens, valent damer le pion à Prosper Avril et à Jean-B Aristide. Le premier est parti avec 386 000 millions de dollars américains. Et le deuxième qui, de loin, semble le plus intelligent, à 700 millions, ralliant du même coup le club des multimillionnaires. Il faut souligner que la corruption comme la pratique autocratique de l’État est un héritage colonial.
[11]En 1986 Baby Doc quittait Haïti pour sa ville de la côte d’Azur avec une fortune évaluée à 900 millions de dollars qui sont encore actuellement gèles par une banque suisse. Il laissait à son peuple une dette extérieure de 750 millions de dollars. Les gouvernements corrompus ont souvent cette pratique comme Mobutu, à la tête du Zaïre pendant plus de 30 ans, disposait d’une fortune estimée à 8 milliards de dollars, équivalant aux deux tiers de la dette de son pays. Ces enrichissements illicites sont personnels, malgré cela, leurs acolytes ne sont pas comptés. D’où une forme de corruption collective diffuse.
Par ailleurs, qui sont financiers ces modes de gouvernement, pourquoi et comment ? [Ibid.] Les pays les plus pauvres sans ressources minières importantes n’intéressent pas les créanciers privés qui s’en sont retirés depuis le déclenchement de la crise de la dette au début des années 1980. Certains pays pauvres mais possédant des ressources minières reçoivent des prêts significatifs de la part des institutions financières privées, même cette part n’est pas toujours majoritaire. C’est le cas de la Bolivie, de la cote d’Ivoire, du Congo-Brazzaville, de l’ile Maurice ou encore du Soudan et Hayti. Le trio ayant FMI, la Banque Mondiale et l’OMC dans sa tradition soutenue des régimes dictatoriaux et corrompus. Si j’ose paraphraser Eric Toussaint.
En ce sens, via la pratique de ce trio de soutenir des régimes corrompus, comment peut-on justifier cette annuité de dette pour Hayti lors du Covid-19?
Si en Hayti la seule crise qui n’est pas en crise, c’est la crise ; on pourrait ajouter la croissance de la dette n’est pas aussi en crise. Elle croît de manière exponentielle. [12] En 2003 la dette externe d’Haïti est estimée à 2 milliards 110 millions de dollars. La Plate-forme Haïtienne de Plaidoyer pour un Développement Alternative(PAPDA) réclame l’annulation sans condition de cette dette et le remboursement des versements déjà effectués. Cette institution n’est pas la seule dans cette démarche.
Comme [op.cit.] le Conseil Représentatif des Associations Noires de France(CRAN) a estimé le remboursement de la dette à 17 milliards d’euros (22 milliards US $, intérêts compris). [13] En 2006, la dette extérieure d’Haïti, évaluée à 1.3 milliards de dollars américains. Vu l’imposition faite par les institutions de Bretton woods (FMI et La Banque Mondiale) afin de faire le pays d’honorer sa dette ; [ibid.] la question de l’annulation totale et immédiate de la dette externe d’Haïti sera l’objet d’une importante mobilisation des organisations altermondialistes nationales et internationales, dont jubilée sud Amérique(JSA) et la PAPDA. Leur mobilisation est une action politique contre la politique appliquée par les Institutions de Bretton Woods en Haïti tout en exigeant le pays à payer une dette illégitime.
[Op.cit.] En 2004, Jacques Chirac, a mis en place une commission de réflexion dirigée par le philosophe de gauche Régis Debray. Cette commission avait pour objectif d’examiner les relations historiques de la France avec Haïti : elle concluait que la demande de restitution était « non pertinente et en termes juridiques et historiques. » En outre, [ibid.] à entendre le président François Hollande en visite en Haïti le 12 mai 2015, des voix s’interrogent sur le courage de la France d’honorer sa dette à son ancienne colonie. Après avoir déclaré la veille « quand je viendrai en Haïti, j’acquitterai à mon tour la dette que nous avons », son entourage a vite précisé qu’il s’agissait d’une « dette morale ».
Mais pour Louis-Georges Tin, du conseil Représentatif des Associations Noires de France(le CRAN), « dire à Haïti » « voilà des réparations morales, et ça suffit » est parfaitement immorale. Ce dernier a aussi souligné dans son ouvrage, esclavage et réparation, comment faire face aux crimes de l’histoire, « la repentance est une question morale ou religieuse ; la réparation est un problème économique et politique ».
Alors, la non-reconnaissance de cette dette par la France comme celle de sa défaite à Vertière le 18 Novembre 1803 est pareille. Elle est une tentative de falsifier sa propre histoire et de manipuler les Français-es, etc. Car, [14] malgré une lettre ouverte au président français Sarkozy, la France refuse toujours de restituer la dette historique à Haïti. La France a pourtant une lourde responsabilité dans l’état de pauvreté dans lequel se demeure la population.
[15]En juin 2009 la dette extérieure d’Haïti est à hauteur d’environ 1 milliards de dollars, la dette totale étant de 1 milliards 800 millions de dollars. Cependant, au 30 septembre 2018, le montant de la dette de la république d’Haïti envers ses créanciers, bilatéraux et multilatéraux s’élève à 2.12 milliards de dollars américains. Selon les données de la Banque de la République d’Haïti(BRH). De ces 2.12 milliards, Haïti doit 1.85, soit 87.3%, au Venezuela qui demeure son principal créancier.
Hayti et la conséquence de la dette
Selon l’Institut Haïtien de Statistique et d’Informatique(IHSI), la population haïtienne est estimée en 2018 à 11.4 millions. Ainsi, si l’on rapporte la dette d’Haïti envers le Venezuela au 30 septembre 2018 à sa population en 2018, on obtient un montant de la dette haïtienne par habitant au 30 septembre 2018. Dans cette même perspective, si l’on actualise les montants du budget 2018-2019, il est certain qu’avec la dépréciation accélérée de la gourde, le service de la dette en deviendra le poste de dépense le plus important. Au taux de 95 gourdes pour un dollar américain, la dette de 1.85 milliards de dollars, un montant de 176 milliards de gourdes, un montant supérieur `a celui du budget 2018-2019.
[Ibid.] La première conséquence de la dilapidation d’une bonne partie du programme petrocaribe demeure le service de la dette qui devient la deuxième enveloppe la plus importante du projet de budget 2018-2019, déposé au parlement haïtien en décembre 2018. Le service de la dette s’élevait à 21.57 milliards de gourdes, soit 12.5% du budget de 172.8 milliards de gourdes. Par ailleurs, le problème de la question de dette est beaucoup plus complexe. Elle est à la fois structurelle et conjoncturelle.
[16] Donc, faire continuellement état de l’annulation de la dette du FMI au tableau d’équilibre du budget d’Haïti est symptomatique d’un problème comptable.
Selon l’Économiste Eddy Labossière, avec l’annulation de la dette, Haïti peut trouver des fonds pour investir dans des domaines clés de développement tels l’agriculture et le tourisme. Cette approche sous-entend qu’il y ait une volonté manifeste de changer la donne des choses par nos « dirigeants ». Par ailleurs, quand à travers notre histoire ces domaines étaient une préoccupation de l’État en Hayti ?
[Op.cit.] L’annulation de la dette est une condition nécessaire mais n’est pas suffisante. Dès lors, elle doit s’accompagner de mécanismes de financement alternatifs qui ne conduisent pas à une nouvelle soumission par la dette et de mesures complémentaires dans de nombreux domaines. En outre, « l’État haïtien » [ibid.] doit réformer radicalement les règles du commerce. En ce qui concerne l’agriculture, comme le revendique le mouvement paysan Via Campesina, il convient de reconnaitre le droit de chaque pays(ou groupe de pays) à la souveraineté alimentaire et notamment à l’autosuffisance pour les produits de base.
[17]Depuis 40 ans la dette contractée par Haïti n’a eu aucun effet sur la croissance économique du pays. De 1976 à 2008, la dette a cru de 10.37% en moyenne alors que la Production Intérieur Brut(PIB) n’a cru que 0.76% sur la même période. Pour des experts, les causes sont de trois ordres : les troubles sociopolitiques qu’à connus le pays pendant cette période agitée ; les chocs naturels comme le séisme de Janvier 2010 ou des ouragans comme Matthew qui ont mis le pays à genou et les mauvaises décisions et les investissements improductifs. Tout cela a effacé les effets positifs que l’endettement aurait pu induire. Cette approche est censée mais est-ce qu’il y existait un moment de l’histoire haytienne que les prêts sont exécutés avec et pour la classe exploitée ?
La dette où rembourse la classe exploitée est une dette odieuse. [Op.cit.] Cette notion de dette odieuse a parfois été invoquée, comme pour Cuba en 1898, le Costa Rica en 1922, la Namibie en 1995 et le Mozambique en 1999. L’un des trois conditions suivantes permet de qualifier une dette d’odieuse : elle a été contractée par un régime despotique, dictatorial, en vue de consolider son pouvoir ; elle a été contractée non dans l’intérêt du peuple, mais contre son intérêt et/ou dans l’intérêt personnel des dirigeants et des personnes proches du pouvoir ; et enfin, les créanciers étaient en mesure de connaître la destination odieuse des fonds prêtés. En outre, le caractère démocratique(ou non) d’un régime n’est pas uniquement lié à son mode de désignation : tout prêt octroyé à un régime élu mais qui ne respecte pas les principes fondamentaux du droit international doit être considéré comme odieux.
[Ibid.] Au –delà, la destination des fonds doit suffire à caractériser une dette odieuse, lorsque ces fonds sont utilisés contre l’intérêt majeur des populations ou lorsqu’ils vont directement enrichir le cercle du pouvoir. Il faut, en outre, qualifier d’odieuses toutes les dettes contractées en vue du remboursement de dettes considérées elles-mêmes comme odieuses, ce qui peut être assimilé à une opération de blanchiment. Par ailleurs, la dette petrocaribe est-elle une dette odieuse ou illégitime? Ladite dette de FMI est-elle odieuse et illégitime? Ladite annuité de dette lors du Covid-19 n’est-elle pas une fausse excuse ?
Hayti et la stratégie de sortir du carcan de la dette
Il est donc nécessaire de comprendre que, la question de dette est une stratégie géopolitique. [18]La plupart des pays africains sont endettés depuis leur indépendance. Hayti est aussi victime sur ce point. [Ibid.] L’impact des programmes ajustements structurels(PAS) et la crise de dette généraient une augmentation des prix des aliments de base, du transport, du logement, etc., et aggravaient les conditions de vie déjà difficiles de la majorité des populations de ces pays.
En ce sens, [op.cit.] il existe une dette historique des classes aisées du Nord envers les populations du sud qu’il faut enfin prendre en considération. Car, l’exploitation des ressources naturelles y dépasse largement les capacités de renouvellement. Cette exploitation accompagne d’effets nocifs : la pollution de l’air et de l’eau, l’accumulation de déchets très toxiques, la disparition des espaces verts.
[Ibid.] En plus, de la pollution créée au sud par un modèle économique générateur de pollution, l’assujettissement du sud par l’engrenage de la dette contribue à en faire de surcroît la poubelle du Nord. Eric Toussaint [19] souligne qu’il y a dette privée, publique, odieuse mais surtout la dette multilatérale. Dans la typologie de dette élaborée par Esther Vivas dans un texte cité là-dessus, il y a dette historique, sociale, culturelle et écologique. Hayti a payé une indemnité qui a duré plus d’une décennie. Cette indemnité a des conséquences socio-économiques, culturelles et environnementales au sein de la société haytienne.
Mme Vivas soutient que le mouvement contre la dette extérieure est un des plus importants acteurs de protestation contre la mondialisation néolibérale. [20] Les trois problèmes dominants en matière d’endettement demeurent toujours : l’extrême lenteur des effets de la politique d’ajustement du FMI ; l’évidence contraction des recettes d’exportations des pays pauvres ; l’alourdissement du fardeau de la dette, au point que les pays débiteurs ne paient même plus les intérêts de leur dette. Par ailleurs, la Covid-19 n’est-elle le dilemme dont fait face à FMI ?
Aujourd’hui les pays occidentaux n’ont pas forcément besoin de contrôler des pays appauvrissants par des lois tout en imposant une constitution comme le cas d’Hayti en 1918 par les occupants États-uniens mais en contrôlant leurs monnaies ils contrôlent tout. N’est-ce pas ce qui arrive actuellement en Hayti avec le taux d’inflation ?
Alors, la question de dette extérieure en Hayti ne date pas des dernières années. Mais ce qui est le pire, c’est que cette dette non seulement persiste mais qu’elle tend à augmenter. Dans cette perspective, la dette découle sur plusieurs résultats. [21]Les caractéristiques spécifiques, locales ou originales des pays non développées et de leurs populations : la faim est l’un des résultats de cette politique ; la militarisation en est un autre résultat ; la dette est encore un résultat de ce modèle de mal développement.
[Ibid.] La solution proposée face au problème de la dette extérieure, c’est la solution en trois D : Dette, Développement, Démocratie. Cette solution s’appelle le remboursement créatif. Celui-ci comporterait deux aspects : remboursement en liquide, et remboursement en nature. Le remboursement en liquide où chaque gouvernement africain ferait des versements réguliers d’intérêts, dans sa propre monnaie, sur un fonds de développement national. Et aussi, le remboursement en nature c’est-à-dire à partir des trésors naturels, matériels et culturels qui font partie de l’héritage de l’humanité. En fait, [22] ce n’est donc ni dans l’économie ni dans le culturel que le problème parviendra à être résolu mais plutôt dans le champ politique. Alors, la dette est une affaire politique. La dette engendre des problèmes structurels et conjoncturels. Le problème de celle-ci est beaucoup plus complexe, une annuité de dette pour les pays appauvrissants ne peut rien améliorer socialement et économiquement.
Port-au-Prince le, 15-04-2020
Auteur, Malachy BASTIEN, Écrivain, Formateur, Asp Ethnologue.
Email : malachybastien2@gmail.com
[1] CASIMIR Jean, Haïti et ses élites, l’interminable dialogue des sourds, Port-au-Prince, UEH, 2009.
[2] Haïti, la dette originelle, par Louis-Philippe DALEMBERT- le 25 mars 2010. Consulté le 23-12-2019.
[3] Haïti et la « dette de l’indépendance » le 17-08-2010. Consulté le 23-12-2019.
[4] L’épineuse question de la dette, par Thélyson Orélien, le 18-05-2015. http: //www.cadtm.org. Consulté le 23-12-2019.
[5] PIERRE-CHARLES Gérard, économie haïtienne et sa voie de développement, s.l, S.e., s.d.
[6] TROUILLOT Michel-Rolph, les racines historiques de l’État duvaliérien, Port-au-Prince, C3, 2016.
[7] LUCIEN Georges-Eddy, le Nord-Est d’Haïti : la perle d’un monde fini entre illusion et réalité,Paris, L’harmattan,2019.
[8] Les dettes extérieures successives imposées à Haiti-l2 19-01-2010. Consulté le 23-12-2019.
[9] JEAN-FRANÇOIS Hérold, la corruption, un élément récurrent du système social et politique en Haïti, 7 avril 2014 dans le cadre de son intervention 8 avril 2014, visite in situ MESISIC.
[10] JEAN Eddy Arnold, Haïti : les obstacles à la démocratie, Port-au-Prince, Haïti-demain, 2011.
[11]MILLET Damien, TOUSSAINT Éric, 65 questions/65 Réponses sur la dette, le FMI et la BANQUE MONDIALE, Liège, CADTM, 2012.
[12] une exposition sur la dette externe, https://www.alterpresse.org, publié, Port-au-Prince, mercredi 25 Juin 2003. Consulté le 23-12-2019.
[13] http://www.collectif devenez mobilisation pour l’annulation de la dette. Le 30-10-2006. Consulté le 23-12-2019.
[14]https://www.politis.fr/articles2017/09/haiti-de-la-traite.a.la TRIBUNES, par Jérôme Duval, publié le 19-09-2017. Consulté le 23-12-2019.
[15] L’annulation de la dette d’Haïti : avantages et inconvénients, https://lenouvelliste.comcoopération, publié le 2009-05-21. Consulté le 23-12-2019.
[16] Pour une remise en question du déficit budgétaire et de la qualité des pratiques comptables, https://lenouvelliste.com/article1151691/ Pour-une-remise en question-du Budget 2015-2016. Consulté le 23-12-2019.
[17] https:/Développement Haïti doit USD 3 milliards, dont 90% au Venezuela, publié le 2017-04-12/le Nouvelliste. Consulté le 23-12-2019.
[18]VIVAS Esther, en campagne contre la dette, Paris, CADTM, 2008.
[19]TOUSAINT Eric, banque mondiale, coup d’État permanent, Paris, Syllepse, 2006.
[20]SÉROUSSI Roland, GATT, FMI ET BANQUE MONDIALE, les nouveaux gendarmes du monde, Paris, DUNOD, 1994.
[21] GEORGE Susan, jusqu’au cou, enquête sur la dette du tiers monde, Paris, la découverte, 1989.
[22] HECTOR Michel, une tranche de la lutte contre l’occupation américaine, les origines du mouvement communiste en Haïti (1927-1936), Port-au-Prince, BND, 2017.