par Claudy Briend Auguste
« La Dessalinienne » versus “Quand nos Aïeux brisèrent leurs entraves” lequel est le mieux adapté de nos deux hymnes nationaux ?
Nous avons essayé au moins une fois toutes les formules de gouvernement. Neuf fois, la présidence à vie, avec jean-Claude Duvalier comme le dernier. Deux fois l’empire qui s’éteint au coup d’Etat de Geffrard contre Soulouque. Une fois, la royauté qui n’a pas survécu à la mort de Christophe, en 1820.
Plusieurs fois, sans parlement de Pétion à Martelly, et diriger par décrets, les ont beaucoup arrangés. Et que de gouvernements militaires provisoires sans parler d’un nombre infini de Constitutions adoptées, mal adaptées pour être ensuite bafouées, martyrisées, pliyé’l mét nan pòch li pa fè menm jan ak bayonèt…
Des lois votées qui ne sont jamais suivies d’effets. Une catégorie d’individus, de familles, qui ne sont pas justiciables de leurs actes, devant les tribunaux en Haiti. Mais quant à l’hymne national, après avoir laissé passer de nombreuses années pour arriver à en adopter un, en 1893, celui écrit par Oswald Durand, nous l’avions préféré à un autre en 1919, après une décennie d’application.
Un mauvais timing, sa substitution. “Il n’est pas un chant guerrier”, auraient conclu des lecteurs avisés. Alors que le bicolore ne flottait point sur les mats du Palais national, depuis presqu’ août 1915, le Président Sudre Dartiguenave, au pouvoir de 1915 à 1922, ironiquement, fait voter, le 5 août 1919, une loi qui institutionnalisa comme hymne officiel de la République d’Haïti « La Dessalinienne ».
Cet hymne qui fait encore aujourd’hui notre fierté quand il est écouté jouer dans une compétition internationale, rappelons-le, de 1919 jusqu’à la date de la fin de l’Occupation en 1934, était presque inconnu des haïtiens de l’époque, pour lesquels il est adapté à la musique de Justin Lhérisson.
Dans les tumultes qui ont succédé 1904, après la célébration grandiose du Centenaire de l’Indépendance, aux Gonaives, l’hymne national ne fut presque joué en Haiti. Batay pou pouvwa pral kòmansé. Et dire que l’année 2004 n’était pas si différente. Les hommes d’état s’occupèrent de préférence à asseoir leur pouvoir que du vrai bien-être de la population. La nature a horreur du vide.
C’est ainsi que Sudre Dartiguenave, dans une ultime tentation de nous prouver qu’il ne fait pas le jeu de l’étranger, fait adopter « la Dessalinienne ». Un texte qui n’était pas du tout écrit dans un contexte adapté au temps jusqu’à devenir un hymne national. Justin Lhérisson ne voyait pas venir l’occupation de notre territoire quand il a rédigé ce texte. Contrairement à Oswald Durand, en 1893, qui se faisait déjà le chantre de la patrie. Il se proposait d’écrire avec le fort sentiment de l’âme, un hommage aux ancêtres.
D’ailleurs, quelle était l’utilité de faire venir avec « la Dessalinienne » quand il était lui-même (Sudre Dartiguenave), le traître dans nos rangs. « La Dessalinienne », par force de le répéter, dès notre enfance, nous nous sommes jamais rendus compte que ce texte n’a rien de constitutif. Il n’y a que des mots vagues, inadaptés ni avec avec le temps en 1919, ni avec celui de 2016, avec des traîtres et partout des vendeurs de patrimoine. Sudre Dartiguenave nous a soudoyés.
Ce président élu sous la menace des baïonnettes, ne pouvait rien apporter de bon à l’ Haïti d’hier et de consistance à notre Haïti d’aujourd’hui. L’hymne national d’ Haiti, avec les paroles de Oswald Durand, adopté en 1893 jusqu’en 1904. Et faites-vous mêmes la différence. son titre est : « Quand nos Aïeux brisèrent leurs entraves », à fredonner.
Quand nos Aïeux brisèrent leurs entraves
Ce n’était pas pour se croiser les bras/
Pour travailler en maîtres les esclaves
Ont embrassé corps à corps le trépas.
Leur sang à flots engraissa nos collines,
A notre tour, jaunes et noirs, allons!
Creusons le sol légué par Dessalines :
Notre fortune est là dans nos vallons.
Refrain:
L’indépendance est éphémère Sans le droit à l’égalité!
Pour fouler, heureux, cette terre
Il nous faut la devise austère : Dieu! Le Travail! La Liberté!
De Rochambeau les cohortes altières,
Quelques instants, suspendirent leur feu,
Pour saluer le héros de Vertières,
Capois-La-Mort, grand comme un demi-dieu
Vers le progrès, crions comme ce brave:
“Noirs! En avant! En avant!”
Et bêchons Le sol trempé des sueurs de l’esclave!
Nous avons là ce qu’ailleurs nous cherchons!
Refrain:
Sans quoi, tout devient éphémère; Pas d’ordre et pas d’égalité!
Pour fouler, heureux, cette terre, Il nous faut la devise austère:
“Dieu! Le travail! La liberté!”
Sang des martyrs dont la pourpre écumante
A secoué nos chaînes et nos jougs!
Chavanne, Ogé, sur la route infamante,
Toi, vieux Toussaint, dans ton cachot de Joux
O précurseurs, dont les dernières fibres
Ont dû frémir, – vous les porte-flambeaux –
En nous voyant maintenant fiers et libres,
Conseillez-nous du fond de vos tombeaux!
Refrain:
Votre bonheur est éphémère; Ayez droit à l’égalité!
Pour fouler, heureux, cette terre,
Il vous faut la devise austère: “Dieu! Le travail! La liberté!”
A l’œuvre donc, descendants de l’Afrique,
Jaunes et noirs, fils du même berceau!
L’antique Europe et la jeune Amérique
Nous voient de loin tenter le rude assaut.
Bêchons le sol qu’en l’an mil huit cent quatre,
Nous ont conquis nos aïeux au bras fort.
C’est notre tour à présent de combattre
Avec ce cri: “Le progrès ou la mort!”
Refrain
A l’œuvre! Ou tout est éphémère! Ayons droit à l’égalité!
Nous foulerons, plus fiers, la terre,
Avec cette devise austère: “Dieu! Le travail! La liberté!”
recherches cba (Ocean City, MD 08/05/2016)

