par Claudy Briend Auguste
Si l’incertitudes régnait en septembre 1991 sur les circonstances entourant la mort, en prison, de l’ex-ministre de l’Intérieur et de la Défense, Dr. Roger Lafontant, le 27 juillet 1915, par contre, les Port-au-Princiens savaient que l’ordre de fusiller dans ses cellules, l’ancien président déposé Emmanuel Oreste Zamor, venait directement du chef de l’Etat en difficulté, Vilbrun Guillaume Sam.
C’est ainsi que pour la toute première fois de son histoire, deux présidents d’Haiti sont morts le même jour à Port-au-Prince. L’un sans sépulcre, avec ses restes, jusqu’à désossements, traînés dans les rues de la capitale. Et le Palais National était sans président après le lynchage de Vilbrun Guillaume Sam.
Deux événements situés séparément dans le temps, ont précédé deux débarquements militaires, en 1915 et en 1994. Comme pour dire jamais un sans deux, et ceci même jusqu’à trois, en 2004. Si également en 1915, le Parlement, malgré l’opposition farouche de certains députés dont celui des Gonaives, était contraint de ratifier le traité d’Occupation d’Haiti par les Marines, mais en 2004, sous une simple réquisition du Premier-ministre Gérard Latortue, le pays est livré dès lors à la Minustha. Jusqu’à date, les clauses du décret n’ont jamais été révisées par le Parlement ravi de partager le pouvoir exécutif.
Avec l’organisation de ces fameux « carnavals des fleurs », (une réjouissance n’ayant absolument rien rapporté au trésor public), une preuve de démonstration erronée que l’haïtien ne vit vraiment pas seulement de musique, de bals, de carnavals, mais d’activités économiques rentables pour déposer du pain sur la table de la famille, les dates des 27 et 28 juillet furent presque passées sous silence.
Toutefois, Evans Paul a le mérite de contraindre son heureux bienfaiteur, l’ex-président Michel Martelly à ne pas organiser de « carnaval des fleurs » en juillet 2015. Une décision que les historiens impuissants devant les fantasmagories de Sweet Micky, en 2012, 2013, 2014 avaient applaudi de deux mains, car ils voyaient mal le Centenaire de l’Occupation, célébré au son de la fanfare.
Un siècle plus tard, après le débarquement dans la soirée du 28 juillet 1915, de la canonnière américaine, « Washington », à Bizoton, nous ne sommes pas plus en avance que nous ne l’étions à cette époque. Avec la seule différence, malgré un large déchirement actuel du tissu social, Dieu merci, aucun groupe armé n’est arrivé à venir en mains pour se mesurer avec la société civile qu’une certaine « insécurité » soumet à la peur de circuler librement dans les rues.
Le 27 juillet 1915, la goutte d’eau qui allait fait renverser la vapeur, malencontreusement, marquait une tournure décisive dans l’histoire de notre pays, avec le remplacement de l’Armée Indigène qui s’effrite avec le nationalisme. Cent un ans plus tard, que reste-il de l’action citoyenne de l’homme haïtien ?
Les mêmes luttes fratricides pour la prise de pouvoir s’intensifient pendant que la misère s’engouffre chez les plus vulnérables. 28 juillet 1915-28 juillet 2016, le pays va encore mal, si ce n’est le constat du pire. Et dire que le « siècle de la technologie » surpasse de loin le « siècle des lumières » qui ne nous avait pas assez éclairé les idées pour que nous ayons aujourd’hui un pays émergeant.
Que la date du 28 juillet 2016, soit une journée de réflexion jusqu’à arriver à reconstituer l’enchaînement des événements, une façon de relever de nombreuses similitudes entre ces deux époques distincts. D’où venons-nous, où sommes-nous maintenant et où irons-nous, tant que ces interrogations ne voyagent pas les confins de notre conscience, les 28 juillet se suivront et se ressembleront.
Heureusement qu’il existe encore des citoyens qui ont bien su saisir le sens d’être libre chez soi.
cba


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