Gonaives, le 1er Janvier 1804 : Acte de proclamation de l’Indépendance d’Haïti

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« Rappelle-toi que j’ai tout sacrifié pour voler à ta défense, parents, enfants, fortune, et que maintenant je ne suis riche que de ta liberté… » Au tout premier jour du premier mois d’une nouvelle année, Dessalines, le Génie, a voulu marquer d’un sceau indélébile, l’Indépendance d’Haïti. Cet acte posé le Premier Janvier 1804, en dépit des soubresauts traversés dans le temps, marquera à jamais l’histoire de l’humanité où il ne saurait exister aucune race supérieure ou inférieure à une autre. Ce pays qui a goûté au fruit de la liberté, continuera de produire des citoyens du genre attachés aux libertés individuelles sans restriction. Notons qu’il a fallu 12 années de lutte pour aboutir à l’épopée de 1804. Hélas! 215 ans plus tard…

Gonaives, Berceau de l’Indépendance d’Haïti, ((rezonodwes.com))–

Citoyens,

Ce n’est pas assez d’avoir expulsé de votre pays les barbares qui l’ont ensanglanté depuis deux siècles ; ce n’est pas assez d’avoir mis un frein aux factions toujours renaissantes qui se jouaient tour à tour du fantôme de liberté que la France exposait à vos yeux ; il faut, par un dernier acte d’autorité nationale, assurer à jamais l’empire de la liberté dans le pays qui nous a vus naître ; il faut ravir au gouvernement inhumain, qui tient depuis longtemps nos esprits dans la torpeur la plus humiliante, tout espoir de nous réasservir ; il faut enfin vivre indépendant ou mourir.

Indépendance ou la mort… Que ces mots sacrés nous rallient, et qu’ils soient le signal des combats et de notre réunion.

Citoyens, mes compatriotes, j’ai rassemblé en ce jour solennel ces militaires courageux, qui, à la veille de recueillir les derniers soupirs de la liberté, ont prodigué leur sang pour la sauver ; ces généraux qui ont guidé vos efforts contre la tyrannie, n’ont point encore assez fait pour votre bonheur… Le nom français lugubre encore nos contrées.

Tout y retrace le souvenir des cruautés de ce peuple barbare: nos lois, nos mœurs, nos villes, tout porte encore l’empreinte française; que dis-je? il existe des Français dans notre île, et vous vous croyez libres et indépendants de cette république qui a combattu toutes les nations, il est vrai, mais qui n’a jamais vaincu celles qui ont voulu être libres.

Eh quoi! victimes pendant quatorze ans de notre crédulité et de notre indulgence ; vaincus, non par des armées françaises, mais par la piteuse éloquence des proclamations de leurs agents ; quand nous lasserons-nous de respirer le même air qu’eux ? Sa cruauté comparée a notre patiente modération ; sa couleur à la nôtre ; l’étendue des mers qui nous séparent, notre climat vengeur, nous disent assez qu’ils ne sont pas nos frères, qu’ils ne le deviendront jamais et que, s’ils trouvent un asile parmi nous, ils seront encore les machinateurs de nos troubles et de nos divisions.

Citoyens indigènes, hommes, femmes, filles et enfants, portez les regards sur toutes les parties de cette île ; cherchez-y, vous, vos épouses, vous, vos maris, vous, vos frères, vous, vos sœurs; que dis-je? cherchez-y vos enfants, vos enfants à la mamelle ! Que sont-ils devenus ?… Je frémis de le dire… la proie de ces vautours. Au lieu de ces victimes intéressantes, votre œil consterné n’aperçoit que leurs assassins ; que les tigres encore dégouttants de leur sang, et dont l’affreuse présence vous reproche votre insensibilité et votre lenteur à les venger. Qu’attendez-vous pour apaiser leurs mânes ? Songez que vous avez voulu que vos restes reposassent auprès de ceux de vos pères, quand vous avez chassé la tyrannie ; descendrez-vous dans la tombe sans les avoir vengés ? Non, leurs ossements repousseraient les vôtres.

Et vous, hommes précieux, généraux intrépides, qui insensibles à vos propres malheurs, avez ressuscité la liberté en lui prodiguant tout votre sang ; sachez que vous n’avez rien fait si vous ne donnez aux nations un exemple terrible, mais juste, de la vengeance que doit exercer un peuple fier d’avoir recouvré sa liberté, et jaloux de la maintenir ; effrayons tous ceux qui oseraient tenter de nous la ravir encore : commençons par les Français… Qu’ils frémissent en abordant nos côtes, sinon par le souvenir des cruautés qu’ils y ont exercées, au moins par la résolution terrible que nous allons prendre de dévouer à la mort quiconque, né français, souillerait de son pied sacrilège le territoire de la liberté.

Nous avons osé être libres, osons l’être par nous-mêmes et pour nous-mêmes ; imitons l’enfant qui grandit : son propre poids brise la lisière qui lui devient inutile et l’entrave dans sa marche. Quel peuple a combattu pour nous ? Quel peuple voudrait recueillir les fruits de nos travaux ? Et quelle déshonorante absurdité que de vaincre pour être esclaves. Esclaves !… Laissons aux Français cette épithète qualificative : ils ont vaincu pour cesser d’être libres.

Marchons sur d’autres traces ; imitons ces peuples qui, portant leur sollicitude jusque sur l’avenir, et appréhendant de laisser à la postérité l’exemple de la lâcheté, ont préféré être exterminés que rayés du nombre des peuples libres.

Gardons-nous cependant que l’esprit de prosélytisme ne détruise notre ouvrage ; laissons en paix respirer nos voisins, qu’ils vivent paisiblement sous l’empire des lois qu’ils se sont faites, et n’allons pas, boutefeux révolutionnaires, nous érigeant en législateurs des Antilles, faire consister notre gloire à troubler le repos des îles qui nous avoisinent : elles n’ont point, comme celle que nous habitons, été arrosées du sang innocent de leurs habitants ; elles n’ont point de vengeance à exercer contre l’autorité qui les protège.

Heureuses de n’avoir jamais connu les fléaux qui nous ont détruits, elles ne peuvent que faire des vœux pour notre prospérité. Paix à nos voisins ! mais anathème au nom français ! haine éternelle à la France ! voilà notre cri.

Indigènes d’Haïti, mon heureuse destinée me réservait à être un jour la sentinelle qui dût veiller à la garde de l’idole à laquelle vous sacrifiez, j’ai veillé, combattu, quelquefois seul, et, si j’ai été assez heureux pour remettre en vos mains le dépôt sacré que vous m’avez confié, songez que c’est à vous maintenant à le conserver. En combattant pour votre liberté, j’ai travaillé à mon propre bonheur. Avant de la consolider par des lois qui assurent votre libre individualité, vos chefs que j’assemble ici, et moi-même, nous vous devons la dernière preuve de notre dévouement.

Généraux, et vous chefs, réunis ici près de moi pour le bonheur de notre pays, le jour est arrivé, ce jour qui doit éterniser notre gloire, notre indépendance.

S’il pouvait exister parmi vous un cœur tiède, qu’il s’éloigne et tremble de prononcer le serment qui doit nous unir.

Jurons à l’univers entier, à la postérité, à nous-mêmes, de renoncer à jamais à la France, et de mourir plutôt que de vivre sous sa domination.
De combattre jusqu’au dernier soupir pour l’indépendance de notre pays !

Et toi, peuple trop longtemps infortuné, témoin du serment que nous prononçons, souviens-toi que c’est sur ta constance et ton courage que j’ai compté quand je me suis lancé dans la carrière de la liberté pour y combattre le despotisme et la tyrannie contre laquelle tu luttais depuis quatorze ans. Rappelle-toi que j’ai tout sacrifié pour voler à ta défense, parents, enfants, fortune, et que maintenant je ne suis riche que de ta liberté ; que mon nom est devenu en horreur à tous les peuples qui veulent l’esclavage, et que les despotes et les tyrans ne le prononcent qu’en maudissant le jour qui m’a vu naître ; et si jamais tu refusais ou recevais en murmurant les lois que le génie qui veille a tes destinées me dictera pour ton bonheur, tu mériterais le sort des peuples ingrats.

Mais loin de moi cette affreuse idée. Tu seras le soutien de la liberté que tu chéris, l’appui du chef qui te commande.

Prête donc entre ses mains le serment de vivre libre et indépendant, et de préférer la mort à tout ce qui tendrait à te remettre sous le joug.

Jure enfin de poursuivre à jamais les traîtres et les ennemis de ton indépendance.

SIGNÉ :

Dessalines
Général en chef

Christophe, Pétion, Clerveaux, Geffrard, Vernet, Gabart
Généraux de division

P . Romain, G. Gérin, L. Capois, Daut, Jean-Louis François, Férou, Cangé, G. Bazelais, Magloire Ambroise, J. J. Herne, Toussaint Brave, Yayou
Généraux de Brigade

Bonnet, F. Papalier, Morelly, Chevalier, Marion
Adjudants-généraux

Magny, Roux
Chefs de brigade

Chareron, B. Goret, Macajoux, Dupuy, Carbonne, Diaquoi aîné, Raphaël, Malet, Derenoncourt
Officiers de l’armée

Boisrond Tonnerre
Secrétaire

Fait au quartier général des Gonaïves, le 1er janvier 1804, l’an 1er de l’indépendance.

1 COMMENT

  1. REFLEKSYON FEN 2018
    An 2018, kondisyon lavi Pèp Ayisyen kontinye vin pi mal e ap deteryore an espiral. Se konsekans politik ekonomik ak sosyal kriminèl ak vyolan klas dominan reyasyonè yo, politisyen abolotcho yo sou dikta peyi kolon enperyalis yo. Menmsi pwopagann pouri yo, toulasent jounen, vle fè kwè nou nan demokrasi, men demokrasi, leta de dwa, ak swadizan eleksyon yo se pou pi byen defann enterè mesken yo epi lage poud nan je nou menm Pèp Ayisyen.

    Nan dènye 30 tan ki sot pase la yo, sa nou remake sè ke moun ki pi kowonpi yo, pi vòlò yo, pi koken yo se yo ki pale pi fò ak plis awogans sou “demokrasi, leta de dwa ak eleksyon nan peyi d Ayiti. Se menm yo menm la kap di zòt si yo bezwen pouvwa se nan eleksyon pou yo ale. Nou dwe kesyone poukisa kalite moun sa yo alèz konsa pou pale de eleksyon, konstitisyon, eta de dwa, demokrasi toupatou, nan tout radyo ak gwo gòj? Tousenpleman paske yo konnen byen pwòp tout machin elektoral la pyeje de bazanwo.

    Tout kowonpi yo, tout koken yo, tout reyaksyonè yo, tout fòs fè nwa yo gen kontwòl total machin elektoral la. Se la menm yap tann tout politisyen ti gwangou ki bezwen pouvwa oubyen kèlke penich pou manje pou yo vin fè bèk atè. Brèf, sistèm elektoral la ann Ayiti, tou kòm tout lòt kote nan mond la, kowonpi nètalkole.
    Li vo lapèn pou Pèp Ayisyen tout antye bòykote masivman sa ki rele “eleksyon” yo ann Ayiti. Dayè, kontrèman a pwopagann klas dominan reyaksyonè yo, politisyen abolotcho yo epi reprezante anbasab peyi kolon enperyalis yo, eleksyon se sèlman youn nan mwayen pou rive a Demokrasi. Eleksyon pa sèl mwayen ki ekziste pou rive a demokrasi a sitou lè sistèm elektoral la pyeje e kowonpi de la tèt o pye.
    Revolisyon Demokratik Popilè sou direksyon PWOLETARYA A se mwayen pi kòrèk, pi asire pou mennen nou nan DEMOKRASI KI NAN ENTERÈ PA NOU AN. Si nou gen pou nou chwazi ant “eleksyon” kowonpi, “eleksyon” koken, “eleksyon” malatchong ke reyaksyonè yo vle foure nan gagann nou tou cho a epi REVOLISYON DEMOKRATIK POPILÈ A SOU DIREKSYON PWOLETARYA A, KISA NOU TAP CHWAZI FÈ? Se yon kesyon fondamantal tout Pèp Ayisyen dwe reflechi sou li seryezman an 2019 la.

    Lè nou gade kondisyon sosyal ak ekonomik deplorab, mizerab, ak ensipòtab kapitalism depandan, dekadan, neyokolonyal ak neyoliberalis la mete nou ladann lan, sèl solisyon ki rete pou nou vreman vre se REVOLISYON DEMOKRATIK POPILÈ A SOU DIREKSYON PWOLETARYA A. Tout lòt solisyon kap vin devan nou se de fo solisyon pou nou voye jete san vire gade dèyè. Tout vye koze, vye pwopozisyon de “sòti de kriz” kap vini tou se fo solisyon yo ye. Se fo solisyon kap vin defann enterè klas dominan reyaksyonè yo, politisyen abolotcho yo, ak peyi kolon enperyalis yo.

    REVOLISYON DEMOKRATIK POPILÈ A SOU DIREKSYON PWOLETARYA A vle di nou menm Pèp Ayisyen, nou pran desten nou nan pwòp men nou. Nou se atizan pwòp EMANSIPASYON NOU. Li vle di nou entèvni, e pran pozisyon masivman sou sèn politik la an pèmanans epi okipe teren an nèt jiskaske nou pran pouvwa politik la nan men bann ak pakèt koken, kowonpi, vòlò, malandren, opresè, eksplwatè, asasen ak kriminèl ki gen pouvwa politik ak ekonomik la nen men yo epi kap kraze peyi a depi plis pase 213 lane.

    Mesaj nou pou tout politisyen rabi, pouri, koken, kowonpi kap klewonen se nan “eleksyon” pou moun pran pouvwa, nap di yo Pèp ki òganize pran pouvwa nan REVOLISYON DEMOKRATIK POPILÈ SOU DIREKSYON PWOLETARYA A. Nap voye tout vye pawòl eleksyon koken, eleksyon malatchong, ak eleksyon pyeje yo nan bwat fatra listwa menm tonbo ak esklavajis yo.

    Apati 2019 la, CHIMEN KI BON POU NOU MENM PÈP AYISYEN AN SE CHIMEN REVOLISYON DEMOKRATIK POPILÈ A SOU DIREKSYON PWOLETARYA A.

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