Affaire Pèlerin 5 : Lettre ouverte du RNDDH au président Jovenel Moïse

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Dans une lettre ouverte du Réseau National de Défense des Droits Humains (RNDDH) au président Jovenel Moïse, le directeur exécutif de ladite institution estime que la destruction par les autorités haïtiennes des maisons des sept familles voisines du couple présidentiel à Pelerin 5 représente un acte discriminatoire et se lamente de ce qu’aucune action concrète en vue de rétablir les victimes dans leurs droits n’a été entreprise




Port-au-Prince, Jeudi 9 août 2018 ((rezonodwes.com))–

Son Excellence Monsieur Jovenel MOISE
Président de la République d’Haïti
En ses bureaux.-

Monsieur le Président,

Le Réseau National de Défense des Droits Humains (RNDDH) estime de son devoir de rappeler à votre attention le dossier des victimes de Pèlerin 5, dont les droits à la dignité et à la propriété privée ont été, sur votre instigation, bafoués par les autorités judiciaires et policières de Port-au-Prince.

En effet, les 2, 3 et 4 juillet 2018, le Parquet de Port-au-Prince et la Direction Départementale de l’Ouest de la Police Nationale d’Haïti (DDO / PNH), aidés de la Direction Générale des Impôts (DGI), ont mené une intervention musclée, illégale et arbitraire, dont l’objectif était de déloger trente-quatre (34) familles à qui ils reprochent de représenter une menace pour votre sécurité et celle de votre famille.

Sept (7) de ces familles ont été arrachées de leur maison pour que celle-ci soit démolie.

Le dossier a fait le tour des médias mais, aucune action concrète en vue de rétablir les victimes dans leurs droits n’a été entreprise. Aussi, le RNDDH juge-t-il opportun de vous présenter les familles victimes et leur situation particulière dans le but de vous porter à comprendre l’ampleur des dégâts engendrés par cette intervention en déguerpissement forcé :

1. Delinois FLEURISIER est père de cinq (5) enfants dont deux (2) en bas âge. Fleuriste, il a tout perdu lors de la démolition de sa maison qui comptait six (6) pièces. Aujourd’hui il se retrouve sans toit et sans aucune possibilité d’acquérir une nouvelle propriété. Sa fille de cinq (5) ans se trouvait dans la maison lorsque la démolition de celle-ci a commencé.

2. Jean Claude TICO est père de deux (2) enfants dont le plus jeune est un bébé aujourd’hui âgé de deux (2) mois. Il est fleuriste. Sa femme et lui hébergeaient deux (2) proches. Les ressources financières du ménage, déjà très limitées, ont été anéanties par cette démolition.

3. Marie Madrelette JOSEPH, commerçante, est cheffe de famille. Elle a passé sept (7) années à construire sa maison. Suite à la démolition de celle-ci, elle a dû confier sa fille unique à une proche et la changer d’école.
4. Elion TOUSSAINT, fleuriste, a une fille de trois (3) ans. Il a perdu tout ce qu’il possédait.

5. Joines JULIS, chauffeur de moto est père d’un enfant de trois (3) ans. Il a aménagé une pièce qui n’avait pas été complètement démolie, dans laquelle il habite aujourd’hui.

6. Isma DESROSIERS, contremaitre en maçonnerie, est père d’un enfant de quatre (4) ans. Il devait emménager sous peu dans sa maison, après avoir passé plusieurs années à la construire.

7. Joseph Gesner VALCIN, ménager, peinait à finir les cinq (5) pièces qu’il avait érigées et qui attendaient encore leur toiture. Le bâtiment a été rasé.




Monsieur le Président,

Comme vous pouvez le constater, ces victimes sont de rudes travailleurs-ses qui ont difficilement réussi à s’ériger un toit, dans un pays où l’accompagnement social s’avère inexistant. Il a donc fallu que vous devinssiez président de la République pour qu’ils passent en quelques heures du statut de propriétaires de maison à celui de sans-abri.

De plus, ils ont été accusés d’empêcher que la sécurité des honnêtes gens soit convenablement assurée. Pourtant, avant votre arrivée dans la communauté de Pèlerin 5, où ils vivent depuis plusieurs années, aucune personne n’avait porté plainte contre eux pour mauvais agissements ou pour troubles à l’ordre public.

Conséquemment, le RNDDH croit que cette intervention représente un acte discriminatoire. Elle a été réalisée en violation des droits à la dignité humaine et au logement, garantis par la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme de 1948, en ses articles 1er et 25, assurant d’une part que tous les êtres humains naissent libres et égaux en dignité et en droits et, d’autre part que toute personne a droit à un niveau de vie suffisant pour assurer son bien-être, celui de sa famille notamment pour le logement ainsi que pour les services sociaux nécessaires.

Monsieur le Président,




Vous êtes tenu, en tant que garant de la bonne marche des institutions républicaines du pays, de réparer les torts qui ont été causés par le zèle déplacé des autorités policières et judiciaires impliquées dans cette opération réalisée pour vous plaire.

En outre, le RNDDH vous rappelle que vous aviez promis à la population d’œuvrer pour que le pouvoir judiciaire soit totalement affranchi du joug du pouvoir exécutif et que l’institution policière devienne plus professionnelle. Commencez donc à donner l’exemple.

Le RNDDH vous transmet, Monsieur le Président, ses patriotiques salutations.

_______________________
Pierre ESPÉRANCE
Directeur Exécutif

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