Rezo Nòdwès : « Coin de l’histoire retrouvée » Lettre de Mme Henri Christophe au Président Boyer, Port-au-Prince, juillet 1821
Détounman lajan leta depi lontan nèg ak nègès pran gou ! « Mme Christophe avait fait placer des fonds en Angleterre, dans le temps de la plus grande prospérité de son royal mari », a révélé le journal La Concorde du 24 février 1822.
Dimanche 25 mars 2018 ((rezonodwes.com))– La veuve du Roi Christophe avant de s’embarquer pour l’Angleterre avec ses deux demoiselles, où il est bruit que des descendants du Royaume du Nord, existeraient encore au Royaume-Uni, a adressé une lettre au président Jean-Pierre Boyer. Cependant, il est important de noter même quand on voit faire au MUPANAH le rapprochement entre les Héros de l’Indépendance, ni Pétion ni Christophe ne se sont adressés la parole depuis janvier 1807, jusqu’à leur décès respectif en 1818 et 1820, pourtant ils étaient les deux principaux comploteurs de l’assassinat de l’Empereur Jean-Jacques Dessalines, un nom interdit de citer en Haïti d’octobre 1806 à avril 1845
recherches: cba
sources: La Concorde du 24 février 1822, n° 8
Après la tournée qu’il venait de faire pour rétablir la tranquillité publique dans les départements de l’Artibonite
et du Nord, à la mort de Christophe en octobre 1820, et pour consolider le gouvernement de l’Etat par des mesures appropriées aux circonstances, Boyer se décida à passer lui-même quelques semaines en repos à la campagne.
Il en fit donner l’avis au public par le secrétaire général, dès le lendemain de son retour à la capitale.
Toutefois, l’expédition des affaires ne devait pas en souffrir, et les trois grands fonctionnaires restèrent chargés, chacun dans ses attributions, de faire parvenir au Président la correspondance y relative et les réclamations des particuliers, afin de recevoir ses ordres. Cette disposition de sa part n’était pas chose inutile; car il allait, pour ainsi dire, se retremper pour mieux remplir son devoir envers le pays dans les événements qui allaient surgir.
Ce fut dans cette circonstance que la Veuve de Henry Christophe prit la résolution de quitter pour toujours Haïti avec ses deux filles, pour se rendre en Angleterre.
Boyer qui ne s’entendait nullement avec Christophe depuis 1807 prit bien soin de sa famille en 1820 à la mort de ce dernier
Depuis qu’elles étaient venues du Cap-Haïtien à Port-au-Prince, elles avaient été constamment l’objet des attentions délicates du Président et de sa famille, qui les voyaient souvent, comme pour les consoler dans leur malheur; et il paraît qu’elles trouvaient dans les procédés de Célie Pétion surtout, le témoignage d’un cœur sensible qui comprenait sa position particulière à leur égard.
Ces personnes intéressantes pouvaient donc continuer à habiter leur pays natal sous des auspices aussi favorables; mais Madame Christophe ayant été assez bien avisée pour faire placer des fonds en Angleterre, dans le temps de la plus grande prospérité de son royal mari, elle reçut, dit-on, des philanthropes de ce pays qui avaient été en correspondance avec lui, le conseil de s’y rendre, en même temps que des négociants anglais, établis au Cap-Haïtien, l’y engageaient surtout, accueillirent cette invitation avec empressement, et leur mère dut déférer à leurs désirs. Le fils de Robert Sutherland, qui les avait vues à la cour de Sans-Souci en compagnie de Sir Home Popham, s’était constitué leur chevalier à Port-au-Prince; il leur offrit de les accompagner en Angleterre.
Les arrangements
Le Président d’Haïti ne pouvait mettre obstacle à leur résolution : le 23 juillet 1821, il leur délivra un passeport à cet effet, et le 31, la veille de leur départ sur un navire marchand, Madame Christophe lui adressa la lettre suivante, écrite par sa fille aînée, nommée Améthyste :
Au Port-au-Prince, ce 31 juillet 1821, an XVIIIe de l’indépendance.
A Son Excellence le Président d’Haïti.
Président,
Sur le point de quitter pour quelque temps ce beau pays, cette patrie qui nous a vues naître et que nous ne cesserons jamais de chérir, moi et mes filles, nous éprouvons le besoin de vous exprimer autrement que de vive voix, toute la reconnaissance que nous ressentons des procédés généreux dont Votre Excellence a usé envers nous depuis neuf mois passés.
Recevez, Président, les nouvelles et solennelles assurances du souvenir profond que nous en conserverons.
Dans nos malheurs, nous avons trouvé en vous un protecteur, un ami, un frère… Nos cœurs en sont pénétrés d’admiration.
Nous vous prions de nous continuer les mêmes dispositions, et nous connaissons assez votre âme pour être assurées que cette prière ne sera pas vaine. Nous faisons la même prière à votre famille et à la fille de votre immortel prédécesseur, auxquelles nous promettons le plus tendre souvenir.
Je laisse au Cap une partie de ma famille et celle de mon feu mari ; je les recommande à toute votre bienveillance.
Je mets sous votre puissante sauvegarde et sous celle de l’honneur de mes concitoyens qui m’ont accueillie avec tant de bienveillance, et la maison que je possède depuis longues années au Cap, et celles que mes filles et moi avons acquises et payées comptant aux domaines, lors des ventes qui en ont été faites par l’État.
Pensant que les importantes et nombreuses occupations du chef de l’État, mon puissant ami, ne lui permettraient pas de régir pour moi ces diverses propriétés, j’ai donné ma procuration au général Magny.
Je prie Votre Excellence de l’appuyer de toute sa protection à cet effet. Une grande infortune ne peut intéresser qu’un grand homme ; les indiscrétions que la mienne me met dans le cas de commettre seront, à ce titre, mises par vous au chapitre des exceptions auquel elles appartiennent.
Je le répète, Président; dans nos malheurs, vous vous êtes montré notre protecteur, notre ami, notre frère, et ces titres m’ont portée à vous demander ces nouveaux et importants services : je sais que vous me les rendrez.
Je suis avec respect, Président, de Votre Excellence, la très reconnaissante concitoyenne et amie,
Signé : Veuve HENRY CHRISTOPHE.
Cette lettre, pleine de convenance, de sentiment et de dignité, fait autant d’honneur à la mémoire de la Veuve de
Christophe et de ses filles qu’à celle de Boyer. En la lisant, on sent que c’est le cœur d’une femme qui l’a dictée, que
c’est sa main qui l’a tracée. On y reconnaît la haute position que ces personnes ont occupée dans le pays, la grandeur dont elles furent toujours entourées auprès de l’homme qui en aimait le faste, sans doute, mais qui savait bien soutenir son rôle.
Hélas! Ainsi s’écroula à jamais le Royaume du Nord qui n’a pas survécu deux décennies. Que d’exemples à tirer du passé de notre histoire.
recherches: cba
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