par Nathanael Louis Barnabé Saint-Pierre
Jeudi 15 février 2018 ((rezonodwes.com))– Je n’ai pas connu Serge Beaulieu. Je l’ai entendu plusieurs fois sur les ondes de sa Radio Liberté et je dois avouer avoir été un peu allergique à ses positions politiques. Je me rappelle de son célèbre béret qui le distinguait de la foule et de ses attaques contre Jean Do, une de mes idoles, que Beaulieu surnomma à tort ou à raison : « le crocodile de Delmas. » Entr’eux, des échanges de mots pas toujours gentils certes, mais une certaine classe qui les a gardés de tomber dans la vulgarité.
En pleine poursuite d’un doctorat en homilétique, je comprends de plus en plus que les mots ont une portée qui va au-delà de la sémantique. Quoique la controverse peut attirer l’attention d’une audience, le présentateur peut se garder du nivellement par le bas.
C’est de ce Beaulieu que j’emprunte l’expression « laideur » en lieu et place de « leader » car il faut se l’avouer, qu’à regarder ce spectacle dégoulinant d’absence de gestion et de vide institutionnel, on se demande « où sont nos dit … dirigeants? (Je ne suis pas bègue) » Pour l’histoire, ils sont à la tête de toutes les organisations bidon, ils arrivent à se faire élire, ils sont nos parler menteurs, Ils sont à la tête de nos églises : piètres et passe terre, ils ont de gros moyens, du pouvoir à en revendre mais zéro crédibilité.
Dans mon texte « Alors que nous piaffons » j’ai écrit, et offusqué plusieurs, que nous n’étions que des susceptibles au premier degré. Sentimental à fleur de peau, on s’enfarge souvent dans les fleurs du tapis. Nous nous offusquons de la vérité alors que nous n’avons aucune vision (rêve + stratégies). Je constate, sans surprises, que les mêmes individus se fâchent parce qu’un artiste, chanteur, entertainer, ex-président nous a balancé en pleine figure, des vérités qui n’ont d’offenses que le panier de vulgarités qui les a accompagnées.
Pourtant le type est bien connu pour ses dérapages et ses montées de lait. Nous l’avons applaudi mille fois et avons payé pour le voir ou l’entendre et même le danser. Je crois qu’en bon commerçant, il a dû réaliser que ce « discours » plaisait à la foule suspendue à ses lèvres. Des milliers de personnes étaient aux abords de son char. C’est un bonhomme qui aime la controverse et qui en a bénéficié. Il n’est pas rendu président d’un pays par hasard. Il a été l’alternative entre une de nos meilleures têtes (intellectuelles) et un ensemble d’opportunistes de tout acabit.
Il ne faut pas confondre immoralité et vulgarité. Il ne faut pas chasser la mouche parce qu’elle nous emmerde (mon traitement de texte vient de me suggérer de remplacer ce mot grossier et vulgaire par ennuie). Dans un contexte d’anarchie que devons-nous espérer? C’est une démocratie fabriquée que nous vivons, une démocratie mal définie, une démocratie greffée, une démocratie sans bornes et sans limites et le peuple, mal éduqué, ne connait que ses droits et non ses devoirs. Sous son couvert, tout devient possible. Personne n’a de compte à fournir à personne, on fait ce qu’on veut quand on veut et nos apprentis dictateurs sont ces laideurs, qui sans peur de possibles conséquences, nous conduisent vers les abysses.
C’était le carnaval, le temps des mascarades et des charades déguisées. L’aveu que nos priorités sont à la mauvaise adresse. Nous refusons d’accepter que nous avons une mentalité d’esclaves. Qu’il nous faut du bâton et des instructions pour fonctionner dans la cohésion. Que nous sommes trop divisés pour être une nation. Placer un élément des couches défavorisées en position de pouvoir et nous créons ces laideurs qui font peur, un monstre qui nous abuse et engraisse le système oppressif parce que les oppressés ne connaissent aucune autre méthode que l’oppression. Le jour où un oppressé devient libre il devient pire que son oppresseur. Le masque est soudainement tombé au cours de ces quelques minutes de téléréalité.
Je n’écris pas ce texte pour défendre le comportement d’un malade et d’un dérangé. Je l’écris pour dénoncer les hypocrites. Ces animateurs de radio qui s’offusquent et demandent « où sont passés nos intellectuels? » Ces intellectuels qui demandent « où sont passés les autorités morales? » Ces prélats dont le silence et l’indifférence raisonnent comme un tonneau sans fond? C’est tellement plus simple de s’accuser les uns les autres. Voici ma réponse pour celles et ceux qui peuvent l’accepter: nos intellectuels sont derrière leurs micros en train de se frustrer parce qu’ils n’ont pas encore reçu leur part du gâteau, le petit chèque qui viendra rétablir leur silence. Ils sont des employés payés pour se taire car ils ont peur de perdre leur emploi. Ils sont des nègres de service qui ont peur de se retrouver baignant dans leur sang sur la rue parce qu’ils savent trop. Ils sont devenus Cardinal parce que recommandé par et supporté par le système. Ils sont des pasteurs connus, abuseurs, et corrompus mais qui assurent le contrôle des masses.
En autant qu’ils peuvent manipuler les consciences et faire croire en Dieu, moins le peuple cherchera à trouver les responsables de nos véritables problèmes. Ils sont ce qui ont peur de parler puisque la vie n’a plus de valeur dans ce pays. On peut abattre un prêtre comme on tue une mouche parce qu’il a questionné le système. Nos intellectuels? Ils sont pour la plupart formés par nos églises, nos écoles congréganistes catholiques ou protestantes. Ils sont pour la plupart formés par nos anciens maitres pour défendre les intérêts de nos anciens maitres. Ils sont éduqués pour une autre réalité. Ils sont éduqués pour concevoir des routes que nous n’avons pas les moyens de bâtir, ils sont éduqués pour vivre dans des châteaux que seul le vol peut s’offrir. Du moment que l’un d’eux voudrait se démarquer et démontrer un semblant de comptabilité, de sérieux, d’intégrité et d’honnêteté, il est lapidé, perd sa crédibilité et est considéré un échec, un imbécile alors que le voleur est appelé intelligent.
Quand on a peur de se regarder dans un miroir, on ne voit que les autres. Alors, continuons de nous offusquer parce qu’une personne sans vergogne nous a balancé en pleine face quelques vérités qui font mal. Cette laideur que nous constatons malheureusement est la nôtre. Ce personnage est le reflet de ce que nous sommes devenus. À nous de savoir quel maquillage choisir. À nous de décider quelle chirurgie peut nous mener à une authentique transfiguration.


2 Comments