18 décembre 2025
Haïti : contraints de reprendre ce qu’ils ont rejeté, pourquoi le 7 février est-il devenu une date maudite ?
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Haïti : contraints de reprendre ce qu’ils ont rejeté, pourquoi le 7 février est-il devenu une date maudite ?

Date fondatrice de l’ordre constitutionnel moderne, le 7 février n’aura été porteur d’espérance que lors de rares séquences historiques, notamment en 1986, avec la chute de la dictature, et en 1991, lors de l’accession d’un président élu au suffrage universel. Depuis, cette échéance s’est progressivement transformée en symbole de désillusion politique : prorogations arbitraires, contestations populaires, continuités imposées, et violations répétées de la Constitution. D’horizon de refondation, le 7 février est devenu le point de départ d’un retour en arrière institutionnel

Port-au-Prince / Boston – Le responsable de la New England Human Rights Organization (NEHRO), le Dr Josué Renaud, a formulé une critique sévère des déclarations tenues par plusieurs diplomates, dont l’ambassadeur du Canada en Haïti, à l’issue d’une rencontre avec huit des neuf membres du Conseil présidentiel de transition (CPT), organisée à l’occasion des vœux de fin d’année.

Selon le Dr Renaud, cette rencontre diplomatique a servi de cadre à une orientation politique implicite visant à maintenir l’architecture actuelle du pouvoir transitoire, tout en préparant l’opinion à la continuité d’ Alix Fils-Aimé au centre de l’exécutif au-delà du 7 février 2026. Une dynamique qu’il analyse comme une tentative d’imposer à la population un schéma de gouvernance pourtant rejeté après l’échec du gouvernement d’Ariel Henry.

Le défenseur des droits humains reprend la formule de l’ancien président et intellectuel Leslie Manigat pour qualifier la situation : « les Haïtiens retournent à leur vomi », non par choix collectif, mais par contrainte institutionnelle et diplomatique. Il estime que le processus en cours vise à forcer l’acceptation d’une gouvernance dépourvue de fondement électoral et de consentement populaire.

À l’appui de son analyse, le Dr Renaud rappelle qu’Alix Fils-Aimé, candidat aux élections sénatoriales de 2015, n’avait obtenu qu’environ 6,5 % des suffrages, un résultat jugé incompatible avec toute prétention à incarner l’autorité exécutive suprême dans un État fondé sur le principe de souveraineté populaire.

Il relève par ailleurs qu’un communiqué de la Primature en date du 16 décembre a qualifié Laurent Saint-Cyr de « chef de l’État », une terminologie qu’il considère juridiquement infondée, Haïti étant privée de président depuis l’assassinat de Jovenel Moïse, le 7 juillet 2021. Selon lui, ce glissement lexical participe à une normalisation de l’exception et prépare une concentration du pouvoir entre les mains d’Alix Fils-Aimé, appelé à devenir l’unique détenteur de l’autorité exécutive après l’échéance du 7 février.

Sur le plan sécuritaire, le Dr Renaud estime que l’autorité gouvernementale a perdu toute capacité effective depuis la prise de Kenscoff par des groupes armés. Il affirme qu’Alix Fils-Aimé avait connaissance des menaces imminentes pesant sur cette localité, sans avoir pris les dispositions nécessaires pour en empêcher l’occupation, laquelle demeure sous la domination des gangs.

Le responsable de la NEHRO appelle enfin la population haïtienne à assumer ses responsabilités civiques afin de mettre un terme au « gouvernement de doublure », considérant que l’actuel dispositif transitoire ne repose ni sur une légitimité démocratique ni sur une capacité réelle à garantir la sécurité, l’ordre constitutionnel et la continuité de l’État.

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