Cette fois, le voyage s’est déroulé sans témoins visuels. Fils-Aimé et Saint-Cyr ont traversé l’Atlantique comme on traverse un couloir mal éclairé : rapidement, silencieusement, sans laisser de traces. Ni photo au départ, ni image au retour. Le protocole habituel, d’ordinaire si prolixe en sourires cadrés et poignées de main stratégiques, a opté pour une sobriété radicale.
L’étrangeté ne s’arrête pas là. Aucune mise en scène d’accueil, aucun salut public de Paraison, pas même une note convenue pour signaler le retour du Premier ministre, que ce soit au Cap-Haïtien ou à Port-au-Prince. Le théâtre communicationnel semble avoir baissé le rideau sans avertissement préalable. Changement de décor ou rappel à l’ordre venu d’ailleurs ? Difficile de ne pas s’interroger.
Reste alors l’hypothèse la plus prosaïque : la machine de propagande tourne au ralenti. Manque d’huile, pénurie d’inspiration, ou fatigue des mêmes récits recyclés ? À force de trop montrer, le choix du silence devient parfois une stratégie. Mais en politique, l’absence d’images produit souvent plus de commentaires que la plus spectaculaire des galeries photos. Ici, le mutisme voyageur parle, ironie suprême, à voix haute.

