Chapo proposé :
Négocier avec des gangs relève de l’inacceptable et aucun responsable haïtien ne devrait s’autoriser une telle rhétorique. Alors qu’un chef de bande condamné pour enlèvements vient d’écoper de la prison à vie aux États-Unis, une question s’impose : dans une Haïti rétablie dans l’État de droit, quel sort attendra ceux qui ont tué, violé, incendié, kidnappé et agi en véritables apatrides ?
Washington — Le chef autoproclamé du gang haïtien 400 Mawozo, Joly Germine, alias Yonyon, 34 ans, originaire de Croix-des-Bouquets, a été condamné ce mardi à la prison à vie sans possibilité de libération supervisée par un tribunal fédéral du District de Columbia, pour son rôle central dans l’enlèvement de 16 missionnaires américains, dont cinq enfants, retenus en otage durant 62 jours en 2021. L’annonce a été faite par la procureure fédérale Jeanine Ferris Pirro.
Reconnu coupable le 16 mai dernier, au terme d’un procès de dix jours, de complot en vue de prise d’otages et de 16 chefs de prise d’otages de ressortissants américains à des fins de rançon, Germine a également été condamné à une amende de 1 700 dollars par le juge John D. Bates.
Le FBI Miami, représenté par l’Assistant Special Agent Brett Skiles, a salué la sentence.
Selon l’accusation, les 17 missionnaires — 12 adultes et cinq enfants, dont un bébé de huit mois — affiliés à Christian Aid Ministries, retournaient d’un orphelinat le 16 octobre 2021 lorsqu’ils ont été interceptés par des membres armés de 400 Mawozo, dont l’arsenal provenait des filières contrôlées par Germine. Les otages ont été dépouillés, séquestrés dans une zone rurale et un ransomware de 1 million de dollars par victime a été exigé. Le gang a également diffusé des menaces de mise à mort sur les réseaux sociaux.
L’enquête a démontré que Germine supervisait l’opération depuis sa cellule en Haïti en utilisant des téléphones clandestins, coordonnant les chefs du gang — pour la plupart des membres de sa famille —, dirigeant les finances, les cargaisons d’armes et la stratégie de négociation.
Il espérait obtenir sa libération en échange des captifs, proposition avancée dès le début des discussions.
Deux otages ont été libérés le 20 novembre 2021 pour raisons médicales. Le 5 décembre, trois autres personnes — deux adultes souffrant de graves problèmes de santé et un enfant de six ans — ont été relâchées après paiement d’une rançon de 350 000 dollars, mais les restants furent maintenus captifs sur ordre direct de Germine, qui misait sur un échange avec les autorités haïtiennes.
Le 16 décembre 2021, alors que leurs ravisseurs étaient distraits, les derniers otages se sont échappés de nuit, parcourant cinq heures à pied dans la brousse avant d’être extraits du pays par une équipe du FBI.
La condamnation de ce jour s’ajoute à une peine antérieure de 35 ans de prison prononcée en juin 2024 pour trafic d’armes vers Haïti et blanchiment de fonds issus de rançons liées à d’autres enlèvements.
Cette affaire a nécessité une coopération inter-agences exceptionnelle : FBI, ATF, Département du Commerce, CBP, DEA, Département de la Défense, U.S. Marshals, GRC canadienne, ainsi que les autorités haïtiennes et dominicaines. La poursuite a été menée par les procureurs fédéraux Karen P. Seifert et Thomas N. Saunders, assistés d’une équipe spécialisée dans la prise en charge des victimes.

