25 octobre 2025
Canada | Justice. Sous couvert de “vérité”, Lamothe (Tèt Kale 1) tente de réhabiliter son nom éclaboussé par PetroCaribe et les soupçons de financement de gangs
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Canada | Justice. Sous couvert de “vérité”, Lamothe (Tèt Kale 1) tente de réhabiliter son nom éclaboussé par PetroCaribe et les soupçons de financement de gangs

Ottawa–Port-au-Prince, 25 octobre 2025 – (Rezo Nòdwès)

La Cour fédérale du Canada rouvre le dossier Lamothe : simple relance procédurale ou offensive politique coordonnée ?

La Cour fédérale du Canada a rouvert, le 23 octobre 2025, le dossier de l’ancien Premier ministre haïtien Laurent Salvador Lamothe, suspendu depuis janvier. L’ordonnance, signée à Edmonton par le juge adjoint Shannon, ne statue pas sur le fond, mais fixe un nouvel échéancier pour la poursuite de la procédure intentée contre le gouvernement canadien par l’ex-chef du gouvernement Tèt Kale ayant institutionnalisé la corruption en Haïti, plus tard fédéré les gangs. Lamothe conteste les sanctions économiques imposées en 2022 par Ottawa pour « corruption et financement présumé de groupes criminels » en Haïti.

Un simple acte de procédure, sans valeur d’acquittement

Le document judiciaire, référencé T-2697-22 et T-402-24, relève d’une ordonnance de gestion de l’instance, instrument procédural courant en droit fédéral canadien. Aucune conclusion n’est rendue sur la légalité ou non des sanctions.

Selon un juriste contacté par Rezo Nòdwès, cette relance n’implique aucune réhabilitation : la Cour se limite à réorganiser le calendrier, en vertu des articles 50 et 54 de la Loi sur les Cours fédérales (L.R.C. 1985, ch. F-7).
Autrement dit, le dossier reste ouvert, mais le fond demeure inchangé : les sanctions canadiennes continuent de produire leurs effets.

Lamothe brandit un “combat pour la vérité”

Peu après la publication de l’ordonnance, Laurent Lamothe a tweeté :

“Mon combat pour la vérité ???????? — Après trois ans d’attente, la Cour fédérale du Canada relance enfin notre dossier. Le Canada devra répondre de sanctions arbitraires imposées par Justin Trudeau pour tenter — et échouer — à redéfinir le paysage politique haïtien en connivence avec Ariel Henry.”

Cette déclaration, à la tonalité victimaire et géopolitique, illustre la stratégie de communication adoptée par l’ex-Premier ministre : transformer une mesure purement procédurale en symbole politique, suggérant que la justice canadienne reconnaîtrait la faiblesse des preuves.

Or, aucun élément de l’ordonnance du juge Shannon n’appuie cette interprétation.

Nommé Premier ministre en 2012 par Michel Martelly, Laurent Lamothe avait été accusé de violations constitutionnelles lors de sa nomination : non-résidence en Haïti pendant la période exigée et absence de régularité fiscale. Son administration a été pointée du doigt par la Cour supérieure des comptes pour sa responsabilité dans le détournement massif des fonds PetroCaribe, notamment à travers des projets fictifs ou surévalués, les lampadaires en particulier.

Ces accusations, bien que jamais jugées au pénal, demeurent une ombre politique persistante et fragilisent sa crédibilité face aux tribunaux haitens et étrangers.

Un autre dossier de corruption longtemps évoqué en Haiti concerne la promesse, faite sous la gouvernance Lamothe, de construire vingt-et-un (voire vingt-cinq) stades ou « parcs sportifs » à travers Haïti. Des analyses dénoncent un « décaissement d’environ 40 millions de dollars américains à travers 7 résolutions de mai 2011 à janvier 2016 », sans livraisons visibles de l’infrastructure sportive. Le projet-stade est devenu, pour les critiques, un symbole de dérive budgétaire et de détournement des fonds issus du mécanisme Fonds PetroCaribe. Certains acteurs l’assimilent à une « illusion sportive » : un plan de façade, moins orienté vers la transformation sociale que vers la captation des ressources

Une manœuvre à portée diplomatique

La reprise de l’affaire au Canada intervient alors que des associés proches de Lamothe multiplient les apparitions publiques à l’international, notamment dans des forums économiques et panels de “réflexion sur la gouvernance haïtienne”.

Plusieurs observateurs y voient une opération d’image coordonnée, cherchant à repositionner l’ancien chef du gouvernement comme une figure “persécutée” par Ottawa et par le pouvoir en place à Port-au-Prince.
Un diplomate canadien, sous anonymat, évoque “une stratégie classique de réhabilitation publique à l’étranger avant un retour politique localement orchestré”.

En droit canadien, contester les sanctions adoptées sous la Loi sur les mesures économiques spéciales (LMES) exige la démonstration d’une erreur manifeste de droit ou d’abus de pouvoir.

Si le demandeur échoue, la Cour peut non seulement confirmer les sanctions, mais aussi renforcer leur légitimité. Autrement dit, relancer le dossier, c’est peut-être enfoncer un peu plus le clou. Un pari risqué pour Lamothe, qui n’en est pas à son premier coup d’essai : il avait déjà misé gros derrière Sweet Micky — et récolté à la même mesure.

Dans un pays où les institutions judiciaires fonctionnent selon les principes de transparence financière, toute incohérence documentaire pourrait se retourner contre le plaignant.

Entre justice et stratégie

La manœuvre de Lamothe, qui jadis faisait débloquer par simple mémo des décaissements de plusieurs milliers de dollars — à l’exemple des fonds destinés à l’aménagement du Gymnasium Vincent —, s’inscrit à la croisée du judiciaire et du politique. En cherchant à transformer un contentieux administratif en bataille symbolique contre Justin Trudeau, il tente de réécrire sa propre histoire : celle d’un ancien dirigeant se disant injustement sanctionné, érigé en porte-drapeau de la “dignité haïtienne”. Or, selon le Dr Josué Renaud, il demeure perçu par beaucoup comme un « fils dénaturé » d’Haïti.

Mais sur le terrain du droit, la Cour fédérale n’a pour l’instant rien confirmé, rien levé, rien annulé.
Le seul fait établi reste la poursuite d’une procédure où, tôt ou tard, les preuves parleront plus fort que les tweets.

cba

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