États-Unis – Détention prolongée pour Réginald Boulos, accusé de soutenir les gangs armés en Haïti
MIAMI — Un juge fédéral en immigration a décidé jeudi 31 juillet de maintenir en détention le puissant homme d’affaires haïtien et ancien candidat à la présidence, Pierre Réginald Boulos, arrêté à son domicile en Floride au cours du mois de juillet dernier. Selon l’agence fédérale Immigration and Customs Enforcement (ICE), Boulos serait impliqué dans « une campagne de soutien aux gangs armés ayant contribué à la déstabilisation de Haïti ».
La décision judiciaire, rendue lors d’une audience tenue à huis clos au centre de détention Krome North à Miami, confirme que Boulos ne bénéficiera d’aucune libération conditionnelle à ce stade. Aucune information officielle n’a été rendue publique concernant les éléments retenus contre lui, mais une source proche du dossier a confirmé à l’Associated Press que la demande de libération avait été rejetée.
Personnalité controversée, Pierre Réginald Boulos est considéré comme l’un des premiers membres de l’élite haïtienne à être visé dans le cadre du durcissement de la politique migratoire sous l’administration Trump. Bien que né aux États-Unis, il avait renoncé à sa citoyenneté américaine en vue d’une candidature à la présidence haïtienne en 2021 — projet resté sans suite. Il avait néanmoins obtenu un statut de résident permanent sous l’administration Biden l’an dernier.
Parallèlement à ses activités politiques, Boulos s’était imposé comme une figure majeure du monde des affaires en Haïti, présidant la Chambre nationale de commerce et développant plusieurs entreprises dans la grande distribution et le secteur automobile. En 2019, il avait fondé le mouvement politique Troisième Voie, se posant alors en critique virulent de la corruption et de la classe politique haïtienne.
Selon ICE, Boulos aurait omis de déclarer, dans ses documents migratoires, son implication dans la fondation d’un parti politique, ainsi qu’un renvoi devant la justice haïtienne pour usage abusif de prêts financiers. Le Département d’État américain affirme par ailleurs que certains résidents permanents légaux, dont Boulos, auraient entretenu des liens avec le groupe armé Viv Ansanm, récemment classé comme « organisation terroriste étrangère ».
Le juge a rendu sa décision alors que plusieurs manifestants, pour la plupart des citoyens haïtiens, s’étaient rassemblés jeudi devant le centre de détention. Tenant des pancartes et appelant à des slogans hostiles, ils ont exigé que Boulos soit expulsé vers une prison au Salvador, et non vers Haïti, où ils estiment que la justice « est vendue au plus offrant ». Selon eux, en cas de déportation à Port-au-Prince, Boulos n’y resterait jamais incarcéré sérieusement. En revanche, ils affirment que son emprisonnement au Salvador constituerait une juste peine pour « les crimes commis contre le peuple haïtien par les membres de la bourgeoisie, en particulier ceux du secteur commercial, qui ont profité de la politique haïtienne tout en l’instrumentalisant ».
Le sort judiciaire de Pierre Réginald Boulos reste incertain, dans un dossier où les accusations mêlent allégations de soutien au crime organisé, soupçons de fausses déclarations administratives, et implications politiques dans l’un des pays les plus fragilisés de l’hémisphère avec un gouvernement le plus corrompus des Caraibes, selon le dernier rapport de l’indice de corruption de Transparency International.