2 octobre 2025
Le CPT rejette l’amnistie des gangs, mais protège ses trois conseillers accusés de ‘braquage’, un crime très odieux
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Le CPT rejette l’amnistie des gangs, mais protège ses trois conseillers accusés de ‘braquage’, un crime très odieux

L’Edito du Rezo

La derniere déclaration du Secrétaire général de l’Organisation des États américains (OEA), évoquant la possibilité de négocier — voire d’amnistier — les groupes armés criminels terroristes opérant en Haïti, constitue une atteinte manifeste au principe de non-impunité garanti par les normes internationales en matière de droits humains. Une telle initiative ne saurait être légitimée, ni moralement ni juridiquement, dans un pays où les populations civiles subissent quotidiennement l’emprise de groupes qualifiés de terroristes. Le rejet immédiat par le conseiller présidentiel Leslie Voltaire, suivi d’un communiqué officiel du Conseil présidentiel de transition (CPT), témoigne d’une volonté manifeste de distanciation.

Toutefois, cette réactivité soulève une interrogation légitime : pourquoi le CPT s’est-il empressé de réagir à cette déclaration, alors même que certains de ses membres entretiennent des relations ambigües avec des entités ou personnalités internationales, y compris par des démarches à l’étranger, comme celle entreprise par le conseiller Saint-Cyr, aspirant au poste de président de transition ?

Parallèlement, des informations circulent sur la présence présumée de mercenaires sur le territoire haïtien, engagés — selon certaines sources — dans des opérations de sécurité en appui à des autorités non élues. À ce jour, aucune prise de position officielle n’a été rendue publique, violant ainsi le principe fondamental de publicité des actes administratifs touchant à la souveraineté nationale. Ce silence institutionnel volontaire ne peut être interprété autrement que comme une tentative d’omission délibérée, compromettant le droit du peuple haïtien à l’information, au nom d’une prétendue « raison d’État ». Lorsqu’un pouvoir public choisit les informations à diffuser ou à taire, il se rend coupable d’un manquement grave à l’obligation de transparence, en contradiction flagrante avec les standards internationaux de bonne gouvernance.

Plus troublant encore est le fait que plusieurs membres du CPT — organe dépourvu de fondement constitutionnel — soient gravement mis en cause dans des affaires de délinquance financière, notamment dans le cadre du braquage de la Banque Nationale de Crédit (BNC). En l’absence de toute procédure judiciaire ouverte ou de suspension temporaire pour préserver l’intégrité institutionnelle, l’on assiste à une forme de tolérance de l’impunité au sein même de l’appareil de transition. Le droit haïtien, comme le droit comparé, impose pourtant l’obligation de moralité publique à toute autorité investie de la puissance publique. Le contraste entre la condamnation verbale des gangs armés et le silence sur les déviances internes trahit un usage sélectif du principe de responsabilité politique.

À cela s’ajoute une crise de fonctionnement : le CPT apparaît aujourd’hui divisé, incapable même d’organiser régulièrement un conseil des ministres. Selon les déclarations de Pierre Espérance, le conseiller Laurent Saint-Cyr aurait conclu une entente tactique avec les trois membres mis en cause dans l’affaire BNC, leur permettant de manipuler la question du quorum selon leur convenance. Ainsi, aucune réunion formelle ne peut être convoquée sans leur accord, sauf lorsqu’il s’agit d’examiner ou de valider des rapports sur les décaissements de fonds publics. Ce mécanisme de blocage, motivé par des intérêts stratégiques internes, constitue une entrave directe à la continuité de l’administration publique abracadabra, et révèle un usage instrumental de la fonction publique à des fins de survie politique. En conséquence, le rejet d’un dialogue avec les gangs, aussi légitime soit-il, ne saurait faire illusion sur la nature profonde d’un pouvoir transitoire en déshérence, absorbé par ses propres calculs, et déconnecté des exigences élémentaires d’État de droit.

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