« C’est pour quand ? » Enfin le regard sincère vers un peuple humilié
À l’ombre d’un tarmac défiguré, l’avenir attend son vol.
C’est pour quand ?
Quand verra-t-on, dans la lumière d’un été apaisé,
La diaspora, foulant la terre natale
Sans sueur froide, sans tremblement, sans escale ?
Quand l’accueil cessera-t-il d’être un rite d’humiliation
Au seuil d’un aéroport qui n’en a que le nom ?
C’est pour quand ?
La fin de cette farce à mille visages —
Cette république des palabres et des mirages,
Où les « gouvernants » psalmodient référendum
Comme s’il s’agissait d’un poème sacré
Quand le feu ronge les fondations de la cité ?
C’est pour quand ?
La fin du règne d’une caste
Qui pactise avec les monstres qu’elle a enfantés,
Tissant avec les gangs un drapeau en lambeaux,
Et offrant, en prime, le silence en cadeau ?
C’est pour quand ?
Port-au-Prince cessera-t-elle d’être
La seule capitale — ô honte ! — sans port d’ailes ni fenêtre,
La seule métropole prisonnière de son ciel,
Dont les pistes désertes racontent l’exil éternel ?
C’est pour quand ?
L’élimination de cette couleuvre à neuf têtes :
Impunité, corruption, lâcheté, incompétence,
Complicité, arrogance, silence, violence,
Et l’infernale patience d’un peuple trop sage ?
C’est pour quand ?
Qu’on ne nous serve plus ces illusions d’en haut,
Quand le peuple a les pieds dans l’eau,
Et la dignité clouée au mur des départs ?
Car tant que l’aéroport sera mirage,
Notre retour restera exil.
Et tant que le mal se niche sous les fauteuils d’État,
Parler de refonder, c’est injurier l’histoire.