Je suis né
dans une langue qui trébuche sur les trottoirs,
où les mots sentent la mangue mûre
et le goudron chaud.
Mais j’habite
une ville de verre et de lignes droites,
où l’on s’excuse sans se toucher,
où les silences ont des manteaux.
Mon nom, ici,
est une énigme sur les lèvres des autres.
Là-bas,
il était une chanson qu’on murmurait
en pelant les oranges.
Je parle deux rives,
et aucune ne m’écoute complètement.
Je rêve dans une langue
et je pleure dans l’autre.
Entre les deux,
je laisse des miettes de moi,
comme si je pouvais retracer le chemin
un jour.
Le déraciné n’est pas un arbre mort.
Il est une graine
en chute lente,
cherchant une terre
qui lui dira :
reste.
Elensky Fragelus