Port-au-Prince dans la rue : colère populaire et hommage aux victimes de la terreur armée
Au lendemain d’un hommage solennel rendu à plusieurs figures communautaires tombées dans les affrontements récents, la capitale haïtienne a connu, ce dimanche 4 mai 2025, une nouvelle mobilisation citoyenne. Sur les hauteurs de Port-au-Prince, plusieurs dizaines de manifestants ont défié l’insécurité ambiante pour réclamer, d’une même voix, la démission du Premier ministre ainsi que celle du Conseil présidentiel de transition. Le mot d’ordre : exiger une réponse immédiate à l’insécurité généralisée.
« Ce que le peuple haïtien demande, c’est de pouvoir vivre en sécurité », a confié un participant à l’agence Associated Press, un large drapeau noué autour du cou. « Chaque jour, nous voyons des quartiers tomber, des familles fuir, des vies fauchées. » Ces paroles, à la fois simples et poignantes, traduisent l’angoisse collective d’une population livrée à la violence armée, pendant que les gangs étendent leur domination bien au-delà de la capitale.
Cette manifestation s’inscrit dans une série de protestations qui s’intensifient à mesure que la crise s’aggrave. Entre janvier et mars 2025, plus de 1 600 personnes ont été tuées, et près de 580 blessées, selon les dernières données disponibles. Ce bilan, glaçant, rend compte de l’ampleur du désastre sécuritaire, alors que l’appareil étatique, impuissant, cède le terrain aux factions criminelles.
La veille, des centaines d’habitants s’étaient déjà rassemblés dans un stade de Canapé-Vert pour saluer la mémoire de militants communautaires récemment abattus. « La liberté ou la mort ! », criaient les participants, entre recueillement et appel à la résistance.
Ces mobilisations successives, à Port-au-Prince comme à Paris le samedi 3 mai, traduisent un sursaut transnational. Elles résonnent comme un appel désespéré d’une société civile qui, face au mutisme des autorités, cherche à briser l’isolement et à faire entendre sa voix sur la scène nationale comme internationale.
Encadré statistique — Haïti sous la menace des gangs (janvier–mars 2025)
- 1 660 personnes tuées entre janvier et mars 2025, soit une moyenne de plus de 18 morts par jour, selon le Bureau intégré des Nations Unies en Haïti (BINUH).
- 580 blessés recensés sur la même période, en grande majorité des civils pris dans les affrontements entre groupes armés.
- Plus de 95 000 déplacés internes depuis le début de l’année, fuyant les violences dans les quartiers de Port-au-Prince, Carrefour, Cité Soleil, Delmas et Croix-des-Bouquets.
- 80 % de la capitale considérée comme étant sous le contrôle ou l’influence directe de gangs, selon les estimations de l’OCHA.
- En 2024, Haïti avait déjà enregistré plus de 4 700 homicides, un record national.
Sources : BINUH, OCHA, Human Rights Watch, ONU Info, Observatoire de la criminalité en Haïti.