28 octobre 2025
Haiti: Les politiciens diplômés d’une même université : l’École Internationale de Confusion Politique Appliquée
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Haiti: Les politiciens diplômés d’une même université : l’École Internationale de Confusion Politique Appliquée

Par Reynoldson MOMPOINT 

Port-au-Prince 

Le 12 Avril 2025

Il y a des mystères qui méritent d’être levés, des questions fondamentales qu’on ne pose jamais assez. Par exemple : comment expliquer que, malgré leurs étiquettes différentes, leurs discours contradictoires, et leurs querelles à la télé, nos politiciens finissent tous par se comporter de la même manière ?

Eh bien, chers lecteurs, on a enquêté. On a fouillé, questionné, médité même — oui, on médite parfois, entre deux coupures de courant. Et on en est arrivé à une conclusion aussi claire que l’eau de la DINEPA (donc pas très claire, mais tenace) : nos politiciens sont tous diplômés d’une même institution. Pas la Sorbonne, pas Harvard, pas même l’Université d’État d’Haïti. Non. Ils sont tous, sans exception, des alumni de la grande et noble Communauté Internationale.

Un cursus taillé sur mesure

Dans cette école pas comme les autres, on enseigne des choses très pointues : comment parler de souveraineté en anglais, comment exiger l’indépendance tout en demandant une mission onusienne, et surtout, comment accuser les autres de corruption en plein détournement de fonds.

Les cours sont dispensés par des experts : anciens ambassadeurs devenus consultants, observateurs électoraux devenus écrivains, des élus et nommés des 9 représentations du Core Group, membres des missions diplomatiques, d’ONG passionnés « d’impact sans résultat ». Les politiciens haïtiens, eux, écoutent avec sérieux, prennent des notes… pour les mettre en exergue une fois accédé au pouvoir. 

Une formation continue… au timon des affaires de l’État 

Le plus beau dans cette école, c’est qu’on ne la quitte jamais vraiment. C’est une formation continue. Une fois en poste, chaque politicien continue de recevoir ses modules : Gestion d’une crise imaginaire, Construction d’un dialogue inutile, Utilisation stratégique du mot « transition ».

Et bien sûr, le très populaire : Comment créer un conseil présidentiel à sept têtes et cent ambitions sans ambitions, un chef-d’œuvre pédagogique, que même les Grecs anciens n’auraient pas imaginé. Cerbère au Palais National, version tropicale.

Le mémoire de fin d’études : « Faire semblant d’agir »

Le diplôme ne s’obtient pas par concours. Il faut simplement réussir à ne rien faire… sans que ça se voie trop. Cela demande du doigté : distribuer des promesses, créer des comités, prononcer des discours vides mais longs. Surtout longs.

Le mémoire de fin d’études est souvent une conférence de presse où l’on annonce des mesures urgentes… qui ne seront jamais appliquées. Mais c’est dit avec fermeté, et parfois même avec PowerPoint. L’illusion est parfaite.

Une école ouverte à tous… sauf au peuple

Évidemment, cette école n’est pas pour tout le monde. Le peuple ? Ah non. Lui, il n’a pas le droit d’entrer. Il reste dehors, à regarder passer les convois blindés, à écouter les voix sur Radio Métropole, Radio Caraïbes, Radio Magik 9…, à attendre que quelque chose change. Vainement !

On lui parle de « solution haïtienne à la crise haïtienne », mais tout le monde sait que le syllabus vient de Washington, Ottawa,  Paris. On lui promet des élections, mais on ne lui donne que des « accueils de délégations ».

Et pourtant… ça continue

Malgré les échecs, malgré les scandales, malgré les morts, l’École ne ferme jamais. Elle recrute, elle forme, elle recycle. Les nouveaux visages sont formés avec la même pâte que les anciens : farine de discours creux, levure de bonne volonté, glaçage de duplicité.

Certains disent que l’école est en crise. Mais non, détrompez-vous. Elle tourne à plein régime. Elle innove même : après les présidents provisoires, voilà le conseil présidentiel, les protocoles d’accord sans protocole, les coalitions sans vision.

Une créativité sans limites. Sauf celle du peuple

En attendant la vraie école…

Pendant ce temps, l’école publique manque de bancs, les professeurs ne se pointent pas de par leur revendications inassouvies, les écoles privées manquent d’éthique, et les jeunes quittent le pays pour aller… devinez où ? Étudier ailleurs. Parce qu’eux, ils veulent apprendre des choses utiles. Ils ne savent pas encore que, pour faire carrière ici, le seul vrai diplôme qui compte, c’est celui de l’École de la Communauté Internationale avec un cursus particulier et propre à la politique haïtienne. 

Et elle, croyez-moi, elle continue de distribuer ses parchemins… avec mention « hypocrisie soutenue ».

Reynoldson Mompoint 

Ce n’est pas la puissance de la voix qui fait trembler le pouvoir, c’est la vérité.

mompointreynoldson@gmail.com

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