Après chaque drame, le gouvernement s’empresse de convier des « délégations » pour l’aider à projeter l’image d’un « bon père » soucieux de son peuple.
Tandis que Mirebalais demeure sous le joug des gangs armés depuis l’assaut du 31 mars dernier — sans qu’aucune intervention publique significative ne soit enregistrée —, le Premier ministre de facto Alix Didier Fils-Aimé a publié mardi un communiqué glaçant d’ironie, annonçant avoir rencontré une délégation issue des camps de déplacés internes.
M. Fils-Aimé a qualifié cette rencontre d’« étape décisive vers une réponse plus humaine, plus solidaire et mieux coordonnée » à la crise humanitaire. Pourtant, cette déclaration sonne tragiquement creuse au regard de la situation à Mirebalais, toujours assiégée depuis l’incursion des gangs le 31 mars dernier, dénoncent les habitants du Plateau Central dans les libres tribunes.
Alors que l’État reste muet face aux appels à l’aide, une question obsédante demeure : combien de ces déplacés, tombés sous les balles ou morts dans l’indifférence, auront droit à une sépulture digne ? Et les deux religieuses assassinées, auront-elles seulement été comptées dans cette « réponse humaine » annoncée ?
Sous le titre lénifiant « Un État présent, solidaire et à l’écoute », le texte vante une réunion « marquée par une forte charge émotionnelle », à laquelle ont pris part plusieurs ministres et directeurs d’organismes publics. Dans un ton emphatique, Fils-Aimé affirme que « l’État ne vous abandonne pas », promettant une mobilisation rapide pour répondre aux demandes urgentes d’eau potable, de soins, de kits hygiéniques et de sécurité.
Or, cette rhétorique humanitaire se heurte frontalement à la réalité vécue dans l’Artibonite et sur la route nationale menant à Mirebalais : des milliers de familles piégées, fuyant sans assistance réelle une violence programmée, entretenue par l’inaction, « voire la complicité, des autorités« , affirme le Pasteur Malory Laurent.
Alors que les déplacés s’accumulent dans des conditions indignes, le gouvernement choisit l’image plutôt que l’action, la communication plutôt que la coordination. Cette mise en scène d’un pouvoir « à l’écoute » sonne d’autant plus creux que les acteurs communautaires et les journalistes sur place dénoncent un silence criminel de l’État depuis plus d’une semaine.