9 octobre 2025
Hélicoptère sous les tirs, réouverture de l’aéroport dans les discours ‘fè pèp dòmi’ : étrange gouvernance en Haïti
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Hélicoptère sous les tirs, réouverture de l’aéroport dans les discours ‘fè pèp dòmi’ : étrange gouvernance en Haïti

minute de la rédaction

Ce que Leslie Voltaire, l’architecte de l’aéroport international des Cayes, ne dit pas. L’aéroport, cette illusion de normalité dans un pays fragmenté. Le langage de l’État fonctionne encore, mais son action n’atteint plus le réel.

Le communiqué émis le 1er avril 2025 par le Conseil Présidentiel de Transition (CPT), et relayé par le Conseiller-Président Leslie Voltaire, annonce avec solennité une réunion consacrée à la « réouverture progressive et sécurisée » de l’aéroport international Toussaint Louverture. À première vue, ce langage technique évoque la reprise d’un processus interrompu. Mais à y regarder de plus près, cette déclaration révèle davantage une mise en scène politique que la manifestation d’une reprise effective de contrôle étatique.

Ce discours repose sur une dissonance flagrante entre la parole officielle et la réalité du terrain. Pendant que l’on évoque des discussions de haut niveau à la Villa d’Accueil, un convoi gouvernemental en direction de Mirebalais par air est criblé de balles à Saut d’Eau, blessant au moins un policier. L’information, confirmée par une source gouvernementale, témoigne de l’état réel du territoire : fragmenté, conflictuel, et dominé par des groupes armés disposant de la capacité de frapper les forces de l’ordre en mouvement.

Dans ce contexte, la question n’est pas seulement logistique — comment rouvrir un aéroport — mais profondément politique : à quelles conditions peut-on parler de « réouverture » lorsqu’aucun périmètre sécuritaire durable n’est garanti ? Que signifie rouvrir un lieu stratégique sans maîtrise effective des accès, des axes routiers et de l’espace environnant ? Une réouverture sans territoire constitue moins une opération de gouvernance qu’un geste symbolique, destiné à entretenir l’apparence d’un État opérant selon les normes de fonctionnement international.

L’allusion implicite à une coordination avec la communauté internationale introduit un autre élément : celui de la délégation implicite de souveraineté. En mobilisant un vocabulaire diplomatique — « dialogue », « reprise », « stabilité » — le communiqué semble vouloir rassurer des acteurs extérieurs davantage que répondre à la population haïtienne elle-même, confrontée à la dislocation continue des institutions.

En somme, le communiqué révèle une fracture fondamentale dans l’exercice de l’autorité : le langage de l’État fonctionne encore, mais son action n’atteint plus le réel. Il s’agit d’un État parlant au nom d’un pouvoir qu’il ne possède plus entièrement, ou qu’il exerce de manière partielle, intermittente, conditionnée.

les angles morts d’un communiqué de Poisson d’Avril

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