minute de la rédaction
Dans un coin discret de la capitale, loin des gangs ‘a sapat‘ en « mission commandée », des micros indiscrets et des regards critiques de la presse, le Premier ministre Alix Didier Fils-Aimé, flanqué du Directeur général de la Police nationale, son ami-ennemi, s’adonne à un petit moment de satisfaction personnelle : l’inspection d’un “échantillon” de matériel supposément destiné à renforcer la capacité opérationnelle de la PNH.
L’image évoque moins la solennité d’un chef de gouvernement en temps de crise qu’un enfant émerveillé devant un jouet flambant neuf offert en avance pour Noël. Pas de discours officiel, pas de conférence de presse : juste une photo, vite publiée sur les réseaux, comme si le simple fait d’avoir touché un prototype suffisait à conjurer l’insécurité qui ronge le pays.
Il est curieux de voir ce même Premier ministre — protégé quelques jours plus tôt par des escadrons de la PNH lançant sans retenue des grenades lacrymogènes sur des citoyens venus, ironie du sort, réclamer davantage de sécurité — jouer au technicien improvisé avec un gadget encore sous cellophane. Ce théâtre politique, bien rodé, ne s’embarrasse d’aucune précision logistique : aucune date de livraison, aucun détail sur les quantités à venir, aucune confirmation de réception par la police elle-même. L’on évoque un « échantillon », entre guillemets, comme s’il s’agissait d’un parfum à tester avant l’achat. Et pendant ce temps, la population suffoque, au sens propre comme au figuré.
Mais peut-être faut-il désormais prendre l’actualité haïtienne comme un calendrier de surprises : après tout, si l’on suit la logique de cet événement performatif, la date du 1er avril — si proche — s’impose comme hypothèse plausible pour la véritable livraison. Car, dans cette mise en scène aux allures de farce, le poisson d’avril semble déjà bien entamé. Le Premier ministre s’amuse, la police regarde, et la nation attend, dans l’incertitude, que le jouet devienne outil de combat dans la lutte réelle contre l’insécurité « programmée ».
