17 mars 2025
Carnaval National 2025 : Haïti Kanpe, mais sur quel pied ?
Actualités Cas d'assassinat Corruption Élections Insécurité|Kidnapping Pages d'Histoire d'Haiti PHTK autorise l'occupation du pays Société

Carnaval National 2025 : Haïti Kanpe, mais sur quel pied ?

Ainsi donc, le président du CPT, M. Lelie Voltaire a parlé. Kanaval du Notre-Dame du Perpétuel Secours,- Point barre. Il a trouvé la solution. Non pas dans un plan de sécurité, non pas dans des tribunaux fonctionnels, non pas dans une gouvernance responsable, mais dans un carnaval sanctifié ! Quelle inspiration divine ! Alors que les gangs règnent en seigneurs sur des quartiers entiers, notamment à Kenskoff, que les déplacés errent sous des bâches trouées, que la faim creuse les ventres plus sûrement qu’une rafale d’armes automatiques, lui, il convoque le peuple à danser dans l’inconscience. Et Notre-Dame du Perpétuel Secours ? Elle sera toujours là. À prier pour un pays qui ne prie plus que pour survivre.

Le 7 février 2025, jour anniversaire d’une ère soi-disant démocratique commencée en 1986, le gouvernement de doublure Voltaire-Fils Aimé, dont les prouesses administratives se mesurent en scandales et en malversations, a cru bon de nous offrir un moment de distraction nationale. Ô divine surprise ! Dans un pays où l’électricité est aussi rare qu’un ministre de l’intégrité, où les écoles ferment plus vite que les procès contre les corrompus, où plus d’un millier de personnes déplacées errent sous des bâches trouées, le ministère de la Culture et de la Communication a trouvé la priorité absolue : organiser un carnaval !

Et pas n’importe lequel ! Un carnaval national sous le thème inspirant « Haïti debout / Ayiti Kanpe ! ». C’est vrai ? Mais sur quoi Haïti se tient-elle debout ? Sur les montagnes d’ordures qui jonchent ses rues ? Sur l’impunité institutionnalisée ? Ou peut-être sur l’argent des contribuables que les dignitaires d’aujourd’hui dépensent sans la moindre crainte de devoir rendre des comptes ? Il faut dire qu’en Haïti, dépenser quelque 536 millions de Gourdes n’est rien lorsqu’il s’agit d’événements festifs, l’État devient soudain fonctionnel, la machine administrative tourne comme une fanfare bien huilée et les fonds sont miraculeusement débloqués.

Le gouvernement, soucieux du bon déroulement des festivités, a même mis en place un Comité d’honneur, composé de ministères dont certains peinent à assurer leurs missions de base. La justice, par exemple, incapable de juger les responsables de détournements massifs de fonds publics, ou encore les chefs des gangs criminels à sapate qui sèment la terreur… a trouvé le temps de siéger au Comité du Carnaval. Quelle insolence ! Même le ministère de la Santé, accablé par la dégradation des hôpitaux et la pénurie de médicaments, est de la partie. Priorités, dites-vous ?

Et que dire des célèbres personnages du Comité national en charge de l’organisation ? Entre un « Directeur financier » à l’aise dans un pays où l’audit des finances publiques est un mythe, et un « Responsable des urgences et des secours » dans un Etat qui n’a jamais su gérer la moindre catastrophe naturelle ou sécuritaire, on ne peut qu’admirer la cohérence. Il ne manque plus qu’un « ministre de l’impunité » pour compléter le tableau.

Pendant ce temps, les populations meurent à petit feu. Plus de 5 000 morts enregistrés en 2024, un chiffre qui, comparé à la violence et aux exactions en Haïti, donnerait presque l’impression que nous vivons dans une zone de guerre sans déclaration officielle. Mais peu importe, car pendant trois jours, du 2 au 4 mars 2025, l’État veut nous faire danser, nous faire oublier nos souffrances au rythme de la corruption et de l’aveuglement politique.

En effet, Fort-Liberté est une destination bien choisie : c’est là que les membres du gouvernement trouveront leur liberté. Liberté de piller. Liberté de mentir. Liberté d’organiser des mascarades coûteuses pendant que la nation agonise. Liberté absolue, surtout celle de ne rendre de comptes à personne.

Mais ne soyons pas trop durs ! Car, après tout, cette administration a des ambitions : un référendum bidon, des élections en 2025 (pourquoi pas un autre carnaval électoral ?), et toujours cette promesse de changement qui, après 39 ans, n’a toujours pas vu le jour. Le seul secteur en plein essor ? La corruption, bien sûr. La corruption, au moins, a su s’adapter aux changements d’époque, de crise et de gouvernement.

Alors dansez, citoyens ! Chantez, Haïtiens ! Pendant que la musique joue, les caisses de l’État se vident, et ceux qui nous gouvernent ne se cachent même pas pour se moquer de nous. Les masques sont tombés.

Haïti Kanpe ? Oui, mais sur le dos de son peuple. Mais que l’on se rassure, car ce n’est pas un carnaval ordinaire ! C’est un carnaval d’État, orchestré par ceux qui gouvernent sans gouverner, un spectacle financé par des caisses déjà vides, un opium destiné à ceux qui ont faim, mais à qui l’on sert la distraction comme dernier repas.

cba

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur la façon dont les données de vos commentaires sont traitées.