Dans neuf jours, tombera le verdict de Transparency International, scrutant l’ombre et la lumière du Conseil Présidentiel de Transition (CPT). L’heure approche où sera pesée, sur la balance de la probité, la capacité réelle de cette instance à incarner une autorité suffisamment crédible pour conduire la nation vers des élections dites « libres et honnêtes ».
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Le dernier Conseil de Gouvernement présidé par le Premier Ministre Alix Didier Fils-Aimé, après son aveu d’impuissance des services de renseignements à empêcher le massacre de Kenskof, suffira-t-il à dissuader les gangs de faire des plateaux et des hauteurs de Port-au-Prince le théâtre de leur suprématie ? Alors que la Primature, dans son communiqué du 1er février 2025, réaffirme sa volonté de renforcer la sécurité et d’accélérer l’action gouvernementale, un tout autre agenda se déroule dans les rues de La Plaine.
Selon une information relayée par Rezo Nòdwès, ce dimanche 2 février 2025, des gangs se préparent à défiler dans un style carnavalesque, revendiquant un territoire qu’ils considèrent désormais comme le leur. Un spectacle macabre où le son des trucksounds menace de se fusionner avec celui des armes automatiques, tandis que les emblèmes des factions criminelles terroristes remplacent les traditionnels chars allégoriques décorés.
Face à cette provocation, l’Etat a un test décisif à faire. Le gouvernement de M. Fils-Aimé, qui prétend avoir pris des mesures fortes, notamment l’achat de matériel pour la police et le renforcement de la formation des forces de sécurité, est aujourd’hui mis à l’épreuve d’une réalité du terrain qui se dérobe à ses yeux. Les services du Premier ministre ont beau proclamer leur volonté d’« accélérer l’action publique » et d’« instaurer un climat de confiance », la présence impassible des bandes dans l’espace public jette une ombre sur ces assurances officielles.
Mais la gouvernance ne se résume pas à des considérations financières : c’est aussi une question d’équilibre des pouvoirs, tant à l’intérieur qu’à l’extérieur du pays. À la recherche d’une légitimité, le Premier ministre Fils-Aimé s’est tourné vers la communauté internationale, notamment en rencontrant l’ambassade de France, pour la convaincre que son gouvernement maîtrise la situation et sera en mesure de conduire le pays vers des élections pacifiques. Mais en ce dimanche 2 février, le défi posé par les gangs vient éclairer la fragilité de cette promesse. Référendum, élections, stabilité ? Tout cela relève de la théorie quand, sur le terrain, ceux qui détiennent le vrai pouvoir orchestrent des carnavals d’une ampleur inédite, défiant la République avec une désinvolture cinglante.
Dans cette impasse, où le gouvernement promet, les gangs exécutent et la population subit, certaines voix se tournent vers le spirituel. Le coordonnateur du CPT, M. Leslie Voltaire a suggéré le recours à la prière, invoquant Notre-Dame du Perpétuel Secours pour apaiser la fureur des armes. Faut-il alors se tourner vers la transcendance dans l’espoir que ce dimanche ne se termine pas dans un bain de sang ? Pendant que les ministres discutent, que les groupes criminels paradent et que les citoyens retiennent leur souffle, il ne reste peut-être qu’une seule certitude : si le gouvernement ne parvient pas, une fois de plus, à imposer son autorité, c’est tout le pays qui basculera de la farce à la tragédie.
cba
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