6 octobre 2025
Les racines de la maltraitance : Responsabilite directe des dirigeants haïtiens dans la crise migratoire en République Dominicaine
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Les racines de la maltraitance : Responsabilite directe des dirigeants haïtiens dans la crise migratoire en République Dominicaine

images d’archives

La question de la migration des Haïtiens vers la République dominicaine est un sujet à la fois complexe et lié à une longue histoire de relations économiques, sociales et politiques entre les deux nations. Alors que le gouvernement dominicain, sous la direction de Luis Abinader, se montre de plus en plus ferme dans sa politique de refoulement des Haïtiens, il faut remonter aux sources de cette situation pour en comprendre les véritables causes. Contrairement au discours dominant qui stigmatise exclusivement les autorités dominicaines, force est de reconnaître la responsabilité historique des dirigeants haïtiens dans la création de cette dynamique migratoire, source d’abus et de mauvais traitements infligés à leurs propres citoyens.

Le Pacte de Zafra, signé dans les années 1950 entre les régimes dominicain et haïtien sous les gouvernements de Rafael Trujillo et de François Duvalier, a institutionnalisé la migration des travailleurs haïtiens vers les champs de canne à sucre dominicains. Ce contrat a permis à la République dominicaine d’utiliser la main-d’œuvre haïtienne bon marché, surnommée « braceros », dans les bateyes, des camps de travail souvent déshumanisants. Le régime Duvalier, tout en bénéficiant des revenus générés par cette migration, a ainsi ouvert la voie à une émigration massive, créant une situation où des milliers de familles haïtiennes se sont installées en République dominicaine dans des conditions précaires. Ce phénomène migratoire, d’abord encouragé par des accords économiques, s’est poursuivi au fil des décennies, favorisé par la faiblesse des structures économiques et sociales d’Haïti.

Le système éducatif haïtien contribue également à cette dynamique migratoire. L’Université d’État d’Haïti, sous-financée et surchargée, n’est pas en mesure d’accueillir les milliers d’étudiants qui cherchent à faire des études supérieures chaque année. Derrière cette situation, de nombreux jeunes choisissent de se tourner vers les universités dominicaines, attirés par des opportunités académiques mieux structurées. Mais le paradoxe réside dans le fait que les gouvernements haïtiens successifs ont souvent ignoré ces jeunes diplômés, minimisant la valeur de leurs diplômes obtenus en République dominicaine. Une attitude qui a poussé nombre de ces étudiants à rester sur place et à tenter de se construire une nouvelle vie, plutôt que de retourner en Haïti où leurs qualifications ne sont pas toujours reconnues. Ce manque d’attention de l’Etat haïtien a contribué à la dépendance économique et sociale de nombreux Haïtiens vis-à-vis de leur voisin, formant ainsi une population migrante de plus en plus vulnérable aux politiques d’immigration dominicaines.

L’insécurité croissante en Haïti, entretenue par une série de crises politiques et économiques, est un autre facteur majeur de cette migration continue vers la République dominicaine. Les gouvernements haïtiens, particulièrement sous les régimes successifs du PHTK (Parti Haïtien Tèt Kale), ont été accusés de complicité avec les gangs armés, exacerbant la violence et l’instabilité dans le pays. Des affaires comme la disparition mystérieuse d’une cargaison d’armes sous le gouvernement de Michel Martelly et de Laurent Lamothe, laquelle aurait profité aux gangs, symbolisent cette collusion entre l’État et les acteurs criminels. Cette situation de chaos et de terreur a poussé des milliers d’Haïtiens à fuir leur pays, cherchant refuge en République dominicaine. Cependant, ces mêmes personnes qui fuyaient l’insécurité se retrouvent aujourd’hui prises au piège d’une politique d’expulsion de plus en plus répressive, orchestrée par le gouvernement dominicain.

En revanche, cette politique n’est pas représentative de l’ensemble de la population dominicaine, c’est pourquoi il est important de le souligner. Les relations entre Haïtiens et Dominicains ont toujours été marquées par d’importants échanges humains et culturels, et de nombreux Dominicains cohabitent pacifiquement avec la diaspora haïtienne. La politique raciste de Luis Abinader ne reflète pas nécessairement l’attitude du peuple dominicain en général, mais fait partie d’une stratégie géopolitique visant à consolider son pouvoir à travers une gestion hostile des relations avec Haïti.

Pour mémoire, la République dominicaine, malgré sa politique actuelle, doit une grande partie de son indépendance à la résistance haïtienne contre la colonisation espagnole, notamment sous la gouvernance de Jean-Pierre Boyer. Ce fait historique témoigne de la profondeur des relations entre les deux pays, malgré les tensions actuelles. En définitive, les Haïtiens et les Dominicains, en tant que peuples, partagent des histoires de lutte et de résilience communes, dont il importe de ne pas se départir dans le contexte des politiques migratoires actuelles.

L’analyse de la crise migratoire haïtienne en République dominicaine doit donc se faire à la lumière de cette responsabilité partagée entre les dirigeants haïtiens et dominicains. Si le gouvernement de Luis Abinader a indéniablement intensifié les pratiques discriminatoires, l’incapacité de l’État haïtien à offrir des opportunités économiques, éducatives et sécuritaires à sa population est au cœur de cette tragédie humaine. La répression des Haïtiens aujourd’hui n’est que l’épilogue d’une histoire qui a commencé il y a plusieurs décennies, lorsque les régimes de Duvalier et Trujillo ont mis en place une forme d’exploitation transnationale des travailleurs haïtiens. Il est temps que les autorités haïtiennes prennent leurs responsabilités et offrent à leur peuple des conditions de vie décentes, afin que les Haïtiens ne soient plus contraints à un exil incertain.

Le phénomène de la migration haïtienne vers la République dominicaine ne peut être analysé sans aborder le rôle des dirigeants haïtiens, notamment ceux qui, dès leur élection – ou plutôt leur sélection selon un processus souvent décrié – se tournent immédiatement vers leur voisin de l’Est. Ce comportement traduit non seulement une forme de dépendance structurelle, mais aussi une absence flagrante de souveraineté nationale dans la gestion des affaires haïtiennes.

Prenons l’exemple de Michel Martelly et de Jovenel Moïse, deux figures emblématiques du régime PHTK. Avant même de prêter serment, ces présidents élus – entre guillemets, puisque les élections haïtiennes ont été marquées par des accusations de fraude et de manipulation – se sont rendus directement en République dominicaine. Cela pose des questions fondamentales sur la nature des relations entre Haïti et son voisin. Peut-on imaginer qu’un dirigeant dominicain nouvellement élu, avant ou après son investiture, se rende en Haïti pour solliciter un soutien ou négocier des accords ? La réponse est sans équivoque : non. Cela met en évidence une nette asymétrie dans les relations entre les deux pays et, plus encore, l’apparente subordination des élites politiques haïtiennes.

Cette situation révèle un malaise profond dans la gouvernance haïtienne, où les dirigeants semblent avant tout répondre à des injonctions extérieures. Les relations diplomatiques entre Haïti et la République dominicaine, bien qu’historiquement complexes, sont aujourd’hui marquées par une forme d’allégeance des dirigeants haïtiens à l’agenda dominicain ou à celui d’acteurs internationaux, plutôt qu’à la défense des intérêts de leurs propres citoyens. En effet, les multiples visites des présidents haïtiens en République dominicaine avant même d’assumer pleinement leurs fonctions s’inscrivent dans une logique de dépendance qui place les dirigeants haïtiens dans une position de faiblesse, plutôt que de partenaires égaux.

Cette posture est l’une des principales causes des abus dont souffrent les Haïtiens en République dominicaine. Les dirigeants haïtiens ne semblent pas œuvrer pour protéger leurs compatriotes vivant de l’autre côté de la frontière. En réalité, ils apparaissent comme des exécutants d’un agenda dicté par des forces extérieures, n’ayant aucune préoccupation pour les conditions de vie des milliers de migrants haïtiens. Cette absence de vision souveraine et cette soumission aux diktats étrangers ont pour conséquence directe l’aggravation de la situation des Haïtiens en République dominicaine. Au lieu de négocier des accords protecteurs pour leurs citoyens, les dirigeants haïtiens se contentent de maintenir des relations diplomatiques stériles, incapables d’exercer une quelconque pression sur leurs homologues dominicains.

Le problème ne réside pas uniquement dans les relations avec la République dominicaine, mais s’inscrit dans un cadre plus large d’incapacité à administrer le pays de manière autonome et efficace. Haïti, depuis des décennies, n’est ni géré ni administré de manière cohérente. Cette gestion erratique se traduit par une incapacité à garantir la sécurité, l’éducation ou même des conditions de vie décentes à sa population, forçant ainsi de nombreux Haïtiens à chercher refuge à l’étranger, souvent dans des conditions précaires.

De plus, la corruption et la collusion avec les acteurs criminels, y compris la connivence avec les gangs armés, renforcent cette gestion défaillante. Sous les régimes Martelly et Moïse, la question de la sécurité nationale a été compromise par des transactions douteuses, comme la disparition de cargaisons d’armes, et par l’alimentation de la violence des gangs. Cette situation a entraîné un exode massif des Haïtiens, dont certains se dirigent vers la République dominicaine. Ces mêmes personnes, fuyant l’insécurité orchestrée par les autorités haïtiennes, se retrouvent aujourd’hui piégées par une politique de refoulement implacable dans un pays qui les exploite et les rejette à la fois.

En définitive, les mauvais traitements infligés aux Haïtiens en République dominicaine ne sont pas seulement le fait d’un gouvernement étranger, mais résultent en grande partie de la négligence et de l’inaction des dirigeants haïtiens eux-mêmes. Au lieu de protéger leurs citoyens et de négocier des accords équitables, ces derniers sont avant tout soumis aux intérêts étrangers. Ce manque de leadership national et de vision souveraine est à l’origine des difficultés que rencontrent aujourd’hui les Haïtiens en République dominicaine. Tant que les dirigeants haïtiens continueront à servir des agendas extérieurs au lieu de s’occuper des besoins de leur propre peuple, la situation des migrants haïtiens ne fera qu’empirer. La question de la gestion du pays, ou plutôt de son absence de gestion, reste centrale pour comprendre cette crise humanitaire.

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