2 novembre 2025
Le débat autour de l’impression de la  Déclaration d’indépendance d’Haïti : une revue de la littérature 
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Le débat autour de l’impression de la  Déclaration d’indépendance d’Haïti : une revue de la littérature 

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Le débat autour de l’impression de la  Déclaration d’indépendance d’Haïti 

Une revue de la littérature 

Patrick Tardieu 

 décembre 2016

Que s’est-il passé au lendemain de la victoire de l’Armée  Indigène sur les troupes françaises le 18 novembre 1803 ?  Qu’est-il arrivé aux trois proclamations manuscrites qui ont  créé l’État haïtien le 1er janvier 1804 ? Cet essai retrace l’étude  de la Déclaration d’indépendance d’Haïti dans l’historiographie  afin d’éclairer les événements qui se sont déroulés entre la fin  novembre 1803 et la fin janvier 1804. Pourquoi LA  DÉCLARATION d’indépendance du 1er janvier 1804 est-elle  considérée comme le document officiel et non LA  PROCLAMATION du 29 novembre 18031 ? Comment le  document du 1er janvier a-t-il été créé, proclamé et rendu  public ? En analysant les différentes publications et les  coutumes d’impression de l’époque, nous pouvons mieux  comprendre le développement de l’État à ses débuts.  

Un document clé de cette période permet d’avoir un aperçu de  la philosophie fondamentale du nouvel État. L’Hymne  Haytiène est une chanson imprimée à la fin de 1803 ou au début  de 1804 et exécutée le 25 janvier 1804 : 

1 Publié dès le 5 janvier 1804. Aurora General Advertiser.  Philadelphia. Thursday January 5, 1804. # 4059, p. 2. Également The Star (London), February 6, 1804, # 683, p. 3 

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Sur l’air: Allons Enfans de la Patrie. 

Quoi tu te tais Peuple Indigène!  

Quand un Héros, par ses exploits,  

Vengeant ton nom, brisant ta chaîne,  

[…]  

Désormais Jacque est le Patron  

De qui repousse l’esclavage, 

Sous ce bon Père unis,  

A jamais réunis, 

Vivons, mourons, ses vrais Enfans. 

Libres, indépendans2.  

On chantait un peu après la bataille de Vertière en novembre  1803, est-ce la Marseillaise noire dont on parle depuis  longtemps ? Dans cette chanson, Jean-Jacques Dessalines est  dépeint comme étant le père de la nouvelle nation ; le peuple  ses enfants. La création d’une famille singulière unissait  symboliquement une population diverse.  

L’utilisation du terme indigène et de l’étiquette de « héros »  pour Dessalines donne une légitimité au projet national ; la terre  leur appartenait de droit et leur cause était justifiée. Ce qui est  le plus intéressant dans cette chanson, cependant, c’est  l’utilisation du terme droits. Les droits ne sont pas du tout  abordés dans la Déclaration d’indépendance d’Haïti du 1er  janvier 1804. L’utilisation des « droits » dans cette chanson,  cependant, doit être pris dans le contexte d’une structure  familiale hiérarchique, et le peuple est redevable à Dessalines  pour le privilège d’avoir ces droits.  

En novembre 1803, alors que les troupes de l’Armée indigène  chantent les louanges de Dessalines en héros national, l’armée  

2 The National Archives of the United Kingdom, (TNA) CO 137 /m)

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française évacue en débandade Saint-Domingue. Peu de temps  après, le 28 novembre, Dessalines et deux autres généraux  révolutionnaires, Henri Christophe et Augustin Clervaux,  publièrent une PROCLAMATION3 d’indépendance de Saint 

Domingue « Au nom du peuple noir et des hommes de couleur  de Saint-Domingue »4. Dés la première phrase on lit : «  L’indépendance de Saint-Domingue est proclamée. » Ce  document, cependant, n’a pas joué le même rôle dans l’histoire  nationale d’Haïti que le document du 1er janvier. Notons qu’à  l’époque une Proclamation est un acte légal. 

29 novembre 1803, il s’agit d’une proclamation de généraux en  campagne, notons que l’entête de Dessalines, Armée Indigène, n’est pas utilisé, et qu’il s’agit de (St-Domingue). La  Déclaration du 1er janvier quant à elle est d’un Acte d’un État  qui vient de se constituer et qui a un nouveau nom, Hayti, avec  entête ARMÉE INDIGÈNE C’est une différence énorme. 

29 novembre 1803 et/ou 1er janvier 1804 

Dans sa co1lection des lois haïtiennes, Jean-Baptiste Symphore  Linstant de Pradine a commencé par la Déclaration  d’indépendance du 1er janvier 1804. Sa tâche était de  rassembler toutes les lois d’Haïti, pas de Saint-Domingue, et  donc le premier document juridique, à son avis, était la  Déclaration d’indépendance. Cette décision a jeté les bases de  la mémoire collective en déclarant que le 1er janvier était le  commencement. Thomas Madiou et Beaubrun Ardouin, les  plus éminents historiens haïtiens du XIXe siècle, suivront la  même logique. « Cette collecte commence le 1er janvier 1804  

3 Selon le Aurora General Advertiser du 5 janvier 1804. « The  following proclamation of the independence of the island has been  published by the three principal military chief. » 

4 Marcus Rainsford, An Historical Account of the Black Empire of  Hayti, ed. Paul Youngquist and Grégory Pierrot (Durham, NC: Duke  University Press, 2013), 260.

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», a déclaré Pradine. « Les héros d’Haïti, vengeant la liberté brisée des enfants d’Afrique, ont choisi cette date pour que lorsque le soleil illumine le renouveau de l’année, il éclaire en même temps une ère nouvelle pour les Haïtiens et leurs premiers pas vers la civilisation. »5 Selon Pradine, les indépendantistes ont choisi le 1er janvier pour sa signification symbolique. Une nouvelle année, un nouveau départ. Mais si Pradine a reconnu le symbolisme du nouveau départ, il a également souligné que l’événement était un rappel d’un passé tragique et de la nécessité de se souvenir des sacrifices. « C’était une façon sublime, affirmait Pradine, de graver dans le cœur de leurs enfants le souvenir des luttes qu’ils ont endurées et des sacrifices qu’ils ont faits pour leur donner une patrie. »6 

L’accent mis par Pradine sur la Déclaration d’indépendance  officielle du 1er janvier était également une tentative de rejeter  ce qu’il considérait comme des rumeurs d’une déclaration  d’indépendance antérieure le 29 novembre 1803 de Fort 

Dauphin (aujourd’hui Fort-Liberté). Il a qualifié cet autre  document présumé de « proclamation » afin de le différencier  de l’Acte de l’Indépendance. Cette proclamation, a-t-il affirmé,  est apparue dans les histoires d’Haïti, en particulier celles  écrites par des auteurs anglophones. On peut se demander,  quelles étaient les motivations des historiens anglophones des  deux régions de l’Atlantique pour donner foi à la proclamation  du 29 novembre 1803 ?  

Pradine a rejeté ces rumeurs pour deux raisons principales :  premièrement, que les auteurs du prétendu document, Jean Jacques Dessalines, Henry Christophe et Augustin Clervaux,  

5 « Cette collection commence au premier janvier 1804, » M. Linstant  Pradine, Recueil général des lois et actes du gouvernement d’Haïti:  depuis la proclamation de son indépendance jusqu’à nos jours …  (Paris: A. Durand, 1886), 1: x. 

6 Linstant Pradine, Recueil général, 1: x.

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étaient connus pour avoir été au Cap Français (aujourd’hui Cap  Haïtien) ce jour-là, et non à Fort-Dauphin. Deuxièmement, il  soutenait qu’  » Il n’est pas raisonnable d’admettre que ces chefs  laissassent la capitale de l’ile pour aller dans une ville  secondaire, qui en est éloignée de 12 lieues, publier un acte de  cette importance ».7. À son avis, la proclamation du 29  novembre n’avait donc que peu d’importance pour la fondation  de la nouvelle nation. La date manquait d’importance  symbolique et la logistique de l’événement était au mieux  obscure. 

Pradine avait tout à fait raison de commencer son recueil des  lois et actes d’Haïti le 1er janvier 1804, car c’est bien cette date  qui marquait la première loi du nouvel État : « Fait aux  Gonaïves, ce 1er janvier et la 1ère année de l’indépendance  d’Haïti. »8 En effet, c’était la première fois que le nom « Hayti »  était utilisé dans les proclamations officielles9. Pradine a  conclu qu’il n’était pas nécessaire d’inclure les lois qui ont  précédé la Déclaration d’indépendance parce qu’il voulait  suivre l’exemple de la datation de la proclamation du 1er  janvier. 10 

Plus récemment, cependant, la question a été abordée par une  nouvelle génération d’historiens haïtiens qui voient la validité  de la rumeur de la proclamation de novembre. Au milieu du  XXe siècle, l’historien Henock Trouillot revient sur cette  question dans son chapitre sur Thomas Madiou et  l’historiographie d’Haïti. Trouillot a relaté la déclaration de  

7 Linstant Pradine, Recueil general, 1: ix. 

8 « Fait aux Gonaives, ce 1er Janvier, 1804 et le 1er de l’indépendance d’Haïti. » 

9 Pour plus d’information voir David Patrick Geggus, « The Naming  of Haiti, » in Haitian Revolutionary Studies (Bloomington: Indiana  University Press, 2002). 

10 Linstant de Pradine, Recueil general, xi.

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Madiou selon laquelle le document était une fiction, mais il a  également souligné que d’autres historiens, comme Pauléus  Sannon, n’étaient pas d’accord11. Trouillot, cependant, a fourni  des preuves convaincantes à l’appui de la thèse selon laquelle  un document du 29 novembre 1803 existait bel et bien parce  que « Après le 29 novembre et avant la proclamation adressée à  la nouvelle nation, les généraux indigènes posèrent des actes  qui portent: an premier de l’indépendance. »12 L’historien  Gérard Mentor Laurent, auteur de Six études sur Dessalines,  montra quelques-uns de ces documents à Trouillot. En fin de  compte, Trouillot était d’accord avec l’évaluation de Laurent  selon laquelle « cela prouve au moins que les indigènes se  considéraient comme étant sous une nouvelle administration  »13

Comment ne pas être d’accord avec l’historien et ancien  présidente d’Haïti, Leslie Manigat, qui soutient qu’il existe des  preuves indiscutables à l’appui de l’existence de la proclamation  du 29 novembre, malgré le fait qu’il n’existe aucune copie  originale ou officielle ?  » Je ne comprends pas, » Manigat  argumente,  » étant donné que ce texte fondateur a été publié dès  le 4 janvier 1804 à l’étranger dans la presse. »14 Manigat critique  

11 Catts Pressoir, Ernst Trouillot, and Henock Trouillot.  Historiographie d’Hafti. Pan American Institute of Geography and  History, No. 168 (Mexico: Instituto Panamericano de Geografia e  Historia, 1953). 

12 Henock Trouillot, « Historiens qui ont surtout consulte la tradition orale: Thomas Madiou, » in Historiographie d’Haïti, ed. Trouillot,  Pressoir, and Trouillot, 151. 

13 Trouillot, « Historiens, » in Historiographie d’Haiti, ed. Trouillot,  Pressoir, and Trouillot, 151. 

14 Leslie F. Manigat, « This Year, 2003, Is the True  Bicentennial/L’année 1803 en quatre grands faits marquants: brèves  réflexions historiques de circonstance d’un politologue, » Haiti  Democracy Project, 

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l’exclusion du document du récent « Calendrier historique ».15  Le contenu du document, selon Manigat, fournit également des  preuves claires qu’il devrait être considéré comme la  déclaration officielle d’indépendance du pays ; Le document  commence ainsi : « L’indépendance de Saint-Domingue est  proclamée. »16 

Manigat note également que les deux documents diffèrent  considérablement dans le ton et souligne que « II s’agissait d’un  projet politique différent, significativement changé à peine un  mois plus tard. ».17 Il suggère que la proclamation du 29  novembre aurait pu être adaptée à la « consommation étrangère  » puisqu’elle a été imprimée à Philadelphie, le site de  l’indépendance américaine. Cette conclusion ne semble  cependant pas convaincante puisque l’on sait que les deux  documents ont largement circulé dans les journaux d’outre Atlantique. 

Les recherches de l’historien Michel Hector permettent de  conclure que le document du 29 novembre a bel et bien existé,  mais il souligne l’importance des aspects cérémoniels de la  proclamation de l’indépendance de Haïti le 1er janvier 1804.  Hector affirme que les célébrations de la fête de l’indépendance  ont commencé par un discours en créole de Dessalines, le  général en chef de l’armée. Ce discours, cependant, n’a pas  encore été retrouvé dans les archives. « On en sait seulement, »  

Pour en savoir plus sur l’impression du 29 novembre 1803, proclamation dans les journaux Britannique voir David Geggus’s  chapter in this volume. See also Deborah Jenson, « Dessalines’s  American Proclamations of the Haitian Independence, » journal of  Haitian Studies 15 (2009): 72-102. 

15 Manigat, « L’année 1803. » 

16 « L’indépendance de St Domingue est proclamée. » Manigat,  « L’annee 1803. » 

17 Manigat, « L’année 1803-« 

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note Hector, « qu’il s’agissait d’une évocation historique de la  barbarie vécue par les flots de captifs sous le régime colonial et  plus particulièrement durant la dernière guerre contre le  rétablissement de l’esclavage et pour l’Indépendance. »18 Louis  Félix Boisrond-Tonnerre, le secrétaire chargé par Dessalines de  rédiger le document, donne alors lecture de la Déclaration  officielle d’indépendance. Hector décrit les trois (3) textes  comme suit : proclamation du général en chef au peuple haïtien  ; le « processus-verbal » de la proclamation de l’indépendance  d’Haïti (aussi connu sous le nom d’Acte de l’indépendance) ; et  la nomination du général en chef au gouvernement d’Haïti.19  Les détails qui entourent la section centrale (le procès-verbal  ou l’acte) sont cependant inconnus. S’agit-il d’une tradition  orale ou d’un texte écrit ? La preuve donne à penser que le  document du 29 novembre a été rédigé, mais la question n’est  pas aussi claire en ce qui concerne le document du 1er janvier,  car l’accent est mis sur la cérémonie publique entourant sa  proclamation. Donc pas de faste le 29 novembre. 

Malgré ce nouvel intérêt à confirmer l’existence de la  Déclaration d’indépendance du 29 novembre et à lui assurer la  place qui lui revient dans la chronologie de l’histoire d’Haïti,  aucun exemplaire original de la proclamation n’a encore été  retrouvé (en français ou en créole). La seule preuve de son  existence se trouve dans des journaux étrangers aux États-Unis  et dans l’Empire britannique (en anglais). Marcus Rainsford, le  chroniqueur britannique de la Révolution haïtienne, a  

18 Michel Hector, « Actes de l’Indépendance, » in Dictionnaire  historique de la révolution haïtienne, ed. Claude Moise (Montreal:  Les éditions Images/ Cidihca, 2003), 23.  

Hector s’appuie sur le récit des événements de Thomas Madiou,  Histoire d’Haïti (Port-au-Prince : Imprimerie Joseph Courtois, 1843),  p. 15. 

19 Tiré de Claude Moise, Dictionnaire historique de la révolution  haïtienne, 1789-1804 (Montreal: Les éditions lmages/Cidihca, 2003).

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également imprimé le texte dans An Historical Account of the  Black Empire of Hayti (1805).20 

L’imprimerie à l’ère de la Déclaration d’Haïti  d’indépendance 

Le gouvernement haïtien publiait constamment des  proclamations et cela n’a jamais cessé, il y eu des irrégularités  dans les publications tant au 19è qu’au 20è siècle. Les  documents comprenaient souvent des instructions spécifiques  pour publication à l’imprimerie du gouvernement et à expédier  à l’étranger. Par exemple:  

a) La proclamation de Dessalines aux citoyens de la ville du  Cap-Français, du 19 novembre 1803 se termine par la note  suivante : « Permis d’imprimer et d’afficher ».  

b) De même, la proclamation du Conseil des Notables du Cap Français du 5 décembre 1803, se termine par : « Fait pour être  publié, imprimé et affiché au Cap, le 13 frimaire an XII (5  décembre 1803) »  

c) Au début de 1804, à partir de la loi n° 5, nous voyons les  mêmes instructions : « Ordonne aux principaux administrateurs  des départements de veiller à l’exécution du présent décret, qui  sera lu, publié et affiché partout où il sera nécessaire. » 21 

20 Marcus Rainsford, An Historical Account of the Black Empire of Hayti,  ed. Paul Youngquist and Gregory Pierrot (1805; repr. Durham, NC: Duke  University Press, 2013). 21 « Enjoint aux administrateurs principaux des départements de tenir  la main à l’exécution du présent arrêté, qui sera lu, publié et affiché partout où besoin sera. » Linstant Pradine, Recueil général, xii.

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d) Enfin, la loi n° 6 se lit comme suit : « Art. 2. Le présent décret  sera imprimé, publié et affiché ; et une copie sera  immédiatement envoyée aux États-Unis.22 

e) C’est à peu près le même langage que l’on retrouve dans le  texte du publié le 5 janvier aux États-Unis  

« The following proclamation of the independence of the island  has been published by the three principal military chief. » = « La  proclamation suivante de l’indépendance de l’île a été publiée  par les trois principaux chefs militaires »23 

Ce n’est qu’en tenant compte d’autres tirages de l’époque que  l’on peut discuter de la question de la version manuscrite par  rapport à la version imprimée de l’Acte de l’indépendance du  1er janvier 1804.  

Mais dès les premiers jours de l’existence de l’État Hayti, un  document officiel est celui qui porte la mention (imprimé,  publié et affiché) le dernier terme pour le rendre public. En  cela il suivait les normes de l’ancien régime. 

En février 2010, alors qu’elle travaillait sur sa thèse de doctorat,  Julia Gaffield a découvert une version imprimée officielle des  trois textes qui composent la Déclaration d’indépendance  d’Haïti. Il s’agissait d’un pamphlet de huit pages (in-quarto).  Gaffield l’a localisé aux Archives nationales du Royaume-Uni,  et il ne semble pas en avoir de copie en Haïti. En deux  occasions au 20è siècle les gouvernements ont mandaté des  historiens retrouver le texte original de la Déclaration de  l’Indépendance. Les chercheurs pour le centenaire et le  sesquicentenaire de l’indépendance n’ont pas été en mesure de  

22 « Art. 2. Le présent décret sera imprimé, publié et affiché; et copie  en sera immédiatement envoyée au congrès des Etats-Unis. » 23 Aurora General Advertiser, op. cit

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trouver une copie officielle à exposer pour les célébrations.24.  Sans succès. 

En février 2011, Gaffield a découvert une deuxième version  imprimée, de la même période, cette fois en grand format  (Affiche). 

Pendant plus d’un siècle, les historiens haïtiens n’ont pas été en  mesure de trouver une copie officielle de la Déclaration  d’indépendance d’Haïti (imprimée ou manuscrite) malgré le fait  que le document ait été largement diffusé en Haïti et à  l’étranger. Beaubrun Ardouin décrit ainsi le processus entourant  ces 3 textes fondateurs de l’État Haytiens : tant la proclamation,  que la publication ainsi que la diffusion des déclarations : «  Néanmoins, les actes publiés aux Gonaïves, puis imprimés,  furent envoyés à toutes les autorités secondaires, et  occasionnèrent des réjouissances publiques : l’armée et le  peuple, dans tous les départements de l’ancienne partie  française de l’île, applaudirent aux actions de leurs chefs. »25  L’annonce de l’indépendance d’Haïti ne pouvait être importante  que si la nouvelle avait été diffusée en Haïti. « L’indépendance  

24 Journal Le Soir, 1903, no. 212 and 215; selon Edmond Mangones,  31 Décembre 1952, La Commission des Sciences Sociales du  Tricinquantenaire de l’Indépendance, collection de la Bibliothèque Haïtienne des Spiritains « Ce n’est pas seulement l’Acte de  l’indépendance qui est introuvable; ce sont les trois Actes qui font la  synthèse de notre Pacte Fondamental l’Acte de l’Indépendance seul  n’aurait pas de valeur sans la glorification à laquelle le « Peuple  d’Haïti » fut conviée et sans le serment solennel de fidélité qui conféré 

la majesté à l’illustre forgeron de la Nation Haïtienne. » 25 « Quoiqu’il en soit, les actes publies aux Gonaïves et imprimes tout  de suite, furent expédiés à toutes les autorités secondaires, et  occasionnèrent des réjouissances publiques: l’armée et le peuple, dans  tous les départements de l’ancienne partie française de l’ile,  applaudirent aux résolutions des chefs. »

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nationale a donc été ratifiée, conclut Ardouin, consacrée par  l’accord et l’union de tous les citoyens et du nouvel État. »26 

Remarquez le langage spécifique utilisé par Ardouin : actes  publiés aux Gonaïves d’une part, et imprimés de suite d’autre  part. Imprimé où ? Par qui ? Quand? Manuscrit et/ou copie  imprimée ? Le gouvernement a envoyé des copies à toutes les  autorités de l’époque. Le récit de Thomas Madiou, cependant,  est moins descriptif « Dessalines ordonna que l’Acte de  l’indépendance soit publié dans tout l’État haïtien – rapporta-t il – ainsi que la proclamation qu’il commanda à Boisrond 

Tonnerre et sa nomination au poste de gouverneur général. » 27 Publier fait-il référence à une lecture orale ou à un texte écrit  et imprimé? Le récit de Madiou souligne également  l’importance de la diffusion du document sur l’ensemble du  territoire. 

Dans une étude préliminaire sur l’histoire de l’imprimerie à  Saint-Domingue et en Haïti, publiée dans la Revue de la  Société Haïtienne d’Histoire et de Géographie, je soutiens que  les presses étaient au service du gouvernement.28 Ces presses  arrivées à Saint Domingue en 1764, accompagnaient le régime  esclavagiste et de fait devenaient un mécanisme de répression  méthodique sous couvert de science, et un outil de défense des  intérêts des structures de pouvoir locales. Très vite, pendant la  

26 L’indépendance nationale fut ainsi ratifiée, » Ardouin conclues, « consacrée  par !’accord et !’union de tous les citoyens du nouvel État. » Pradine, Recueil  général, 6:34. 

27 « Dessalines fit publier dans tout l’État d’Haïti l’acte de l’Indépendance, »  selon le rapport, « sa proclamation au peuple qu’avait rédigée Boisrond Tonnere, et sa nomination à la dignité de Gouverneur General. » Pradine,  Recueil général, 2:119. 

28 Patrick D. Tardieu, « Pierre Roux et Lémery, imprimeurs de Saint  Domingue à Haïti, » Revue de la Société Haïtienne d’Histoire et de  Geographic d’Haïti 79, no. 218 (2004): 1-30.

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révolution, cependant, « la presse devient une arme puissante  entre les mains des nouveaux libres ».29 Jean Fouchard a  également défendu l’importance des presses pendant la  révolution. Il soutient que les dirigeants de la révolution n’ont  jamais détruit les presses parce qu’elles étaient trop  importantes.30 

Avec l’indépendance, les pères fondateurs ont continué à faire  bon usage des presses à imprimer. L’imprimeur Pierre Roux,  imprimeur du gouvernement de 1791 à 1815, habite le Cap  Français/Cap Haïtien. Le 30 ou le 31 décembre 1803,  Dessalines commande à Boisrond-Tonnerre un texte pour  publication immédiate sur les presses du gouvernement.31 

L’original manuscrit de la Déclaration d’indépendance a-t-il  servi de seule source pour la copie imprimée ? À ce jour, nous  n’avons pas trouvé de preuve de l’existence d’une imprimerie  aux Gonaïves, lieu de l’adresse de la déclaration, avant 1804. 

Ouvrons une parenthèse ici. Le lieu d’impression se confondait  avec l’adresse de l’édition. Le phénomène des fausses adresses  se pratiquait en Europe par exemple, pour fuir la censure  étatique et religieuse. Rien ne dit que cela n’arrivait pas à  Saint-Domingue et Hayti. En effet, les Mémoires pour servir à  

29 « [E]lle devint une arme puissante aux mains des nouveaux libres. » Tardieu,  « Pierre Roux et Lemery, » 6. 

30 Tardieu, « Pierre Roux et Lémery, » 6;  

voir aussi Jean Fouchard. Les marrons de la liberté (Port-au-Prince:  Henri Deschamps), 1988; Jean Fouchard, Les marrons du syllabaire (Port au-Prince: Henri Deschamps), 1988; Jean Fouchard, Plaisirs de St. Domingue (Port-au-Prince: Henri Deschamps), 1988. 

31 Pour en savoir plus sur la question du régimes des privilèges, voir  Raymond Blanchot, L’art du livre à l’imprimerie nationale (Paris:  Bibliothèque Nationale, 1951), 11, colo.1.

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l’histoire d’Hayti32 de Boisrond-Tonnere, porte la mention « 1)  imprimé A Dessalines ; 2) sous les presses de L’Imprimerie  Centrale du Gouvernement », la capitale se trouvait à  Marchand-Dessalines, alors, transportait-on les presses à tout  moment ? 

Au cours de cette période, le document imprimé était la preuve  sanctionnant les Actes des gouvernements. C’est ainsi que de  nouvelles lois ont été publiées et portées à la connaissance des  populations locales et autochtones. Cela soulève alors la  question suivante : était-il nécessaire de conserver la version  manuscrite de ces trois textes fondateurs, après que le texte  avait été imprimé par l’imprimerie gouvernementale et diffusé  dans tout le pays? Quoi qu’il en soit, nous savons sans l’ombre  d’un doute que les trois textes ont été rédigés aux Gonaïves. Ils  furent ensuite imprimés en quelques semaines à Port-au-Prince  ; les documents imprimés portent la mention « AU PORT-AU PRINCE, De l’imprimerie du GOUVERNEMENT ». 

Il s’agit en effet d’un document imprimé qu’Edward Corbet, en  mission pour l’Empire britannique, remet au gouverneur de la  Jamaïque, le lieutenant-gouverneur George Nugent. Gaffield,  en découvrant ce document, découvrit non seulement l’une des  premières impressions des trois textes fondateurs de la  première république noire, mais aussi les premiers documents  relatifs à l’histoire de la diplomatie d’Haïti.33. Ardouin  mentionne ces documents dans son Histoire. Afin d’obtenir la  reconnaissance de l’indépendance d’Haïti, Dessalines  entreprend de grandes mesures : non seulement il ordonne  l’impression de tous les textes (lois, décrets et proclamations),  

32 Boisrond-Tonnerre. Mémoires pour servir à l’histoire d’Hayti. De  l’Imprimerie Centrale du Gouvernement : A Dessalines, 1804 33 Julia Gaffield, « Haiti and Jamaica in the Remaking of the Early  Nineteenth Century Atlantic World, » William and Mary Quarterly  69, no. 3 (2012): 583-614.

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mais il tente aussi de faire connaître la volonté du peuple  souverain aux nations du monde. Il a ordonné que des copies  de certains documents soient envoyées immédiatement au  Congrès des États-Unis : 

DÉCRET du gouverneur général qui offre une récompense aux  capitaines de navires américains qui ramènent les Haïtiens dans  leur patrie.  

L’art. 2. Ce décret sera imprimé, publié et affiché ; et une copie  sera immédiatement envoyée au Congrès américain.34 

On voit bien une volonté manifeste d’imprimer, dès le début,  les textes officiels du nouveau gouvernement. Aujourd’hui, en  plus de la publication au Journal Officiel, le gouvernement  utilise également la radio et la télévision. Le décret n° 6 de la  compilation de Pradine est un document daté du 14 janvier  1804, et son texte comprend des instructions pour imprimer ; Il  faut croire que les trois textes fondateurs ont été imprimés bien  avant le 14 janvier.35 

Selon l’historien haïtien Max Bissainthe, auteur du  Dictionnaire de bibliographie haïtienne, entre 1837 et 1839,  Beaubrun Aroudin a écrit la majorité des articles de L’Union qui se rapportent à l’histoire d’Haïti. Le numéro du 4 août 1839  du journal ajoute un élément de preuve clé au débat36. Dans  cet article, Ardouin, prétend que Dessalines s’est plaint à son  conseil des retards créés par (Le Vieux) Charéron, un chef métis  éduqué en France que Dessalines a chargé de rédiger une  

34 Aurora General Advertiser, Philadelphie, 17 mars 1804 (en anglais  et en français) 

35 Pradine, Recueil général, 7-8. 

36 « Anecdotes historiques, » L’Union: Recueil commercial et littéraire,  à Port-au-Prince, du 4 August 1839 #51,  http://gallica.bnffr/ark:/12148/bpt6k580941gjfi.image (18 Février 2013).

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déclaration d’indépendance. L’article relate une prétendue  interaction entre Dessalines et Boisrond-Tonnerre au cours de  laquelle ils attendaient tous deux avec impatience que Charéron  produise une déclaration d’indépendance. Dessalines voulait  déclarer l’indépendance le premier jour de la nouvelle année :  « Le moment ne pouvait pas être mieux choisi. »37 

Boisrond-Tonnerre s’est plaint du ton de la proclamation de  Charéron, arguant : « Il veut créer quelque chose de calculé,  écrire un travail de réflexion sans émotion. »38 Ce qu’il fallait,  affirmait-il, « Dans la conjoncture présente, quelque chose de  spontané, de terrible, une proclamation foudroyante. ».39 Pour  mener à bien cette tâche importante et orageuse, l’article  rapporte que Boisrond-Tonnerre déclara que « II faut pour écrire  un acte semblable, se servir de la baïonnette pour plume, du  corps des blancs pour papier et leur sang pour encre. » 40. Ces  paroles convainquirent Dessalines que Boisrond-Tonnerre était  l’homme de la situation. 

D’après cet article de L’Union, Dessalines, dans la nuit du 30  au 31 décembre [sic], voulut donc un texte pour publication le  1er janvier 1804, afin de proclamer l’Indépendance d’Haïti avec  la splendeur et la formalité que méritait l’occasion. Il voulait  donner à ce document tout son poids officiel en faisant  imprimer le texte sur les presses de l’imprimerie du  gouvernement. Quelle fut donc la tâche de Boisrond-Tonnerre  dans la nuit du 31 décembre 1803 ? D’écrire une PROCLAMATION manuscrite, ou de faire imprimer de suite?  Chronologiquement, la Proclamation est faite aux Gonaïves et  

37 Anecdotes historiques, ibidem 

38 Anecdotes historiques, ibidem 

39 Anecdotes historiques, ibidem 

40 Anecdotes historiques, ibidem

[17] 

imprimé, quand ? à l’imprimerie du Gouvernement à Port-au Prince.  

Lorsque Gaffield est retournée à Londres en février 2011, elle  a découvert une impression de la Déclaration d’indépendance  de 1804. Ce format était habituel à l’époque, car le document  grand format d’une seule page pouvait être affiché dans les  espaces publics pour que tout le monde puisse le voir. La  version de la Déclaration d’Indépendance d’Haïti avait été  acquise par l’un des officiers supérieurs de l’Amirauté  britannique en Jamaïque, John Thomas Duckworth, qui envoya  ensuite le document à ses supérieurs à Londres41

Documents haïtiens dans les archives étrangères.  

Les Archives nationales du Royaume-Uni à Londres  conservent de nombreux documents de cette époque sur l’histoire haïtienne. Avec les deux exemplaires de la  Déclaration d’indépendance, les archives possèdent le seul  exemplaire connu de l’Hymne Haytiene (en annexe). Ce  document, ainsi qu’une copie imprimée du journal de campagne  de Dessalines, semble provenir du même imprimeur que la  version in quarto de la Déclaration d’indépendance. Quelles  autres surprises trouverons-nous dans les archives de Londres  ?  

Existe-t-il d’autres copies imprimées de la Déclaration  d’indépendance qui n’ont pas encore été retrouvées, enfouies  dans les archives ou au fond d’une bibliothèque, en Haïti ou  ailleurs ? Rien n’est impossible. Une thèse récente soutenue à  Paris en 2010 et publiée en 2013 nous oblige à chercher des  sources alternatives. Alejandro E. G6mez nous emmène au  Venezuela et à Gran Colombie et nous permet de comprendre  l’influence de la Révolution haïtienne sur les anciennes  

41 TNA. ADM 1/256 and MFQ 1/184.

[18] 

colonies hispano-américaines.42 Ses recherches éclairent la  mémoire collective et contribuent à notre compréhension de  l’histoire officielle entre Simon Bolivar et Alexandre Pétion et  les promesses de Bolivar de libérer les esclaves en Amérique  latine. 

Haïti était d’un grand intérêt pour l’Empire espagnol et ses  colonies qui allaient bientôt prendre leur indépendance. De  plus, les connexions sont parfois beaucoup plus évidentes :  Dessalines et Pétion apportèrent tous deux leur aide aux  mouvements indépendantistes vénézuéliens (à Francisco de  Miranda en 1806 et à Bolivar en 1816). On ne peut donc pas  faire une croix sur les archives espagnoles et latino-américaines  simplement parce qu’Haïti a été boudée lors du Congrès de  Panama de 1826 (organisé par Bolivar). Comme le suggèrent  les recherches de Gomez, les dirigeants de l’Amérique latine se  sont tenus informés des événements en Haïti.  

En avril 1804, le gouverneur du Venezuela reçoit une copie du  discours de Dessalines, prononcé lors de LA DÉCLARATION  d’indépendance du nouvel État d’Haïti, du 1er janvier 1804.  Dans une lettre adressée au gouvernement métropolitain, il  exprime sa frustration de ne pouvoir obtenir plus  d’informations sur « la malheureuse colonie de Saint 

Domingue et son inévitable retour à la monstrueuse domination  des Noirs 43. Rien n’indique qu’il n’ait pas réussi à en obtenir  une copie de l’Acte. 

42 Alejandro E. Gomez, Le spectre de la révolution noire. L’impact de  la révolution haïtienne dans le monde atlantique, 1790-1886  (Rennes: Presses Universitaires de Rennes, 2013). 

43 « Plus tard, en avril 1804, le gouverneur du Venezuela se procura,  grâce à un particulier, une copie du discours du 1er janvier de  Dessalines, prononce à l’occasion de la déclaration d’Indépendance du  nouvel État d’Haïti. Dans une communication qu’il envoie au  gouvernement central, il exprime sa frustration de ne pas avoir été en 

[19] 

Conclusion  

Le 7 avril 1801, Toussaint Louverture défie l’Europe en dotant  la nation naissante d’Haïti d’une constitution souveraine.  Napoléon, au faîte de sa gloire, réagit pour défendre l’Occident  chrétien en rétablissant l’esclavage aux Antilles. Le  révolutionnaire trahi est capturé et déporté, le 7 juin 1802, mais  ses principaux généraux réorganisent la résistance. Au congrès  du 18 mai 1803, l’armée s’unit et crée un nouveau drapeau; les  généraux jurent de se battre (liberté ou la mort) et d’expulser l’armée française de l’île. Les anciens esclaves vont dès lors se  confronter aux puissances atlantiques et à une économie du  XIXe siècle alimentée par la traite transatlantique et des  économies esclavagistes. Néanmoins, ils proclamèrent l’indépendance le 29 novembre 1803 et ont consacré  l’événement dans un acte solennel le 1er janvier 1804, en  déclarant, à la face du monde, la guerre à l’esclavage sur le  territoire de l’île. Les défenseurs de la traite transatlantique et  de l’esclavage des noirs ont tout fait pour isoler le nouveau  pays. Haïti a été mis en quarantaine et, partout dans les  Amériques, le syndrome de « Hayti » s’est installé. Pendant  plus de vingt ans, nos dirigeants n’ont pas failli. Ils ont proliféré  et soutenu le désir de liberté du peuple. Haïti, seul, a osé aider  Miranda et Bolivar en fournissant des hommes et des armes  pour aider à libérer la Nouvelle Grenade devenu la Grande  Colombie. La partie orientale de l’île d’Hispaniola – sous le  contrôle de la France jusqu’en 1809, date à laquelle elle est  

mesure de se procurer davantage d’informations sur la malheureuse  colonie de Saint-Domingue et la fatalité d’être redevenue l’objet de la  monstrueuse domination des Noirs. » Alejandro E. Gomez, Le  syndrome de Saint-Domingue: perceptions et représentations de la  révolution haïtienne dans le monde atlantique, 1790-1886. (Thèse de  doctorat, École des Hautes Études en Sciences Sociales, 2010), 70;  « Le capitaine général de Caracas au ministre d’État (Caracas,  24/04/1804), » Archivo General de Indias, Estado, 68, n°12.

[20] 

revenue sous contrôle espagnol – a ensuite été incorporée à  Haïti en 1822 et l’esclavage aboli pour toujours, par le Président  Jean Pierre Boyer, le 8 février 1822. 

Pourrions-nous demander aux bossales, nouvellement arrivées  d’Afrique, et aux créoles affranchis d’avoir un but commun dans  la construction d’une nouvelle nation, d’un pays ou d’un État ?  L’abolition de l’esclavage a suffi à cerner la nouvelle nation, les  enfants d’Haïti et le reste du monde ont vu Haïti comme tel.

[21] 

Hymne Haytiène 

[Nous avons gardé, l’orthographe du manuscript original.] Sur l’air: Allons Enfans de la Patrie. 

Quoi tu te tais Peuple Indigène!  

Quand un Héros, par ses exploits,  

Vengeant ton nom, brisant ta chaîne,  

A jamais assure tes droits?  

Honneur à sa valeur guerrière!  

Gloire à tes efforts triomphants!  

Offrons-lui nos coeurs, notre encens;  

Chantons d’une voix mâle et fière  

Sous ce bon Père unis,  

A jamais réunis,  

Vivons, mourons, ses vrais Enfans.  

Libres, indépendans.  

De nos droits ennemis perfides,  

Du Nouveau-Monde les tyrans,  

Déjà les Français homicides,  

Du Soleil frappaient les Enfans;  

0 ! du Ciel éclatans prodiges!  

Pour lever nos fronts abattus,  

Jacque paraît, ils ne sont plus,  

Et l’on en cherche les vestiges.  

Sous ce bon Père unis,  

A jamais réunis,  

Vivons, mourons, ses vrais Enfans.  

Libres, indépendans.  

En mer, en plaine, et sur nos cîmes  

Écoutez ce bruit, ces éclats;  

Amis, c’est le cri des victimes 

Dénonçant leurs noirs attentats  

Du sang d’une horde cruelle,  

Oui, quand vous arrosez leurs os,  

Elles font entendre ces mots  

Du sein de la nuit éternelle, 

[22] 

Sous ce bon Père unis,  

A jamais réunis,  

Vivons, mourons, ses vrais Enfans. 

Libres, indépendans.  

Quel est cet indigène Insulaire,  

Ce lâche coeur, ce vil soldat  

Qui, désormais sous sa bannière  

N’affronterait point le trépas?  

Qu’il parle; au défaut du Tonnerre,  

Pour expier cet attentat,  

Nos bras levés contre l’ingrat,  

Sauront le réduire en poussière.  

Sous ce bon Père unis,  

A jamais réunis,  

Vivons, mourons, ses vrais Enfans.  

Libres, indépendans.  

Amis, que la reconnaissance  

Consacre ses faits, sa valeur;  

Nous servirons, sous sa puissance,  

Le ciel, la justice et l’honneur:  

Que nos enfans, dès le bas âge,  

Aiment à bégayer son nom;  

Désormais Jacque est le Patron  

De qui repousse l’esclavage,  

Sous ce bon Père unis,  

A jamais réunis,  

Vivons, mourons, ses vrais Enfans. 

Libres, indépendans.  

CH …  

FIN 

The National Archives of the United Kingdom, (TNA) CO 137 /m)

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