La mythologie comme protohistoire spécifique des sociétés.

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Par Camille Loty Malebranche

  • Le mythe n’est pas une factualité de l’histoire mais une projection la déterminant. Il augure de la configuration mentale et comportementale des sociétés dans la manifestation métaphysique, politique, morale de leur existence identitaire. C’est donc une part du spécifique de l’essence sociale.

Les mythes, les grands mythes fondateurs, s’ils ne sont pas des faits historiques mais des socles de l’imaginaire projetant les sociétés vers leur propre devenir, forment un fondement du projet existentiel qui fait l’histoire dont ils sont au principe inspirateur, étant vision de départ du soi collectif tel que conçu, pressenti, projeté et peu à peu façonné par les groupes ancestraux et les élites des sociétés. Les mythes sont la fiction dynamique qui détermine l’action par laquelle la société s’érige. Une fiction qui se veut respectivement canevas idéel, bilan imaginaire du vécu ou synthèse de la projection collective du soi social. Là, le mythe est antérieur à l’histoire en tant que celle-ci est à la fois logos et praxis institutionnels de la direction imprimée par les élites à leur société, alors que le mythe constitue cette eidétique qui réfère à la substance de la conception de soi de toute société humaine que met en branle l’histoire.

Les mythes fondateurs sont des signatures que s’inventent les sociétés humaines pour signifier leur condition collective tout en interprétant la factualité de l’existence humaine.

L’identité, ce par quoi l’homme ou la société est l’autre de tout ressemblant et dissemblant, tient pour les sociétés humaines à l’élaboration de leur mythologie. L’on comprend alors l’importance d’un mythe fondateur d’une société.

Le mythe est l’avant-scène de l’histoire en tant que la mythologie fondatrice des peuples portent en condensé leur expression imaginaire de l’ipséité collective selon leur perception du monde et leur conception de leur conception quant au rapport à entretenir intérieurement entre eux mais aussi extérieurement avec autrui et avec l’univers. C’est pourquoi, j’aime à dire que la mythologie fondatrice est l’Adn identitaire des sociétés du point de vue de leur essence en tant qu’elles se définissent elles-mêmes à travers cette chose fondamentale qu’est l’identité. Tout le chaos de sang par la guerre ou la conquête que les sociétés en leurs débordements identitaires ont déclenché à travers leur temps et espace occupé en leur durée existentielle, est la preuve de la force bien active des mythes. Force destructrice des mythes identitaires où chaque société se cloisonne dans sa fiction autodéfinissante comme pour prêter un statut actif à sa subjectivité dans l’extériorisation de son essence perçue par où elle se prend pour le centre du monde selon l’ego collectif défini en ses mythes fondateurs. C’est aussi à partir de l’identité mythologique que la société opère à travers l’histoire le tri entre semblable et dissemblable pour façonner des rapports avec l’autre. Là, se comprennent aussi les racines insistantes de l’ethnicité et de l’ethnocentrisme comme celles du sociocentrisme.

Les mythes fondateurs proches ou éloignés nous mettent en présence des rapports anthropologiques complexes entre sociétés originairement contiguës et ceux entre celles qui ne se reconnaissent rien de commun sinon qu’elles sont humaines partageant la même espèce.  

Ah! La mythologie des sociétés en révèle vraiment long sur leur tempérament et leur réflexe dans l’histoire! Car la dissemblance et la ressemblance des sociétés, qui déterminent leur rapport d’étrangers ou, à contrario, leur alliance de famille pérenne même quand celle-ci est ponctuée de moments de guerres et d’atrocités, siéent à leur essence signifiée en leur mythologie globale et particulièrement à leurs mythes fondateurs et à ce que ceux-ci désignent de commun ou au moins d’affin, de conciliable! Donc avant de croire aux alliances entre nations, cherchez à voir quelle communauté mytho-axiologique, quelle affinité et quelle conciliation possible – par delà leurs spécificités identitaires – les déterminent dès le départ, en leur origine mythique, leur projection mythologique.

CAMILLE LOTY MALEBRANCHE

Lisez le texte sur le Blog Intellection dirigé par l’auteur

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