ADIH : Le sursaut nationaliste face à l’intrusion dominicaine

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un billet de la rédaction

Sur l’échiquier économique haïtien, une transformation inattendue s’est produite lorsque les influents acteurs de l’industrie locale ont subitement fait preuve d’un patriotisme ardent en réaction à la menace que représente le président dominicain, Luis Abinader, suite au lancement effectif des travaux de construction d’un canal alimenté par les eaux internationales de la Rivière Massacre. L’inattendu revirement de l’Association des Industries d’Haïti (ADIH) et de ses pairs révèle une prise de conscience commune de l’impératif de défendre les intérêts nationaux. Néanmoins, ce soudain essor du nationalisme économique soulève d’importantes interrogations en toile de fond.

La rivière Massacre, avec son nom tragique, devient le centre d’une bataille symbolique entre deux nations voisines. Elle incarne la question de la souveraineté nationale et de l’utilisation des ressources hydriques partagées. Cette résurgence du nationalisme industriel rappelle que la politique et l’économie sont inextricablement liées, et qu’elles façonnent la destinée d’une nation.

L’ADIH, tout comme d’autres groupes industriels, a longtemps été critiquée pour son indifférence à la situation économique du pays, en maintenant un salaire minimum parmi les plus bas de la Caraïbe, malgré le coût de la vie élevée en Haïti. La défense du contrôle des ressources nationales s’inscrirait donc dans une logique de protection des intérêts haïtiens, que ces acteurs économiques semblent aujourd’hui embrasser avec conviction.

Toutefois, il est essentiel d’examiner cette conversion soudaine au prisme de la réalité politique et économique du pays. L’ADIH et ses homologues détiennent une influence considérable, non seulement en termes de contrôle des ressources, mais également en ce qui concerne les infrastructures vitales du pays, y compris les ports et les aéroports. Cette position de pouvoir soulève des interrogations sur la véritable intention derrière cette prise de position. Est-ce un réel désir de préserver l’autosuffisance nationale, ou est-ce une manière de protéger des intérêts économiques spécifiques ?

L’histoire économique d’Haïti est marquée par une relation complexe entre les acteurs industriels et le gouvernement. Il est donc crucial de ne pas accepter cette nouvelle posture sans questionnement. Il est essentiel de se demander si cette déclaration en faveur du nationalisme économique reflète un engagement réel envers le bien-être de la population haïtienne ou si elle est motivée par des intérêts économiques particuliers.

Dans cette époque de transformation économique et politique en Haïti, il appartient à la société civile, aux chercheurs et aux experts de rester vigilants et de poser les questions nécessaires. Les enjeux de cette déclaration de l’ADIH vont bien au-delà de la simple rhétorique nationaliste. Ils touchent à l’avenir économique et politique de la nation et à la manière dont les ressources et les opportunités nationales doivent être gérées pour le bénéfice de tous.

En fin de compte, cette déclaration de l’ADIH met en évidence la convergence de l’économie et de la politique, ainsi que la fragilité des intérêts nationaux face à des enjeux économiques majeurs. Les Haïtiens doivent rester vigilants et exiger une véritable responsabilité des acteurs industriels dans la recherche de l’autosuffisance nationale. Comme l’économiste John Kenneth Galbraith l’a si justement dit : « L’économie ne peut être qu’une science morale ou politique, et doit être observée à la lumière de l’éthique et de l’intérêt public. » Il est temps de trouver cet équilibre entre le développement économique et la préservation des intérêts.

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