Inégalités de financement sportif en Haïti : Au-delà du football, vers une reconnaissance de la diversité sportive
par Médjina Elve Jean-Baptiste
Il y a deux semaines, la Fédération Haïtienne de Football a reçu une subvention de 20
millions de gourdes du gouvernement haïtien. Cette somme, consacrée à la participation de l’équipe nationale masculine à la Gold Cup, a suscité de vives controverses. Malgré une performance modeste (une victoire pour deux défaites), la sélection masculine a bénéficié d’une attention financière significative.
La sélection féminine, malgré sa qualification pour les barrages, a été éliminée après avoir concédé trois défaites consécutives, une situation qui soulève de nouvelles questions sur l’allocation des fonds publics dans le sport haïtien.
Il est vrai que le football, en tant que sport populaire et mondial, peut justifier une certaine préférence dans l’attribution des subventions. Cependant, il convient de noter que la Fédération Internationale de Football Association (FIFA) apporte déjà un soutien financier considérable.
Ainsi, il est difficile de comprendre pourquoi l’État haïtien ne redistribue pas une partie de
ses ressources pour soutenir d’autres disciplines sportives, qui peinent à se faire une place dans le paysage sportif haïtien en raison du manque de soutien.
Prenez l’exemple du taekwondo haïtien. Cette fédération sportive a déjà remporté 12
médailles d’or, 2 médailles d’argent et 2 médailles de bronze en 2023, et ce, sans aucune
aide financière de la part de l’État ou du secteur privé. Malgré un nombre réduit d’athlètes, le taekwondo haïtien continue de se distinguer au niveau régional, avec deux médailles remportées lors des Jeux d’Amérique Centrale et des Caraïbes.
L’injustice ne s’arrête pas seulement au taekwondo. Les Fédérations d’Athlétisme, de Judo et de Natation, malgré les sanctions imposées par le Comité Olympique Haïtien pour
comportement indésirable, continuent de réaliser des performances impressionnantes sur
la scène internationale, toujours sans aucune subvention de l’État.
Et que dire des Fédérations Haïtiennes des Échecs et d’Haltérophilie ? Elles ont, elles aussi, brillé lors des éliminatoires des Jeux d’Amérique Centrale et des Caraïbes, projetant une lumière positive sur le sport haïtien. Ces fédérations ont démontré une détermination et un dévouement exceptionnels envers leurs athlètes et leur sport, malgré le manque de soutien financier.
La question des subventions aux fédérations sportives en Haïti n’est pas simplement une
question d’argent. C’est une question de priorités, d’équité et de reconnaissance de la
diversité sportive du pays. Il est temps que l’État haïtien revoie ses politiques de
financement du sport, en tenant compte de l’ensemble du paysage sportif haïtien et non
d’un seul sport, aussi populaire soit-il. Le potentiel de développement du sport en Haïti est immense, mais il ne pourra être réalisé que si toutes les disciplines sportives bénéficient d’un soutien équitable et adéquat.
Médjina Elve Jean-Baptiste
Directrice Exécutive du Centre d’Appui à la Bonne Gouvernance dans le Sport.