Plurivocité univoque de la poésie et du précepte

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Par Camille Loty Malebranche

La distance du je et du tu en langage poétique ou préceptif est un acte ludique de l’expressivité communicative du locuteur universel qui charrie toutes les faces de l’interpellation de l’humain dans son identité globalisatrice. Le je ou le tu est en fait la transposition du soi en ses dimensions, une stratégie de solipsiste refusant tout narcissisme, toute mégalomanie hégémonique pour communiquer sa vérité, son eccéité.

Quand, dans un précepte, je déclare « sois l’acteur indomptable et sans fard de ta nature humaine envers et contre la société de la facticité », le je qui parle est aussi le tu qui écoute, et c’est l’ensemble de tous les je qui s’y reconnaissent et de tous les tu qui veulent bien entendre. Là, Rimbaud et son « je est un autre » a tort parce réducteur; je n’est pas un autre car je est la précellence de l’ipséité englobante qui s’étend entre semblables de famille d’esprits.

Le tu poétique est le je interlocutif du partage esthétique sentimental où le sentiment se drape de la beauté des mots, je poétisé par le je poétisant alors que le tu préceptif, moralisé n’est que le je précepteur moralisant, je enjoint attentif au je injonctif qu’il se doit d’être pour être uni, être un en son être pensant et agissant. Tous les je et tu semblables peuvent ainsi vivre leur altérité ressemblante dans une forme d’ipséité collective transcendante comme de purs entendements. Quant au domaine spirituel, quand le partage verbal est précepte, ignition métaphysique d’esprits vivant leur foi, les je et les tu sont des esprits frères éprouvant leur spiritualité dans la pureté de leur intériorité, la puissance déitaire dont ils viennent et qu’ils partagent.

L’altérité qu’évoque le précepte est une omniprésence prescriptive dans l’ipséité du soi; alors qu’en poésie, l’altérité est ipséité sentimentale. En précepte et poésie, plus que dans n’importe quelles autres occurrences, la voix est multiple, disséminée pourtant une à travers les sensibilités d’esprit qui motivent le verbe. Les voix du réel, de l’infini, du refus, de l’affirmation du vrai soi… Précepte et poésie sont le cri insolite de l’Homme: le précepte comme voie de l’expression active sentencieuse voire incendiaire tel un butoir des hideurs d’un monde macabre par ses horreurs; la poésie comme voix esthétique de l’éprouvement qui scande les émotions de multiples autrui se reflétant dans le chant de l’art, se retrouvant à travers les mots du poète.

CAMILLE LOTY MALEBRANCHE

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