L’insécurité et le vol ont trop fait pour leur jeune âge en Haïti

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Mardi 15 novembre 2022 ((rezonodwes.com))–

Les actes d’accaparement ont commencé à s’imposer en Haïti durant la période tumultueuse ayant succédé la dictature des Duvalier entre 86 et 90. Juste avant le début de l’implantation de la démocratie en Haïti au début des années 90, nous avions commencé à être confrontés aux rigueurs des actes de vol, à la campagne comme en ville.

En milieu urbain, la fréquence était plus élevée qu’en milieu rural et les vols se manifestaient sous différentes formes. Dans tous les cas, il s’agissait de ravisseurs itinérants qui fuyaient après s’être emparés des objets de valeur de leurs victimes. Une fois identifié, l’accapareur était obligé de prendre le maquis, car il était, à tous les coups, vivement recherché par la population et la justice.

Après le premier coup d’État sur la présidence de Jean Bertrand Aristide en 1991, le phénomène allait prendre une autre tournure. Le concept Zenglendo, apparu un peu plus tôt sous le gouvernement de facto du général Prosper Avril, allait connaitre son application en Haïti dans le vrai sens du terme. Un Zenglendo est un malfrat intervenant en plein jour, muni d’un pistolet, pour accaparer des biens ou soutirer de l’argent de ses victimes.

Grace à l’affaiblissement des forces de sécurité, avec les crises répétées dans l’armée d’Haïti, les Zenglendos ne tardaient pas à s’étendre rapidement dans la majorité des grandes villes du pays. Avant le retour du président Aristide en octobre 1994, la question de vol à main armée allait connaitre un nouveau visage : l’attaque des autobus assurant de longs trajets. Armes aux poings et cagoules à la tête, les bandits placent au travers de la route des matériels ou des camions, en vue de stopper le véhicule pour ensuite procéder à leurs manœuvres criminelles.

Jusque-là, qu’il s’agissait de simples ravisseurs, de Zenglendos ou d’accapareur cagoulés et portant des armes, stoppant les autobus pour les dévaliser, ils commettaient leurs actes sans se faire connaître. Une fois appréhendés, ils étaient incarcérés et punis selon la loi. La vie se déroulait tant bien que mal en Haïti. Malgré les contraintes logistiques et de moyens techniques de la police et de la justice, ces dernières faisaient de leur mieux pour en empêcher la progression.

Après le grand séisme du 12 janvier 2010, la réalité du pays a pris une autre dimension en matière de sécurité. Bien avant, à part la parenthèse  »opération Bagdad », quelques cas de kidnapping par-ci et par-là ont été répertoriés, mais ce phénomène allait atteindre un niveau record et les clans de bandits ont commencé à se faire valoir et à se  »professionnaliser ».

Auprès de la jeunesse, la misère et la pauvreté entraînent évidemment des dérives sociales. Toutefois, la réalité haïtienne présente une particularité. Non seulement le phénomène embrase tout le pays en même temps mais il est accompagné du pouvoir mystique de Satan. Pire encore, la politique semble se mêler de la partie.

Les moindres plaintes portées auprès des autorités judiciaires sont retournées rapidement vers les clans de bandits contre lesquels les dépositions ont été faites. Les enlèvements ne se font pas toujours pour cause de rançon. Les victimes sont parfois tuées même après avoir versé la rançon. La date du 12 mars 2021 rappelle un des drames du banditisme légal en Haïti. Au Village de Dieu, un déploiement de policiers de l’unité SWAT a piteusement échoué et a subi les assauts de bandits. Un char blindé a été saisi et 5 policiers ont été massacrés.

Du côté mystique, les bandits affrontent les forces de l’ordre sans gilet spécial et opèrent librement. Le niveau de cruauté et la souffrance que les malfrats infligent à leurs victimes n’est pas attribuable à des êtres humains normaux. Très peu de victimes sortent indemnes d’un kidnapping. Strangulation, torture, boisson létale, humiliation, bastonnade, viol et fusillade sont administrés aux kidnappés.

Au lieu d’être des parias, les bandits sont des vedettes avec qui presque tout le monde cherche à avoir des contacts. Les noms de certaines autorités politiques ou judiciaires sont souvent associés aux dossiers honteux dans lesquels sont impliqués des chefs de gang. Faute de trouver de quoi se nourrir ou en quête de puissance, de protection ou d’influence, des jeunes ne cessent de grossir le rang des gangs. Les bandits sont craints et jouissent d’énormes privilèges. Ils ont accès facile au carburant, produit de luxe dans le pays.

L’ironie de cette réalité est que, dans les zones rurales, certains officiers de police cherchent l’amitié de certains délinquants et siéent mieux avec eux en vue de leur propre sécurité. D’un côté, des autorités politiques utilisent ou partagent les avantages d’autorités ou du pouvoir pour se protéger l’un l’autre. De l’autre, elles se montrent complaisantes avec les délinquants et avec les bandits pour ne pas attiser leur fureur. Le gros du peuple continue de croupir dans la peur, dans une tyrannie éparse et dans l’angoisse la plus totale.

NELFRARD Nito,
Ing. Agronome et étudiant en Théologie

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