Choquant ! Bilan sombre des conditions générales de fonctionnement des tribunaux de paix en Haïti

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Jeudi 7 avril 2022 ((rezonodwes.com))–

Sommaire

Pages

Résumé                                                                                                                                   2

  1. Introduction                                                                                                      3
  1. Méthodologie                                                                                                    3
  1. Rappel de certains résultats obtenus par l’étude de 2021                          4
  1. Résultats de l’enquête de suivi                                                                        5
  1. Sur le personnel judiciaire                                                                                 5
  • Sur les matériels de bureau et les matériels roulants                                           6
  • Sur l’alimentation en énergie et en eau                                                               6
  • Sur la sécurité des tribunaux de paix                                                                 7
  • Sur les bâtiments des tribunaux de paix                                                             9
  • Travail des tribunaux de paix : Infractions fréquentes et Défis                10
  • Conséquences du dysfonctionnement des Tribunaux de paix et Impacts

Sur le respect des Droits aux garanties judiciaires                                      11

  1. Commentaires et Recommandations                                                               13

Résumé

  1. Dans un rapport d’étude publié le 4 octobre 2021, le Réseau National de Défense des Droits Humains (RNDDH) a présenté un bilan sombre des conditions générales de fonctionnement des tribunaux de paix du pays. 144 des 186 tribunaux de paix existants, soit 77.40 %, avaient alors été touchés, ce qui constituait pour le RNDDH un pourcentage suffisamment élevé, ayant permis de brosser un portrait représentatif de leur situation.  
  • 6 mois après le partage de ce rapport d’étude avec les autorités concernées, le RNDDH a tenu à mener une enquête de suivi en vue d’évaluer si des interventions ont été consenties par ces autorités, dans le but d’améliorer la situation décrite dans le rapport en question. En ce sens, 22 tribunaux de paix, représentant 15% de ceux qui avaient été touchés préalablement, ont été cette fois monitorés.
  • Les nouvelles informations recueillies auprès du personnel des tribunaux de paix prouvent qu’aucun progrès n’a été constaté, la situation actuelle ne différant pas de celle qui avait été décrite en détails, dans l’étude antérieure.
  • Ainsi, conformément à ce qui avait été révélé précédemment, le personnel judiciaire est très mal reparti. Certains tribunaux de paix disposent de plus de personnel que nécessaire alors que d’autres souffrent d’une carence en juges, greffiers, huissiers et secrétaires.
  • Dans leur grande majorité, les tribunaux de paix ne disposent ni de matériels de bureau, ni de matériels informatiques. Dans ces cas, des membres de la communauté font parfois des dons de mobiliers aux tribunaux et les greffes supportent des achats minimaux mais obligatoires de papiers et de plumes, par exemple. Sinon, les tribunaux de paix évoluent dans un état de dénuement total, en ayant d’énormes difficultés à offrir le service public de justice.  
  • Les tribunaux de paix ne disposent pas non plus de matériels roulants. Les déplacements sont soit supportés par les justiciables eux-mêmes, soit par la police.
  • L’alimentation en courant de ville ou en énergie électrique alternative reste une utopie. Et, les rares tribunaux qui ont été dotés en matériels informatiques ne peuvent s’en servir, faute de courant électrique. D’autres se sont accommodés et fonctionnent tant bien que mal.
  • C’est aux tribunaux de paix qu’il revient de se procurer de l’eau soit par camion ou par seaux.  Son accès reste très difficile car les coûts doivent être supportés par le personnel ou le greffe.
  • De nombreux bâtiments accueillant les tribunaux de paix tombent en lambeaux ou sont sales et mal entretenus.
  1. La situation sécuritaire du personnel reste très préoccupante : impacts de balles sont constatés sur des bâtiments, certains tribunaux de paix comme celui de Cité Soleil ont carrément fermé leurs portes alors que d’autres, comme celui de la Croix-des-Bouquets ne fonctionnent qu’au gré de la volonté des bandits armés.
  1. Il ne fait aucun doute que les conditions générales de fonctionnement des tribunaux de paix entraînent des conséquences immédiates sur l’accès à la justice et le respect des droits aux garanties judiciaires. Cette situation est d’autant plus regrettable que depuis plusieurs années, les justiciables s’en remettent de plus en plus à la justice de paix, les tribunaux de première instance étant totalement absents.
  1. Fort tant de ces constats que de l’importance de la justice de paix pour les communautés, le RNDDH recommande aux autorités étatiques de : réviser la répartition du personnel judiciaire dans les tribunaux de paix ; doter les tribunaux de paix de ressources financières, de matériels informatiques et de matériels de bureau ; fournir à chaque tribunal de paix au moins un véhicule roulant de service ; mettre à la disposition des tribunaux de paix une source alternative d’énergie électrique ; prendre les dispositions nécessaires en vue de rétablir la sécurité dans les tribunaux de paix ; réaménager les espaces endommagés qui exposent la vie du personnel judiciaire ; doter tous les tribunaux de paix d’un bloc sanitaire.
  2. Introduction
  1. Dans une étude publiée le 4 octobre 2021, le Réseau National de Défense des Droits Humains (RNDDH) a présenté la situation des tribunaux de paix ainsi que les conditions générales de travail du personnel qui y est affecté.
  • Les objectifs alors poursuivis par le RNDDH étaient de mettre à la disposition des autorités étatiques des données précises, et de les pousser à prendre les décisions nécessaires en vue de rendre accessible et disponible la justice de proximité, qui a toute son importance dans les communautés.  
  • Six (6) mois après la publication du document susmentionné et son partage avec les autorités judiciaires, le RNDDH estime que l’urgence reste encore réelle, et donc de son devoir de tirer la sonnette d’alarme, compte tenu de la dégradation de la situation des tribunaux de paix. 
  1. Méthodologie
  • En février et mars 2022, le RNDDH a réalisé une enquête de suivi dans vingt-deux (22) tribunaux de paix, soit 15 % du total de ceux qui avaient été touchés par l’étude précédente. Onze (11) d’entre eux sont localisés dans le département de l’Ouest et les onze (11) autres, dans les villes de province. Tous les tribunaux ont tous été choisis de manière aléatoire. Six (6) départements géographiques du pays ont été touchés par ces recherches supplémentaires.
  • Il s’agit des tribunaux de paix suivants :
  • Arcahaie, Ouest
  • Beaumont, Grand’Anse
  • Cabaret, Ouest
  • Camp‑Coq, Nord
  • Cité Soleil, Ouest
  • Croix-des-Bouquets, Ouest
  • Croix-des-Missions, Ouest
  • Delmas, Ouest
  • Ennery, Artibonite
  • Fort-Liberté, Nord-est
  • Jacmel, Sud-est
  • Kenscoff, Ouest
  • Pétion-ville, Ouest
  • Port-au-Prince, section sud, Ouest
  • Port-au-Prince, section est, Ouest
  • Pilate, Nord
  • Victoire, Nord
  • Roseaux, Grand’Anse
  • Saintard, Ouest
  • Soufrière, Nord
  • Marbial, Sud-est
  • Marigot, Sud-est
  • Par cette enquête de suivi, le RNDDH a tenu à analyser, six (6) mois plus tard, si un quelconque suivi avait été réalisé, pour donner suite à l’étude dont les résultats ont été communiqués aux autorités étatiques ; ou si une certaine amélioration a été enregistrée dans le milieu de travail du personnel judiciaire.
  • Aussi, pour réaliser cette enquête de suivi, le RNDDH a-t-il actualisé les fiches d’entretien qui avaient été utilisées pour le travail antérieur en invitant les personnes rencontrées cette fois‑ci, à faire la parallèle entre la situation de leur tribunal de paix avant et après le rapport d’étude du 4 octobre 2021.
  1. Rappel de certains résultats obtenus par l’étude de 2021
  • De février à juillet 2021, le RNDDH, de concert avec ses structures départementales, avait réalisé une étude[1] sur les conditions de fonctionnement des tribunaux de paix du pays. Un échantillon de cent quarante-quatre (144) tribunaux de paix – représentant 77.40 % d’entre eux – avait alors été considéré.
  • Les conclusions de l’étude ont démontré que :
  • Le personnel affecté aux tribunaux de paix, composé majoritairement d’hommes, est très mal réparti. Le RNDDH a dénombré du personnel total 23.2 % de juges de paix contre 27 % de greffiers et 26.5 % d’huissiers exploitants. En revanche, le personnel de soutien est très minime. Le RNDDH a pu alors recenser toujours au niveau du personnel total, seulement 1.3 % de gardiens, 9 % de secrétaires et 6 % de ménagères.
  • 59 % des tribunaux de paix n’ont pas d’agents en provenance du ministère de la Justice et de la sécurité publique alors que 69 % n’ont jamais connu la présence des agents de la Police Nationale d’Haïti (PNH). 53 % des tribunaux de paix ne disposent ni d’agents de la PNH ni d’agent du ministère de la Justice et de la sécurité publique.
  • 77% des bâtiments logeant les tribunaux de paix du pays sont en mauvais état.
  • 77.7% des tribunaux de paix sont localisés dans un environnement ne favorisant pas la quiétude du tribunal : Ils se retrouvent non loin des marchés, logent dans des bâtiments inachevés, sont localisés à proximité de zones contrôlées par des bandits armés, à proximité de piles d’immondices ou de décharges de déchets, etc.
  • 24% des tribunaux ne disposent ni d’ordinateur, ni de machine à taper.
  • 20 % des tribunaux de paix ne disposent d’aucun espace de bureau pour les juges de paix.
  • 66.6 % des tribunaux de paix ne comptent aucun ordinateur, 74% ne disposent pas d’une imprimante et 76% n’ont pas de photocopieuse.
  • 34% des tribunaux de paix ne sont pourvus ni en toilette confort moderne, ni en latrine. Et, si 87 % des toilettes sont en confort moderne, 33 % d’entre elles sont dysfonctionnelles.
  • 100 % des tribunaux de paix ne disposent d’aucun véhicule de service et 74% ne comptent ni voiture de fonction, ni voiture de service, ni motocyclette de fonction, ni motocyclette de service.
  • 48,6% des tribunaux de paix n’ont aucune source d’énergie.
  1. Résultats de l’enquête de suivi
  1. Pour cette enquête de suivi, le RNDDDH s’est accentué sur le personnel, les matériels de fonctionnement, l’alimentation en eau et en énergie, la sécurité des tribunaux et l’état des bâtiments.
  • son poste de travail à Drouillard. L’antenne où il était affecté est depuis, contrôlé par les bandits armés et, le tribunal de paix de Cité Soleil ne fonctionne plus. Le personnel de ce tribunal ne travaille plus, à l’exception du juge de paix titulaire qui parfois se rend au sous-commissariat de Cazeau, pour auditionner certains dossiers et procède, lorsqu’il est possible, à des constats.
  • fissurés et méritent de rapides réparations. Cette situation préoccupante a porté l’un des juges affectés au tribunal de paix de Beaumont à loger temporairement le tribunal dans une partie de sa maison.
  • Les blocs sanitaires des tribunaux de paix, pour ceux qui en sont pourvus, sont sales et mal entretenus. 
  • Le tribunal de paix de la section Sud de Port-au-Prince mis à part, aucun des édifices ne respecte les modalités d’accès aux personnes à mobilités réduites alors que les autorités n’arrêtent pas de parler d’inclusion.
  • Travail des tribunaux de paix : infractions fréquentes et défis
  • En matière pénale, les tribunaux de paix sont appelés par la population et en fonction des infractions fréquentes perpétrées dans les communautés, à se pencher sur des cas de voies de fait, bastonnade, coups et blessures volontaires, abus de confiance, escroquerie, vol, viol et conflits terriens.
  • Ces cas varient d’une zone à une autre. Ainsi, les tribunaux de paix reçoivent toutes sortes de dénonciation et doivent, selon le vœu de la loi, décider définitivement sur les cas de contravention et transférer aux Parquets auxquels ils sont rattachés, les cas de délit et de crimes dont ils ont été instruits, pour suivis judiciaires.
  • Au sujet des cas de conflits terriens particulièrement, il convient de souligner que la situation s’aggrave chaque jour un peu plus, notamment à Fort-Liberté dans le Nord-est et dans les différentes communes du département de l’Ouest où la passivité de l’Etat contribue à gangrener la situation.  
  • A côté de la fréquence des cas sur lesquels les tribunaux de paix sont appelés à se pencher, les défis sont nombreux. Si le manque de moyens de fonctionnement, le manque de matériels de déplacement ainsi que l’insécurité demeurent les défis majeurs des tribunaux de paix, il a aussi été rapporté au RNDDH que le comportement des fondés de pouvoir est très préoccupant.  En effet, très actifs dans les tribunaux de paix et fonctionnant comme ne devant respecter aucune déontologie, nombre de ces derniers se transforment en de véritables escrocs, exigeant des sommes faramineuses de la part des justiciables tout en faisant porter le chapeau par le personnel affecté aux tribunaux auxquels ils sont rattachés. Il s’agit, pour le personnel, de comportements qui contribuent à discréditer les tribunaux de paix et à envenimer les rapports entre la population et la justice.
  • Conséquences du dysfonctionnement des Tribunaux de paix et Impacts sur le respect des Droits aux garanties judiciaires
  • Le mode de fonctionnement actuel des tribunaux de paix du pays entraîne des conséquences énormes sur le respect des droits aux garanties judiciaires et sur l’accès à la justice.
  • Le manque de personnel ou encore la mauvaise répartition du personnel au niveau des tribunaux de paix a pour conséquence immédiate un déficit de service de la justice dans les communautés ainsi que l’accueil des justiciables, dans un désordre généralisé.  En effet, dans les tribunaux où les greffiers et les huissiers sont plus nombreux que les magistrats par exemple, le travail du personnel est totalement désorganisé. L’espace est souvent bondé mais les tâches ne sont pas réalisées car, il s’agit pour la plupart d’individus qui sont affectés à des postes sans vraiment avoir une description de tâches précises. Ils n’aident en rien à améliorer le service de la justice et les justiciables s’en plaignent souvent.
  • Le manque de matériels de bureau dans les tribunaux de paix tels que : ordinateur, imprimante, encre, papier, photocopieuse, produits de nettoyage, etc. invite le personnel à la paresse. Les actes judiciaires sont souvent manuscrits ce qui ne poserait pas de problème en soi si la capacité de falsification de ces documents ne s’en trouvait pas augmentée. De plus, les justiciables se plaignent de l’impossibilité de trouver les actes, une difficulté qui aurait pu facilement être contournée, s’ils avaient été informatisés. Les espaces sont aussi sales et mal entretenus.
  • L’absence de matériels de déplacement engendre un coût supplémentaire pour les justiciables. Comme déjà mentionné, ils sont obligés de supporter les frais de déplacement du tribunal. Additionné à cela, les enquêtes préliminaires sont souvent bâclées, le tribunal ne se transportant que rarement sur les lieux des crimes. Dans ces cas particulièrement, lorsqu’il n’y a pas de plaignant pour prendre en charge les déplacements des magistrats ou lorsque les commissariats ne les font pas chercher pour les transporter sur les lieux des crimes, aucune enquête préliminaire n’est réalisée. Le tribunal se contente alors de transférer les dossiers – souvent vides – au parquet auquel il est rattaché.
  • Les tribunaux de paix ne sont que difficilement alimentés en eau et en énergie. Cette situation paralyse leur fonctionnement journalier. Si le manque d’eau est l’une des causes de l’état d’insalubrité des bâtiments dans l’ensemble et des blocs sanitaires en particulier, la non‑alimentation en énergie cantonne généralement ces tribunaux dans l’organisation des audiences pénales seulement.  
  • L’insécurité généralisée qui sévit dans le pays a de graves conséquences sur le fonctionnement de la justice de proximité. De nombreux tribunaux de paix ne travaillent pas régulièrement. D’autres ont réduit drastiquement leur horaire de fonctionnement. L’absence d’agent de sécurité ou d’agents de la PNH au sein des tribunaux de paix expose le personnel judiciaire à la fureur des justiciables et de l’assistance qui souvent les invectivent, les menacent ou les attaquent verbalement et physiquement. De nombreux cas enregistrés lors des audiences pénales ou lors des auditions d’individus arrêtés, témoignent de cet état de fait.  
  • De plus, les juges de paix choisissent souvent de ne pas se rendre dans certaines zones aux fins de constat, en raison justement de la situation sécuritaire. Dans d’autres endroits du pays, ce sont les mandats qui ne peuvent être exécutés, en raison du contrôle de ces espaces par des bandits armés. Tel est le cas par exemple de Fond Cochon, dans le département de la Grand’Anse, et de Cotard, Michaud, Duval Roche, La Tremblay, Dumay, dans le département de l’Ouest. Il a été rapporté au RNDDH qu’en janvier 2022, à Michaud, des individus armés ont saisi deux (2) armes à feu l’une de calibre 12 et l’autre, une arme de poing qui étaient en possession d’un agent de sécurité qui accompagnait un juge de paix de la Croix-des-Bouquets, dans une mission de constat.
  • Le mauvais état des bâtiments des tribunaux de paix porte le personnel à évoluer dans un environnement menaçant. Toitures trouées, murs lézardés et fissurés, espaces exigus, bâtiments donnant l’impression d’effondrements imminents : les conditions de travail offertes aux membres du personnel affecté aux tribunaux de paix sont carrément inadmissibles, ce qui influe directement sur leur rendement et leur engouement au travail.
  • Ce dysfonctionnement aux multiples facettes du service public de la justice de paix influe directement sur le traitement des dossiers des justiciables. Ainsi, l’accès à la justice et la disponibilité du service ne sont pas respectés. Or, ils demeurent deux (2) incontournables des droits aux garanties judiciaires pour le respect desquels l’Etat a le devoir de s’engager, en mettant à la disposition des organes judiciaires – les tribunaux de paix, en l’occurrence -, le minimum adéquat permettant un travail efficace et régulier.  
  • Commentaires et Recommandations
  • Les tribunaux de paix constituent la plus proche porte d’accès aux revendications de justice, à la disposition des communautés. Par leur nature, ils jouent un rôle primordial dans l’harmonisation de la vie dans la société.
  • En ce sens, le RNDDH juge inadmissible cette volonté des autorités étatiques de banaliser la justice de paix dans le pays en général : mauvaise répartition du personnel judiciaire, manque ou absence de matériels de bureau, absence de matériels de déplacement, non-alimentation en eau, en produits de nettoyage et en énergie, espaces non sécurisés, bâtiments inappropriés : les tribunaux de paix sont totalement livrés à eux-mêmes. Et, les conditions générales de fonctionnement dénotent un désintérêt total des autorités étatiques pour le service public de la justice.
  • Les résultats de cette enquête de suivi révèlent – comme l’étude de 2021 d’ailleurs – que malgré les cris d’alarme poussés par des juges de paix titulaires ainsi que par certains juges de paix suppléants et en dépit des nombreuses documentations mises à la disposition des autorités étatiques, aucun effort n’a jusqu’à date été consenti pour améliorer l’accès à la justice. Sur ce point particulièrement, le RNDDDH s’insurge contre le fait que les recommandations précises qui ont découlé des travaux de recherche réalisés en 2021 dans le but de mettre à la disposition des autorités étatiques, des données précises et scientifiques, n’ont pas, à date, été mises en application.
  • A ce stade, le RNDDH estime de son devoir de rappeler que le service public de la justice est régi par de nombreux principes dont la continuité, la publicité et l’égalité d’accès à la justice, en vigueur par devant n’importe quel organe judiciaire. Or, ces principes n’ont aucune chance d’être respectés si les autorités étatiques continuent de maintenir les tribunaux de paix dans les conditions générales décrites tant dans le présent rapport que dans le rapport d’étude du 4 octobre 2021. 
  • Sans moyen de fonctionnement, sans salle d’audience et espace adéquat de travail, sans un minimum de sécurité, sans un environnement apte à offrir une sérénité sinon absolue du moins, relative, au personnel judiciaire, sans moyens de déplacement, les tribunaux de paix ne peuvent assurer un service continu, public et accessible pour tous-tes.
  • Le RNDDH demeure convaincu que les droits humains dans leur ensemble ne peuvent exister ou évoluer en dehors du respect des droits aux garanties judiciaires de tous et de toutes. Or, deux (2) faits doivent retenir l’attention :
  • Depuis plusieurs années, la population haïtienne se retourne de plus en plus vers la justice de proximité en raison du dysfonctionnement des tribunaux de première instance du pays, rudement affectés par l’insécurité ;  
  • La situation de la justice en général se détériore continuellement, et de manière alarmante sans que les autorités étatiques semblent y accorder d’importance.
  • Le RNDDH, tenant compte tant de ces constats que du caractère primordial de la justice de paix pour les communautés, estime de son devoir de recommander – encore une fois – aux autorités concernées de :  
  • Réviser la répartition du personnel judiciaire dans les tribunaux de paix ;
  • Doter les tribunaux de paix de ressources financières, de matériels informatiques et de matériels de bureau ;
  • Fournir à chaque tribunal de paix au moins un véhicule roulant de service ;
  • Mettre à la disposition des tribunaux de paix une source alternative d’énergie électrique ;
  • Prendre les dispositions nécessaires en vue de rétablir la sécurité dans les tribunaux de paix ;
  • Réaménager les espaces endommagés qui exposent la vie du personnel judiciaire ;
  • Doter tous les tribunaux de paix d’un bloc sanitaire.

[1] Conditions générales de fonctionnement des Tribunaux de paix en Haïti : Plaidoyer pour une distribution saine et équitable de la justice haïtienne ; RNDDH – Rapport/A21No6, 4 octobre 2021, 42 pages.

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