La Chambre des députés vote la loi sur l’UCREF, le Sénat se met au pas

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Le Sénat se met au pas, en entérinant lundi, sans la moindre modification, la version votée par la Chambre basse. Jovenel Moise tord Ucref

(texte extrait de Haiti-Observateur / Edition du mercredi 10 au 17 mai 2017)

Port-au-Prince, mercredi 10 mai 2017 ((rezonodwes.com)).- Moins d’une semaine après que la Chambre basse eut modifié le texte de la loi organique de l’Unité centrale de référence fiscale (UCREF) mettant cette institution sous la férule de la présidence, les membres du Grand Corps ont entériné cette dernière version. Se faisant complices de leurs collègues de la Chambre des députés, les sénateurs se sont fait ainsi partie prenante d’une stratégie de la présidence visant à se défaire de l’actuel directeur de l’UCREF. Des lors, Jovenel Moïse, inculpé pour blanchiment des avoirs, se voit offrir la chance en or de classer définitivement son dossier. Mais en même temps, il risque d’ attirer sur Haïti les foudres du Groupe d’action financière de la Caraïbe (GAFIC), gendarmes du blanchiment d’argent.




Par ce dernier vote, le Sénat haïtien démontre clairement que les deux pouvoirs (présidence et Parlement) font cause commune pour favoriser l’évolution de ce crime international dans le pays et qu’ils n’ont cure de la bonne santé du système bancaire haïtien. C’ est-à-dire que les membres de l’ exécutif (le chef de l’État en tête de liste) et les parlementaires liés au commerce illicite n’auront rien à s’inquiéter aux yeux de la loi. À moins qu’ils soient l’objet d’une action similaire à celle dont le sénateur élu de la Grand’Anse, Guy Philippe est tombé victime.

Sous sa présente forme, la loi créant l’UCREF élimine la fonction de directeur qu’assurait Sonel Jean-François; elle sera remplacée par un conseil d’administration dont la majorité est nommée par le président de la République.

Juge et partie

En effet, au bout d’une séance, qui s’est étirée sur six heures environ, dominée par un débat brouillé et entrecoupée de huis clos très animés, en sus de menaces de quorum infirmé, la majorité des députés a finalement voté la loi organique de l’UCREF, le jeudi 4 mai 2017.




Pour mieux comprendre la stratégie mixte présidence-Parlement, en vue de donner autorité au président de vassaliser l’institution de référence fiscale, il suffit d’observer l’attitude désinvolte, voire méprisante, des députés à l’égard d’une loi si importante.

Pour commencer, sur 117 membres de la Chambre basse, seulement 90 étaient présents lors de l’appel initial. Mais ce nombre diminuait au fur et à mesure du déroulement du vote; car les parlementaires se dérobaient, au point que seulement 62 députés étaient présents pour voter la version finale.

Le vote de cette loi, telle que soumise par la Chambre basse avec sa modification, fait du président de la République juge et partie. Autrement dit, Jovenel Moïse est libre de choisir ceux qui devront décider de son sort. Car il y a fort à parier que sous sa nouvelle configuration, l’UCREF (désormais totalement au servie du chef de l’État) va se donner pour objectif le retrait du rapport initial qu’avait préparé l’institution sous la gouverne de Jean-François ayant abouti à l’inculpation de Jovenel Moïse pour blanchiment des avoirs.

Dans la mesure où l’organisme de référence fiscale rectifie le dossier du président, le mettant à l’abri des poursuites dont il est présentement l’objet, il ira sans dire que toutes les personnes se trouvant dans le collimateur de l’UCREF pour ces mêmes cri mes seront automatiquement in no centées. Ce serait, par exemple, le cas de Magalie Habitant, qui a été nommée directrice de l’institution responsable du ramassage de déchets solides à la capitale, et qui serait l’objet d’ une enquête par cette même institution, également pour blanchiment d’argent.

La mainmise de Jovenel Moïse sur l’UCREF signifie que la mise sous tutelle du système judiciaire par la présidence ne finira pas avec l’arrivée au pouvoir du second régime tèt kale. De toute évidence, l’actuel président doit imposer ses quatre volontés à la justice haïtienne s’il doit se libérer, ainsi que ses alliés politiques, des griffes de la justice. Cela veut dire si Guy Philippe était en Haïti il n’aurait à s’inquiéter de rien, sous le régime Moïse-Lafontant. Au tant dire, Dimitri Hérard, récemment nommé à la direction de l’Unité de surveillance générale du Palais national (USGPN), avant sa mise en disponibilité, pour être ensuite convoqué par le commissaire du gouvernement, dans le cadre de l’affaire « Bateau sucré» d’Acra, est un autre candidat, au même titre que M. Moïse et Mme Habitant. Il est certain que Jovenel Moïse fera tout ce qui est dans ses pouvoirs pour protéger ses amis et alliés de la justice.




Dans ce même ordre d’idées, Marc Antoine Acra, fugitif de la justice actuellement en exil en République dominicaine, doit se positionner pour qu’une intervention du président Moïse lui permette de regagner le territoire national. Il en sera de même pour tous ses collègues hommes d’affaires ayant participé au financement de ce chargement de cocaïne, d’héroïne et de marijuana. Ce la représentait une cargaison mix te de sucre et de drogue. Environ 66 tonnes de substances illicites se trouvaient dissimulées parmi les sacs de sucre. Le Manzanares, bateau battant pavillon panaméen, qui transportait cette cargaison, a été intercepté par des membres de la Brigade haïtienne anti-drogue (Brigade de lutte contre le trafic de stupéfiants, BLTS), secondés par leurs homologues américains de la DEA (Drug Enforcement Administration) au moment du débarquement au Terminal Varreux, à Chancerelles.

Une stratégie dénoncée par d’autres parlementaires

Si les sénateurs ont plié l’échine, face au Palais national, acceptant à la lettre le document préalablement voté par la Chambre basse, acheminé au Sénat par la présidence, le député d’Aquin (Sud), Jean Robert Bossé, est monté au créneau pour dénoncer un complot de l’exécutif associé aux deux Chambres en vue de protéger les « blanchisseurs » d’argent.

Expliquant le cheminement de la version originelle de cette loi, préalablement votée par le Sénat, il y avait environ une année, et qui a été soumise à l’approbation de la Chambre basse, le député Bossé a précisé que le document était imposé par le Palais national. On apprend de source autorisée que la présidence avait passé des instructions à ses alliés députés pour que la législation crée un conseil d’administration en lieu et place d’un directeur pour gérer l’institution.

M. Bossé a déclaré que, faute de pouvoir maintenir l’institution sous la houlette d’un directeur, il a, avec d’autres collègues du même avis que lui, lutté durement pour que les membres de l’UCREF soient désignés par des entités de la société civile, histoire d’assurer son indépendance. Mais, a-t-il souligné, la majorité l’a emporté. Aussi, a-t-il ajouté, s’en est-il remis au peuple haïtien pour rectifier le tir et éviter le grave danger qui menace le pays.

Pour le député Abel Descollines, transfuge du Parti haïtien tèt kale (PHTK), cité dans l’édition du 5 mai de Le Nouvelliste, la version du texte original, modifiée à la Chambre basse, constitue la « mainmise » du pouvoir sur l’institution et l’ « instrumentalisation » de l’UCREF par l’ exécutif. Et Des collines de s’ écrier : « C’est grave, très grave ! ». Sur ces entrefaites, il a lancé un appel au Grand Corps pour qu’il n’entérine pas la version finale provenant de la Chambre des députés.

Intervenant à son tour, Sinal Bertrand, député Lavalas représentant Mirebalais à la Chambre des députés, a été très remonté contre la version de la loi modifiée avant d’être ratifiée par la majorité des députés. Affirmant que le texte a été « cuisiné » au Palais national avant d’être soumis à la Chambre basse, M. Bertrand a précisé, cité aussi par La même version du Nouvelliste, que «C’est du jamais vu, c’est inédit !».
Dans l’état actuel des choses, le gouvernement Moïse-Lafontant se fait partie prenante du cri me de blanchiment d’argent; et par voie de conséquence de trafics illicites dont la version la plus en vogue en Haïti constituent le commerce de drogue, le transfert d’argent clandestin et la contrebande d’armes.

Ceux qui entretenaient encore quelque illusion concernant l’attitude de la majorité des dé pu tés par rapport à la loi organique de l’Unité centrale de référence fiscale (UCREF) peuvent se détromper maintenant. Le vote par la Chambre basse de cette législation, d’une version totalement différente de celle entérinée par le Grand Corps, neuf mois après qu’ elle eut été adoptée par le Sénat, témoigne de l’hostilité de celle-là à la campagne globale contre le blanchiment des avoirs à laquelle souscrivent entièrement les pays de l’hémisphère. Pratiquant la politique de l’autruche, les parlementaires, qui ont voté pour favoriser le contrôle de l’institution de référence fiscale par le Palais national, ne font preuve d’ aucun intérêt à protéger les banques haïtiennes, en particulier, et les consommateurs, en général, contre les éventuelles sanctions du Groupe d’action financière de la Caraïbe (GA FIC). Le sursis ac cordé au système bancaire haïtien, dont certains membres sont soupçonnés d’avoir violé les règlements anti-blanchiment en recevant des dépôts de fonds provenant d’activités illicites, venant à échéance, à la fin de ce mois, l’anxiété est quasi générale dans les mi lieux bancaires du pays.

Comme l’a souligné le député d’Aquin, si les dirigeants du GA FIC ne rejettent pas cette loi sur l’UCREF, il faut croire que l’organisme qu’ils dirigent n‘est pas sérieux dans la lutte contre le blanchiment. Il semble que nombre d’hommes d’affaires haïtien pensent que le système financier haïtien soit en passe de confronter une crise des plus graves. C’est pourquoi ils cherchent d’autres banques à l’étranger pour héberger leurs comptes.

1 COMMENT

  1. 1 milyon goud pou pwason nan Fèt Pak fè depite yo depale, gaga, avèg a tout konsekans zak yo komèt la nan vote pwojè lwa kap pèmèt ekzekitif la domestike UCREF la nan pye tab prezidans la. Bagay sa a pa bon ditou pou peyi a ak Pèp Ayisyen an. Sa montre ankò yon fwa kouman leta Ayisyen an ap bondi a tout bouling nan pourisman total. NOU ANFAS YON LETA POURI JOUK NAN ZO.

    Kouman èske UCREF pral janm kapab mennen yon envestigasyon endepandan sou moun ki nan pouvwa a? Jamèdlavi. Kounye a, fòk se yon enstans endepandan ki kreye pou pèmèt limyè fèt sou tout yon seri kesyon enkli blanchiman lajan nan peyi a. Tout moun ki konsènen dwe koumanse leve lavwa pou kreyasyon yon lòt enstans endepandan tousuit pou rapousuiv envestigasyon nesesè yo kont koripsyon nan peyi a.

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